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Danielle Brulebois
Question N° 38020 au Ministère de l’agriculture


Question soumise le 13 avril 2021

Mme Danielle Brulebois attire l'attention de M. le ministre de l'agriculture et de l'alimentation sur l'obligation d'afficher le « Nutri-Score » sur tous les supports publicitaires pour les denrées alimentaires à compter du 1er janvier 2021. En effet, l'affichage du « Nutri-score » sous la forme d'une échelle graphique classe en cinq catégories les produits alimentaires, en fonction de leurs qualités nutritionnelles. Le logo est attribué sur la base d'un score prenant en compte pour 100 grammes ou 100 millilitres de produit, la teneur en nutriments et aliments à favoriser (fibres, protéines, fruits, légumes, légumineuses, fruits à coques, huile de colza, de noix et d'olive) et en nutriments à limiter (énergie, acides gras saturés, sucres, sel). Après ce calcul, le score obtenu par un produit permet de lui attribuer une lettre et une couleur. Le Nutri-score a pour objectif d'améliorer et de faciliter l'information du consommateur sur la qualité nutritionnelle du produit en apposant en face avant des produits un logo en 5 lettres correspondant à une échelle de 5 couleurs (du vert au rouge). Le second objectif de cet étiquetage est d'encourager et d'inciter les entreprises agroalimentaires à améliorer la qualité nutritionnelle de leurs produits dans le but d'obtenir un meilleur score. Néanmoins, cet étiquetage reste facultatif et repose sur le volontariat des entreprises. Avant adaptation, le Nutri-Score « de base » classait la plupart des fromages en E. Les fromages faisant partie des produits laitiers dont la consommation est recommandée par les autorités de santé, le calcul du score pour les fromages a été modifié. Ainsi, leur teneur en protéines, censée refléter leur contenu en calcium, a été (partiellement) prise en compte. Malgré cette adaptation, près de 90 % des fromages se retrouvent classés en D ou E. Cette situation a des conséquences importantes. Avec 80 % de fromages classés en D, le Nutri-Score actuel ne permet pas au consommateur un choix éclairé au rayon fromage. En effet, il retrouvera dans cette catégorie des fromages avec des teneurs en protéines allant de 6 à 33 % et des teneurs en calcium allant de 90 à 1 000 mg pour 100 g mais aussi des fromages avec de 13 à 40 % de matière grasse et de 0,1 à 2,5 % de sel. Par ailleurs, des propositions émergent au sujet de l'interdiction de la publicité sur les produits classés D et E par le système du Nutri-Score. Ces décisions reviendraient à interdire toute publicité et promotion pour 95 % des fromages. Comme les autres fromages, la très grande majorité des appellations d'origine (AOP ou IGP) sont classées en D (93 %) et en E (6 %). Les compositions de ces produits (notamment leurs teneurs en matières grasses) étant définies par des cahiers des charges bien précis, il n'est pas possible de les reformuler pour améliorer leur classement. L'appellation d'origine protégée (AOP) désigne un produit dont toutes les étapes de production sont réalisées selon un savoir-faire reconnu dans une même aire géographique, qui donne ses caractéristiques au produit. À travers la classification « Nutri-score », de nombreux savoir-faire et de nombreux terroirs sont en danger, alors que la fabrication des produits alimentaires en question est soumise à de nombreux contrôles et est le fruit d'une transmission intergénérationnelle. Dans le Jura, les acteurs de la filière comté, cités en exemple par la Président de la République lors de son discours de Rungis aux états généraux de l'alimentation pour sa capacité à réguler les volumes parce qu'ils défendaient une excellence et aussi pour le niveau de rémunération de ses agriculteurs très supérieur à la moyenne nationale, sont particulièrement inquiets. Les intérêts nutritionnels du comté tels que sa pauvreté en sel, sa richesse en protéines, en cuivre, en minéraux, phosphore, calcium et en vitamine B12 ne sont pas valorisés actuellement par le Nutri-score. Il en est de même des membres de la filière morbier, dont la teneur en zinc, micro-nutriments, minéraux et oligo-éléments n'est aussi pas assez valorisé. Dans ce contexte, elle souhaiterait donc savoir si le Gouvernement prévoit d'exclure l'obligation « Nutri-score » des AOP afin de ne pas sanctionner des produits issus d'une fabrication extrêmement encadrée, fleurons de l'identité du département.

Réponse émise le 13 juillet 2021

Le Nutri-score est le dispositif que les pouvoirs publics français ont choisi de recommander à l'issue d'une démarche scientifique, innovante, inclusive et fondée sur le dialogue avec les parties prenantes. Ce logo fournit au consommateur, sur la face visible des emballages alimentaires, une information lisible et facilement compréhensible sur la qualité nutritionnelle globale des produits, au moment où il fait ses courses. Il peut ainsi comparer les produits et orienter ses choix vers des aliments de meilleure qualité nutritionnelle. Fondée par l'arrêté du 31 octobre 2017, la démarche d'engagement en faveur du Nutri-score est volontaire, en conformité avec le droit européen. Le Nutri-score est largement déployé par les professionnels de l'alimentation et plébiscité par les français. En juillet 2020, 415 entreprises étaient engagées dans la démarche Nutri-score en France, dont les parts de marché représentent environ 50 % des volumes de vente. Désormais, ce sont près de 500 entreprises qui se sont engagées en faveur du logo. De même, près de 94 % des français ont déclaré être favorables à sa présence sur les emballages. Enfin, plus d'un français sur deux déclare avoir changé au moins une habitude d'achat grâce au Nutri-score. De nombreux travaux scientifiques ont permis de montrer que le Nutri-score était un outil efficace pour discriminer la qualité nutritionnelle des denrées alimentaires, de manière cohérente avec les recommandations alimentaires, en France mais également dans de nombreux pays européens. Le Nutri-score et les signes de l'origine et de la qualité (SIQO) répondent à des objectifs différents. Les SIQO constituent une « garantie » pour les consommateurs en termes de qualité, de savoir-faire, de protection de l'environnement, d'origine et de terroir, quand le Nutri-score informe le consommateur sur la qualité nutritionnelle des produits transformés, et permet de comparer les produits entre eux. Les fromages font déjà l'objet d'une adaptation dans le calcul du Nutri-score, pour prendre en compte leur teneur élevée en calcium. Si les fromages sont classés pour la majorité en D et parfois en E, ceci s'explique par le fait qu'ils contiennent des quantités non négligeables de graisses saturées et de sel et sont également caloriques. Mais, comme tous les produits classés D ou E avec le Nutri-score, les fromages peuvent parfaitement être consommés dans le cadre d'une alimentation équilibrée. Informer les consommateurs sur la réalité de la qualité nutritionnelle de ces aliments n'exclut pas de les consommer mais en quantités et/ou fréquences conformes aux recommandations nutritionnelles du programme national nutrition santé (deux produits laitiers par jour pour les adultes, trois produits laitiers pour les enfants), ce qui est totalement en cohérence avec la signification de leur classement sur l'échelle du Nutri-score. Des évolutions du mode de calcul du Nutri-score sont néanmoins possibles ainsi, sept pays sont désormais engagés en faveur du Nutri-score : la France, la Belgique, l'Espagne, l'Allemagne, les Pays-Bas, le Luxembourg et la Suisse. Une gouvernance a été mise en place entre ces pays, comprenant notamment un comité scientifique. Ce comité, composé d'experts scientifiques indépendants, s'est réuni pour la première fois le 12 février 2021 et aura pour mission d'évaluer la pertinence scientifique des propositions d'évolution du mode de calcul du Nutri-score. La France soutiendra les évolutions dans ce cadre. La Commission européenne prévoit par ailleurs, dans sa stratégie « de la ferme à l'assiette », publiée en mai 2020, une proposition législative d'étiquetage nutritionnel en face avant, harmonisé et obligatoire, pour le 4e trimestre 2022. Dans ce cadre, le Gouvernement souhaite que le Nutri-score soit le dispositif retenu. Enfin consciente que le système doit prendre en compte des spécificités liées aux produits comme les fromages, la France portera des propositions dans un cadre européen afin que l'algorithme du Nutri-score et les critères utilisés tiennent compte de ces spécificités.

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