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Sophie Beaudouin-Hubiere
Question N° 32038 au Ministère des solidarités


Question soumise le 8 septembre 2020

Mme Sophie Beaudouin-Hubiere attire l'attention de M. le ministre des solidarités et de la santé sur la situation d'un grand nombre de patients subissant des mesures de contention et d'isolement au sein des hôpitaux psychiatriques. La période de confinement qui vient d'être vécue a montré ou rappelé à quel point la solitude et le confinement pouvaient être pénibles et perturbants, surtout lorsqu'ils sont imposés. On imagine sans peine comment sont vécues de longues périodes d'isolement ou de contention imposées à des patients psychiatriques, personnes fragiles et vulnérables par définition. L'instruction ministérielle du 29 mars 2017 relative à la politique de réduction des pratiques d'isolement et de contention a été l'expression d'une véritable prise de conscience et d'une ferme volonté de limiter le recours à ces pratiques. De nombreux indices montrent malheureusement que d'énormes progrès restent à faire. La Contrôleure générale des lieux de privation de liberté a tiré plusieurs fois le signal d'alarme sur ce sujet et a pointé de nombreux abus particulièrement révoltants. Le Conseil constitutionnel vient de confirmer, dans une décision rendue le 19 juin 2020, qu'il s'agit bien de mesures de privation de liberté et que le maintien à l'isolement ou à la contention en psychiatrie au-delà d'une certaine durée ne pouvait se faire sans contrôle judiciaire. La loi doit être changée et une limite de temps doit être inscrite dans cette loi. La Haute Autorité de santé avait émis en février 2017 un certain nombre de recommandations pour limiter le recours à ces mesures, qui doivent rester exceptionnelles et de durée limitée : 12 heures pour l'isolement et 6 heures pour la contention. Ne conviendrait-il pas que ces recommandations de la HAS et ces limites, très inégalement respectées dans les faits, soient intégrées dans la future loi qui sera prochainement proposée au Parlement ? Elle souhaiterait connaître sa position sur ce sujet et quelles solutions concrètes il envisage pour que les contrôles, notamment ceux effectués en principe par les ARS, soient beaucoup plus stricts afin que la loi et les droits humains soient respectés.

Réponse émise le 3 novembre 2020

L'isolement et la contention en psychiatrie sont encadrés par l'article 72 de la loi de modernisation de notre système de santé du 26 janvier 2016. L'action 22 de la feuille de route santé mentale et psychiatrie officialisée en juin 2018, prévoit de réduire le recours aux soins sans consentement, à l'isolement et à la contention. Cette démarche s'inscrit dans le cadre d'une politique déterminée de prévention, de réduction et de contrôle des pratiques d'isolement et de contention, partagée au niveau européen. Elle s'est traduite en France par le déploiement depuis 2016, sous l'égide du centre collaborateur de l'Organisation mondiale de la santé (OMS) pour la recherche et la formation en santé mentale de Lille, de l'initiative de l'OMS QualityRights, basée sur la Convention des Nations Unies relative aux Droits des Personnes Handicapées (CIDPH), et par les travaux du comité de pilotage de la psychiatrie, qui ont permis d'engager un plan d'actions de réduction déterminée des mesures d'isolement, de contention et de soins sans consentement les plus attentatoires aux droits des patients. L'article L. 3222-5-1 du code de santé publique dispose ainsi que la contention, comme l'isolement, « sont des pratiques de dernier recours » et qu'il « ne peut y être procédé que pour prévenir un dommage immédiat ou imminent pour le patient ou autrui, sur décision d'un psychiatre, prise pour une durée limitée ». Il prévoit aussi la création d'un registre dans chaque établissement de santé autorisé en psychiatrie, afin de tracer chaque mesure d'isolement et de contention. Or, par décision n° 2020-844 question prioritaire de constitutionnalité du 19 juin 2020, le Conseil Constitutionnel a décidé que cet article L. 3222-5-1 du code de la santé publique, dans sa rédaction résultant de la loi n° 2016-41 du 26 janvier 2016 de modernisation de notre système de santé, était contraire à la Constitution et qu'il devait être abrogé. Cette décision prendra effet au 31 décembre 2020 (date de l'abrogation des dispositions contestées). Dans le prolongement de l'action déjà engagée pour réduire l'isolement et la contention, le Gouvernement entend donner suite à cette décision d'inconstitutionnalité, en travaillant à une modification de la législation à l'occasion de l'examen du projet de loi de financement de la sécurité sociale pour 2021.

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