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Thomas Gassilloud
Question N° 33573 au Ministère de l’économie (retirée)


Question soumise le 3 novembre 2020

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M. Thomas Gassilloud interroge Mme la ministre déléguée auprès de la ministre de la transition écologique, chargée du logement, sur les possibilités de mise en œuvre de cautions hypothécaires dans le cadre de cessions de parts sociales en SCIA (société civile immobilière d'attribution) ou SCCC habitat participatif (société civile coopérative de construction). Pour rappel l'habitat participatif est une démarche citoyenne qui permet à des personnes physiques de s'associer, le cas échéant avec des personnes morales, afin de participer à la définition et à la conception de leurs logements et des espaces destinés à un usage commun, de construire ou d'acquérir un ou plusieurs immeubles destinés à leur habitation et, le cas échéant, d'assurer la gestion ultérieure des immeubles construits ou acquis. Cette démarche favorise la construction et la mise à disposition de logements, ainsi que la mise en valeur d'espaces collectifs dans une logique de partage et de solidarité entre habitants. L'autopromotion de logements et les coopératives d'habitants sont encore très émergentes en France, mais reçoivent un soutien croissant des collectivités locales et des organismes de logement social, s'inscrivant dans une volonté plus large de « favoriser l'accès de tous à un logement digne et abordable ». Pourtant, les projets d'habitats participatifs structurés en SCIA ou en SCCC maintenues en jouissance rencontrent des difficultés autour de la mise en œuvre des mécanismes de caution hypothécaire. En effet, depuis les années 1980, les statuts juridiques de la SCIA et de la SCCC sont utilisés par les groupes d'habitants qui souhaitent construire (ou acheter et rénover) en autopromotion, et pour la plupart rester ensuite en attribution en jouissance dans le cadre d'un projet d'habitat solidaire et écoresponsable, faute de structure juridique mieux adaptée. Ces statuts ont largement inspiré ceux des SAA (sociétés d'attribution et d'autopromotion), une des deux formes juridiques instituées par l'article 47 de la loi Alur (loi du 24 mars 2014) qui est venue marquer la reconnaissance par l'État de l'habitat participatif (articles L. 200-1 et suivants du CCH), notamment pour son intérêt en termes d'innovation sociale. Depuis cette date, les SAA loi Alur ne pouvant être utilisées du fait de l'absence de garantie financière telle que prévue par le texte de loi, ses décrets d'application et les circulaires qui en découlent, beaucoup de projets d'habitat participatif continuent à se monter en SCIA et quelques-uns en SCCC conformément aux possibilités ouvertes par le CCH (articles L. 212-1 et suivants pour les SCIA, L. 213-1 et suivants pour les SCCC). Malheureusement, les habitats participatifs en autopromotion, désireux de se maintenir en jouissance après la construction, rencontrent des difficultés récurrentes pour obtenir les emprunts bancaires nécessaires aux opérations d'achat, de construction ou de rénovation. Les établissements bancaires, habitués en effet à la propriété classique, sont réticents quant à ces configurations de propriété sous forme de parts sociales donnant vocation à la jouissance exclusive d'un lot et à sa pleine propriété en cas de dissolution. Ces SCIA ainsi que les SCCC sont pourtant : premièrement, des sociétés civiles immobilières de copropriété visées à l'article 1 655 ter du code général des impôts, bénéficiant d'un état descriptif de division et d'un règlement de jouissance (l'équivalent d'un règlement de copropriété) ; secondement, des sociétés fiscalement transparentes, n'ayant pas de personnalité distincte de leurs membres pour l'application des impôts directs, des droits d'enregistrement, de la taxe de publicité foncière ainsi que des taxes assimilées. Or les établissements bancaires, soit refusent l'examen des dossiers de demande d'emprunt, soit cherchent à orienter les futurs habitants sur une dissolution rapide en copropriété et peuvent conditionner leurs accords de prêt à cette disposition, afin de se trouver rapidement dans un schéma de propriété classique. Les cautions bancaires habituelles (caution logement ou SACCER par exemple) sont la plupart du temps refusées, générant un blocage au niveau des comités d'engagement, même lorsque les agences qui ont monté les dossiers ont donné des avis favorables. Les établissements bancaires ne peuvent en effet prendre d'hypothèque directe sur le logement de l'associé concerné, celui-ci ne détenant que des parts sociales puisque c'est la société qui est détentrice du titre foncier. Pour les groupes projets désireux de fonder un habitat participatif, la possibilité de maintenir cette propriété collective est pourtant une garantie essentielle de pérennité dans le temps du fait des possibilités qu'elle maintient en termes de droit de préemption, d'agrément des nouveaux entrants et de gouvernance collective que ne permettent pas le régime de la copropriété. Pour pallier le manque de garanties pouvant être consenties aux banques dans le cadre, notamment, du financement du prix de cession des parts de ces sociétés, les notaires ont proposé aux groupes d'introduire dans les statuts de ces sociétés, en sus du nantissement des parts, la faculté pour les SCIA et les SCCC de consentir une garantie de type caution hypothécaire portant sur le lot dont l'acquisition des parts donne droit à la jouissance. Cette garantie hypothécaire, consentie par la société pour faciliter la cession des parts de ses associés, est prévue par le code de la construction de l'habitation. Aux termes de l'article L. 212-7 du CCH, les sociétés de copropriété peuvent en effet donner caution hypothécaire pour la garantie des emprunts contractés par les associés, pour leur permettre de satisfaire aux appels de fonds de la société nécessaires à la réalisation de l'objet social, mais également pour permettre aux acquéreurs des parts sociales de payer le prix de cession, à concurrence des appels de fonds déjà réglés à la société et, s'il y a lieu, de payer les appels de fonds qui restent encore à régler. D'autres clauses sont également prévues dans les statuts, visant à rassurer les banques, notamment en cas de défaillance de l'emprunteur, inscrivant une exception statutaire pour les établissements financiers qui pourront récupérer d'emblée le bien en pleine propriété et sans clause d'agrément, le tout afin de faciliter l'obtention de financements bancaires et ainsi permettre la transmission des parts de ces sociétés. Ces garanties, et notamment le cautionnement hypothécaire, sont donc primordiales pour le bon fonctionnement des sociétés de type SCIA et SCCC et la cession de leurs parts. Ces dispositions, sans lever les réticences initiales des établissements bancaires, permettent souvent d'obtenir une réponse positive, l'existence d'une caution hypothécaire sur le logement objet de l'emprunt, faisant poids dans la décision finale, lorsque le montage est compris et validé par la banque. Mais si cela fonctionne pour les prêts initiaux des associés, des difficultés surgissent lors des cessions ultérieures. La doctrine administrative prévoit en effet actuellement que les sociétés constituées en vue de l'attribution d'immeubles aux associés par fractions divises visées aux articles L. 212-1 à L. 212-13 du CCH perdent le bénéfice de la transparence fiscale si elles consentent une caution hypothécaire dans le cadre d'une cession (voir BOFIP BOI-ENR-AVS-40-20 n° 10). Les notaires spécialisés interrogés sur cette problématique ne comprennent pas sur quels fondements juridiques cette disposition du code des impôts vient en contradiction avec le code la construction. Il semblerait que soit considéré, du point de vue fiscal, que la réalisation d'une cession dont elle se porte caution, dans une SCIA ou une SCCC maintenue en jouissance, génère l'enregistrement de cette société comme ayant une activité économique, ce qui n'est pas le cas des projets participatifs au sein desquels les associés ont leur résidence principale et peuvent, du fait des évènements de la vie, avoir simplement besoin de vendre. Cette doctrine administrative est en parfaite contradiction avec la situation des habitats participatifs, dont l'objet n'est évidemment pas d'assurer une quelconque activité économique, mais simplement de gérer un habitat commun entre plusieurs foyers. De fait, la perte de la transparence fiscale, contradictoire avec leur objet social, génère de multiples difficultés et complexités pour les projets participatifs (impossibilité de mise à disposition gratuite des logements au profit de leurs associés notamment). Cette situation aboutit à ne plus leur permettre de mobiliser de caution hypothécaire au fil de la vie de la société, ce qui pose un problème majeur pour ces projets. Ils peuvent se constituer, soutenant les emprunts de leurs membres, via une caution hypothécaire, au démarrage des projets, mais celle-ci ne peut plus ultérieurement être mobilisée, bloquant ainsi les mutations. Elle met donc déjà en grande difficulté les projets installés, certains depuis plus de 30 ans sous ce statut (plus d'une centaine soit près de 700 logements) qui doivent faire face à des besoins de revente d'ordre privée (du fait de séparation conjugale, de mutation professionnelle ou de décès). Lors de ces cessions, les candidats à l'achat sont présents mais les cessions peuvent échouer car les candidats, bien qu'ayant des dossiers qui leur permettraient un achat classique, voient leurs demandes de prêts refusées de par les spécificités de ce montage en SCIA attribuée en jouissance, par insuffisance de garanties jugées valables par les établissements bancaires. En effet, si le mécanisme de caution hypothécaire ne peut plus être mobilisé dans ces contextes, il ne reste plus comme seule possibilité que de trouver des acquéreurs en capacité d'acheter le lot vendu sur fonds propres ou avec des garanties personnelles, excluant de fait toutes les personnes ayant besoin de souscrire un emprunt immobilier pour acquérir leur résidence principale, soit la quasi-totalité des jeunes ménages. Dès lors, la situation est définitivement bloquée, générant une grave impasse et portant atteinte aux objectifs de mixité sociale et intergénérationnelle au cœur de ces montages. Ainsi M. le député souhaiterait savoir si, pour rendre possible les emprunts bancaires nécessaires aux acquéreurs, lors des cessions de parts de ces sociétés ouvrant droit à l'attribution en jouissance du lot d'habitation qui lui est rattaché, il serait possible de faire modifier la doctrine fiscale qui, actuellement, leur fait perdre la transparence fiscale si elles consentent une caution hypothécaire sur le lot visé par l'emprunt (caution hypothécaire pourtant autorisée pour leurs statuts par le CCH). Cette adaptation pour les SCIA et SCCC, souvent créées pour 99 ans dans le cadre de l'habitat participatif, serait en effet cruciale pour leur permettre de gérer les mutations générées par les évènements de vie (mutation professionnelle, décès, séparation) conformément à leur objet social. Il souhaite connaître son avis sur le sujet.

Retirée le 21 juin 2022 (fin de mandat)

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