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Sébastien Nadot
Question N° 36661 au Ministère de l’europe


Question soumise le 23 février 2021

M. Sébastien Nadot interroge M. le ministre de l'Europe et des affaires étrangères sur la situation de guerre en Éthiopie dans la région du Tigray. Depuis le 4 novembre 2020, le Front de libération du peuple du Tigré (TPLF) s'oppose à l'armée fédérale éthiopienne, soutenue par des milices nationalistes de la région de l'Amhara et des troupes érythréennes. Dès le 13 novembre 2020, Michelle Bachelet, la Haute-commissaire des Nations unies aux droits de l'Homme, dénonçait de possibles crimes de guerre et appelait à la mise en place d'une commission d'enquête indépendante pour le vérifier, tandis que de nombreux témoignages provenant d'organisations humanitaires signalent des milliers de civils en danger. Dans ce contexte dramatique, l'ambassade de France en Éthiopie se félicitait le 14 janvier 2021 de la rencontre de l'ambassadeur français, M. Rémi Maréchaux, avec le docteur Eyob Tekalign, ministre d'État des finances en Éthiopie, évoquant le « souhait mutuel de renforcer la coopération économique bilatérale ». Les intérêts commerciaux français en Éthiopie sont nombreux, comme en témoigne la visite officielle de M. Emmanuel Macron en mars 2019. Cependant, les ambitions françaises depuis le début du conflit en novembre 2020 semblent en décalage avec les « violences ciblant certains groupes ethniques, assassinats, pillages massifs, viols, retours forcés de réfugiés et possibles crimes de guerre » évoqués le 15 janvier 2021 par M. Joseph Borrell, haut représentant de l'Union européenne pour les affaires étrangères et la politique de sécurité. La discrétion de la France étonne, d'autant plus qu'elle est en droit de faire la demande d'une session extraordinaire sur l'Éthiopie suite à son élection au conseil des droits de l'Homme des Nations unies. Dans la conjoncture actuelle, il est indispensable et urgent de faire entendre la voix française autrement que sur ses motivations économiques de court terme. Au regard de ces éléments particulièrement préoccupants, il lui demande d'expliquer quelles sont les actions que la France compte mener face à l'escalade militaire en Éthiopie, afin de garantir la sécurité des populations civiles au Tigray et pour limiter les potentielles répercussions régionales du conflit.

Réponse émise le 23 mars 2021

La France suit avec attention le conflit en cours au Tigray, compte tenu de son lourd impact sur les populations civiles, et des risques dont il est porteur pour la cohésion de l'Ethiopie et la stabilité de la région. Plusieurs mois après le début du conflit, la situation humanitaire est particulièrement dégradée. Le nombre de personnes en besoin d'assistance humanitaire au Tigray varie entre 3,8 et 4,5 millions de personnes pour une population de 6 millions d'habitants. Durant plusieurs semaines, la communauté internationale a appelé le gouvernement éthiopien à permettre un accès humanitaire sans entrave à la région. Plusieurs hauts responsables des Nations unies et de l'Union européenne ont également fait le déplacement en Ethiopie pour porter ce message. Quelques avancées ont eu lieu récemment avec l'annonce de la mise en place d'un système de notification à la place d'un système de demande d'autorisation pour les humanitaires souhaitant se rendre dans la région. Ce conflit a également été générateur de graves violations des droits de l'Homme comme en attestent les rapports de la Commission éthiopienne des droits de l'Homme et ceux de plusieurs ONG internationales. Des crimes de guerre auraient ainsi été commis dans plusieurs villes du Tigray (Mai Kadra, Humera, Axoum, Dengelat, etc.). Toutes les parties au conflit sont mises en cause, mais les pires atrocités semblent avoir été commises par les forces érythréennes, dont le rôle dans ce conflit semble être particulièrement déstabilisateur. C'est pour cette raison que la Haute-Commissaire aux droits de l'Homme, Michele Bachelet, a récemment jugé la situation alarmante et réclamé la conduite d'enquêtes indépendantes pour documenter ces exactions et traduire en justice leurs responsables. Les autorités éthiopiennes se sont montrées ouvertes à la perspective d'une enquête conjointe avec l'appui d'une expertise internationale. Depuis le mois de novembre, la France s'est publiquement exprimée à plusieurs reprises, notamment pour exiger un meilleur accès humanitaire à la région et pour condamner les exactions touchant les civils et les réfugiés. Nous participons également à l'effort financier pour fournir une assistance aux populations du Tigray et nous nous sommes mobilisés à tous les niveaux pour transmettre nos messages aux autorités éthiopiennes. Afin de répondre à cette crise, nous souhaitons amplifier nos efforts, avec nos partenaires européens, pour augmenter l'assistance internationale vers la Corne de l'Afrique. La France se mobilise également au sein du Conseil de sécurité des Nations unies pour que les autorités éthiopiennes mettent fin aux violences et trouvent des réponses appropriées à cette crise, à la fois au plan humanitaire et dans le domaine de la lutte contre les violations des droits de l'Homme. La France portera une attention particulière au retrait de toutes les forces érythréennes du Tigray, d'autant que le gouvernement éthiopien confirme désormais que ces forces étrangères n'avaient jamais été invitées à se déployer dans cette région. La France, tout comme ses partenaires internationaux et en particulier l'Union européenne, tient à ce que l'Ethiopie redevienne un pivot de la stabilité régionale dans la Corne de l'Afrique et un modèle de coexistence pacifique sur le continent.

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