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Brigitte Kuster
Question N° 32412 au Ministère de la culture


Question soumise le 22 septembre 2020

Mme Brigitte Kuster alerte Mme la ministre de la culture sur la décision rendue par la Cour de justice de l'Union européenne concernant la rémunération par les organismes de gestion collective européens des artistes-interprètes pour les phonogrammes provenant de pays non-signataires de traités internationaux permettant la réciprocité des droits, c'est-à-dire essentiellement étasuniens. Cette décision, qui contraindrait les organismes de gestion collective européens à réduire de plus de 35 % les budgets consacrés à l'aide à la création et à l'emploi, fait peser un risque de pertes pour les artistes-interprètes français de l'ordre de 12 à 15 millions d'euros par an. Aussi, alors même que les artistes-interprètes ont déjà connu, avec l'arrivée du numérique, une baisse de leurs revenus, puis plus récemment encore avec la crise du covid-19, elle lui demande les mesures qu'elle entend prendre, au niveau européen avec ses collègues des autres États-membres, pour garantir la réciprocité au travers de traités internationaux.

Réponse émise le 5 janvier 2021

Par son arrêt du 8 septembre 2020, la Cour de justice européenne a décidé qu'il n'appartient pas aux législateurs nationaux d'évaluer la répartition des droits voisins au titre de la rémunération équitable vers les ressortissants d'États tiers. Une telle limitation de l'exercice du droit ne peut en effet résulter que d'un acte législatif européen. Ainsi, un État membre ne peut limiter de lui-même, sans que le droit de l'Union ne l'y autorise spécifiquement, le droit à rémunération équitable des ayants droit issus de pays tiers qui n'appliquent pas ce droit sur leur territoire. Cette décision vient bouleverser la pratique suivie jusqu'ici en France en application du principe de réciprocité matérielle des conventions internationales relatives aux droits voisins, puisque les droits à rémunération équitable collectés sur les phonogrammes issus d'États tiers ayant notifié des réserves à ces conventions étaient considérés comme des « irrépartissables juridiques ». Il en allait ainsi des collectes liées à la diffusion d'enregistrements américains, les États-Unis n'ayant pas signé la Convention de Rome de 1961 sur la protection des artistes-interprètes et exécutants. L'arrêt de la Cour de justice remet en cause l'usage de ces sommes « irrépartissables » qui apportent aujourd'hui une contribution essentielle à la production artistique française et à la vitalité artistique des territoires, les organismes de gestion collective d'artistes et de producteurs ayant l'obligation d'utiliser ces sommes à destination d'aides à la création et à la diffusion, tels que des festivals. Cette remise en cause, dans le contexte économique très difficile de la pandémie de Covid-19, est particulièrement lourde de conséquences. Le ministère de la culture se félicite ainsi de l'adoption de l'article 35 de la loi n° 2020-1508 du 3 décembre 2020 portant diverses dispositions d'adaptation au droit de l'Union européenne en matière économique et financière qui vise à sécuriser, pour le passé, le système français d'aides à la création et à la production musicale. Cet article valide en effet l'utilisation des sommes attribuées par le passé par les organismes de gestion collective au titre de l'aide à la création. Ce faisant, il répond à un motif d'intérêt général manifeste, qui est la promotion de la diversité culturelle et artistique. Pour l'avenir, le ministère de la culture a déjà fait part de sa préoccupation à la Commission européenne et les autorités françaises ont pris des initiatives auprès des autres États membres et des instances européennes, afin de conforter le dispositif français de rémunération équitable.

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