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Didier Le Gac
Question N° 36727 au Ministère de l’europe


Question soumise le 23 février 2021

M. Didier Le Gac attire l'attention de M. le ministre de l'Europe et des affaires étrangères sur la situation de plus de 40 000 Français dénommés « Américains accidentels ». Il peut s'agir d'individus ayant acquis la nationalité américaine à la naissance par le droit du sol, compte tenu de leur venue au monde sur le territoire des États-Unis d'Amérique, ou encore d'individus ayant bénéficié dès la naissance de cette autre nationalité transmise par l'un des deux (ou les deux) parents. Ces « Américains accidentels », n'ayant pourtant aucun lien familial ou économique avec les États-Unis d'Amérique, sont confrontés à l'extraterritorialité de la législation fiscale américaine depuis la promulgation de la loi dite « FATCA » (Foreign Account Tax Compliance Act), entrée en vigueur en 2014. Cette réglementation vise à identifier et déclarer les contribuables américains auprès de l'administration fiscale américaine en vue d'améliorer le respect des obligations fiscales à l'échelle internationale. Les conséquences fiscales sont importantes puisque les banques du monde entier sont dans l'obligation de transmettre à l'administration fiscale américaine - l'Internal revenue service (IRS) - des informations fiscales sur les contribuables américains. En vertu de la législation américaine extraterritoriale, les institutions financières françaises sont soumises, sous peine de sanctions importantes de la part de l'administration fiscale américaine, à une obligation déclarative concernant leurs clients présentant des « indices d'américanité ». Si ces indices sont relevés, les institutions financières françaises refusent de fournir à ces clients certains services financiers classiques en l'absence de transmission par ceux-ci de leur numéro de sécurité sociale américain ou d'un certificat de perte de nationalité américaine. Or l'obtention de ce numéro ou de ce certificat est impossible depuis mars 2020, l'ambassade américaine à Paris ayant fermé ses services en raison du contexte sanitaire. Les Américains accidentels peuvent donc se retrouver face à des refus d'ouvertures de comptes, des fermetures de comptes unilatérales ou dans l'impossibilité de souscrire à des produits d'épargne et ce malgré l'actualisation de la doctrine concernant les règles relatives à la collecte et à la déclaration des informations sur les comptes financiers transmises automatiquement aux autorités compétentes étrangères. Il lui demande donc quelles mesures son ministère entend mettre en œuvre pour que l'ambassade américaine à Paris puisse de nouveau permettre l'accès à ces services indispensables aux citoyens français dénommés « Américains accidentels ».

Réponse émise le 6 avril 2021

Les "Américains accidentels", citoyens français également ressortissants américains du fait de leur lieu de naissance, sont assujettis à des obligations au regard de la législation fiscale américaine, en dépit de l'absence de lien particulier effectif avec ce pays. En 2010, une loi américaine (Foreign Account Tax Compliance Act ou "loi Fatca") a créé l'obligation, pour tous les établissements financiers, de transmettre, à l'administration fiscale américaine, des informations détaillées sur les comptes détenus directement ou indirectement par des contribuables américains. Le 14 novembre 2013, la France a signé l'accord intergouvernemental "Fatca"qui permet d'éviter une transmission directe, puisqu'il charge la direction générale des finances publiques (DGFiP) de la réception de ces données auprès des établissements financiers, puis de leur envoi à l'Internal Revenue Service (IRS), l'agence fédérale américaine chargée du recouvrement de l'impôt. Cet accord intergouvernemental apporte des garanties aux titulaires de comptes (protection des données personnelles, limitations des comptes financiers devant faire l'objet d'une déclaration). En l'absence d'accord, ces garanties seraient supprimées et les"Américains accidentels" continueraient d'être assujettis à l'obligation de déclarer leurs revenus à l'IRS et, le cas échéant, de payer l'impôt correspondant, puisque cette obligation découle du principe américain même d'imposition. En outre, les banques, placées dans une relation directe avec l'IRS, seraient alors susceptibles de redoubler de prudence vis-à-vis de leurs clients de nationalité américaine, ce qui renforcerait les difficultés bancaires qu'ils peuvent rencontrer à ce jour. Depuis plusieurs années, le Gouvernement, par le biais du ministère de l'Europe et des affaires étrangères et du ministère de l'économie, des finances et de la relance, sollicite l'attention des autorités américaines sur ces situations particulières et plaide en faveur d'une renonciation à la nationalité américaine facilitée pour ces "Américains accidentels", étant entendu que les conditions d'octroi de la nationalité et le principe de l'imposition sur la base de la citoyenneté relèvent de la compétence souveraine des États-Unis. Les demandes relayées à de nombreuses reprises, à Paris comme aux États-Unis, qui ont également mobilisé d'autres États européens dans le même sens, ont abouti à des avancées significatives, sur plusieurs plans : - Sur le plan administratif, les services de l'ambassade et des consulats des États-Unis en France ont été réceptifs aux arguments français et ont mis en place un guichet spécial et une page internet dédiée en langue française afin de faciliter les démarches des personnes souhaitant renoncer à la nationalité américaine. Des informations sont également disponibles sur le site de l'ambassade de France aux États-Unis. La procédure a également été allégée et l'obtention d'un numéro de sécurité sociale n'est ainsi plus nécessaire pour ce faire. Le service chargé des renonciations à la nationalité américaine de l'ambassade des États-Unis en France est actuellement fermé et rouvrira lorsque la situation sanitaire le permettra. L'ambassade des États-Unis en France a indiqué au ministère de l'Europe et des affaires étrangères que les personnes concernées peuvent l'interroger sur ce sujet via l'adresse courriel : citizeninfo@state.gov - Sur le plan fiscal, l'IRS a présenté le 6 septembre 2019 une procédure d'amnistie particulière, et compte tenu de seuils élevés, de nombreux binationaux décidant de renoncer à leur nationalité américaine peuvent échapper aux arriérés d'impôts américains. Le 15 octobre 2019, l'IRS a également étayé ses instructions existantes pour préciser les obligations des institutions financières en matière de collecte et de transmission du numéro d'identifiant fiscal (Tax identification number, TIN) auprès de leurs clients détenant la nationalité américaine. Elles ont été reprises et commentées dans la doctrine de l'administration fiscale française, et expressément rappelées à la Fédération bancaire française (FBF). Depuis ces précisions, l'administration française n'a pas eu connaissance - sinon de manière très limitée - de cas de clôtures forcées de comptes détenus par des "Américains accidentels" de la part de leurs établissements bancaires, même si des complications administratives peuvent subsister pour ces personnes. Le Gouvernement va poursuivre, en lien avec ses partenaires européens, un dialogue actif avec la nouvelle administration américaine afin d'obtenir des avancées complémentaires, aussi bien dans le sens d'une réciprocité accrue des échanges d'informations fiscales avec les États-Unis que d'une facilitation des démarches pour les "Américains accidentels".

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