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Marie Tamarelle-Verhaeghe
Question N° 39522 au Ministère de l’économie


Question soumise le 15 juin 2021

Mme Marie Tamarelle-Verhaeghe interroge M. le ministre de l'économie, des finances et de la relance sur l'application de l'article 3 de la loi n° 2020-904 du 24 juillet 2020 visant à encadrer le démarchage téléphonique et à lutter contre les appels frauduleux, qui prévoit une interdiction sectorielle du démarchage téléphonique pour les professionnels de la rénovation énergétique. Cette mesure était motivée par de nombreuses plaintes de consommateurs victimes de démarchages abusifs, de pratiques déloyales et parfois de désinformation sur les dispositifs d'aides mis en place par l'État, par des personnes se revendiquant professionnels du secteur de la rénovation énergétique. Si la loi votée va dans le bon sens pour protéger les consommateurs, il apparaît toutefois, à la lumière de certains témoignages de terrain, que son application stricte poserait question aux entreprises du secteur. En effet, dans le cas où une personne renseignerait un formulaire de contact sur le site d'une entreprise du secteur de la rénovation énergétique, en y indiquant son numéro de téléphone, cette dernière ne serait pas autorisée à le rappeler, alors même que le consommateur a donné son consentement et souhaite être rappelé. Dans ce cas précis, et dès lors que l'entreprise est en conformité avec les évolutions du code de la consommation, notamment l'information du consommateur sur la possibilité de s'inscrire sur la liste d'opposition au démarchage via Bloctel, l'application trop stricte de la loi contribuerait à paralyser les relations entre les entreprises et leurs clients. Par ailleurs dans sa partie FAQ, le site de Bloctel précise clairement qu'un particulier pourra toujours être appelé s'il a « communiqué de manière libre et non équivoque son numéro pour être rappelé ». Elle souhaiterait donc connaître son interprétation de la situation ci-dessus exposée.

Réponse émise le 7 septembre 2021

La loi n° 2020-901 du 24 juillet 2020 visant à encadrer le démarchage téléphonique et à lutter contre les appels frauduleux prévoit que « toute prospection commerciale de consommateurs par des professionnels, par voie téléphonique, ayant pour objet la vente d'équipements ou la réalisation de travaux pour des logements en vue de la réalisation d'économies d'énergie ou de la production d'énergies renouvelables est interdite, à l'exception des sollicitations intervenant dans le cadre de l'exécution d'un contrat en cours » (article L. 223-1 alinéa 3 du code de la consommation). Cette nouvelle mesure a été introduite lors des débats parlementaires en seconde lecture à l'Assemblée nationale d'une proposition de loi visant à encadrer le démarchage téléphonique et à lutter contre les appels frauduleux. L'administration considère que cette interdiction s'applique strictement, c'est-à-dire également aux personnes qui ont inscrit leur numéro de téléphone sur un formulaire de contact d'un site Internet d'une entreprise qui relève du secteur de la rénovation énergétique, en vue d'être rappelé. En effet, les débats parlementaires ont montré que le législateur entendait instituer une interdiction absolue de démarchage téléphonique dans ce seul secteur de la rénovation énergétique : « toute prospection commerciale (…) est interdite ». Il n'a prévu qu'une exception, celle consistant à appeler une personne déjà cliente, à l'occasion de l'exécution d'un contrat en cours. Le législateur a tenu compte du fait que le secteur de la rénovation énergétique était un secteur atteint par des abus généralisés et que la technicité des travaux liés à la rénovation ou à l'installation d'équipements liés aux énergies renouvelables était peu compatible avec le démarchage téléphonique. Ainsi le rapport de la commission des affaires économiques de l'Assemblée nationale précise : « Il s'agit de mettre fin à de nombreuses pratiques frauduleuses, nuisant à la crédibilité d'un secteur pourtant stratégique, jouant sur la méconnaissance par les consommateurs d'un domaine technique où coexistent de nombreuses aides publiques ». Comme l'indique l'exposé des motifs de l'amendement, « en 2019, 30 % des amendes administratives faisant suite aux contrôles effectués par la direction générale de la concurrence, de la consommation et de la répression des fraudes (DGCCRF) sur le démarchage téléphonique concernaient le secteur de la rénovation énergétique. Il s'agit donc de l'un des premiers secteurs pour les abus constatés en matière de démarchage téléphonique ». On observe d'ailleurs que le « consentement » à être rappelé que les personnes laissent sur les sites Internet peut également être obtenu de manière discutable. Souvent, ces sites ne sont pas suffisamment descriptifs des prestations délivrées par le professionnel lors de son rappel, ou sont trompeurs ou ambigus : le consommateur croit par exemple qu'il va être rappelé pour avoir des informations sur les dispositifs fiscaux, et non parce qu'il souhaite commander sur Internet des travaux de rénovation. Des agences de webmarketing sont souvent à l'origine de ces démarches et ont pour unique objectif la constitution de fichiers qualifiés (« leads ») à destination d'entreprises du secteur, ou même d'autres secteurs, par le biais d'un démarchage téléphonique. Le consommateur contacté a alors des difficultés à savoir qui est à l'origine de l'appel et pour quel produit ou service il est démarché. C'est pourquoi l'introduction d'une autre exception, fondée sur ce « consentement », paraît inopportune. Cette application stricte de la loi n'est pas un obstacle insurmontable car il n'interdit pas d'autres vecteurs de prospection :de proposer au consommateur d'appeler ses télévendeurs, par exemple par un numéro vert, en le démarchant par courrier, ou par courriel, et/ou de lui proposer un rendez-vous physique à son domicile ;de contacter téléphoniquement un consommateur, après qu'il a consenti à une visite technique, au sujet des modalités pratiques d'exécution de cette visite technique - cet appel n'entrant pas dans le cadre d'une « prospection commerciale » mais d'une relation quasi commerciale. Mais elle paraît être la seule compatible avec l'objectif du Gouvernement et de la loi du 24 juillet 2020 de freiner les démarchages téléphoniques abusifs, irritants majeurs pour une grande partie de la population.

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