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Frédéric Barbier
Question N° 40521 au Ministère auprès du ministre de l’économie


Question soumise le 3 août 2021

M. Frédéric Barbier attire l'attention de Mme la ministre déléguée auprès du ministre de l'économie, des finances et de la relance, chargée de l'industrie, sur l'utilisation abusive du terme « cuir » pour désigner des produits qui ne sont pas d'origine animale et l'impérieuse nécessité de mettre en place une réglementation spécifique à l'échelle de l'Union européenne. En effet, un nombre croissant de produits fabriqués à partir de fibres végétales et qui ressemblent au cuir affichent la dénomination « cuir synthétique », « cuir vegan » ou encore « cuir végétal ». Si les professionnels du cuir ne sont pas défavorables à ces produits alternatifs, ils exigent en revanche l'interdiction de la dénomination « cuir » pour les qualifier. Non seulement cet abus de langage suggère au consommateur que le cuir pourrait ne pas uniquement être issu de la transformation de peaux animales et induit donc une distorsion manifeste de concurrence qui nuit au secteur maroquinier, mais il confère aussi implicitement à ces produits d'origine végétale les caractéristiques de qualité et de durabilité propres à la matière noble qu'est le cuir. Cela va donc à l'encontre des exigences d'authenticité et de transparence réclamées par les consommateurs. Or les différents textes en vigueur au sein de l'Union européenne sont insuffisants. Ainsi, non seulement la directive 94/11/CE n'interdit pas explicitement l'usage des termes tels que « cuir synthétique » ou « cuir d'ananas » mais elle ne vise surtout que les règles d'étiquetage des articles chaussants et non de l'intégralité des produits en cuir. De même, l'article 12 du règlement communautaire 1007/2011 du 27 décembre 2011, qui introduit l'obligation d'indiquer la présence des parties non-textiles d'origine animale ne permet pas clairement de prévenir l'usage abusif du terme « cuir ». Face aux insuffisances réglementaires qui permettent le développement de pratiques frauduleuses dont les consommateurs et les industriels sont les victimes, il lui demande donc quelles mesures elle compte prendre pour mieux protéger l'appellation « cuir ».

Réponse émise le 7 septembre 2021

Au plan national, la commercialisation des produits en cuir ou de certains produits similaires au cuir est encadrée par le décret n° 2010-29 du 8 janvier 2010 qui interdit l'utilisation du mot « cuir » pour désigner toute autre matière que celle obtenue de la peau animale au moyen d'un tannage ou d'une imprégnation conservant la forme naturelle des fibres de la peau. Ainsi, l'utilisation de dénominations telles que « cuir synthétique », « cuir vegan » ou « cuir végétal » n'est pas recevable et contrevient à ce décret. Ce texte a toutefois une portée uniquement nationale ; il ne s'applique pas aux produits légalement fabriqués dans un autre État de l'Union européenne ou importés via un de ces États, conformément aux principes de libre circulation des marchandises et de reconnaissance mutuelle. Les autorités françaises sont pleinement conscientes des difficultés rencontrées par la filière du cuir résultant de l'absence d'une définition harmonisée de la dénomination « cuir » au sein de l'Union européenne et de l'attente légitime des consommateurs en matière de transparence des dénominations. C'est pourquoi les autorités françaises plaident, chaque fois qu'elles en ont l'occasion, pour une telle harmonisation européenne en la matière. En ce qui concerne les dénominations susceptibles de tromper les consommateurs – au cas d'espèce, pour désigner des produits ressemblant à des produits en cuir sans en avoir les qualités – une nuance doit toutefois être apportée entre, d'une part, le respect formel du décret national susmentionné et, d'autre part, le respect de l'exigence de portée plus générale de ne pas induire le consommateur en erreur sur la nature ou les qualités substantielles de toute marchandise. Ces dernières pratiques, relevant de la pratique commerciale trompeuse, au sens du code de la consommation, constituent un délit pouvant être recherché et constaté par les agents de la direction générale de la concurrence, de la consommation et de la répression des fraudes, quel que soit le lieu de fabrication ou d'importation des articles en cause (délit pouvant être sanctionné par une amende de 300 000 euros et/ou une peine d'emprisonnement de deux ans). À cet égard, les services de la direction générale de la concurrence, de la consommation et de la répression des fraudes mènent régulièrement des actions de contrôle et des enquêtes dans le secteur des articles manufacturés en « cuir » ou présentés comme tels – dans le domaine de la maroquinerie, des articles chaussants et de l'ameublement, notamment – afin de faire respecter la réglementation spécifique, ou le cas échéant générale, relative à l'information due au consommateur et concourant ainsi à la loyauté des pratiques commerciales. Dans ce contexte, l'absence même d'une réglementation européenne harmonisée sur le « cuir » ne prive pas les enquêteurs de toute possibilité d'action s'ils constatent l'usage de présentations commerciales manifestement trompeuses.

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