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Frédérique Dumas
Question N° 30514 au Ministère de l’intérieur (retirée)


Question soumise le 23 juin 2020

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Mme Frédérique Dumas attire l'attention l'attention de M. le ministre de l'intérieur sur le décret n° 2020-487 publié au Journal officiel du  28 avril 2020 portant création d'un traitement automatisé de données à caractère personnel dénommé « système d'information sur les armes ». Décret signé par le Premier ministre et cosignés par lui-même, par la garde des sceaux, par le ministre de l'économie et des finances ainsi qe par le ministre de l'action et des comptes publics. Le décret achève ainsi le travail de transposition de la directive européenne 2017/853 du Parlement européen et du Conseil du 17 mai 2017 modifiant la directive 91/477/CEE du Conseil relative au contrôle de l'acquisition et de la détention d'armes. Mais le décret va beaucoup plus loin que la directive européenne en autorisant par dérogation,  la collecte, la conservation et le traitement de données très sensibles relatives : « 1° Aux opinions politiques, aux convictions religieuses, à l'appartenance syndicale ou à la santé de la personne faisant l'objet de cette enquête administrative ; 2° A la prétendue origine raciale ou ethnique, aux opinions politiques, aux convictions religieuses, à l'appartenance syndicale, à la vie sexuelle ou l'orientation sexuelle d'une personne autre que celle faisant l'objet de l'enquête administrative mentionnée au V, sous réserve que ces données se rapportent à une procédure dans laquelle la personne faisant l'objet de l'enquête administrative est mise en cause. » La CNIL, dans sa délibération n° 2020-001 du 9 janvier 2020 portant avis sur un projet de décret portant création d'un traitement automatisé de données à caractère personnel dénommé « système d'information sur les armes » (demande d'avis n° 19017309) a certes  validé  ce projet de décret mais en soulevant des interrogations et en en formulant des réserves substantielles. En effet, la Commission regrette vivement que le ministère n'ait pas entendu modifier les actes réglementaires encadrant les fichiers interrogés et qui relèvent de sa compétence, afin de mentionner explicitement qu'ils peuvent faire l'objet d'une interrogation par le traitement « SIA ». La Commission s'interroge sur les raisons ayant conduit le ministère à permettre à ces agents d'accéder directement aux données enregistrées dans le traitement et non de les rendre uniquement destinataires des seules données qui leur sont nécessaires, compte tenu de leurs missions, d'une part, et des finalités poursuivies par le traitement « SIA », d'autre part. Plus précisément, concernant les agents de la DGSE, la Commission prend acte des éléments transmis par le ministère selon lesquels ces agents ont vocation à accéder aux données du traitement « SIA » dans le cadre des enquêtes administratives qu'ils réalisent, alors même qu'il a précisé que la réalisation d'enquêtes administratives relatives aux personnes concernées par le « SIA » ne constitue pas une finalité en soi du traitement. Dans ce contexte, elle s'interroge sur la possibilité pour les agents de la DGSE d'accéder directement aux données enregistrées dans celui-ci à des fins de réalisation de ces enquêtes. Par ailleurs, s'agissant de l'accès direct des agents de la DGSI aux données du traitement « SIA », si la Commission prend acte des éléments fournis par le ministère selon lesquels il présente un « intérêt majeur pour évaluer le profil d'un individu », l'acquisition d'une arme pouvant « révéler un attrait pour la violence ou encore indiquer la mise en œuvre ou l'accélération d'actes préparatoires à un passage à l'acte », elle relève également que le traitement poursuit un objectif global de traçabilité des armes à feu dont le prisme n'est pas, selon le ministère, celui du suivi de l'individu. Au regard de ces précisions, la Commission s'interroge sur la possibilité pour les agents de la DGSI d'accéder directement aux informations enregistrées dans le traitement aux fins de suivi des personnes, d'une part, et de renseignement, d'autre part. Après la remise en cause par le Conseil constitutionnel de l'article 3 la loi n° 2019-290 du 10 avril 2019 visant à renforcer et garantir le maintien de l'ordre public lors des manifestations , apres la remise en cause par le Conseil constitutionnel de l'article 13 de la loi n° 2020-546 du 11 mai 2020 prorogeant l'état d'urgence sanitaire et complétant ses dispositions, après la remise en cause par le Conseil constitutionnel le 18 juin 2020 de la mesure phare de la loi contre la haine en ligne donnant aux géants du numérique des quasi pouvoirs de police et de justice. que la majorité s'est empressée d'adopter à la sortie du confinement, après l'élaboration d'un nouveau concept, celui de « soupçons avérés » entraînant sanctions immédiate, aprés donc la remise en cause systématique du rôle et de la place du juge, sanctionnée ainsi de manière constante et enfin après l'adoption d'un texte en première lecture à l'Assemblée nationale visant à faire passer dans la loi ordinaire des dispositions figurant dans la loi sur l'état d'urgence sanitaire, c'est dans l'indifférence générale que le décret n° 2020-487 a pu être élaboré, signé et publié au Journal officiel. Finaliser la transposition de la directive européenne sur l'acquisition des armes de manière légale et le contrôle des armes était nécessaire. À cet égard il est aussi important de préciser, pour qu'il n'y ait pas de confusion, que ce dispositif ne règle par ailleurs en rien la problématique de la détention illégale de fusils d'assaut et autres armes automatiques à caractère militaire. Problématique mise en lumière par les événements récents survenus à Dijon et à Nice, mais aussi dans tous les attentats commandités par Daech. En revanche ce décret, en instituant une possibilité de dérogation permettant la collecte de données personnelles très sensibles, propose un dispositif ne correspondant pas à l'objectif poursuivi, la traçabilité des armes à feu acquises légalement. Aucun criminel, aucun apprenti terroriste ne va se porter légalement acquéreur d'une arme destinée à commettre un crime. Le marché noir des armes est suffisamment accessible et bon marché pour éviter le dispositif « SIA ». Le contexte, actuel est pourtant plus qu'explosif. On ne peut pas d'un côté évoquer l'universalisme et les risques de « séparatisme » et de l'autre mettre en place des outils qui ne peuvent que donner naissance à ce que l'on redoute. Ainsi, elle lui demande dans quelle mesure des données aussi personnelles et sensibles que la conviction religieuse, l'appartenance syndicale, la prétendue origine raciale ou ethnique, la vie ou l'orientation sexuelle, seraient nécessaires pour la constitution du « SIA » . Elle lui demande enfin pourquoi et comment un tel dispositif sans lien avec l'objectif poursuivi a pu être proposé au détour d'un décret, donc d'une disposition de simple nature réglementaire. Elle lui demande s'il est prêt à remettre en cause cette disposition tout simplement inacceptable. Elle lui demande de bien vouloir répondre sur ces points.

Retirée le 21 juin 2022 (fin de mandat)

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