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Hubert Wulfranc
Question N° 31154 au Ministère de l’intérieur (retirée)


Question soumise le 14 juillet 2020

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M. Hubert Wulfranc attire l'attention de M. le ministre de l'intérieur sur la nécessité de réformer l'inspection générale de la police nationale (IGPN), suite aux critiques incessantes dont fait l'objet cette institution accusée, à tort ou à raison, de faire preuve d'indulgence à l'égard des policiers mis en cause dans le cadre de signalements de violences policières ou, plus généralement, d'entorse à la loi. Une réforme nécessaire pour rétablir le lien de confiance permanent qui doit exister entre les forces de l'ordre et la population. Si la critique de l'IGPN est déjà ancienne, celle-ci se fait de plus en plus prégnante depuis la démocratisation des smartphones et autres caméras compactes qui permettent de filmer les interventions des forces de police lors des opérations de maintien de l'ordre. Dépendante du ministère de l'intérieur, l'IGPN est chargée de contrôler les services de police en menant des audits et des visites inopinées, d'améliorer leur fonctionnement par la rédaction d'études et de recommandations et, enfin, de s'assurer que les agents respectent la loi et le code de déontologie de la police nationale. C'est au titre de cette dernière mission qu'elle enquête, sur demande des autorités judiciaires (procureur de la République ou juge d'instruction) ou administratives (ministre de l'intérieur, directeur général de la police nationale, préfet de police ou directeur général de la sécurité intérieur). Dans le cadre des enquêtes administratives, l'IGPN est amenée, le cas échéant, à proposer à la hiérarchie d'un policier incriminé, après investigation, une sanction administrative. Concernant les enquêtes judiciaires, l'IGPN rédige, ou non, selon les délégations, une recommandation à l'intention des juges d'instruction sur la pertinence d'engager des poursuites. Il revient alors au parquet d'apprécier, conformément au principe de l'opportunité des poursuites, les suites à donner aux enquêtes. En tant que service policier, les agents de l'IGPN dépendent du ministère de l'intérieur pour leur avancement. Ceux-ci peuvent être amenés à réintégrer un autre service de la police nationale après leur passage à l'IGPN. Dans ces conditions il n'est pas toujours facile de condamner des collègues de leur propre corporation professionnelle. L'esprit de corps particulièrement important n'est pas sans inciter les agents de l'IGPN à accorder un poids supplémentaire à la version des agents plutôt qu'à celle des victimes potentielles, sur lesquelles reposent déjà la charge de la preuve des faits reprochés. Selon Sébastian Roché, directeur de recherche au CNRS, le fait d'être un policier modifie la façon dont l'enquêteur regarde une vidéo ou lit un témoignage. Ce biais existe pour tous les groupes sociaux. Cette difficulté peut aussi toucher les magistrats qui travaillent quotidiennement avec les policiers, en particulier dans les tribunaux de petites tailles où un certain malaise peut affecter les magistrats susceptibles de condamner des agents qu'ils côtoient. Du fait d'un manque de données, il est impossible de conclure scientifiquement à l'existence d'un biais dans le traitement de l'IGPN ; néanmoins, sans preuve définitive, le doute persiste. Étant donné les conditions de production des rapports de l'IGPN, une partie substantielle de la population pense, non sans raison, que l'IGPN est juge et partie, ce qui est, dans les faits, une réalité. Le rétablissement du lien de confiance entre les citoyens et la police nationale nécessite donc de revisiter le lien structurel de dépendance de l'IGPN avec le ministère de l'intérieur. En effet, cette proximité administrative nuit grandement à la crédibilité de l'IGPN, accusée de ne pas vouloir, ou de ne pas pouvoir, mener des enquêtes jusqu'à leur terme. Aussi, de nombreux chercheurs et juristes, des responsables politiques ou syndicaux proposent de placer l'IGPN sous l'autorité du ministère de la justice. Plusieurs pays européens procèdent déjà de cette façon. La Belgique et le Danemark ont une police des polices indépendante ou placée sous la direction du ministère de la justice. Ainsi la Belgique dispose d'un organisme de contrôle indépendant, le Comité P, conduit par un magistrat, qui est composé de membres nommés par la Chambre des représentants et placé sous la responsabilité du ministère de la justice. Au Danemark, c'est également une entité rattachée au ministère de la justice, qui associe des enquêteurs, des magistrats et des profils issus de la société civile, qui mène les investigations sur les manquements imputés aux forces de l'ordre par les requérants. Si, au Royaume-Uni, la police des polices (l'IOPC) dépend du ministère de l'intérieur, c'est au prix d'une séparation stricte avec la police, les responsables de ce service ayant l'interdiction absolue d'avoir été policier. À l'aune de ces différents exemples européens, il lui demande de préciser quelles évolutions structurelles le Gouvernement envisage pour l'IGPN afin de redonner du crédit à cette institution sévèrement décriée par l'opinion publique.

Retirée le 21 juin 2022 (fin de mandat)

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