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Josiane Corneloup
Question N° 2838 au Ministère de l'économie


Question soumise le 14 novembre 2017

Mme Josiane Corneloup attire l'attention de M. le ministre de l'économie et des finances sur la propension des publicistes à un recours de plus en plus systématique à la langue anglaise dans les messages publicitaires à destination des consommateurs. La loi du 4 août 1994, dite « Toubon », relative à l'emploi de la langue française prévoit dans son article 2 que « dans la désignation, l'offre, la présentation, le mode d'emploi ou d'utilisation, la description de l'étendue et des conditions de garantie d'un bien, d'un produit ou d'un service, ainsi que dans les factures et quittances, l'emploi de la langue française est obligatoire ». La direction générale de la concurrence, de la consommation et de la répression des fraudes sur le territoire français est chargée d'assurer le respect de l'application de cette obligation. Les sanctions qui répriment les infractions constatées existent et des interventions au siège social des entreprises contrevenantes pour faire cesser les pratiques en cause sont régulièrement effectuées. De même, l'autorité de régulation professionnelle de la publicité (ARPP) développe une approche préventive auprès des annonceurs en corrigeant en amont les possibles malversations à la loi « Toubon » et prend en charge près de 1 000 plaintes qui sont déposées auprès d'elle chaque année par des personnes physiques ou morales. Or les sociétés adeptes d'une anglicisation des modes de communication publicitaire ne contreviennent à la loi qu'en l'absence de traduction en français d'un slogan ou d'une annonce. Si le message apparaît en français sur le document quel que soit sa taille, bien souvent très réduite par rapport aux caractères de la formule anglaise, la conformité à la loi ne peut être remise en question. Bien souvent, il est impossible de trouver cette information sans une recherche approfondie, la mention en français étant reléguée en bas de page ou perdue parmi une nuée de recommandations annexes. La considération envers la langue française, pour le raffinement de la culture de son peuple et pour la vocation humaniste qu'elle porte, est pourtant présente partout dans le monde. Or l'anglicisation des pratiques publicitaires apparaît plus importante en France que dans les autres pays. Cette constatation amène à s'interroger sur les incidences d'un délitement de l'usage de la langue de la République sur la manière dont un peuple doit faire corps avec lui-même, dans un contexte où la maîtrise des fondamentaux du français fait de plus en plus défaut, surtout parmi les plus jeunes. Les pouvoirs publics s'en sont très justement préoccupés en prévoyant en janvier 2017 le lancement d'un plan national s'adressant aux 6 millions d'adultes, qu'ils soient en situation d'illettrisme ou en difficulté avec la langue française. L'académie française prend sa part de promotion de cette belle langue en mettant à disposition des internautes un dictionnaire des néologismes et des anglicismes incitant à dire en français ce qui ne trouve pas son équivalent rigoureux et esthétique en anglais. Sans brimer la liberté d'inventer des slogans incitatifs et entraver une part importante de l'activité économique du pays, il conviendrait d'inciter les entreprises à démarcher dans la langue de leurs clients. Une certaine mode d'un retour volontaire aux annonces désuètes a d'ailleurs déjà vu le jour, avec succès, à l'instar des campagnes de l'opérateur free, « Il a Free, il a tout compris » ou de la compagnie Air France « Faire du ciel le plus bel endroit de la terre ». Aussi, elle lui demande quelles sont les mesures qu'il compte mettre en œuvre pour favoriser l'usage de la langue française dans les processus publicitaires de vente des biens de consommation et favoriser ainsi son rôle d'élément fédérateur de la Nation.

Réponse émise le 12 décembre 2017

L'article 2 de la loi du 4 août 1994 relative à l'emploi de la langue française prévoit l'emploi obligatoire mais non exclusif de la langue française dans la désignation, l'offre, la présentation, le mode d'emploi ou d'utilisation, la description de l'étendue et des conditions de garantie d'un bien, d'un produit ou d'un service, ainsi que dans les factures et quittances. Ces dispositions s'appliquent également à toute publicité écrite, parlée ou audiovisuelle. Le texte permet, ainsi, en sus de la langue française, l'emploi d'autres moyens d'information du consommateur, l'utilisation d'une autre langue, de dessins, symboles ou pictogrammes par exemple. Au regard du droit européen, et plus particulièrement de la libre circulation des marchandises au sein de l'Union, la mise en œuvre de ces dispositions s'effectue dans le respect du principe de proportionnalité. A cet égard, les contrôles qui sont régulièrement effectués par la direction générale de la concurrence, de la consommation et de la répression des fraudes (DGCCRF) pour l'application des dispositions relatives à l'emploi de la langue française, à l'issue desquels des sanctions réprimant les infractions constatées peuvent être prononcées, visent essentiellement à vérifier que, nonobstant l'emploi de termes ou expressions d'une autre langue, ou l'utilisation de dessins, pictogrammes, symboles, l'information est lisible et intelligible pour le consommateur. Il convient, d'ailleurs, de préciser que les exigences de lisibilité et d'intelligibilité sont différentes selon la nature de l'information délivrée. Lorsqu'il s'agit d'une publicité permettant d'établir ou de renforcer la « notoriété » d'une marque et que l'information délivrée ne porte ni sur les caractéristiques, ni sur la composition d'un produit, l'utilisation de termes rédigés en langue étrangère peut être tolérée. En tout état de cause, les agents de la DGCCRF s'attachent à faire une appréciation au cas par cas, compte tenu de la nature du message et des exigences posées par le principe d'une information claire et loyale des consommateurs. Ainsi, lorsque la marque utilise un slogan en langue étrangère facilement compréhensible, traduit en petits caractères en bas de page ou d'affiche, aucune atteinte aux droits des consommateurs ne peut être établie. En revanche, lorsque le message peut avoir un impact sur la sécurité ou la santé des consommateurs, certaines mentions, permettant de fournir au consommateur des informations utiles pour évaluer les risques inhérents aux produits, doivent être obligatoirement traduites en français. C'est notamment le cas en matière de sécurité des produits conformément à l'article 5 de la directive sur la sécurité générale des produits.

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