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Pierre Morel-À-L'Huissier
Question N° 4719 au Ministère de l'agriculture


Question soumise le 23 janvier 2018

M. Pierre Morel-À-L'Huissier attire l'attention de M. le ministre de l'agriculture et de l'alimentation sur les conséquences économique, sanitaire et environnementale de la conclusion d'un accord de libre-échange avec le MERCOSUR sur l'avenir de l'élevage bovin en France. Alors que les marchés européen et français sont saturés, les accords du CETA prévoient l'entrée de 65 000 tonnes de viandes canadiennes et l'accord du MERCOSUR s'accorderaient sur quelques 100 000 tonnes. Cette ouverture du marché ne pourrait qu'aggraver la crise économique et financière que connaissent les éleveurs français. Outre les préoccupations économiques, les enjeux sanitaires posent question. En mars 2017, une affaire de corruption et de réseau de commercialisation de viandes avariées impliquant les services de l'État brésilien a été divulguée. L'Europe, Hong-Kong et la Corée du Sud ont notamment suspendu partiellement ou totalement les importations suite à ce scandale sanitaire. Plus récemment, les importations de poissons vers l'Union européenne ont subi le même sort. Enfin, les méthodes intensives d'élevages sud-américains utilisant des fourrages OGM, des antibiotiques et des farines animales et causant la destruction de la forêt amazonienne posent également question sur la politique environnementale que promeuvent l'Europe et la France. Face à ces constats, il lui demande tout d'abord, l'échéance des élections brésilienne imposant la fin des négociations en ce début d'année 2018 et au regard des difficultés évoquées, s'il ne vaudrait pas mieux repousser les négociations afin de s'assurer de la protection de l'élevage français. Il voudrait être tenu informé des mesures qui vont être prises par l'État français pour s'assurer de la bonne traçabilité des produits importés et de la qualité de ceux-ci. Enfin, après les états généraux de l'alimentation, il souhaite savoir si l'État français ne considère-t-il pas que ces accords de libre-échange entrent en contradiction avec la volonté du Gouvernement de promouvoir une filière de qualité et respectueuse de l'environnement.

Réponse émise le 22 mai 2018

Conscient des défis que doit relever l'agriculture française et, au premier titre, les agriculteurs, le Président de la République a souhaité organiser, dès les premiers mois de son mandat les états généraux de l'alimentation (EGA) avec pour objectif d'engager une transformation profonde de l'agriculture de nature à permettre aux producteurs de vivre de leurs activités en obtenant des revenus décents et aux consommateurs de bénéficier d'une alimentation saine, sûre et durable. Le Gouvernement est mobilisé pour mettre en œuvre les recommandations issues des EGA, déclinées dans la feuille de route présentée par le Premier ministre le 21 décembre 2017. S'agissant des négociations commerciales, l'Union européenne (UE) négocie actuellement un accord de libre-échange avec le Mercosur (Brésil, Argentine, Uruguay, Paraguay) avec un objectif affiché de conclusion en 2018. Les enjeux sont importants pour certaines filières agricoles françaises, notamment la filière bovine, compte tenu de la compétitivité des filières du Mercosur. Pleinement conscient de ces sensibilités, et en cohérence avec les objectifs des EGA, le Gouvernement s'engage pour assurer la défense des intérêts français et ainsi garantir la préservation du dynamisme économique des territoires. La France, soutenue par d'autres États membres, considère ainsi que la conclusion de l'accord UE/Mercosur est tributaire de l'équilibre entre l'ouverture du marché et la protection des filières sensibles agricoles dans la négociation, en particulier, le bœuf, l'éthanol, le sucre et les volailles. Concernant la viande bovine, l'UE a proposé à l'automne 2017 un contingent de 70 000 tonnes équivalent carcasse (tec). Face à la pression du Mercosur pour élever ce quota au-delà de 100 000 tec, la France demande que ce contingent soit le plus limité possible et ne s'écarte pas significativement de 70 000 tec. En cohérence avec les actions décidées dans le cadre du plan d'actionsur la mise en œuvre de l'accord économique et commercial global (AEGC/CETA), le Gouvernement fait en outre valoir que les concessions tarifaires sur les produits sensibles doivent s'inscrire dans les limites d'une « enveloppe globale », permettant de définir ce qui est soutenable pour les filières au regard du marché, à l'échelle de l'ensemble des négociations en cours ou à venir (Australie, Nouvelle-Zélande, Mexique…). Il se mobilise également pour l'ajout de mesures permettant de rétablir des conditions de concurrence équitables entre les producteurs français et ceux des pays du Mercosur (mécanisme de sauvegarde et conditions non tarifaires liées aux modes de production). Concernant le volet sanitaire et phytosanitaire, des audits ont été réalisés au Brésil par les services de la Commission européenne en 2017 et 2018 pour évaluer la fiabilité de la certification des exportations vers l'UE. Le Gouvernement sera particulièrement vigilant pour que soit garantie la fiabilité du système sanitaire des pays du Mercosur avant la conclusion de l'accord, en cohérence avec les conclusions de ces audits. En tout état de cause, l'ensemble des importations de viande en provenance du Mercosur devront se conformer aux normes sanitaires de l'UE. En outre, les viandes bovines issues d'animaux traités avec des hormones de croissance ou toute autre substance non autorisée dans l'UE comme facteur de croissance resteront strictement interdites. Il reste du travail à mener pour atteindre le stade final de cette négociation, le Mercosur devra démontrer qu'il peut proposer à l'UE un accord protecteur de ses sensibilités et synonyme d'avancées pour les secteurs agricoles offensifs. Le Gouvernement sera attentif jusqu'à la conclusion pour s'assurer que la substance prime sur le calendrier et préserver les intérêts des filières agricoles françaises.

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