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François Ruffin
Question N° 34980 au Ministère de l’économie


Question soumise le 15 décembre 2020

M. François Ruffin interroge M. le ministre de l'économie, des finances et de la relance sur la situation des entreprises de l'aéronautique et la stratégie du Gouvernement pour y faire face. Ce lundi 7 décembre 2020, une réunion se tenait à la préfecture de la Somme sur la situation des entreprises de l'aéronautique. Le gros des échanges a tourné autour de l'« accompagnement » : faut-il installer une antenne de Pôle emploi sur le site ? Quels dispositifs sont mobilisables ? Il y avait un catalogue de sigles, et une discussion moins politique, stratégique, que technique, presque administrative. Pour énoncer sommairement le point de vue de M. le député : l'accompagnement, c'est déjà un renoncement. M. le ministre et ses services étaient absents de cette rencontre. C'est dommage. Que veut l'État ? Quelle est la vision de l'État pour l'aéronautique dans le département de la Somme ? Voilà les questions, et bien sûr les réponses que M. le député attend du Gouvernement et de M. le ministre. Quelle est la stratégie ? Laisser faire la main invisible du marché, qui dans le bassin d'Albert a en trois mois déjà détruit plus de mille emplois ? Laisser se disperser les compétences ? Pour les plus importants sous-traitants, laisser s'opérer une délocalisation sous couvert de covid-19 vers le Portugal, vers le Maroc ? Voilà le mouvement auquel on assiste. S'agit-il de l'accompagner, de l'adoucir, de rendre les licenciements plus humains ? Sinon, que compte-t-il faire ? Premièrement, sur l’ « hibernation » : le pari, ici, c'est que l'industrie aéronautique redémarre en 2023, 2024. Mais encore faut-il que le « cluster » d'entreprises, de qualifications, n'ait pas éclaté entre temps en France, qu'on devienne incapable de produire des coques d'avions, tout comme on est devenu incapables de produire des masques, des sur-blouses, etc. L'État est-il prêt, pour les salariés, à faire le pont, la jonction, à leur fournir des formations, à peut-être les déplacer sur d'autres secteurs, mais temporairement, préparant l'après ? Quels dispositifs compte-t-on inventer, mobiliser dans l'urgence ? Dans l'urgence car plus de mille emplois ont d'ores et déjà disparu. Deuxièmement, sur la « diversification » : il semble, à M. le député comme à beaucoup, que le choc d'aujourd'hui impose de sortir le bassin d'Albert de la mono-industrie aéronautique, sans l'abandonner pour autant. À ce titre, on a entendu évoquer beaucoup d'idées : les éoliennes, les drones, l'énergie hydraulique, etc., et on pourrait en avancer pas mal d'autres, notamment pour rendre l'industrie utile à la transition écologique. Mais à nouveau, c'est M. le ministre, c'est l'État que M. le dépuét souhaite entendre, et dont il n'entend que le silence. Au printemps 2020, le Président de la République déclarait que « déléguer à d'autres notre production est une folie », il annonçait des « décisions de ruptures dans les prochaines semaines, les prochains mois ». Et la rengaine est alors venue des « relocalisations » (M. le député l'entend depuis dix ans), de la « réindustrialisation » (il l'entend depuis le double). Mais, concrètement, quelles productions l'État compte-t-il ramener ici ? Quelles productions pourraient revenir en Picardie, dans le bassin d'Albert, s'appuyant sur la tradition d'une métallurgie de précision ? Voilà les questions de M. le député et pour entendre M. le ministre, pour y répondre, il souhaite sa présence, personnelle, à la prochaine réunion de ce genre : la Picardie ne peut pas laisser partir les avions comme elle a vu s'en aller le textile, les lave-linge, les meubles, etc. Enfin, et M. le député en vient à du subsidiaire, mais qui paraît le minimum du minimum : dans un secteur prospère depuis plusieurs décennies, avec l'État premier actionnaire du donneur d'ordres Airbus, avec 15 milliards d'euros débloqués dans le plan de relance, comment comprendre des « plans sociaux » faméliques ? C'était le cas chez 3A, avec 6 mois de congés reclassement, là où 12 mois sont normalement garantis. C'est encore le cas chez Simra, avec 8 mois. M. le ministre devrait signifier à ces entreprises que de tels PSE ne seront pas homologués. Il souhaite connaître ses répnses à ces questions.

Réponse émise le 25 janvier 2022

L'épidémie de Covid-19, inédite par son ampleur et ses conséquences pour la filière aéronautique, a entrainé une mobilisation totale de l'Etat pour soutenir le maintien l'activité et les compétences en France, tout en aidant la filière à préparer les ruptures technologiques nécessaires au développement de l'avion bas carbone. Ce sont des objectifs majeurs du plan de soutien à la filière aéronautique, annoncé le 9 juin 2020. Ce plan de soutien vise à soutenir la pérennité et la compétitivité des entreprises de la filière notamment via leur modernisation, l'innovation et le maintien des compétences. Il a aussi pour objectif de renforcer le soutien à la demande, à travers les outils d'aide à l'export, le maintien des commandes, et à travers le soutien à Air France. De surcroît, le plan de soutien à la filière aéronautique s'accompagne d'une charte d'engagement visant à renforcer la coopération et les relations client-fournisseur, dans le but d'améliorer la confiance mutuelle, de développer une vision claire et à long terme pour chacun, et enfin de renforcer leur compétitivité et leur efficacité. Afin de limiter les effets de la crise sanitaire sur l'emploi de la filière aéronautique, qui compte environ 250 000 employés en France, le plan de soutien à la filière aéronautique comporte des mesures massives directes et indirectes. Les mesures indirectes visent à renforcer les entreprises de la filière, pour augmenter leur résilience et leur capacité à préparer l'avenir. Par exemple, le fonds d'investissement en fonds propres, dotés de 740 Ms€ et abondé par l'Etat et les quatre grands donneurs d'ordres de la filière, vise à consolider les entreprises de la filière en leur permettant d'atteindre une taille critique. Le fonds de soutien aux investissements de la filière aéronautique, doté de 300 Ms€, aide également les entreprises à renforcer leur compétitivité et à se diversifier, ainsi qu'à réduire leur impact environnemental ; afin de ne pas souffrir d'un éventuel sous-investissement à cause de la crise. D'autres mesures non spécifiques à la filière mais témoignant d'un engagement total de l'Etat et d'un effort jamais consenti permettent d'aider les entreprises à traverser la crise : tel est le cas des prêts garantis par l'Etat et de l'activité partielle. Les mesures directes visent à renforcer les carnets de commande des entreprises de la filière ainsi qu‘à soutenir l'emploi via des mesures d'activité partielle. Le soutien à la demande passe par les commandes militaires, qui ont été renforcées à hauteur de plus de 830 Ms€, ainsi que par les mesures de soutien à l'export et le plan de soutien à Air France. L'activité partielle et l'activité partielle longue durée ont à ce jour fait l'objet de demandes pour plus de 77 millions d'heures rien que sur le code NAF lié à la construction aéronautique. Plus spécifiquement sur l'aéronautique dans la Somme, berceau de cette industrie, une action spécifique a été initiée dans le cadre du programme Territoires d'industrie co-piloté par le ministère de l'économie, des finances et de la relance et le ministère de la cohésion des territoires et des relations avec les collectivités territoriales, et la communauté de communes du Pays du Coquelicot. Cet accompagnement s'inscrit dans le dispositif de soutien en ingénierie aux collectivités, dédié aux Territoires d'industrie pour faire émerger et accélérer de nouveaux projets industriels, mis en place par l'Agence nationale de la cohésion des territoires. L'action du cabinet EY mandaté pour l'occasion, a consisté à analyser les besoins de l'écosystème industriel, accélérer les projets industriels potentiels de son bassin d'emploi et à appuyer la candidature de projets structurants aux dispositifs du Plan de relance. Elle s'est articulée avec celle du cabinet Absiskey mandaté par la Banque des Territoires pour étudier un plan de diversification des petites et moyennes entreprises (PME) de la filière aéronautique. De Mars à Juillet 2021, le cabinet EY s'est rendu deux jours par semaine sur le territoire pour échanger avec les différents acteurs locaux et rencontrer les 68 industriels du territoire, les clusters et des structures d'innovation comme Altytud, IndustriLAB et Agrosphères. Ces échanges ont permis d'établir un diagnostic des besoins du territoire et les projets éligibles aux aides du Plan de relance national et régional. Les résultats de ces travaux communs, présentés le vendredi 8 octobre 2021 devant les partenaires du territoire réunissant notamment les représentants de l'Etat, de la Région, de la Communauté de communes et acteurs industriels du territoire, sont les suivants : 25 projets industriels endogènes identifiés et 10 % des entreprises du territoire lauréates de France Relance pour un montant total de 3,3 Ms€ d'aide et de 6,3 Ms€ d'investissements productifs, appui à la diversification du territoire dans une logique individuelle (i) et collective (ii) : accompagnement individuel de certaines entreprises du territoire en amorçant la prospection de nouveaux clients donneurs d'ordre (naval, défense, machinisme agricole), soutien de la politique de diversification industrielle dans une dynamique inter filière au travers notamment de l'accompagnement du cluster Altytud dans le dépôt d'un dossier de financement FEDER sur le projet Altylab (démarche d'innovation à destination des industriels de la filière aéronautique régionale), lancement d'un groupe de travail avec tous les acteurs du de la filière hydraulique du territoire autour de la mise en place d'un campus hydraulique. structuration d'une feuille de route industrielle à 5 ans. Enfin, un plan d'investissement massif, France 2030, a été annoncé par le Président de la République le 12 octobre dernier. France 2030 a une ambition : préparer la France de demain, avec des choix d'investissement stratégiques majeurs et une ambition écologique forte. L'aéronautique tiendra une place importante dans ce plan, avec l'un des 10 objectifs spécifiquement consacré à ce secteur clé. L'objectif visé est celui de produire en France, d'ici 2030, le premier avion bas-carbone. Un volet de ce projet sera notamment dédié aux PME innovantes et start-ups de la filière.

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