Photo issue du site de l'Assemblée nationale ou de Wikipedia

Mathilde Panot
Question N° 39616 au Ministère auprès de la ministre de la transition écologique


Question soumise le 15 juin 2021

Mme Mathilde Panot interroge Mme la ministre de la transition écologique sur le projet de création et de mise en concession de la liaison autoroutière Castres-Toulouse. Ce projet démesuré, estimé pour l'instant à 275 millions d'euros d'argent public, pose plusieurs problèmes écologiques juridiques et démocratiques majeurs. L'étude d'impact environnemental ainsi que l'étude financière du projet ont été largement sous-estimées dans l'enquête publique et la DUP et sont en contradiction totale avec les faits : les quantités de matériaux nécessaires aujourd'hui annoncées sont pratiquement deux fois supérieures aux extractions initialement prévues dans des carrières « existantes » comme indiqué dans la DUP (signée par M. Nicolas Hulot, ministre de la transition écologique et solidaire). Une des sociétés candidates à l'appel d'offres a d'ores et déjà pris des dispositions auprès de la préfecture pour lancer une procédure visant à la création de 3 carrières « temporaires » et réserve pour cela 62 hectares d'espaces agricoles et naturels auprès de propriétaires terriens. Cette pratique dite du « saucissonnage » qui consiste à minimiser dans la DUP l'impact environnemental et financier est illégale et met de fait l'État hors la loi. De plus, une telle opération aurait pour conséquence inévitable la formation sur des terres agricoles parmi les plus fertiles de la région de trois zones de stockage de déchets. Ce projet d'autoroute est dimensionné pour accueillir plus de 40 000 véhicules par jour selon l'étude CEREMA, alors que la route existante plafonne à 8 000 trajets journaliers maximum. Une telle augmentation, par ailleurs irréaliste, entraînerait une hausse considérable des émissions de gaz à effet de serre. Ainsi, ce projet d'autoroute s'avère non seulement faramineux mais s'inscrit dans la droite ligne du laisser-faire aux intérêts privés, avec pour seules bénéficiaires les sociétés de concessions autoroutières qui continueront de se gaver sur le dos des citoyens. Pourtant, une étude financée par les collectivités locales montre que l'aménagement sur place de l'itinéraire existant est plus économe pour les finances publiques, plus respectueux de l'environnement, gratuit pour l'usager et répond aux besoins des populations du territoire comme aux recommandations formulées dans son avis par l'autorité environnementale. Même le Commissariat général à l'investissement doute d'un désenclavement économique induit par une autoroute avec un péage de 15 euros (valeur 2010) quand la 2 fois 2 voies Albi-Toulouse pour la même distance coûte 1,50 euros à l'usager. Ce traitement territorialement discriminatoire favorisera plutôt la délocalisation des entreprises de l'agglomération Castres-Mazamet. Mme la députée s'interroge sur la contradiction entre les paroles et les actes de l'actuel Gouvernement, alors que le Président de la République s'exprimait ainsi il y a encore quelques mois : « Il faut revenir sur cette catastrophe française qu'a été l'artificialisation des sols ». Or ce projet d'autoroute consacre à nouveau l'hypocrisie d'une telle formule quand 478 hectares de terres agricoles fertiles et des espaces naturels sont prévus d'être artificialisés pour les besoins des entreprises privées, le tout au détriment d'une politique cohérente de transports publics comme, par exemple, le cadencement de la ligne ferroviaire existante entre Castres et Toulouse. Mme la députée rejoint la demande formulée auprès de Mme la ministre par le collectif Stop carrière Montcabrier 81 concernant la réalisation d'une étude sérieuse et complète sur la quantité de remblais nécessaires au chantier et leur provenance. Mais, surtout, elle appelle Mme la ministre à la raison en l'invitant à examiner sérieusement l'étude financée par les collectivités territoriales sur l'aménagement de la nationale existante, une alternative que le collectif des maires opposés à l'autoroute et le collectif citoyen PACT (Pas d'autoroute Castres-Toulouse) portent depuis des années. Dans l'attente, elle lui demande si elle entend stopper immédiatement ce projet-écocide, anti-démocratique et strictement orienté vers des intérêts privés au détriment de l'intérêt général.

Réponse émise le 14 décembre 2021

Le projet de liaison autoroutière entre Castre et Verfeil a fait l'objet d'un débat public à la fin de l'année 2009. Le débat public a notamment permis de contribuer à l'élaboration d'un projet autoroutier qui s'insère pleinement dans le territoire et lui profite en participant à son développement. Fin 2016, le projet a fait l'objet d'une enquête publique qui a permis de recueillir l'ensemble des observations, remarques, avis et propositions de l'ensemble des personnes, physiques ou morales, concernées par le projet. La commission d'enquête a remis son rapport et ses conclusions motivées le 2 mars 2017. Elle a émis un avis favorable à la déclaration d'utilité publique (DUP) des travaux de l'autoroute A69 assorti de trois réserves, qui ont donné lieu à des modifications intégrées au projet après l'enquête publique. La déclaration d'utilité publique est intervenue par décret en Conseil d'État du 19 juillet 2018. Dès lors, ce projet a fait l'objet, durant les sept années ayant amené à sa déclaration d'utilité publique, d'une large consultation de l'ensemble des acteurs concernés. Elle aura permis notamment de faire évoluer le projet afin de répondre au plus près des besoins et attentes des populations et des territoires concernés. Il est à noter que le Conseil d'État a rejeté les recours introduits sur ce décret réaffirmant l'utilité publique du projet dans sa décision intervenue le 5 mars 2021. Le Conseil d'État juge donc, définitivement, que l'étude est conforme au code de l'environnement, son contenu étant proportionné à la sensibilité environnementale de la zone susceptible d'être affectée par le projet, à l'importance et la nature des travaux, ouvrages et aménagements projetés et à leurs incidences prévisibles sur l'environnement et la santé humaine. Le Conseil d'État a par ailleurs jugé que l'étude d'impact réalisée par l'État comprend une analyse poussée de la solution alternative consistant en un aménagement sur place en 2 fois 2 voies de la route nationale 126 et précise les avantages et les inconvénients de cet aménagement et expose ainsi les raisons pour lesquelles le projet déclaré d'utilité publique a été retenu. Enfin, il est rappelé que l'ensemble des engagements pris par l'État s'imposera au concessionnaire, qui sera chargé de les mettre en œuvre. Ainsi un comité de suivi des engagements de l'État sera mis en place, sous l'autorité du préfet de la région Occitanie et composé de représentants des administrations, des élus, des responsables socio-économiques et d'associations, afin de veiller au respect par le concessionnaire de ces engagements. La désignation du concessionnaire de l'autoroute A69 permet d'ouvrir, en lien avec les services de l'État, une nouvelle phase de dialogue avec le territoire et ses forces vives permettant d'affiner encore les conditions d'insertion du projet. Enfin, dans le respect du projet, le concessionnaire retenu a proposé des optimisations permettant de s'affranchir du besoin d'ouvertures de carrières.

Aucun commentaire n'a encore été formulé sur cette question.

Cette législature étant désormais achevée, les commentaires sont désactivés.
Vous pouvez commenter les travaux des nouveaux députés sur le NosDéputés.fr de la législature en cours.