Photo issue du site de l'Assemblée nationale ou de Wikipedia

Olivier Marleix
Question N° 347 au Ministère de la justice


Question soumise le 1er août 2017

M. Olivier Marleix appelle l'attention de Mme la garde des sceaux, ministre de la justice, sur le décret n° 2017-867 du 9 mai 2017 relatif au répertoire numérique des représentants d'intérêts. La rédaction de ce décret pose un grave problème d'interprétation de la volonté du législateur par le Gouvernement. Pris en application de l'article 25 de la loi n° 2016-1691 du 9 décembre 2016 relative à la transparence, à la lutte contre la corruption et à la modernisation de la vie économique qui instaure notamment les articles 18-2 et 18-3 dans la loi n° 2013-907 du 11 octobre 2013 relative à la transparence de la vie publique, ce décret apporte dans son article 1er des « précisions » relatives à « certaines notions » qui sont en réalité des limitations voire des exonérations massives du champ d'application de la loi. Ainsi l'ajout du paragraphe « Ne constitue pas une entrée en communication au sens de l'alinéa précédent le fait de solliciter, en application de dispositions législatives ou réglementaires, la délivrance d'une autorisation ou le bénéfice d'un avantage dont l'attribution constitue un droit pour les personnes qui remplissent les conditions légales pour l'obtenir, ainsi que le fait de présenter un recours administratif ou d'effectuer une démarche dont la réalisation est, en vertu du droit applicable, nécessaire à la délivrance d'une autorisation, à l'exercice d'un droit ou à l'octroi d'un avantage » ne résulte ni de la volonté du législateur, ni d'une habilitation donnée par celui-ci au Gouvernement (contrairement aux cas des articles 18-3, 18-5, 18-6, 18-8 par exemple). En effet, l'article 18-2 de loi relative à la transparence de la vie publique vise expressément la notion « d'entrée en communication » comme facteur déclenchant de la soumission des représentants d'intérêts à son champ d'application de la loi et n'a nullement prévu d'en exclure ceux qui le font pour en bénéficier du simple fait qu'ils y ont droit ou qu'ils en tirent un avantage. La volonté du législateur est même exactement inverse à cette rédaction puisque ce dernier entend justement soumettre ces « entrées en communications » au contrôle de la HATVP. Le législateur n'a pas entendu ouvrir d'autres exceptions que celles qu'il a lui-même définies et n'a donné aucune délégation au pouvoir réglementaire pour préciser ces dispositions. Par ailleurs, il conviendrait de connaître l'avis ou les motivations données par la section de l'intérieur du Conseil d'État pour justifier ou non une telle rédaction gouvernementale. Cette rédaction vient en outre nuire à plusieurs objectifs dont celui à valeur constitutionnelle de clarté et d'intelligibilité des textes par la création d'un conflit d'interprétation, mais également à l'objectif de confiance dans la vie publique dans la mesure où le Gouvernement n'a pas respecté la volonté exprimée dans la loi. Enfin cette interprétation restrictive prête d'autant plus à interrogations que sa publication est intervenue peu de temps après le second tour de l'élection présidentielle et peu avant la formation d'un nouveau Gouvernement. C'est pourquoi il lui demande si elle compte abroger ces dispositions contra legem.

Réponse émise le 26 mars 2019

Le répertoire numérique public, tenu par la Haute Autorité pour la transparence de la vie publique (HATVP), assure l'information des citoyens sur les relations entre les représentants d'intérêts et les pouvoirs publics. Il permet ainsi aux citoyens de mieux connaître les éléments qui concourent à l'élaboration d'une décision publique. Si le texte impose des obligations aux représentants d'intérêts, il apporte également une première reconnaissance de cette activité et des professionnels qui l'exercent. L'obligation pour les représentants d'intérêts de communiquer certaines informations à la HATVP (sur leur organisation, leurs actions de lobbying et les moyens qui y sont consacrés) est limitée par le législateur aux personnes ayant pour activité principale ou régulière d'influer sur la décision publique en entrant en communication avec les pouvoirs publics. Les dispositions du troisième alinéa de l'article 1 du décret n° 2017-867 du 9 mai 2017 relatif au répertoire numérique des représentants d'intérêts explicitent les cas qui, par nature, ne relèvent pas de l'activité de représentation d'intérêts au sens des dispositions des articles 18-1 et suivants de la loi n° 2013-907 du 11 octobre 2013 relative à la transparence de la vie publique issues de l'article 25 de la loi n° 2016-1691 du 9 décembre 2016 relative à la transparence, à la lutte contre la corruption et à la modernisation de la vie économique. Ces précisions ont été apportées à la suite des consultations menées lors de l'élaboration du projet de décret afin d'éviter toute ambiguïté sur le fait que « solliciter, en application de dispositions législatives ou réglementaires, la délivrance d'une autorisation ou le bénéfice d'un avantage dont l'attribution constitue un droit pour les personnes qui remplissent les conditions légales pour l'obtenir, ainsi que le fait de présenter un recours administratif ou d'effectuer une démarche dont la réalisation est, en vertu du droit applicable, nécessaire à la délivrance d'une autorisation, à l'exercice d'un droit ou à l'octroi d'un avantage » ne constitue pas une entrée en communication en vue d'influer sur une décision publique dès lors que les personnes concernées se contentent d'exercer un droit dans le cadre de dispositifs existants. Il s'agit ainsi de rappeler qu'une personne n'exerce pas une activité de représentation d'intérêts lorsqu'elle agit comme tout usager, dans le but par exemple d'exercer des démarches administratives ou de faire valoir ses droits et non d'influer sur la décision publique. Dans son avis public du 5 avril 2017 sur le projet de décret, la HATVP a d'ailleurs estimé que les précisions ainsi apportées permettent « de déterminer précisément quelles actions devront être considérées comme de la représentation d'intérêts et de préserver un équilibre entre l'efficacité du dispositif et le bon fonctionnement des institutions ». Ces précisions renforcent ainsi la sécurité juridique du dispositif sans ajouter ni retrancher à la loi. Il n'y a dès lors pas lieu d'abroger ces dispositions.

Aucun commentaire n'a encore été formulé sur cette question.

Cette législature étant désormais achevée, les commentaires sont désactivés.
Vous pouvez commenter les travaux des nouveaux députés sur le NosDéputés.fr de la législature en cours.