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Constance Le Grip
Question N° 30240 au Ministère de l’europe


Question soumise le 9 juin 2020

Mme Constance Le Grip, députée des Hauts-de-Seine, alerte M. le Premier ministre sur la dégradation de la situation à Hong Kong. Le 28 mai 2020, l'Assemblée nationale populaire et la Conférence consultative politique du peuple chinois ont adopté une loi « sur la sécurité nationale à Hong Kong ». En 7 articles, cette loi marque une violation nette des règles posées par les traités de rétrocession. Cette loi permettra ainsi à la République populaire de Chine d'encadrer fermement tout droit local, contrairement au principe « un pays, deux systèmes », comme en atteste par exemple l'article 4 qui autorise les organes chinois de justice et de police à s'établir à Hong Kong. Or c'est précisément sur les questions de justice, diamétralement différentes entre les deux systèmes, que les premières manifestations s'étaient initiées pour refuser la facilitation des extraditions vers la Chine. L'article 6 de cette loi de sécurité nationale inquiète également les habitants de Hong Kong, puisqu'il prévoit de « prévenir, stopper, ou punir toute conduite qui met en danger la sécurité nationale, tels que le séparatisme ou l'organisation d'activités terroristes ». Cette criminalisation à venir des oppositions constitue en réalité autant d'intimidations et de menaces pour la liberté d'un peuple et l'avenir de la démocratie dans la région administrative spéciale. Il est notable que, pour la première fois en 31 ans, la commémoration du massacre de la place Tian'anmen, le 4 juin 2020, soit interdite. Après plusieurs mois d'accalmie dus à la crise sanitaire de la covid-19, les manifestations reprennent donc contre cette mainmise et sont sévèrement réprimées avec 300 manifestants arrêtés le 27 mai 2020. Ces nouvelles actions législatives chinoises, hostiles à l'exception hongkongaise, ne peuvent pas laisser indifférent. À Hong Kong, c'est une parcelle de démocratie, de liberté et d'état de droit qui est menacée. Or, d'après plusieurs sources de presse, le ministère des affaires étrangères chinois aurait indiqué que, au cours d'un appel téléphonique le mardi 26 mai 2020 entre le ministre des affaires étrangères de la République populaire de Chine et le conseiller diplomatique du Président de la République, ce dernier aurait affirmé que la France « n'avait aucune intention d'intervenir dans les affaires de Hong Kong ». Auditionné le mercredi 27 mai 2020 par la commission des affaires étrangères, de la défense et des forces armées du Sénat, le ministre de l'Europe et des affaires étrangères a indiqué que la France est « préoccupée par l'adoption prochaine d'une loi sur la sécurité nationale à Hong Kong, qui se mettrait en œuvre sans l'accord du Parlement de Hong Kong, car nous craignons que ces mesures soient des remises en causes de l'état de droit et des libertés fondamentales garanties par la loi fondamentale de 1997 ». Dans une déclaration solennelle en date du 29 mai 2020, le Haut représentant de l'Union pour les affaires étrangères et la politique de sécurité a exprimé la « vive préoccupation de l'Union européenne face aux mesures prises par la Chine le 28 mai qui ne sont conformes ni à ses engagements internationaux (déclaration commune sino-britannique de 1984) ni à la loi fondamentale de Hong Kong. Ces mesures risquent de compromettre gravement le principe "un pays, deux systèmes" et le degré élevé d'autonomie dont jouit la région administrative spéciale de Hong Kong ». Mme la députée souhaite donc savoir si le Gouvernement est en mesure de confirmer ou d'infirmer la teneur de cette conversation entre le ministère des affaires étrangères de la République populaire de Chine et un conseiller à la Présidence de la République française, et quelles sont les initiatives que le Gouvernement compte entreprendre concrètement pour faire en sorte que l'état de droit et les libertés fondamentales ne soient pas remis en cause à Hong Kong. Elle rappelle au Premier ministre que la question écrite n° 27386, publiée au Journal officiel du 10 mars 2020, et portant sur les conditions d'exportation de certains équipements français de protection individuelle pour les opérations de maintien de l'ordre, est à ce jour toujours en attente de réponse. Face à cette violation manifeste de l'état de droit, qui interroge sur la sincérité des négociations et des accords signés par la République populaire de Chine, la France et l'Union européenne doivent avoir une attitude cohérente et conforme à leurs valeurs. Elle souhaite connaître son avis sur ce sujet.

Réponse émise le 1er septembre 2020

La France a exprimé sa vive préoccupation dès la décision de l'Assemblée nationale populaire chinoise d'adopter une loi sur la sécurité nationale à Hong Kong, qui constitue une rupture par rapport au cadre hérité de la rétrocession de 1997. Nous nous sommes pleinement associés aux déclarations en ce sens du Haut Représentant de l'Union européenne au nom des 27 Etats membres les 22 et 29 mai, puis le 1er juillet dernier, après l'adoption de la loi sur la sécurité nationale à Hong Kong, qui a confirmé nos craintes les plus fortes. Une déclaration a également été adoptée par les pays membres du G7 le 17 juin, appelant les autorités chinoises à revenir sur leur décision. Cette loi a, en effet, un impact négatif important sur l'autonomie de Hong Kong, le respect des libertés fondamentales et l'indépendance de la justice. Le ministre de l'Europe et des affaires étrangères s'est entretenu à de nombreuses reprises avec ses homologues, notamment européens, sur ce sujet afin qu'une position européenne unie et ferme puisse être maintenue. Cette position constante de la France a également été rappelée par le conseiller diplomatique du Président à M. Wang Yi lors de son entretien du 26 mai dernier. Et le Président de la République a abordé la situation à Hong Kong lors de son entretien du 5 juin dernier avec le Président Xi en rappelant le soutien de la France au principe « un pays, deux systèmes ». En effet, la France est attachée au principe « un pays, deux systèmes » et veillera attentivement au respect du haut degré d'autonomie, de l'Etat de droit, des droits de l'Homme et des libertés fondamentales, ainsi qu'à l'indépendance du système judiciaire, qui sont essentiels à la population et à la prospérité économique de Hong Kong. Nous serons particulièrement vigilants quant à la mise en œuvre de la loi et ses conséquences, notamment dans son volet extraterritorial. L'Union européenne s'est accordée sur des pistes d'actions pour tirer les conséquences de la nouvelle situation créée à Hong Kong. Le Conseil de l'Union européenne (UE) a adopté le 28 juillet des conclusions exprimant sa vive préoccupation. Il y réaffirme le soutien de l'UE en faveur du degré élevé d'autonomie de Hong Kong, en vertu du principe « un pays, deux systèmes », ainsi que la solidarité de l'UE avec la population de Hong Kong, tout en décidant d'un ensemble coordonné de mesures. Ces actions concernent différents domaines tels que les politiques en matière de visas et de mobilité, les actions en soutien à la société civile notamment via les bourses d'études et les échanges universitaires, les exportations de certains équipements ou technologies sensibles, ainsi que la mise en œuvre des accords d'extradition et autres accords pertinents des États membres avec Hong Kong. Sur ce dernier point, et à la lumière des développements récents, la France a déclaré le 3 août qu'elle ne procèderait pas en l'état à la ratification de l'accord d'extradition signé le 4 mai 2017 entre la France et la Région administrative spéciale de Hong Kong. La France continuera de suivre la situation avec une grande attention, en lien avec ses partenaires européens et y compris dans la perspective des élections législatives dont les autorités hongkongaises ont récemment annoncé le report. Il est essentiel que ces élections puissent se tenir dans les meilleurs délais et dans des conditions permettant une expression démocratique sincère, dans le respect des droits et libertés garantis par la Loi fondamentale de Hong Kong.

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