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Ian Boucard
Question N° 27562 au Ministère de l'intérieur


Question soumise le 17 mars 2020

M. Ian Boucard attire l'attention de M. le ministre de l'intérieur concernant le malaise vécu par les policiers qui sont constamment stigmatisés dans l'exercice de leurs fonctions. En effet, passées de figure héroïque contre la menace terroriste lors des attentats à l'encontre de Charlie Hebdo à cible privilégiée des black blocs et des casseurs durant les récents conflits sociaux, les forces de l'ordre sont aujourd'hui prises à partie par une frange de la population. Des conflits qui les placent d'ailleurs en première ligne et où leurs interventions sont passées au crible sur les réseaux sociaux. Des vidéos virales, totalement sorties de leur contexte, montrant des policiers intervenir de manière musclée et qui amènent à relancer le débat sur les violences policières. À ce titre et concernant le seul mouvement des gilets jaunes, l'IGPN a été saisie de 334 enquêtes judiciaires à l'encontre des forces de l'ordre. Or, si les policiers coupables de violences à l'égard de citoyens doivent être sévèrement punis, ce chiffre doit être remis en perspective car dans la plupart des cas, les faits de violences présumés n'ont pas entraîné de poursuites judiciaires. Cependant, cela donne une image négative des policiers alors même que ces derniers subissent beaucoup de violences. Ainsi, ces derniers mois, on déplore 574 blessés et 38 519 plaintes déposées pour violences par les forces de l'ordre, soit une augmentation de 18 %. Un constat chiffré qui renforce le sentiment de manque de reconnaissance dont souffrent celles et ceux qui protègent et servent les Français et auquel vient s'ajouter la dureté du métier. Effectivement, la pénibilité du travail de nuit et des horaires décalés mais aussi l'enchaînement des missions sans possibilité de repos régulier ainsi que la forte pression hiérarchique entraînent une grande lassitude chez les forces de l'ordre. Par ailleurs, le fait d'être constamment confronté à la misère sociale renforce ce mal être qui peut conduire au suicide. Là également, les chiffres sont criants, puisqu'en 2019, le nombre de passages à l'acte chez les forces de l'ordre a atteint un palier important avec 59 suicides, soit un taux supérieur de 36 % à celui de la population générale. Cet état de fait est particulièrement préoccupant et interroge sur les conditions dans lesquelles les policiers exercent leurs missions. Il est donc urgent d'intervenir en faveur des forces de l'ordre afin de leur montrer tout l'attachement et la reconnaissance qu'elles méritent et ainsi éviter une crise de la vocation de gendarmes et de policiers qui conduirait à des problèmes d'effectifs. Bien qu'il y ait eu certaines mesures mise en place avec notamment l'apparition d'une ligne d'écoute et de soutien psychologique, cela reste insuffisant et il faut aller beaucoup plus loin. C'est pourquoi il lui demande ce qu'il compte faire pour lutter contre la stigmatisation des forces de l'ordre afin de les préserver dans l'exercice de leur mission et ainsi redorer leur image auprès des Français qu'ils servent et défendent.

Réponse émise le 23 juin 2020

Les policiers, comme les gendarmes, assurent chaque jour, avec dévouement et professionnalisme, le respect de la loi républicaine et la protection de nos concitoyens, dans des situations fréquemment difficiles et dangereuses, parfois au péril de leur vie. Ils font l'objet de violences, de menaces et d'injures, voire de véritables guets-apens. Des calomnies, des caricatures et parfois de véritables discours de haine sont proférés à leur encontre. Tout est mis en œuvre pour que soient systématiquement recherchés et identifiés les auteurs de violences commises à l'encontre des policiers, afin que des peines exemplaires puissent être prononcées par la justice. La protection des policiers est une priorité du ministre de l'intérieur, sur le plan matériel et juridique. Elle exige aussi de défendre leur honneur et de faire reconnaître le travail exceptionnel accompli au quotidien sur le terrain. Tout doit être mis en œuvre pour améliorer concrètement leurs conditions de travail et leur donner les moyens de remplir leurs missions dans les meilleures conditions d'efficacité et de sécurité possibles. Le budget des forces de l'ordre est ainsi en augmentation depuis 2017. En 2020, 13,2 Mds€ (+ 8,7 % depuis le début du quinquennat) sont alloués à la police et à la gendarmerie, soit une hausse de plus de 1 Md€ depuis 2017. Ce budget permet d'abord de poursuivre la politique de recrutement ambitieuse menée par le Gouvernement (10 000 policiers et gendarmes supplémentaires d'ici à la fin du quinquennat). Le budget permet également de poursuivre la modernisation et l'amélioration des matériels qui concourent à la protection des forces de l'ordre : véhicules, armes, équipements de protection et d'intervention, etc. Sur le plan immobilier, si important pour les conditions de travail, 450 M€ de crédits (autorisations d'engagement) bénéficient à la police nationale au titre de la programmation triennale 2018-2020. Les questions de sécurité, d'hygiène et de santé des personnels constituent aussi des enjeux de premier plan. Le protocole conclu en décembre 2018 avec les organisations syndicales du corps d'encadrement et d'application se traduit par des avancées indemnitaires substantielles. Près de 3,5 millions d'heures supplémentaires ont en outre été indemnisées dès la fin 2019 grâce à un effort exceptionnel de 45 M€, première étape du plan d'apurement des heures supplémentaires. Les bases d'un nouveau régime soutenable et équitable ont été établies (arrêté du 5 septembre 2019 portant sur l'organisation relative au temps de travail dans les services de la police nationale). Le projet de loi de finances pour 2020 prévoit ainsi un abondement de près de 26,5 M€ pour indemniser le flux annuel des services supplémentaires. Par ailleurs, le nouveau cadre défini par l'arrêté précité permet de limiter la production d'heures supplémentaires afin de prévenir toute reconstitution de stock. En outre, la police nationale expérimente depuis fin septembre de nouveaux cycles de travail susceptibles d'améliorer le bien-être des agents en offrant aux effectifs de voie publique un plus grand nombre de week-end de repos. Face à la question du suicide, qui est une préoccupation majeure, la police nationale s'est dotée en mai 2018 d'un nouveau « programme de mobilisation contre le suicide », qui se décline actuellement. Il met l'accent sur l'amélioration du quotidien au travail, sous l'angle en particulier de la solidarité et du management. En avril 2019, a été créée une « cellule alerte prévention suicide » pour veiller à la bonne mise en œuvre de ce plan et cette même année des séminaires ont été organisés dans chaque zone de défense et de sécurité afin d'apporter des outils aux acteurs de terrain. Par ailleurs, deux numéros verts ont été mis en place en 2019 pour garantir l'accès à un dispositif d'écoute psychologique. Le ministre de l'intérieur suit personnellement la mise en œuvre concrète du programme de mobilisation contre le suicide. Enfin, le prochain Livre blanc de la sécurité intérieure, élaboré dans le cadre d'une consultation qui a associé les personnels, fixera sur le plan des ressources humaines et des moyens matériels, mais aussi des missions, une stratégie adaptée aux enjeux de sécurité et aux attentes des personnels. C'est donc tant sur le plan des moyens que des méthodes que le Gouvernement agit pour améliorer les conditions de travail des forces de l'ordre et être à l'écoute de leurs attentes, avec la volonté de redonner du sens à leur engagement, à la fierté d'être policier et de leur garantir la reconnaissance qui leur est due.

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