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Romain Grau
Question N° 3479 au Ministère du travail


Question soumise le 5 décembre 2017

M. Romain Grau attire l'attention de Mme la ministre du travail sur l'absence de délai de déclaration pour les créances salariales dans le cadre des procédures de liquidation d'entreprises. Dans le cadre de ces procédures, les fournisseurs bénéficient d'un délai de 15 jours à dater de la désignation du liquidateur par le tribunal de commerce, pour faire valoir auprès de lui le montant des créances dont ils sont victimes. À défaut aucun délai n'est prévu en ce qui concerne les créances salariales que pourraient détenir certains salariés de l'entreprise. On assiste ainsi à certaines procédures prud'homales ouvertes plusieurs mois après la liquidation, qui privent le liquidateur et les assurances garanties salaire (AGS) appelés à la cause de tout éléments opposables aux demandes formulées par le salarié. Les prud'hommes sont donc appelés à juger sur simple début de preuve apporté au débat par le demandeur sans que le contradicteur ait les moyens d'opposer le moindre document, l'entreprise liquidée n'existant plus. Ces procédures se retournent très souvent en défaveur des AGS. Il souhaiterait savoir, afin de sécuriser ces demandes, s'il est possible d'appliquer les mêmes délais pour les déclarations de créances salariales que les délais existant pour les créances des fournisseurs.

Réponse émise le 2 avril 2019

Dès l'ouverture d'une procédure collective, la connaissance du passif est nécessaire pour apprécier la situation économique du débiteur. C'est pourquoi les créanciers ont l'obligation de déclarer leurs créances dans un délai de deux mois à compter de la publication au BODACC du jugement d'ouverture ou, pour les créanciers munis d'une sûreté réelle publiée ou liés au débiteur par un contrat publié, à compter de la réception de l'avis du mandataire judiciaire. Cette déclaration ouvre le droit au créancier de participer aux distributions dans le cadre des opérations de liquidation judiciaire. Les créanciers salariés sont dispensés par la loi, de déclarer leurs créances. Ils n'encourent, par conséquent, pas le risque de forclusion. Cette dispense constitue donc une mesure de protection des créances salariales, justifiées par leur caractère alimentaire. Les créances salariales sont vérifiées et inscrites par le mandataire de justice ou le liquidateur sur le relevé des créances conformément aux articles L.625-1 et R. 625-2 du code de commerce. Ce relevé visé par le juge-commissaire, est opposable aux salariés et fixe leurs droits à l'égard de l'association pour la gestion du régime de garantie des créances des salariés (l'AGS). Le relevé de créances doit être établi dans des délais très brefs par le mandataire de justice ou le liquidateur : dans les 10 jours ou les trois mois suivant le jugement d'ouverture, en fonction de la nature de la créance salariale considérée. Les salariés sont informés personnellement du sort de leur créance. Les salariés peuvent contester, devant le conseil de prud'hommes, le relevé de créances salariales en cas d'omission ou de rejet de l'une de leurs créances ou en raison de leur admission partielle. Le délai de contestation est de deux mois à compter de la publication du relevé de créances salariales dans un journal d'annonces légales, à peine de forclusion. Cette forclusion n'est toutefois pas opposable aux salariés qui contestent la régularité de leur licenciement. Par ailleurs, les salariés omis ayant laissé passer le délai de deux mois peuvent agir en relevé de forclusion devant le conseil de prud'hommes dans les six mois du jugement d'ouverture. La jurisprudence considère, en outre, que la forclusion est inopposable aux salariés qui n'ont pas reçu l'information individuelle relative au sort de leur créance. L'audience sur la contestation de créance peut donc se tenir plusieurs mois après l'ouverture de la procédure, voire alors que la procédure est déjà liquidée. Pour autant, ce délai est sans incidence sur les règles de preuve. Il appartient au créancier qui conteste le montant de sa créance de produire en justice les éléments de fait précis et concordants de nature à étayer sa demande conformément à l'article 1353 du code civil. Il n'existe dès lors ni un renversement ni un allègement ni une dispense de la charge de la preuve au profit des salariés. Le risque de la preuve pèse sur le demandeur qu'est le salarié. Le Gouvernement n'estime donc pas opportun de modifier le traitement spécifique réservé par la loi aux créances salariales, au risque de fragiliser la situation des salariés, qui dans la plupart des liquidations judiciaires, subissent déjà la perte de leur emploi.

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