Photo issue du site de l'Assemblée nationale ou de Wikipedia

Alain David
Question N° 33126 au Ministère auprès du premier ministre


Question soumise le 20 octobre 2020

M. Alain David attire l'attention de Mme la ministre déléguée auprès du Premier ministre, chargée de l'égalité entre les femmes et les hommes, de la diversité et de l'égalité des chances, sur l'annonce d'une procédure de marché public concernant le 3919, ligne d'écoute nationale Violences femmes info. Cette annonce est très inquiétante pour la Fédération nationale solidarité femmes (FNSF) et risque de fragiliser la qualité de la prise en charge des femmes victimes de violence sur l'ensemble du territoire. En effet, la FNSF, qui gère cette ligne d'écoute depuis 1992, s'appuie localement sur un réseau de 73 associations en capacité de prendre en charge les femmes victimes de violence de manière efficace et adaptée. C'est toute cette synergie opérante qui risque d'être anéantie par la mise en concurrence liée au marché public. Pourtant, l'expertise de la FNSF dans l'écoute des femmes victimes de violence est à haute valeur ajoutée. Elle est issue d'une expérience sur le terrain de plus de 30 ans et s'appuie sur des professionnels formés et qualifiés. Cette expertise a été saluée par le Président de la République lui-même face à la capacité des équipes du 3919 à faire face, avec engagement et professionnalisme, à l'afflux des appels durant la période de confinement suite à la crise sanitaire. Face à cet afflux, le Gouvernement envisage d'ailleurs d'étendre l'écoute 24 heures sur 24, projet sollicité par la FNSF depuis les années 1990, qui s'est déclarée prête à satisfaire cette proposition sous réserve de l'obtention de subventions supplémentaires via un nouveau contrat pluriannuel d'objectifs et de moyens (CPOM). Le 3919 est un véritable dispositif d'intérêt général dont la plupart des appels nécessitent une longue écoute, une formation et une qualification importante, difficilement quantifiable dans un cahier des charges forcément sensible aux coûts. Ainsi, et dans le cadre de la priorité quinquennale donnée à la lutte contre les violences faites aux femmes, il lui demande si le Gouvernement entend renoncer à cette procédure de marché public, poursuivre le CPOM avec la FNSF et renforcer la subvention qui lui est allouée afin de lui permettre l'extension de l'écoute 24 heures sur 24.

Réponse émise le 15 décembre 2020

La Fédération Nationale Solidarité Femmes (FNSF) constitue depuis plusieurs années un partenaire privilégié de l'Etat en matière de lutte contre les violences au sein du couple. Il n'entend nullement remettre en cause cet engagement indéniable, ni la qualité de ses interventions, constamment soutenues. Il a du reste été présent à ses côtés pour soutenir cette action depuis sa création, ainsi que pour accompagner l'évolution du dispositif d'écoute vers un numéro court, plus facilement identifiable auprès des femmes victimes de violences, porté par la seule fédération via une plateforme nationale. L'Etat l'a d'ailleurs soutenu systématiquement par des subventions en constante augmentation. Toutefois, comme indiqué dès fin 2019 à la FNSF, il n'est pas possible juridiquement, au vu des règles de droit de la commande publique et européennes, de soutenir ce dispositif par subvention aussi bien dans le cadre d'un appel à projets que par conventionnement. Dès lors que l'Etat endosse le pilotage et la responsabilité d'un dispositif d'écoute des femmes victimes de violence, qu'il en définit les besoins à satisfaire et les modalités (notamment un fonctionnement 24h/24, l'accessibilité aux personnes en situation de handicap) et qu'il le financera en totalité, le marché public est le vecteur de l'action. Dans le cas contraire, le risque de requalification de la subvention en contrat serait important, avec un remboursement de la subvention. Cela emporterait également, à la fois pour les pouvoirs publics et l'association, des conséquences lourdes, sur les plans fiscal, pénal et civil. En l'espèce, le recours au marché public n'est pas un choix mais s'impose comme une conséquence. Cela ne signifie nullement une contestation des droits et propriétés dont l'association est détentrice, s'agissant des aspects matériels ou immatériels. Il serait quelque peu paradoxal d'en conclure que l'Etat, en se conformant au droit en vigueur, entre dans une logique mercantile quant à la prise en charge des femmes victimes de violences et privatise ce dispositif dont le financement sera assuré à 100% par l'Etat. Il est d'ailleurs noté que plusieurs dispositifs d'écoute téléphoniques dans le domaine des services sociaux relèvent déjà de marchés publics pilotés par l'Etat. Il s'agit par exemple du marché des numéros 116 000 pour les enfants disparus, 116 006 à destination des victimes ou encore de la plateforme 360 dédiée aux personnes en situation de handicap. Attentif par ailleurs aux risques soulevés par l'honorable parlementaire, l'Etat entend veiller au contraire via ce marché réservé aux acteurs de l'économie sociale et solidaire, à ce que cette future plateforme réponde à des hautes exigences qualitatives en termes de fonctionnement. Le Ministère et ses services seront ainsi très vigilants sur la qualité des projets présentés, notamment pour la formation des écoutantes et écoutants sur les violences, afin de renforcer l'écoute et l'accompagnement de ce public. La FNSF peut naturellement candidater dans le cadre de la consultation qui sera lancée à cet effet, au vu en particulier de l'antériorité de son action et des compétences spécifiques développées et capitalisées. Il est enfin signalé que l'Etat est interpellé sur les modalités de fonctionnement de ce dispositif et, tout récemment, lorsque la plateforme d'écoute a cessé son activité pendant quelques jours lors de la crise sanitaire et y a répondu en apportant une contribution financière complémentaire répondant aux besoins de la plateforme pendant cette période. Dans ce contexte, les pouvoirs publics n'entendent donc pas se défausser de leurs responsabilités mais au contraire accroitre leur soutien à l'écoute des femmes victimes de violences.

Aucun commentaire n'a encore été formulé sur cette question.

Cette législature étant désormais achevée, les commentaires sont désactivés.
Vous pouvez commenter les travaux des nouveaux députés sur le NosDéputés.fr de la législature en cours.