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Sacha Houlié
Question N° 35504 au Ministère de la transition écologique


Question soumise le 12 janvier 2021

M. Sacha Houlié alerte Mme la ministre de la transition écologique sur les conséquences des arrêtés du 3 août 2018 portant réforme de la classification des chaudières à bagasse (déchets de la canne à sucre) du registre 2910A à déclaration au registre 2910B à enregistrement. Les distillateurs martiniquais - qui ont démontré leur volontarisme pour réduire les émissions des pollutions en diminuant par 10 la valeur limite d'émission atmosphérique des poussières issues des chaudières (de 1 000 miligrammes par mètre cube à 100) - avaient alerté Mme la ministre quant à la surtransposition de la directive européenne n° 2015-2193 du 25 novembre 2015. À ce titre, les dispositions relatives au délai d'application des valeurs limite d'émission (devant être réduites à 50 miligrammes par mètre cube) ont d'ores et déjà fait l'objet de modifications par arrêté du 15 juillet 2019. Il n'en demeure pas moins que ces nouvelles dispositions imposent des obligations particulièrement radicales (monitoring en temps réel et mesures de multiples données même non émises lors de la combustion) pour des exploitations qui représentent tout juste 1 % des pollutions par particules relevées en Martinique (60 % étant le fait de brumes de sable et 30 % résultant des transports). Mais, surtout, cette classification nouvelle procède au reclassement de la chaudière à bagasse en considérant le résidu de la transformation de la canne à sucre comme un déchet industriel et non plus un déchet végétal. Or elle risque de produire des effets manifestement contraires au but poursuivi. En effet, au regard des obligations nouvelles, il pourrait être plus avantageux pour les distilleries agricoles d'installer une chaudière à fuel. Cela les contraindrait par ailleurs à rechercher une autre valorisation de la bagasse emportant sa remise en circulation sur des routes déjà très encombrées, alors même qu'elles sont jusqu'à présent brûlées sur site, dans une démarche d'économie circulaire, aux fins d'alimenter en électricité et en chaleur les sites de production. En conséquence, il l'interpelle pour lui demander de protéger l'économie circulaire, traditionnelle et vertueuse de valorisation de la bagasse comme déchet végétal biomasse.

Réponse émise le 24 août 2021

La dernière modification de la réglementation des installations de combustion moyennes s'est faite à l'occasion de la transposition de la directive 2015/2193 du 25 novembre 2015, dite directive MCP. Cette directive vise les installations de combustion de puissance comprise entre 1 et 50 MW. La directive MCP prévoit notamment que les exploitants doivent respecter des valeurs limites d'émission (VLE) pour les émissions de dioxyde de soufre (SO2), d'oxydes d'azote (NOx) et de poussières et réaliser un suivi périodique des émissions de ces polluants. La réglementation applicable aux installations classées pour la protection de l'environnement (ICPE) a été le vecteur réglementaire choisi pour transposer cette directive. Cela a occasionné une révision de la nomenclature, et plus précisément de la rubrique 2910 et des textes de prescriptions générales applicables. Les installations de combustion moyennes font l'objet d'un régime ICPE qui est fonction de la puissance de l'installation et du type de combustibles : - pour les combustibles classiques : régime de la déclaration avec contrôle (DC) entre 1 et 20 MW, et régime de l'enregistrement entre 20 et 50 MW (rubrique 2910-A) ; - pour certains déchets de biomasse et produits sortis du statut de déchets : régime de l'enregistrement (rubrique 2910 B1) ; - pour les autres combustibles : régime de l'autorisation (rubrique 2910 B2). Quatre arrêtés ministériels de prescriptions générales relatifs aux installations de combustion sont applicables, dont un arrêté pour le régime déclaration et un pour le régime enregistrement. Tout d'abord, il est à noter que la directive MCP impose aux installations de combustion existantes brûlant de la biomasse de puissance inférieure à 20 MW une valeur limite « poussières » de 50 mg/m3 : c'est cette valeur limite qui a été reprise dans la réglementation française, que ce soit dans l'arrêté déclaration ou dans l'arrêté enregistrement.  En ce qui concerne la qualification de la bagasse, il est important d'indiquer en premier lieu que la bagasse entre bien dans la définition réglementaire de biomasse qui provient de la directive MCP. La bagasse peut donc être brulée au sein d'installations de combustion relevant de la rubrique 2910. Les déchets ne relevant pas de la définition de biomasse, comme par exemple les déchets industriels, ne peuvent être brûlés qu'au sein d'installations d'incinération de déchets relevant des rubriques ICPE 2770 ou 2771. Plus précisément, la bagasse relève de la définition b ii) de la biomasse, c'est-à-dire : « déchets végétaux provenant du secteur industriel de la transformation alimentaire, si la chaleur produite est valorisée », et donc sa combustion relève du régime de l'enregistrement, et non pas du régime de déclaration. L'arrêté « enregistrement » comprend les mêmes valeurs limites que l'arrêté « déclaration », mais les dispositions en terme de surveillance sont un peu plus importantes : ainsi l'exploitant doit faire appel une fois par an à un organisme agréé (au lieu d'une fois tous les 2 ou 3 ans pour le régime de déclaration). De plus, une estimation en continu des rejets des poussières doit être effectuée. Cependant, l'arrêté « enregistrement » prévoit que les polluants atmosphériques qui ne sont pas susceptibles d'être émis par l'installation ne font pas l'objet des mesures périodiques prévues. Dans ce cas, l'exploitant tient à la disposition de l'inspection des installations classées les éléments techniques permettant d'attester l'absence d'émission de ces produits par l'installation. Ainsi, la réglementation applicable aux installations de combustion brûlant de la bagasse est transposée directement de la directive européenne, en ce qui concerne les niveaux des valeurs limites et les définitions de la biomasse, et correspond aux enjeux en découlant. La surveillance des polluants atmosphériques est adaptée à chaque type d'installations.

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