Photo issue du site de l'Assemblée nationale ou de Wikipedia

Valérie Beauvais
Question N° 32228 au Ministère auprès de la ministre des armées


Question soumise le 22 septembre 2020

Mme Valérie Beauvais attire l'attention de Mme la ministre déléguée auprès de la ministre des armées, chargée de la mémoire et des anciens combattants, sur l'intoxication aux métaux lourds des anciens combattants. Le rôle de l'uranium appauvri dans le syndrome de la guerre du Golfe est un sujet de controverse. Il a pourtant été établi que cette substance a été utilisée dans l'armement pour ses propriétés physiques, notamment dans la composition des obus flèches « A10 » utilisés lors de la guerre du Golfe. Trois anciens combattants du 4ème régiment de dragons qui ont participé aux opérations militaires lors de ce conflit armé sont décédés de manière brutale avant leurs 60 ans, et ce sans explication médicale. Depuis 2003, l'Union fédérale des associations françaises d'anciens combattants (UFAFAC) sollicite, au travers de l'adoption de motions, la reconnaissance de ce syndrome. À l'appui de sa demande, l'UFAFAC a d'ailleurs produit deux rapports, l'un américain, l'autre italien, établissant l'existence de ce syndrome. En conséquence, elle lui demande de bien vouloir lui indiquer si elle entend reconnaître le syndrome de la guerre du Golfe et donc l'intoxication à laquelle les forces françaises armées ont été exposées.

Réponse émise le 15 décembre 2020

Les opérations « Bouclier du désert » et « Tempête du désert » ont été menées contre l'Irak par une coalition de 35 pays dont les troupes venaient majoritairement des États-Unis (700 000), de Grande-Bretagne (50 000) et de France (25 000). Durant ce conflit, les combattants ont été exposés à plusieurs reprises à des agents nocifs, connus ou inconnus (fumées des puits de pétrôle, gaz de combat, munitions à l'uranium appauvri…). En outre, ces opérations, menées dans des conditions climatiques rigoureuses, ont été source d'un stress psychologique important. À la suite du conflit, un certain nombre de plaintes ont été enregistrées aux Etats-Unis puis en Grande-Bretagne et dans une moindre mesure en France, menant à la description d'une pathologie floue appelée « syndrome de la guerre du Golfe ». Les principaux symptômes décrits correspondent à une fatigue chronique, des arthralgies, mais aussi à des troubles de l'humeur ou de la mémoire. Cependant, l'analyse de ces signes ne fait pas apparaître de manière évidente la notion d'un syndrome unique spécifique de la guerre du Golfe et aucune description proposée ne fait consensus au sein de la communauté scientifique. L'absence de prélèvements d'échantillons environnementaux durant la guerre rend en outre difficile l'établissement d'un lien de causalité entre les symptômes allégués et l'exposition à un agent nocif, faute de pouvoir en identifier clairement la teneur, la concentration et la durée d'exposition. De multiples travaux ont été engagés afin de répondre aux attentes légitimes des combattants de la guerre du Golfe. Une mission d'information parlementaire, menée par les députés de la commission de la défense nationale et des forces armées a été créée. Un observatoire de la santé des vétérans (OSV) [1], chargé de la surveillance médicale des anciens militaires a été mis en place et un groupe de travail chargé d'analyser les données sanitaires relatives aux anciens combattants français de la guerre du Golfe [2] a été constitué. Enfin, une enquête exhaustive a été réalisée par l'INSERM entre 2002 et 2004 [3] sur une population de 5 666 personnes ayant participé aux opérations pendant la guerre du Golfe. L'ensemble de ces travaux n'a mis en évidence aucune augmentation significative de la prévalence de certaines maladies qui pourraient être imputables à une exposition à des agents toxiques, et ce quels que soient l'armée ou le service d'appartenance. Dans le cadre de l'enquête de l'INSERM, il était également proposé aux militaires qui le souhaitaient de bénéficier d'un bilan complémentaire hospitalier avec recherche d'uranium appauvri dans les urines, cette recherche étant pertinente dans les dix ans qui suivent une exposition, du fait de la persistance prolongée de l'uranium dans l'organisme. L'enquête a conclu qu'aucun personnel militaire, y compris les sapeurs du génie ayant été potentiellement les plus exposés, n'a présenté de signes d'uranium appauvri dans les urines. Ces recherches n'ont pas montré d'augmentation des atteintes rénales [4] chez les militaires qui auraient pu être exposés à l'uranium appauvri ou à d'autres métaux lourds. Ainsi, les multiples travaux réalisés n'ont pas permis d'objectiver un « syndrome de la guerre du Golfe », ni conduit à identifier d'anomalie statistique en matière de pathologie tumorale, presque 30 ans après l'exposition initiale. La reconnaissance d'une intoxication aux métaux lourds et en particulier à l'uranium appauvri n'est donc pas envisagée. Cependant, l'observatoire de la santé des vétérans continue d'exercer une veille scientifique active et soutenue sur ces questions. [1] Décret n° 2004-524 du 10 juin 2004 portant attributions et organisation de l'observatoire de la santé des vétérans. [2] Rapport de mission du groupe de travail chargé d'analyser les données sanitaires relatives aux anciens combattants français de la guerre du Golfe, INSERM, 2001. [3] « L'enquête française sur la guerre du Golfe et ses conséquences sur la santé », Roger Salamon, INSERM, 2004. [4] L'uranium appauvri est un métal lourd au même titre que le plomb, le cadmium ou le tungstène. Son organe cible principal est le rein. L'altération rénale est le marqueur le plus précoce d'une intoxication à l'uranium appauvri.

Aucun commentaire n'a encore été formulé sur cette question.

Cette législature étant désormais achevée, les commentaires sont désactivés.
Vous pouvez commenter les travaux des nouveaux députés sur le NosDéputés.fr de la législature en cours.