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Pierre Vatin
Question N° 38706 au Ministère de la transition écologique


Question soumise le 4 mai 2021

M. Pierre Vatin attire l'attention de Mme la ministre de la transition écologique sur la décharge de Néry-Saintines. De 1969 à 1973, une entreprise spécialisée dans le retraitement des déchets a exploité ladite décharge en y déversant et en y enfouissant 20 000 tonnes de produits industriels toxiques, principalement des solvants. En 1992, cette société a déposé le bilan et le site a été recouvert de terre sans que ces déchets ne soient retirés. Depuis, les riverains se plaignent fréquemment de mauvaises odeurs et de l'absence de traitement des eaux résurgentes ; tandis qu'ils constatent une recrudescence de cas de cancers. En 2000 et 2012, deux études menées par l'Agence régionale de santé (ARS) Hauts-de-France n'ont pas permis de conclure à une dangerosité quelconque pour la population. En 2008, le site a néanmoins été partiellement dépollué grâce à une station de retraitement des eaux louée temporairement par l'ADEME. En 2018, la préfecture a lancé une étude pour recenser l'intégralité des produits polluants présents sur le site. Une surveillance épidémiologique a aussi été diligentée. En 2020, l'ADEME a mis en place, également, un questionnaire en ligne afin que les riverains puissent signaler les nuisances olfactives générées par le site. La décharge de Néry-Saintines n'est malheureusement pas un cas isolé et est révélatrice d'un fléau sanitaire et environnemental conséquent. M. le député avait déjà alerté le prédécesseur de Mme la ministre sur ce sujet lors d'une question au Gouvernement le 5 juin 2019, en insistant sur l'absence de solution pour les communes concernées dans toute la France. Les acteurs à l'origine de l'enfouissement de déchets dangereux et polluants ont, en effet, généralement tous disparu, tant moralement que physiquement. C'est pourquoi il lui demande les mesures qu'elle entend prendre pour dépolluer entièrement l'ancienne décharge de Néry-Saintines et pour éviter que ce genre de situation ne se reproduise sur le territoire national.

Réponse émise le 24 août 2021

Le site de Néry-Saintine était avant la Seconde Guerre mondiale une ancienne carrière d'exploitation de calcaire d'environ 4 ha. De 1963 à 1973, le site a été exploité comme centre de traitement de déchets industriels par la société RODANET. Les déchets ont alors été déversés et parfois dépotés directement des camions-citernes, dans les fosses creusées au sommet de la carrière. La quantité de déchets résiduelle est estimée à 21 000 m³ en surface ou dans les sols, 11 000 m³ de terres polluées et 5 000 tonnes de déchets liquides infiltrés profondément dans la nappe. Le site est à l'origine d'une pollution des sols et de la nappe. Les premiers impacts sont apparus en 1981 et 1982, avec le dépérissement de la peupleraie située en aval de la carrière et des odeurs situées à proximité des émergences de pied de carrière. La nappe polluée, sous la décharge, s'écoule en direction de la rivière l'Automne. Avant d'atteindre la rivière, la nappe émerge à la faveur de zones perméables créant des zones de dégagements d'odeurs. À la suite de ces constats, un ensemble d'actions a été mis en œuvre, dont le montant total depuis 1987 est supérieur à 8,5 M€ :environ 1 300 tonnes de déchets superficiels sont enlevés sur site par l'Agence de l'environnement et de la maîtrise de l'énergie (ADEME), entre 1987 et 1989, suite à la défaillance de l'exploitant, puis envoyés en centre de traitement spécialisé ;ce site étant un site complexe à gérer et la politique de gestion de ce type de pollution en étant alors à ses débuts, de nombreuses études ont été lancées par l'ADEME à partir de 1991. Elles visaient à caractériser au mieux la zone d'un point de vue de l'écoulement des masses d'eau et des caractéristiques des sols, ainsi que la pollution des sols et des eaux souterraines afin de définir les meilleures solutions de dépollution à mettre en place. Un comité d'experts a été mis en place pour appuyer l'ADEME et ses travaux ont conclu en 2000 que la meilleure option était de laisser sur place les déchets solides enterrés mais d'améliorer leurs conditions de stockage ;des travaux ont été réalisés pour mieux gérer le site et limiter les risques supplémentaires de pollution (clôture, maîtrise de la végétation, gestion des eaux de pluie…), diminuer les impacts (notamment olfactifs) et surveiller l'évolution de la situation pour vérifier que la pollution sur le site reste maîtrisée ;ainsi, de 2005 à 2008, un système de drainage des émergences principales situées en pied de carrière a été mis en place et un système de traitement des eaux de drainage avant rejet à l'Automne a été utilisé pendant quelques années puis arrêté, le temps que les concentrations des effluents diminuent ;depuis 2008, la surveillance environnementale du site se poursuit sous maîtrise d'ouvrage de l'ADEME, avec notamment un suivi des eaux superficielles et souterraines s'étendant le long de la vallée de l'Automne, qui draine les transferts de polluants. Cette surveillance permet de s'assurer la stabilité du stockage sur le site ;en 2011, suite aux plaintes de riverains, une étude des nuisances olfactives a été réalisée. Elle a permis de mettre en évidence que les travaux réalisés avaient amélioré la situation. Des odeurs restent perceptibles, mais sur des zones très localisées que l'étude a permis d'identifier (le long de la RD 98 et au niveau du pont qui traverse l'Automne). Aucun impact n'a été constaté chez les riverains à l'occasion de cette étude ;les campagnes quadriennales régulières de surveillance se poursuivent et ne montrent pas d'évolution inattendue. Les derniers résultats ont été présentés en novembre 2017 à la Commission de Suivi de Site (CSS), mise en place depuis 1995 par le préfet de l'Oise pour informer les représentants locaux de la situation environnementale. Cette surveillance se poursuit toujours. La tendance générale est à la diminution des concentrations des paramètres chimiques étudiés, ce qui n'exclut pas des variations au cours des suivis environnementaux du site. Par ailleurs, le site reste régulièrement entretenu (fauchage mécanique de la parcelle, taille au lamier des branches basses en bordure de route, débroussaillage des fossés périphériques et battage des arbres dangereux) comme cela a été présenté à la CSS du 24 septembre 2019 ;en mars 2017 l'agence régionale de santé (ARS) a réalisé une analyse des études existantes concernant l'impact sur la santé des populations vivant à proximité de l'ancienne décharge. Elle n'a pas permis d'identifier d'excès de risque significatif ;pour permettre une objectivation des plaintes des riverains, il a été proposé lors de la dernière CSS de mettre en place un dispositif de suivi, permettant un signalement facile des nuisances perçues dans les environs de l'ancien site RODANET et caractériser le ressenti associé (intensité, gêne, localisation, fréquence…), via un site web dédié avec une possibilité de géolocalisation sur une carte de l'emplacement de la gêne ressentie. Après plus d'une année de service, une dizaine de signalements ont été enregistrés, mais n'ont pas permis d'en déduire une action spécifique à mener. À ce jour, l'ADEME n'a pas identifié d'élément permettant de remettre en cause les résultats de l'étude technico-économique menée en 2000 sur la solution de gestion des déchets présents sur le site et les travaux menés ont conduit à une réduction importante des nuisances, même si des gênes persistent et continuent d'être surveillées. La surveillance du site est maintenue, et des analyses complémentaires sont en cours pour approfondir la question de la dynamique des polluants et améliorer la gestion du site.

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