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Bruno Joncour
Question N° 43096 au Ministère des solidarités


Question soumise le 14 décembre 2021

M. Bruno Joncour appelle l'attention de M. le ministre des solidarités et de la santé sur la situation des personnes souffrant de migraines sévères persistantes après des échecs successifs aux traitements existants. Ces traitements classiques prescrits contre la migraine sont souvent destinés à d'autres pathologies et parfois abandonnés par les malades en raison de leurs effets indésirables. Une nouvelle classe de médicaments, appelés antagonistes du peptide lié au gène de la calcitonine (CGRP) et générant peu d'effets secondaires, a obtenu son autorisation de mise sur le marché européen. Ces anticorps monoclonaux ont montré leur efficacité sur les patients testés et représentent une avancée incontestable dans le traitement de la migraine sévère. Deux traitements anti-CGRP, s'administrant sous la forme d'auto-injections, sont actuellement disponibles en France mais ne font l'objet d'aucune prise en charge, alors que d'autres pays d'Europe ont fait le choix d'un remboursement total ou partiel. Leur coût élevé ne permet pas à tous les patients souffrant de migraines sévères et sans traitement alternatif efficace d'y avoir accès. Il lui demande si le Gouvernement entend engager une réflexion sur la prise en charge de ces traitements anti-migraineux afin de les rendre accessibles au plus grand nombre.

Réponse émise le 4 janvier 2022

La migraine est une maladie douloureuse et invalidante qui peut se traduire par un handicap et une dégradation marquée de la qualité de vie, notamment pour les patients souffrant de migraine sévère. La commission de la transparence (CT) de la Haute Autorité de Santé (HAS), chargée d'évaluer l'intérêt thérapeutique de ces trois produits dans le panier de soins remboursable, souligne l'existence de différents traitements actuellement pris en charge dans le traitement de fond de la migraine et pouvant être considérés comme des comparateurs cliniquement pertinents de ces nouvelles spécialités. Ces comparateurs permettent une prise en charge de l'ensemble des stades de la pathologie avec des traitements de première et seconde intention (Lopressor, Seloken, Avlocardyl, Epitomax) mais également des traitements de recours (Sanmigran, Nocertone et Sibelium) ainsi que des alternatives non médicamenteuses pouvant être aussi mobilisées pour la prise en charge des patients. En raison de la démonstration d'une efficacité clinique par rapport à un placebo alors qu'il existe des comparateurs médicamenteux et d'une quantité d'effet modérée uniquement dans une sous-population, cette même commission a octroyé à EMGALITY®, AJOVY® et AIMOVIG® un service médical rendu (SMR) pour une population plus restreinte que celle de l'autorisation de mise sur le marché (AMM). Elle recommande ainsi la prise en charge de ces traitements par la solidarité nationale dans un périmètre limité aux patients atteints de migraine sévère avec au moins huit jours de migraine par mois, en échec à au moins deux traitements prophylactiques et sans atteinte cardiovasculaire. Le service médical rendu octroyé est modéré pour AJOVY® et AIMOVIG® et important pour EMGALITY®. Ce SMR modéré octroyé à deux des trois médicaments reflète un rapport efficacité clinique/effet indésirable qualifié de moyen par la commission de transparence. Pour les trois médicaments, cette même commission a octroyé une amélioration du service médical rendu (ASMR) de niveau V, soit une absence d'ASMR, ce qui signifie que les anti CGRP ne représentent aucune amélioration du service rendu au regard des thérapeutiques existantes. Conformément aux dispositions de la loi, la fixation du prix d'un médicament tient compte principalement de son amélioration du service médical rendu. Les discussions tarifaires entre le Comité économique des produits de santé (CEPS) et les laboratoires exploitant ces spécialités se sont ainsi fondées sur les critères légaux, réglementaires et conventionnels qui définissent le cadre de négociation, une spécialité d'ASMR V ne pouvant être inscrite au remboursement que dans le cas où elle génère une économie dans les coûts de traitement. Malgré plusieurs propositions de la part du CEPS, ces discussions n'ont pu aboutir du fait des prétentions tarifaires extrêmement élevées des industriels au regard des dépenses actuellement engagées pour le traitement médicamenteux de la migraine. Face à l'impossibilité pour les industriels de formuler des propositions tarifaires compatibles avec les dispositions législatives, réglementaires et conventionnelles se traduisant par un échec des négociations, de l'existence de sept autres médicaments pris en charge dans le traitement de la migraine, du risque de tolérance à long terme (risques cardiovasculaires et immunogénicité) et de l'absence de réponse supplémentaire au besoin médical partiellement couvert, ces trois antimigraineux anti CGRP n'ont pas pu être inscrits sur les listes des médicaments remboursables. Néanmoins, cette non-inscription ne préjuge pas de l'issue de nouvelles négociations qui pourraient se tenir à la demande d'un des laboratoires s'il souhaite s'inscrire dans le cadre réglementaire, ou encore après soumission à la commission de la transparence de nouvelles données permettant l'octroi d'une ASMR revalorisée. Les services du ministère de la santé sont pleinement conscients du besoin médical qui subsiste pour traiter des patients en impasse de traitement souffrant de migraine, qui du fait de sa grande prévalence et du retentissement qu'elle induit, est classée par l'Organisation mondiale de la santé (OMS) parmi les vingt maladies ayant le plus fort impact sociétal. Ils espèrent que les laboratoires seront en mesure de déposer de nouvelles données démontrant l'intérêt du produit par rapport à des comparateurs médicamenteux ou accepteront de négocier dans le cadre réglementaire existant. Au-delà, des travaux récents mettent en lumière l'impact de l'inhibition de la protéine HDAC6 dans la réduction de la douleur liée à la migraine et ouvrent également la voie au développement de nouvelles alternatives thérapeutiques dans cette pathologie.

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