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Martial Saddier
Question N° 2707 au Ministère de l'europe


Question soumise le 7 novembre 2017

M. Martial Saddier attire l'attention de M. le ministre de l'Europe et des affaires étrangères sur l'aide bilatérale consacrée par la France au secteur de l'éducation dans le cadre de son aide publique au développement (APD). Selon les chiffres déclarés par la France au Comité pour l'aide au développement de l'OCDE au titre de l'APD pour l'année 2015, qui sont les derniers chiffres disponibles, la France a consacré pour cette année 926 millions d'euros d'aide bilatérale à l'éducation dans les pays en développement. Sur ce total, 72 % sont dirigés vers l'enseignement supérieur, dont la quasi-totalité vers les bourses et frais d'écolages versés pour l'accueil d'étudiants étrangers en France, des fonds qui ne contribuent pas au développement des systèmes éducatifs des pays. L'appui aux systèmes d'éducation de base (primaire et secondaire) dans les pays en développement ne représente que 15 % de l'aide bilatérale à l'éducation, et 2,5 % de l'APD totale. En termes d'allocation géographique, les 17 pays désignés comme prioritaires pour l'aide au développement française par le comité interministériel pour la coopération internationale et le développement en 2016 ne sont bénéficiaires que de 18,5 % de l'aide bilatérale consacrée par la France à l'éducation. Afin que l'aide bilatérale à l'éducation puisse répondre aux besoins éducatifs les plus fondamentaux et urgents, il souhaite donc savoir quelle est la justification d'une telle priorité accordée aux frais d'écolage par rapport à l'éducation de base, et quelles mesures permettant un rééquilibrage des allocations sous-sectorielles de l'aide à l'éducation et une véritable priorisation des pays les plus pauvres sont aujourd'hui envisagées.

Réponse émise le 5 décembre 2017

L'éducation doit constituer une priorité majeure en matière de développement. C'est le message qu'a porté le Président de la République lors de son discours à l'Assemblée générale des Nations unies. Seul un investissement important dans ce secteur permettra de donner la possibilité aux jeunes filles et aux jeunes garçons des pays en développement de ne pas sombrer dans l'obscurantisme et de pouvoir choisir leur avenir. C'est pour cette raison que la France présidera, aux côtés du Sénégal, la conférence de reconstitution des fonds du Partenariat mondial pour l'éducation (PME), qui se tiendra en février 2018 à Dakar. Cette conférence vise à lever 3,1 Mds USD sur le triennum 2018-2020. La France, au regard de son rôle, annoncera une contribution nationale en hausse substantielle et participe activement à la campagne menant à la conférence afin d'encourager les bailleurs à augmenter leurs contributions triennales au PME. L'éducation constitue déjà l'un des principaux secteurs de l'aide publique au développement française. En 2015, la France a consacré 1 Md€ à l'éducation en bilatéral, à quoi s'ajoutent 183 M€ transitant par des canaux multilatéraux, notamment le PME, soit environ 15 % de son aide totale. La base de données de l'OCDE sous-estime la part transitant par les canaux multilatéraux, dont l'affectation exacte par secteur est beaucoup plus difficile à renseigner et se fait avec retard. Si l'on applique la définition de l'"éducation de base +"du PME qui intègre le primaire, le premier niveau du secondaire, la formation des enseignants et l'aide budgétaire, la part de l'aide à l'éducation allouée par la France à l'éducation de base atteint 23 % de son aide sectorielle. En 2015, la France a consacré 1,183 Md€ à l'éducation (en bilatéral et en multilatéral), soit environ 15 % de son aide totale. La part de l'éducation de base représente 23 % de l'aide sectorielle. La France a fait le choix d'appuyer des initiatives structurantes à dimension régionale pour améliorer la qualité de l'éducation de base, renforcer les capacités des systèmes éducatifs et lutter contre l'exclusion de l'éducation. La nouvelle Stratégie éducation, formation professionnelle, insertion 2017-2021 vise également à lutter contre les inégalités, réduire les vulnérabilités, soutenir le développement d'opportunités économiques dans les territoires et accompagner les transitions. L'Agence Française de développement a actualisé en 2016 sa stratégie Education-Formation-Emploi arrivée à échéance fin 2015. Ces nouvelles orientations stratégiques reposent sur le bilan et les enseignements du Cadre d'intervention sectoriel (CIS) précédent et intègrent l'apport des objectifs de développement durable. Un des trois grands axes du CIS 2016-2020 est le soutien à l'éducation de base, en particulier sur le collège, pour construire les compétences fondamentales à l'autonomie, avec une double priorité : équité et qualité. L'AFD appuie donc les plans nationaux des pays bénéficiaires, notamment des PMA selon les priorités suivantes : - l'universalisation de l'accès à l'enseignement par le soutien à la demande éducative des familles, par le déploiement d'une offre de formation attractive pour les populations rurales et urbaines pauvres et par la diversification des parcours à l'issue de l'éducation de base ; - l'amélioration des enseignements-apprentissage avec une attention particulière sur les premiers apprentissages et la maîtrise des langues, sur les compétences fondamentales cognitives et non cognitives, les formations des enseignants et des chefs d'établissements ainsi que sur le pilotage du système éducatif vers la qualité. Les efforts de la France afin de financer l'éducation de base via les organisations multilatérales doivent également être pris en considération. Au niveau multilatéral, l'aide de la France consacrée à l'éducation s'est élevée à 183 M€ en 2015, dont 116 M€ pour l'éducation de base. En 2017, malgré les contraintes budgétaires, la France a maintenu sa contribution au PME, seul fonds multilatéral dédié entièrement au financement de l'éducation de base, à un niveau identique à celui de 2016, soit 8 M€, et continue de financer deux postes d'experts techniques mis à disposition du PME. Depuis 2002, la moitié des financements du PME (2,3 Mds USD) a bénéficié aux pays francophones dont 1,7 Md USD pour les 17 pays prioritaires de notre politique de développement. Ainsi, l'éducation de base est plus que jamais une priorité de l'aide française et, à travers le PME, les pays prioritaires bénéficient d'un soutien structurant. Par exemple, dans les pays du G5 Sahel, plus de 250 MUSD sont engagés par le PME (période 2013-2017) et contribuent au développement et à la stabilisation de ces pays, y compris à travers un mécanisme de financement accéléré pour les pays fragiles/en crise. Au niveau international, la définition de l'aide publique au développement est établie par le Comité d'aide au développement (CAD) de l'OCDE, qui comptabilise notamment les bourses et les frais d'écolage dans les pays d'accueil. Le CAD estime, en effet, que la formation tout au long de la vie, y compris après le baccalauréat, contribue à accroître le capital humain d'un pays et donc son développement. Le développement des programmes de bourses en direction des étudiants des pays en développement constitue par ailleurs l'une des cibles de l'Objectif de développement durable pour l'éducation (ODD no 4) récemment adopté lors de la dernière Assemblée générale des Nations unies. Pour permettre la comparaison entre l'aide publique au développement des différents pays membres du CAD de l'OCDE, il est important de continuer à comptabiliser les bourses et frais d'écolage conformément aux normes établies. Afin de s'assurer que les bourses et écolages contribuent au développement de ses pays partenaires, la France ne comptabilise dans son APD que les frais relatifs aux étudiants ayant passé leur baccalauréat dans leur pays d'origine avant de venir effectuer leurs études supérieures en France. A la différence des programmes budgétaires de la mission APD (programme 209 et 110 qui permettent de financer le soutien à l'éducation de base), les frais d'écolage des étudiants étrangers en France ne sont pas pilotables. Le nombre d'étudiants inscrits dans les universités françaises et leur nationalité d'origine ne peuvent être constatés qu'a postériori, même si nous nous efforçons de faciliter l'accès des étudiants méritants de pays en développement grâce à des politiques de bourses. Ces frais d'écolage représentent des montants importants, compte tenu des caractéristiques du système éducatif français, qui peuvent entraîner des distorsions. Seuls les crédits pilotables de la mission aide publique au développement permettent effectivement de cibler les pays prioritaires. A cet égard, les objectifs actuels (CICID de novembre 2016) fixent une cible de 75 % de l'effort financier de l'Etat et 85 % de l'effort financier de l'AFD vers l'Afrique et le Moyen-Orient, ainsi que de 50 % du total des dons (deux-tiers des dons de l'AFD) vers les 17 pays prioritaires.

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