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Erwan Balanant
Question N° 4515 au Ministère des solidarités


Question soumise le 16 janvier 2018

M. Erwan Balanant attire l'attention de Mme la ministre des solidarités et de la santé sur la prostitution des mineurs. Selon une étude réalisée en 2015 par plusieurs associations, notamment l'ECPAT, entre 6 000 et 10 000 mineurs se prostitueraient en France. Cette situation s'avère particulièrement alarmante pour la protection de l'intérêt de l'enfant et, plus largement, pour la société française. À cet égard et en vue de l'examen périodique universel de la France devant le Comité des droits de l'Homme des Nations unies, le 15 janvier 2017, l'Organisation internationale du travail a demandé au Gouvernement de détailler les résultats du plan d'action national contre la traite des enfants. Ces demandes rejoignent les préoccupations exprimées en 2016, par le Comité des droits de l'enfant, dans le cadre de ses Observations finales concernant le cinquième rapport périodique de la France. En effet, ce comité relevait que le recours à la prostitution des enfants constitue une infraction mais regrettait que les clients ne fassent pas systématiquement l'objet de poursuites pénales. Il déplorait également que les mineurs de violence sexuelle ou d'exploitation sexuelle ne soient bien souvent pas entendus par des juges ou reconnus comme des victimes de la prostitution, les affaires étant classées sans suite pour insuffisance de preuves. En parallèle, le Comité pour l'élimination de la discrimination à l'égard des femmes, recommandait à la France d'améliorer l'accès aux données sur les victimes de la traite de personnes ventilées par sexe et par âge. La société civile, pour sa part, déplore le manque de données statistiques relatives à la prostitution des enfants. Comment le Gouvernement prévoit-il de mettre en œuvre les recommandations de ces différents organismes onusiens ? Envisage-t-il de réaliser d'une étude dédiée à la prostitution des mineurs, afin de cerner l'ampleur de ce phénomène en France ? Il lui demande quelles mesures concrètes le Gouvernement compte adopter afin de permettre aux mineurs engagés dans la prostitution d'être accompagnés, de se voir reconnaître le statut de victime et d'obtenir des indemnités par voie judiciaire.

Réponse émise le 30 janvier 2018

La protection de l'enfance et la lutte contre le système prostitutionnel constituent des objectifs prioritaires du Gouvernement comme en témoignent son action et les dernières avancées législatives dans ces domaines. Ainsi la loi no 2016-444 du 13 avril 2016 vise à renforcer la lutte contre le système prostitutionnel et à accompagner les personnes prostituées. Elle prévoit notamment l'abrogation du délit de racolage, les personnes prostituées étant considérées comme des victimes, le renforcement des moyens de lutte contre les réseaux et les proxénètes, des mesures de protection et d'accompagnement, des actions de prévention et de sensibilisation, notamment auprès des élèves du second cycle. Dans le cadre du traitement des victimes, les mineurs victimes de traite des êtres humains bénéficient des dispositifs de mise à l'abri prévus par le droit commun de la protection de l'enfance. Ainsi, en cas d'urgence, l'article 375-5 du code civil prévoit la possibilité d'un placement provisoire par le juge des enfants ou par le procureur de la République. Il s'agit d'une décision qui peut intervenir lorsque la situation du mineur requiert un placement immédiat afin de le protéger au plus vite du danger. Le Gouvernement s'attache à développer une politique publique à part entière en matière de lutte contre la traite des êtres humains (TEH). Cette volonté s'est traduite par le renforcement de l'arsenal législatif et la mise en œuvre d'un premier plan d'action national contre la traite des êtres humains (TEH) 2014-2016. Ce plan s'articule autour de trois axes : identifier et accompagner les victimes de la traite, poursuivre et démanteler les réseaux de la traite et faire de la lutte contre la traite une politique publique à part entière. La protection des mineurs victimes de traite fait l'objet d'un accompagnement et d'une prise en charge adaptés à la spécificité de ces mineurs. Ces mesures s'intègrent dans la politique mise en œuvre au niveau européen telle qu'elle ressort des directives 2011/36/UE et 2012/29/UE du parlement européen et du conseil. Concernant la prévention et la protection, les actions menées par la France sont réalisées en partenariat avec les instances européennes, les associations de protection de l'enfance et des entreprises du secteur privé. Elles s'articulent autour de deux axes principaux : - la protection des enfants et des adolescents ; - la sensibilisation et l'éducation aux médias y compris numériques. En ce qui concerne la protection des enfants et des adolescents, des mesures importantes de police et de justice ont été prises. Des dispositions législatives ont été adoptées pour protéger davantage les enfants de contenus non tolérés par la loi (pédopornographie, racisme, xénophobie) et de contenus choquants qu'ils peuvent rencontrer sur internet (pornographie, grande violence). La loi de 2011 sur la sécurité intérieure prévoit le blocage à la source de sites pédopornographiques par le fournisseur d'accès et crée l'infraction d'usurpation d'identité lorsque cet acte est commis sur un réseau de communication au public en ligne. Depuis 2009, la plate-forme "PHAROS", intégrée à la police nationale et en lien avec Interpol, est le point d'entrée unique de tous les signalements de cybercriminalité. Depuis 2008, la France participe au programme « Safer Internet » de la Commission européenne. Intitulé Internet sans crainte en français, il comprend : - un site de signalement des contenus choquants de l'AFA (association des fournisseurs d'accès à l'internet) : pointdecontact.net (en 2016, plus de 23 000 signalements dont plus de la moitié considérés comme illégaux et transmis aux autorités de police) - une ligne téléphonique gratuite pour les parents et les éducateurs : Netécoute 0 800 200 000 (en 2016, 5 000 contacts téléphoniques ou par messagerie électronique) - des actions de sensibilisation et d'information aux risques et au signalement. S'agissant des logiciels de contrôle parental depuis 2006, les fournisseurs d'accès à l'internet et les opérateurs mobiles mettent à disposition des parents un logiciel de contrôle parental gratuit et évolutif. Une attention particulière est portée à l'hypersexualisation des enfants. Ainsi, une Charte "Protection de l'enfant dans les médias » a été signée en février 2012 entre le ministère chargé des affaires sociales et les médias écrits et audiovisuels afin notamment de mieux contrôler les contenus d'hypersexualisation des enfants dans la presse écrite et audiovisuelle. La lutte contre le harcèlement est un objectif majeur. Ainsi en 2014, l'éducation nationale a mis en place un plan de lutte contre le harcèlement à l'école, y compris sur les réseaux sociaux. Ce plan comprend une formation des personnels de l'éducation nationale, une information des élèves et de leurs parents, une ligne téléphonique "Stop harcèlement" et un partenariat avec l'association E-enfance et Facebook. Enfin le premier Plan interministériel de mobilisation et de lutte contre les violences faites aux enfants 2017-2019 comporte la mesure 7 qui vise à mieux protéger les enfants et adolescents de l'exposition à la pornographie, notamment sur Internet. Dans ce cadre, la direction générale de la cohésion sociale a mis en place en juin 2017 un groupe de travail qui avait pour principale mission de trouver des solutions visant à « prévenir l'exposition des mineurs à la pornographie ». Ce groupe de travail était composé de représentants de différents ministères (Intérieur, DGSCO, DJEPVA), et industriels du secteur du numérique, d'associations et de personnes qualifiées (avocat, sociologue, psychologue). Le groupe de travail est chargé de mener une réflexion et d'élaborer un plan d'actions autour de trois axes : - limiter l'accès à la pornographie par les mineurs par des moyens juridiques et techniques, - promouvoir le soutien à la parentalité numérique,  la prévention et la sensibilisation des enfants et des adolescents. Un plan d'actions a été remis à la ministre des solidarités et de la santé en décembre 2017.

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