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Laurence Trastour-Isnart
Question N° 4629 au Ministère de l'intérieur


Question soumise le 23 janvier 2018

Mme Laurence Trastour-Isnart attire l'attention de Mme la ministre, auprès du ministre d'État, ministre de l'intérieur, sur la feuille de route du ministère de l'intérieur du mois de septembre 2017, qui décline les priorités qu'il entend mener pour rendre l'exercice du droit de vote plus simple et plus accessible. La ministre écrit que les conditions de mise en œuvre du vote électronique feront l'objet d'un examen approfondi, tenant compte des enjeux de sécurité des systèmes d'information. Elle précise que d'autres mesures de simplification, concourant également à la sécurité informatique, juridique et matérielle des scrutins électoraux seront proposées, parmi lesquelles la dématérialisation de la propagande électorale, la normalisation des bulletins de vote et l'interdiction des machines à voter. Cette proposition, sans concertation avec les maires, interpelle les élus des communes concernées qui n'ont qu'à se louer de l'utilisation des machines à voter acquises pour la plupart dès 2004 lesquelles sont conformes à la réglementation actuelle. Depuis cette date, aucune anomalie n'est à déplorer. 7 communes des Alpes-Maritimes ont recours aux machines à voter dont 2 communes de sa circonscription (Villeneuve-Loubet et Saint-Laurent-du-Var totalisent 35 machines au prix unitaire d'environ 5 000 euros, soit un coût de 175 000 euros). Au moment de la dématérialisation de nombreuses procédures, il serait regrettable de suspendre cette utilisation avant la mise en œuvre du vote par internet. Aussi, elle la remercie de bien vouloir lui préciser quelles sont les raisons qui motivent sa proposition et quelles sont précisément ses intentions. Elle lui demande si elle envisage une compensation financière en direction des communes qui ont investi dans ce mode d'expression démocratique dont la fiabilité est garantie.

Réponse émise le 31 décembre 2019

Si les machines à voter présentent des avantages indéniables en termes de facilitation du processus de dépouillement, leur usage a soulevé des interrogations croissantes tant du point de vue de la rationalisation de l'organisation du scrutin que de celui du respect de principes fondamentaux du droit électoral depuis une dizaine d'années, non seulement en France, mais partout en Europe et dans les pays démocratiques, où leur utilisation est en déclin. Ainsi, entre 2007 et 2012, 32 communes françaises y ont renoncé pour des raisons de coût, de complexité d'usage et de mauvaise acceptation des électeurs. Les termes de la feuille de route du ministère de l'intérieur relatifs aux mesures de simplification et de sécurisation des scrutins, que vous citez, découlent, concernant les machines à voter, du travail approfondi associant en 2007 le Conseil d'État, des représentants des collectivités territoriales et des usagers, le ministère de l'intérieur et le Secrétariat général de la défense et de la sécurité nationale. A l'issue de ce travail, un moratoire avait été décidé, ayant pour effet de figer le nombre de communes autorisées à se doter de machines à voter. Plusieurs raisons ont justifié la mise en œuvre de ce moratoire. Elles tenaient à l'allongement des temps d'attente dans les bureaux équipés, sources de contentieux, au coût pour les communes et l'État, évalué entre 4 000 et 6 000 euros en 2007 pour l'achat d'une machine, auxquels s'ajoutent les frais d'entretien, de stockage et de formation, et surtout à une problématique de confiance de la part des citoyens, devant l'impossibilité de procéder à un comptage physique des suffrages, comme l'avait relevé le Conseil constitutionnel dans ses observations sur les scrutins présidentiel et législatif de 2007. Ce dernier soulignait ainsi que « l''utilisation [des machines à voter], qui rompt le lien symbolique entre le citoyen et l'acte électoral que la pratique manuelle du vote et du dépouillement avait noué, se heurte aussi à une résistance psychologique qu'il convient de prendre en compte ». Ces raisons ont été confirmées par les sénateurs Alain ANZIANI et Antoine LEFEVRE, qui ont estimé, dans un rapport d'information sur le vote électronique remis en avril 2014, qu'il était nécessaire de proroger le moratoire, compte tenu des risques sur le secret du scrutin et sur sa sincérité associés à l'usage des machines à voter. D'après eux, ces dernières « ne peuvent garantir ni la conformité du choix de l'électeur, ni l'absence de dysfonctionnement dans l'enregistrement des suffrages. » Enfin, le niveau élevé de risques « cyber », tels que ceux qui ont récemment caractérisé les scrutins législatif et présidentiel de 2017, doit désormais être pris en compte dans l'appréhension des opérations de vote réalisées à l'aide de machines à voter, du fait, pour une part prépondérante du parc installé, de l'obsolescence technique des dispositifs, ainsi que de l'importance du risque inhérent attaché aux opérations de paramétrage des machines à voter préalable aux opérations de vote à proprement parler. Les termes de la feuille de route reposent donc sur des constats objectifs et partagés aussi bien par les acteurs publics que par les usagers. Au regard de l'ensemble de ces éléments techniques, le Gouvernement a engagé une réflexion afin de réexaminer le cadre applicable aux machines à voter.

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