Photo issue du site de l'Assemblée nationale ou de Wikipedia

Mathilde Panot
Question N° 35125 au Ministère de l’intérieur (retirée)


Question soumise le 22 décembre 2020

Être alerté lorsque cette
question aura une réponse

e-mail
par e-mail

Mme Mathilde Panot interroge M. le ministre de l'intérieur sur les décrets scandaleux publiés en catimini le 4 décembre 2020 élargissant les possibilités de fichage pour les renseignements territoriaux. Ces fichiers sont élargis aux personnes « susceptibles de porter atteinte à l'intégrité du territoire ou des institutions de la République » ou à la « sûreté de l'État », une formule suffisamment floue pour laisser à M. le ministre le loisir de choisir qui il souhaite viser entre des fonctionnaires en grève ou des syndicalistes. Désormais, les opinions politiques, les convictions philosophiques ou religieuses ou l'appartenance syndicale seront recensés. Mme la députée s'interroge fortement sur la pertinence de tels critères, si ce n'est en vue de cibler les individus dont les opinions déplaisent au ministre de l'intérieur. Les critères ne s'arrêtent pas là, puisque les données de santé, celles relatives aux troubles psychologiques, les déplacements, les pratiques sportives ou encore les activités sur les réseaux sociaux pourront également figurer dans ces fichiers. À ce stade, Mme la députée s'interroge plutôt sur le type de données qui ne pourront pas être recueillies par les policiers, tant leur élargissement acte une surveillance de masse de la population. Il s'agit d'une atteinte sans précédent aux libertés publiques et au droit à la vie privée. Tout ce qui avait été retiré du fichier Edvige à l'occasion d'une polémique en 2008 sur la collecte d'opinions politiques et religieuses, est réintroduit dans ces décrets sans consultation ni discussion. Les associations peuvent être désormais concernées, ainsi que l'entourage d'une personne visée par le renseignement. La logique du ministre consiste en une fuite en avant sécuritaire pour des résultats dérisoires. Plus de 80 000 personnes figurent déjà dans ces dossiers, leur élargissement laisse donc craindre une inflation massive des fichages avec une multiplication des données collectées. Ainsi, l'élargissement des critères n'aura pour effet que de noyer les agents de renseignement sans améliorer la précision des données collectées. Ces décrets autorisent a posteriori des pratiques de collecte d'opinions politiques jusque-là illégales, montrant la vision particulière du ministre en matière de légalité. Plutôt que de sanctionner ces pratiques, M. le ministre de l'intérieur choisit délibérément de les autoriser et étend le champ d'intervention de la police. Ainsi, il renforce l'autonomisation dangereuse du corps policier par rapport au pouvoir politique. De plus, l'accès à ces données pose question : désormais, personnels de police ou de gendarmerie pourront les consulter sur demande préalable à leur responsable de service, sans plus de garantie. Les procureurs de la République pourront également y avoir accès. La CNIL s'inquiète que des données particulièrement sensibles, sur un nombre de plus en plus important de personnes, collectées dans le cadre d'enquêtes administratives, ne soient pas accompagnées de garanties fortes concernant la vie privée des personnes. Mme la députée rejoint ces constats. Elle lui demande de retirer au plus vite ces décrets indignes d'un État de droit et lui recommande de relire la définition de « libertés publiques ».

Retirée le 21 juin 2022 (fin de mandat)

Aucun commentaire n'a encore été formulé sur cette question.

Cette législature étant désormais achevée, les commentaires sont désactivés.
Vous pouvez commenter les travaux des nouveaux députés sur le NosDéputés.fr de la législature en cours.