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Jean François Mbaye
Question N° 30239 au Ministère de la transition écologique


Question soumise le 9 juin 2020

M. Jean François Mbaye interroge Mme la ministre de la transition écologique et solidaire sur la déforestation mondiale durant la pandémie de covid-19. Selon un communiqué publié vendredi 5 juin 2020 sur le site belge de l'ONG WWF, la destruction des forêts tropicales aurait augmenté de 150 % au mois de mars, période durant laquelle la pandémie de covid-19 se propageait sur la planète. Selon des données satellitaires relevées dans 18 pays abritant ce type d'écosystème, environ 645 000 hectares de forêts tropicales auraient été détruits durant le seul mois de mars 2020, principalement en Asie du Sud-Est, mais également en Amérique du Sud et en Afrique. Si différents facteurs sont à prendre en considération afin d'expliquer cette recrudescence des atteintes portées à ce patrimoine mondial de l'humanité, deux d'entre eux doivent néanmoins être soulignés : l'affaiblissement des dispositifs de surveillance consécutif à la prise de mesures d'urgence sanitaire (comme le confinement des populations) et les difficultés économiques présentes et à venir contraignant les habitants à trouver d'autres sources de revenus, parmi lesquelles la récole intensive de bois. Ce phénomène est particulièrement inquiétant, et risque, s'il se poursuit, de précipiter une disparition irréversible de la couverture forestière mondiale, sur laquelle alertait son dernier rapport budgétaire sur la mission écologie, développement et mobilités durables du projet de loi de finances pour 2020. Il souhaite dès lors l'interroger sur la manière dont le Gouvernement entend adapter sa stratégie en matière de protection des forêts mondiales à l'aune des problématiques soulevées par la pandémie de covid-19, notamment au niveau européen et dans le cadre de l'organisation des Nations unies, ainsi que suggéré dans le rapport susmentionné.

Réponse émise le 13 octobre 2020

S'il est trop tôt pour faire le bilan exhaustif des effets collatéraux de la crise sanitaire, en particulier en matière de déforestation, dans les pays où la crise n'a pas encore atteint son apogée, le rapport publié sur le site belge du WWF est une alerte sérieuse, raison pour laquelle la France ne relâche pas ses efforts pour lutter contre la déforestation en agissant à la fois aux niveaux national, européen et mondial. Ainsi, la Stratégie nationale de lutte contre la déforestation (SNDI), publiée fin 2018, vise à enrayer l'impact de la France sur la déforestation à l'échelle internationale au travers de ses importations en s'engageant à mettre fin, d'ici 2030, à la déforestation causée par l'importation de produits de base à fort impact sur les écosystèmes, notamment tropicaux. Le ministère de la transition écologique et solidaire et toutes les administrations concernées s'attèlent à sa mise en œuvre par : - l'élaboration de feuilles de route pour les pays forestiers concernés par la production de denrées à fort risque de déforestation ; - l'instauration de conditions de respect de l'accord de Paris dans les nouveaux accords commerciaux conclus ; - l'élaboration d'un guide sur la commande publique zéro déforestation à paraître prochainement ; - la publication d'une plateforme en ligne d'information du public sur la déforestation importée et la mobilisation d'acteurs privés pour des chaînes d'approvisionnement durables (à l'automne 2020). Les autorités françaises agissent, par ailleurs, pour infuser les mesures de la SNDI dans les politiques européennes. À cet égard, la Commission européenne a publié : - une communication, en juillet 2019, pour renforcer l'action de l'UE en matière de protection et de restauration des forêts de la planète reprenant une grande partie des mesures de la SNDI française ; - deux stratégies cruciales, en mai 2020, qui annoncent à l'horizon 2021 « une proposition législative et d'autres mesures visant à éviter ou à réduire au minimum la mise sur le marché dans l'UE de produits associés à la déforestation ou à la dégradation des forêts » ; - la stratégie biodiversité de l'UE qui pose un principe de protection des forêts primaires devant mener l'Union à ne pas prendre de mesures qui pourraient entraîner une déforestation dans d'autres régions du monde ; - la stratégie « de la ferme à la table » qui présente une analyse des règles en vigueur pour limiter la dépendance aux matières premières alimentaires critiques et, notamment, le soja issu de la déforestation. Les autorités françaises se réjouissent de ces annonces et continuent, par ailleurs, de plaider pour une meilleure prise en compte des enjeux de reconversion des terres, pour l'introduction d'une interdiction d'achat public de produits importés issus de la déforestation dans le cadre de l'accord plurilatéral sur les marchés publics de l'Organisation mondiale du commerce et de la directive 2014/24/UE du 26 février 2014 sur les marchés publics. Elles proposent la mise en place d'un mécanisme d'alerte aux entreprises lorsqu'elles importent des matières premières à fort impact sur les écosystèmes, notamment tropicaux. Les échanges de la France avec le Parlement européen qui prépare des rapports sur la déforestation importée, auront vocation à alimenter les initiatives de la Commission européenne de 2021. La France a, par ailleurs, été à l'initiative du lancement, en septembre 2019, de l'alliance pour la préservation des forêts tropicales qui se veut inclusive en rassemblant l'ensemble des acteurs de la forêt tropicale. Elle vise les trois bassins tropicaux d'Amazonie, d'Afrique centrale et d'Asie du Sud-Est, en mettant en place trois actions consistant : - à créer une plateforme de réflexion et d'action, autour de six thématiques identifiées pour la préservation des forêts tropicales (dont la conservation de la biodiversité, le développement de chaînes de valeur durables, la création de mécanismes de prévention) ; - à mettre en valeur des projets et programmes conformes aux principes et objectifs de cette alliance ; - à soutenir les pays forestiers dans la prévention, la préparation et la gestion des situations de menaces pesant sur les forêts tropicales (incendies, maladies des arbres). Enfin, au sein des négociations onusiennes en cours dans le cadre de la convention sur la diversité biologique (CDB) pour le futur cadre stratégique mondial pour la biodiversité post-2020 qui sera adopté lors de la COP15 en 2021, la France porte un objectif global de 30 % d'aires protégées terrestres et marines, ainsi qu'un objectif d'utilisation durable des ressources, notamment issues des écosystèmes forestiers. La lutte contre la déforestation et la préservation des écosystèmes forestiers font ainsi partie des priorités portées par la France dans le cadre de ces négociations.

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