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Patrick Hetzel
Question N° 40526 au Ministère des armées


Question soumise le 3 août 2021

M. Patrick Hetzel interroge Mme la ministre des armées sur un arrêt de la CJUE (Cour de justice de l'Union européenne) qui estime que le temps de travail des soldats doit être encadré lorsque ceux-ci n'assurent pas des missions urgentes pour la nation. En effet, la Cour de justice de l'Union européenne a rendu, jeudi 15 juillet 2021, un arrêt sur le temps de travail des militaires en désaccord avec la position défendue par la France. Saisie par la Slovénie, confrontée à un militaire contestant sa solde réduite lors des périodes de garde, la plus haute juridiction européenne a estimé que les militaires ne peuvent être exclus de la portée de la directive européenne de 2003 sur le temps de travail. En clair, le modèle français d'un statut militaire fondé sur une disponibilité en tout temps et en tout lieu, défini par le code de la défense, pourrait être mis à mal. Il souhaite donc savoir ce que compte faire le Gouvernement afin de garantir le maintien du statut militaire tel que défini actuellement dans le droit français.

Réponse émise le 21 décembre 2021

Plusieurs États membres de l'Union européenne, parmi lesquels la France, n'ont pas transposé aux forces armées la directive 2003/88/CE sur le temps de travail, considérant qu'elle ne s'applique pas aux militaires du fait des stipulations du droit primaire, qui n'attribuent pas de compétence à l'Union européenne en la matière, ainsi que des exclusions qu'elle prévoit. C'est la position que la France a rappelée avec constance aux côtés d'autres États membres, faisant valoir que la santé et la sécurité des militaires étaient garanties par des règles protectrices dans le cadre d'un statut qui ménage un équilibre entre droits et devoirs, adapté à la singularité de leur engagement. L'arrêt rendu par la Cour de justice de l'Union européenne (CJUE) juge par principe la directive applicable aux militaires, même s'il ménage certaines exceptions. Or, la directive susmentionnée prévoit un décompte individualisé du temps de travail et un plafonnement de celui-ci à 48 heures hebdomadaires, alors que l'armée française doit, pour assurer la permanence de sa mission, organiser collectivement ses activités. Le niveau d'engagement des forces françaises est particulièrement élevé et repose sur un continuum formation-entraînement-déploiement. Le contexte stratégique et la violence croissante qu'affrontent les armées sur les théâtres extérieurs rappellent combien est important le maintien de forces disponibles en tout temps et en tout lieu, de même que la préservation de l'esprit militaire. La plus grande vigilance est donc apportée à garantir la disponibilité, la combativité, l'interopérabilité et la cohésion de nos armées. La distinction proposée par la CJUE pour décider de l'application de la directive entre activités de haute intensité, d'une part, et activités dites de service ordinaire, d'autre part, n'est pas adaptée au cas d'une armée qui, comme l'armée française, est entièrement professionnalisée. L'application partielle, ou à éclipse, de ce texte n'est pas compatible avec son mode d'organisation. La libre disposition de la force armée constitue par ailleurs un principe à valeur constitutionnelle, comme le rappelle les décisions du Conseil constitutionnel n° 2014-432 QPC du 28 novembre 2014 et n° 2014-450 QPC du 27 février 2015. Par ailleurs, l'unité de sort des militaires, qui se traduit par l'unicité et la singularité du statut, est au cœur de la cohésion et de l'efficacité de nos forces armées. Conformément aux orientations données par le Président de la République, le Gouvernement est déterminé à répondre à cet arrêt de la CJUE par le droit. Les autorités françaises ont entrepris à ce sujet des échanges techniques avec la Commission européenne.

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