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Jacques Marilossian
Question N° 29189 au Ministère de l’économie


Question soumise le 5 mai 2020

M. Jacques Marilossian attire l'attention de M. le ministre de l'économie et des finances sur le phénomène grandissant des arnaques financières visant les épargnants français de tous les niveaux sociaux. En effet, un sondage CSA commandé par l'Autorité des marchés financiers (AMF) révèle que 28 % des Français sont démarchés par des sociétés frauduleuses et que 5 % des Français sont victimes d'une arnaque. Personnes sans profession, employés, cadres et professions intellectuelles : ces trois catégories sociales sont visées à parts égales. On recense même parmi les victimes des cadres financiers, des experts judiciaires et des gestionnaires d'entreprises pourtant sensibilisés à la comptabilité et aux bonnes pratiques financières. L'AMF estime les pertes liées aux arnaques financières (usurpation d'identités de banques, souvent étrangères comme la Northern Trust, de sociétés d'investissement et même d'institutions d'État comme la Banque de France, etc.) à 5,5 milliards d'euros depuis 2010 en France. Ce montant est probablement plus important car toutes les fraudes ne sont pas comptabilisées (découragement des victimes ou sentiment de honte débouchent souvent sur une absence de plainte). Année après année, les montants arnaqués sont de plus en plus importants et le mode opératoire des escrocs se perfectionne. L'AMF a ainsi observé que les escrocs s'appuient sur un réseau international complexe et organisé de nombreux prestataires (création de sites internet « vitrines », référencement, publicité, vol de bases de données clients, création de centres d'appel, ouverture de comptes bancaire de collecte, blanchiment d'argent). Identifier et remonter ces filières s'avère dès lors fastidieux pour la justice. ADC France, une association de défense des consommateurs, a déposé une plainte pour que soient ajoutés 150 sites internet d'arnaques à une enquête menée par Mme Pflug, juge d'instruction de Nancy, sur un réseau d'escrocs présumé. ADC France porte également une action juridique collective regroupant l'ensemble des victimes déclarées de ce réseau dans une procédure d'information judiciaire. Cette procédure d'information sera suivie par une procédure pénale à laquelle ADC France se prépare à se constituer partie civile. Les victimes d'arnaques financières dénoncent un manque de prévention de la part des autorités (AMF, Gouvernement) et des acteurs concernés (banques) auprès du grand public. Des outils de vérification d'IBAN, de documents et d'adresses internet sont mis à disposition sur le site de l'AMF mais leur visibilité ne semble pas assez grande. En complément du traitement judiciaire de ces escroqueries, il lui demande donc quels sont les objectifs du Gouvernement en matière de prévention et de lutte contre les escroqueries financières et les moyens mis en œuvre - ou à mettre en œuvre - pour les réaliser.

Réponse émise le 18 mai 2021

Le parlementaire attire l'attention du ministre de l'économie, des finances et de la relance sur les objectifs du Gouvernement en matière de prévention et de lutte contre les escroqueries financières et les moyens pour y parvenir. En application de l'article L. 621-1 du code monétaire et financier, l'Autorité des marchés financiers (AMF) veille à la protection de l'épargne investie dans les instruments financiers et les placements donnant lieu à appel public à l'épargne, à l'information des investisseurs et au bon fonctionnement des marchés d'instruments financiers.   Dans le cadre de l'exercice de sa mission, l'AMF autorise les acteurs (prestataires de service d'investissement, sociétés de gestion, émetteurs, prestataires de services sur actifs numériques), vise des documents d'information sur les opérations financières et agrée les produits d'épargne collective, surveille les marchés financiers et les transactions financières, mène des enquêtes et des contrôles, dispose d'un pouvoir de sanction et de transaction en cas de manquements aux règles applicables, informe les épargnants, et peut proposer un dispositif de médiation en cas de litige. Elle ne dispose pas de compétence directe en matière d'escroqueries financières lesquelles relèvent de l'autorité judiciaire. Le développement des arnaques financières nécessite une coopération étroite de l'ensemble des autorités compétentes. À cet égard, l'AMF coopère avec d'autres entités publiques, comme l'Autorité de contrôle prudentiel et de résolution (ACPR), la direction générale de la concurrence, de la consommation et de la répression des fraudes (DGCCRF), le parquet du tribunal de grande instance de Paris, ainsi qu'avec la police nationale et la gendarmerie nationale. Cela se matérialise par des échanges d'informations sur les tendances et les pratiques des arnaqueurs en utilisant au mieux le périmètre de chacun pour agir le plus efficacement possible et de manière complémentaire. Par exemple, en septembre 2019, une conférence de presse a été organisée conjointement par l'AMF, le Parquet du tribunal de grande instance de Paris et l'ACPR. Face à l'ampleur de ce fléau, les trois institutions ont souhaité dresser un nouvel état des lieux des arnaques financières en France, et appeler le public à la plus grande vigilance pour mieux se protéger. L'AMF et l'ACPR, dans le cadre de leurs missions respectives de protection de l'épargne et des clients des secteurs de la banque et de l'assurance, appellent régulièrement le public à la plus grande vigilance face au risque d'escroqueries financières, notamment dans le contexte récent de l'épidémie de la Covid-19. Depuis 2010, le pôle commun à l'ACPR et à l'AMF a notamment pour mission d'offrir un point d'entrée commun pour les demandes du public. Ce dispositif, dénommé « Assurance Banque Épargne Info Service – ABEIS » offre trois modalités d'accès : un site internet permettant notamment le dépôt de demandes en ligne, une plateforme téléphonique et un accès par voie postale. L'AMF est également très investie dans la prévention des escroqueries financières via ses actions de communication et de pédagogie auprès du grand public en proposant le décryptage des mécanismes d'arnaques financières sur son site internet et sur le site ABEIS, en sensibilisant les épargnants via les réseaux sociaux et les moyens de communication audiovisuelle ou de presse écrite, en développant une application mobile « AMFProtectEpargne » qui permet un accès direct et immédiat aux alertes de l'AMF, en menant des campagnes vidéo présentant des témoignages de victimes, en diffusant avec l'Institut national de la consommation des Consomags sur les chaînes de France Télévisions, en diffusant des listes noires d'acteurs financiers dans un souci de prévention et de sécurisation des décisions des épargnants, et en développant des outils de veille fondés sur l'intelligence artificielle. L'AMF mène un travail de sensibilisation régulier des associations de consommateurs en organisant un dialogue régulier et structuré. Elle inscrit son action dans la stratégie nationale d'éducation financière, et travaille de manière étroite avec « La Finance pour Tous » qu'elle a contribué à créer en 2006. Au niveau national, le législateur a accordé de nouveaux pouvoirs à l'AMF lui permettant de renforcer sa mission de protection des épargnants, qu'il s'agisse de la décision visant à demander au juge le blocage de l'accès aux sites internet frauduleux, l'interdiction de la publicité pour les produits de trading les plus risqués ou l'enregistrement obligatoire à l'AMF des offres d'investissement dans des produits concrets avec promesse de rendement (biens divers). Ces nouvelles compétences ont contribué à une décrue significative des offres sur des produits frauduleux (par exemple sur le Forex), à une quasi-disparition des offres d'options binaires et diamants d'investissement. Par ailleurs, lorsque l'arnaque financière constatée est le fait d'un acteur étranger, la coopération internationale permet à l'AMF de saisir et d'alerter le régulateur des marchés financiers du pays concerné, pour autant que l'acteur en question a effectué une démarche de commercialisation active visant des épargnants résidant en France. Au niveau européen les contacts bilatéraux et les échanges d'expériences sur ces problématiques d'arnaques sont de plus en plus fréquents. L'AMF, compte tenu de son large bassin d'épargne, est parmi les autorités les plus concernées mais aussi les plus actives en Europe sur ces questions. L'Autorité des services et marchés financiers belge est également très mobilisée et innovante en la matière. Les échanges avec les instances homologues européennes sont réguliers.

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