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Stéphane Buchou
Question N° 2856 au Ministère de la transition écologique et solidaire


Question soumise le 14 novembre 2017

M. Stéphane Buchou attire l'attention de M. le ministre d'État, ministre de la transition écologique et solidaire, sur la question de l'extraction de granulats marins. En France, les mouvements de contestation voient le jour au même rythme que les nouveaux projets concernant ce sujet. Les problématiques environnementales en sont le principal motif. L'île de Sein, la presqu'île de Quiberon, la baie de Lannion, ou encore l'île de Noirmoutier sont quelques exemples parmi les cas français les plus connus. Dans le cas de l'île de Noirmoutier, la communauté de communes s'oppose aux conclusions du rapport fourni par le bureau d'études mandaté par l'extracteur. Elle s'appuie notamment sur l'expérience du site d'extraction de l'île du Pilier, en exploitation depuis 1999. Dès lors la communauté de communes réitère sa désapprobation à l'octroi des deux permis exclusifs de recherches de granulats marins au large de l'île de Noirmoutier et de l'île d'Yeu, sur les sites de Cairnstrath et Astrolabe. Cette opposition se fonde sur le fait que : les différentes études publiées par le CEREMA, IFRENER et la MREAL des Pays de la Loire réalisées sur les incidences de ces campagnes d'extractions ne mesurent pas avec précaution les impacts sur la faune, la flore et les milieux naturels, pire elles relèvent des incohérences et des incertitudes ; des relevés menés en 2012 sur le site d'extraction du Pilier ont montré que la zone était devenue impropre à la pêche en raison de la détérioration des fonds marins ; la méthodologie choisie par l'extracteur concernant l'érosion du trait de côte n'est pas satisfaisante, le prélèvement de grandes quantités de matériaux dans les fonds marins pourrait perturber le fragile équilibre hydro-sédimentaire, sans compter l'élévation du niveau de la mer. Par ailleurs, le Gouvernement souhaite présenter dans la première partie de 2018 son plan sur la transition énergétique, surnommé « Green deal », pour soutenir la transition énergétique, l'efficacité énergétique ainsi que le développement des énergies renouvelables et les nouvelles filières industrielles. Les sables marins n'étant pas une ressource renouvelable, l'extraction de granulats entre en contradiction avec l'objectif de développement durable. C'est pourquoi, compte tenu de ces éléments, il lui demande quelle est la vision à long terme et la politique adoptée par le Gouvernement concernant l'extraction de granulats marins ainsi que ses conséquences, et quelle est sa position sur le cas particulier de l'île de Noirmoutier.

Réponse émise le 27 mars 2018

Les granulats sont des composants essentiels de la fabrication du béton. Ils servent très majoritairement à la construction de logements et aux infrastructures. Ils sont nécessaires, comme de nombreuses ressources minérales, aux énergies renouvelables. Ce sont les ressources minérales les plus consommées en France avec une moyenne annuelle de 370 millions de tonnes. Le recyclage (7 % de la consommation) progresse d'année en année mais reste limité par les volumes et la part des déchets du BTP réutilisables dans les bétons. Le recyclage ne peut pas satisfaire la demande. Il en est de même avec les matériaux biosourcés malgré leur développement. Si les granulats marins ne représentent qu'environ 2 % de la production annuelle, ils constituent une ressource de proximité non négligeable pour certaines régions côtières. 22 % de la production de granulats des Pays-de-la-Loire provient ainsi de l'exploitation de concessions en mer. En façade atlantique, la consommation en granulats de toutes origines par habitant est supérieure à la moyenne nationale car ces territoires sont très attractifs, ce qui provoque des besoins de construction et d'infrastructures très consommateurs en ressources. Les granulats marins se substituent aux ressources terrestres de plus en plus contraintes par les nécessaires protections des milieux. Concernant spécifiquement les pressions et les impacts de cette activité sur les milieux, ils sont multiples et dépendants des conditions locales. Ils peuvent porter sur la modification de l'état physique et chimique de l'eau par mise en suspension de sédiments, la modification du fond marin, la modification de l'hydrodynamisme et de la dynamique sédimentaire, les impacts sur les espèces marines du fait de la modification de leur milieu et de leur habitat, mais aussi notamment des prélèvements directs d'individus au cours de l'extraction, du dérangement induit par l'augmentation de la turbidité et du niveau sonore. L'activité d'extraction interagit également avec les autres activités en mer, et en particulier avec la pêche. Pour autant, les deux activités ne sont pas incompatibles. Au-delà de la modification du profit du fond marin au droit du site d'extraction, aucun impact irréversible, ni atteinte au trait de cote n'a d'ailleurs été mis en évidence à l'occasion du suivi des concessions, y compris celle du Pilier. Concernant les ressources halieutiques au niveau de ce site, il est à ce stade essentiellement relevé le développement d'espèces opportunistes capables de recoloniser rapidement le milieu après une perturbation. Pour limiter les impacts sur l'environnement, des mesures d'évitement et de réduction sont mises en œuvre dans le cadre des autorisations d'ouverture de travaux miniers délivrées par les préfets : limitation du périmètre autorisé, maintien d'une couverture sédimentaire pour éviter la mise à nu de la roche et favoriser le repeuplement, exploitation par bandes alternées, choix des périodes d'extraction pour éviter les périodes de reproduction… Ces dernières années, des expériences exemplaires montrent qu'une bonne appréhension scientifique et technique de l'activité d'extraction, avec par exemple la constitution d'un groupement d'intérêt scientifique, est de nature à améliorer considérablement les connaissances permettant ainsi de limiter les impacts de l'extraction de granulats sur l'environnement et de mieux concilier les usages. Une telle démarche, déjà mise en œuvre en Normandie, est encouragée au niveau des façades concernées par cette activité. Sur le plan réglementaire, les exploitations en mer relèvent du code minier et non du code de l'environnement. En 2006, la prise en compte des enjeux environnementaux, la consultation des parties prenantes et la concertation ont été très sensiblement renforcées dans les procédures d'instruction et de délivrance des autorisations. Pour les travaux, elles reposent à présent sur l'étude d'impact et l'enquête publique du code de l'environnement. Néanmoins, les instructions restent exagérément longues et souvent contestées sur les aspects environnementaux et sur la compatibilité avec les autres activités en mer. De plus, ces instructions au coup par coup ne répondent pas aux attentes des acteurs du milieu marin notamment en termes de visibilité dans l'espace et le temps. Les dossiers au large de la Vendée sont emblématiques à cet égard. La loi relative à la reconquête pour la biodiversité a été mise à profit, en 2016, pour introduire le principe d'une planification de l'activité et subordonner les projets portant sur les granulats marins au document stratégique de façade, à mettre en place d'ici 2019. L'un des volets de ce document pourra ainsi porter spécifiquement sur les ressources minérales marines, indiquant un objectif de production pour une première période allant jusqu'à 2030 et définissant un ensemble de contraintes opposables aux demandes d'extraction. La mise en œuvre effective des documents stratégiques de façades dotera ainsi l'État des moyens de gérer la ressource en granulats marins en prenant en compte les besoins économiques de la construction et les enjeux de protection du milieu marin. Les demandes encore en instruction à cette date pourront alors être restreintes, voire refusées, s'il est établi que de nouvelles capacités d'extraction sont inutiles à moyen terme.

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