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Patrick Hetzel
Question N° 40890 au Ministère auprès du ministre de l’économie


Question soumise le 7 septembre 2021

M. Patrick Hetzel appelle l'attention de M. le ministre de l'économie, des finances et de la relance sur le résultat du contrôle fiscal en 2020. Selon le rapport d'activité 2020 de la direction générale des finances publiques, le fisc a notifié 10,2 milliards d'euros en redressement fiscal et pénalité. Ce chiffre est très bas puisqu'il était de 13,9 milliards en 2019 et 21,2 milliards en 2015. En 2020, 32,5 % des contrôles sont dus au datamining. Ils représentent 794 millions s'euros de droits rappelés. Toutefois, 32,5 % des contrôles ne représentent que 10 % des droits rappelés. Même si 2020 est une année marquée par la covid-19, les résultats du contrôle fiscal sont très médiocres et sont en dégradation constante depuis 2015. Une des causes serait due à la réorganisation et à l'atrophie progressive des moyens dédiés au contrôle. Selon le même rapport, dans le contrôle des professionnels, les opérations sur place suite à programmation sont passées de 39 000 en 2018 à 17 483 en 2020. S'agissant du contrôle des particuliers, le contrôle sur pièces de l'impôt sur le revenu est passé de 901 633 en 2018 à 580 233 en 2020. Alors que le bilan du datamining reste à ce jour très mitigé pour les fraudes complexes, il souhaiterait savoir quelles dispositions sont prévues, lors de l'examen du prochain PLF, pour inverser cette tendance et mettre en place une organisation du contrôle qui permette de lutter efficacement contre la fraude.

Réponse émise le 30 novembre 2021

La lutte contre la fraude demeure une priorité majeure des services de contrôle de la direction générale des finances publiques (DGFiP). L'administration fiscale dispose d'un important arsenal législatif, largement renforcé en 2018 par la loi relative à la lutte contre la fraude du 23 octobre 2018 et par la loi de finances pour 2020 (renforcement de la lutte contre la fraude à la TVA, droit de communication auprès des entrepôts et des plateformes logistiques…). En particulier, la loi relative à la lutte contre la fraude a mis à la disposition de la puissance publique de nouveaux outils pour lutter efficacement contre la fraude fiscale, en renforçant les moyens judiciaires mis en œuvre pour détecter et traiter les fraudes les plus graves. Ainsi, la mise en place d'un mécanisme de dénonciation obligatoire au procureur de la République des contrôles fiscaux répondant à certains critères de gravité a permis une augmentation substantielle des saisines de l'autorité judiciaire puisqu'en 2019, 1 678 dossiers fiscaux, dont 965 dénonciations obligatoires, ont été transmis aux parquets, soit le double du nombre de plaintes pour fraude ou présomption de fraude fiscale déposées en 2018. Malgré le contexte sanitaire, l'administration fiscale aura également saisi les parquets de 1 272 dossiers fiscaux en 2020, dont 823 dénonciations obligatoires. Un service d'enquêtes judiciaires des finances (SEJF) a également été créé en 2019 au sein du ministère chargé du budget. Dirigé par un magistrat de l'ordre judiciaire, il regroupe 241 officiers de douane judiciaire et 40 officiers fiscaux judiciaires. Il vient compléter l'action de la brigade nationale de répression de la délinquance fiscale (BNRDF) rattachée au ministère de l'intérieur. Avec le SEJF, la capacité experte d'enquête judiciaire sur la fraude fiscale complexe a été multipliée par trois. Plus largement, face à des fraudes toujours plus organisées, complexes et mobiles, une nouvelle impulsion interministérielle à la politique de lutte contre la fraude a été engagée en matière de lutte contre la fraude aux finances publiques avec la création en juillet 2020 de la mission interministérielle de coordination anti-fraude (MICAF) dont l'objectif est de donner la priorité aux partages opérationnels de renseignements et à la définition de stratégies communes d'actions entre administrations partenaires. Les résultats du contrôle fiscal doivent quant à eux être analysés avec précision. Depuis plusieurs années, les rapports d'activité de la DGFiP présentent les résultats financiers1 et les encaissements suite à contrôle fiscal. Cependant, des modifications dans la présentation des résultats étant intervenues à partir de 2019, il est nécessaire de veiller à comparer les chiffres à périmètre égal. A compter de l'année 2019, les montants pris en compte correspondent aux dossiers rendus après avis des instances consultatives de recours, ce qui n'était pas le cas en 2015 puisque les résultats étaient comptabilisés avant le tenue de ces instances2. D'autre part, le chiffre de 2015 incluait les résultats du service de traitement des déclarations rectificatives (STDR), à hauteur de 2,6 Md€, dont la mission s'est arrêtée au 31/12/2017. Enfin, deux dossiers exceptionnels ont été conclus cette année-là3. L'année 2020, compte tenu de la crise sanitaire, n'est pas pertinente dans un exercice de comparaison de long terme. Les résultats du contrôle fiscal en 2015 ne sont donc pas comparables aux résultats affichés en 2019 et 2020. Les résultats financiers de l'année 2020 s'élèvent quant à eux à 10,2 Md€ contre 13,5 Md€ en 2019 (-24%). Cette baisse est directement liée à l'impact de la crise sanitaire sur les opérations de contrôle sur place (CFE). En effet, en 2020, le résultat des contrôles sur place, qui visent essentiellement les entreprises, a chuté de 44 % (4,1 Md€) par rapport à 2019 en raison principalement de la baisse de plus de 50 % du nombre de contrôles effectués par les brigades de vérification. Cette baisse fait suite à la suspension des opérations sur place entre mars et fin juin 2020 qui n'ont repris que très progressivement et de manière ciblée à compter de juillet puis septembre 2020. À l'inverse, le résultat des contrôles sur pièces (CSP) se maintient à 4,1 Md€ en 2020, en baisse de 5 % seulement par rapport à 2019. La diminution du nombre de contrôle sur pièces (CSP) de l'impôt sur le revenu, constatée entre 2018 et 2020, s'explique par la mobilisation des services des impôts des particuliers sur la mise en place du prélèvement à la source, la suppression de l'obligation de contrôle triennal de l'ensemble des dossiers à fort enjeu et la crise sanitaire. En parallèle des résultats financiers, il convient d'analyser l'évolution des encaissements suite à contrôle fiscal (hors STDR et hors créances exceptionnelles) entre 2015 et 2020. En méthode, il est nécessaire de rappeler que les sommes encaissées une année N peuvent être issues de contrôles clos en N, mais également de dossiers terminés les années antérieures. En 2015, les encaissements suite à contrôle fiscal se sont élevés à 9,6 Md€, contre 11 Md€ en 2019 (incluant deux créances exceptionnelles pour plus d'1 Md€), et 7,8 Md€ en 2020. Ainsi, les encaissements ont progressé de 14,5 % entre 2015 et 2019. Par ailleurs, le développement de l'analyse de données est un atout et une nécessité pour la DGFiP. L'administration a engagé, en 2017, un processus de modernisation de ses travaux, avec pour objectif de mettre en place une infrastructure informatique qui permettent le décloisonnement des données, l'utilisation d'analyses reposant sur des techniques statistiques et mathématiques, et la réorganisation des services de programmation autour d'un réseau resserré d'analystes utilisant ces nouveaux outils et coordonnés par un bureau en administration centrale. Les techniques d'analyse de données n'ont pas vocation à être l'unique source de ciblage des opérations de contrôle fiscal. L'objectif de l'administration fiscale n'est pas d'éliminer les autres techniques (mobilisation du renseignement, échanges d'informations directes avec d'autres informations, aviseurs…) mais de moderniser la part de la programmation qui relève de l'analyse de données, dont le volume a considérablement progressé. Le taux de 32,5% correspond à l'avancement de ce processus de modernisation : il traduit la part des affaires issus de ces travaux rénovés d'analyse de données dans la programmation avec pour cible qu'ils soient à l'origine de 50% des contrôles. Les services de contrôle ayant la possibilité de choisir les sources de programmation qui leur semblent la plus pertinente, la progression de l'indicateur mesurant la part de la programmation issue du data-mining traduit bien l'appropriation et la satisfaction croissantes par les services de ce processus de modernisation. Ce taux de 32,5% correspond au taux d'affaires programmées en 2020 par des techniques de data-mining et qui, pour la plupart, ont donné lieu à l'ouverture d'une procédure en 2020. Or, compte tenu des délais liés aux investigations et aux procédures fiscales, très peu d'affaires engagées au cours d'une année sont terminées au cours de la même année. Ainsi, les droits issus en 2020 des travaux d'analyse de données, sont la conclusion, pour la quasi totalité d'entre eux, d'analyses de données réalisés en 2017, 2018 et pour une moindre part, 2019. Or, au cours de ces années, la part de la programmation des contrôles fiscaux issue des travaux de data-mining étaient respectivement de 7% (2017), 14% (2018) et 25% (2019). L'écart entre la part des affaires issues du data-mining et la part, dans le total des droits, de ces affaires ne peut donc être interprété comme un signe d'un manque d'efficacité de ces techniques. Il est par ailleurs souligné que les travaux de data-mining pris en compte dans le taux de 32,5% ne sont pas utilisés pour la programmation des contrôles des sociétés les plus importantes, qui génèrent les plus gros rappels et qui relèvent d'une direction nationale de contrôle spécifique qui dispose de ses propres techniques d'analyse de données. Ainsi, il n'est pas pertinent de comparer les droits issus du data-mining avec l'ensemble des droits du contrôle fiscal. 1 Droits et pénalités notifiés mis en recouvrement + crédits d'impôts ou taxes non remboursés. 2 Montants notifiés en attente de confirmation des instances consultatives : 3,3 Md€ en 2015. 3 En 2015, deux dossiers de plus de 500 M€ de droits nets, pour un total droits et pénalités supérieur à 2,3 Md€. En 2019 et 2020, aucun dossier dont les droits nets sont supérieurs à 500 M€ n'a pas été comptabilisé.

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