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Frédéric Barbier
Question N° 4984 au Ministère des solidarités


Question soumise le 30 janvier 2018

M. Frédéric Barbier attire l'attention de Mme la ministre des solidarités et de la santé sur les pathologies psychiques liées au travail. En France, l'évolution entre 2007 et 2012 de la souffrance psychique liée au travail a été étudiée dans le cadre du programme de surveillance des maladies à caractère professionnel, piloté par l'ex-Institut de veille sanitaire (InVS), aujourd'hui Santé publique France. Ce programme a permis de montrer que 3,1 % des femmes étaient concernées en 2012 par cette souffrance, contre 2,3 % en 2007. Pour les hommes, cette proportion est passée de 1,1 % à 1,4 %. Cette hausse peut être due à une plus grande sensibilisation des salariés et des médecins du travail, en lien avec une plus grande couverture médiatique, mais il est aussi possible que ce soit dû à une détérioration des conditions de travail. Selon une autre étude : « Calcul des coûts du stress et des risques psychosociaux liés au travail » de l'Observatoire européen des risques, réalisée en 2014, 8 % à 10 % des maladies coronariennes en France seraient attribuables au stress au travail, mais aussi 9 % à 11 % des décès qui en découlent. Il serait aussi responsable de 15 % à 20 % des cas de dépressions et de syndromes anxieux chez les hommes et de 14 % à 27 % des cas chez les femmes. Cela représente entre 450 000 et 590 000 cas de maladies cardiovasculaires et de problèmes de santé mentale pour les hommes et entre 730 000 et 1,38 million de cas pour les femmes, ainsi que 910 à 1 130 décès pour les hommes et 150 à 280 décès pour les femmes. Parmi les conséquences possibles du stress au travail figurent aussi les suicides. Le Conseil économique, social et environnemental (CESE) les a estimés entre 300 et 400 par an. En 2009, la Sécurité sociale a reçu 72 déclarations de suicides et seulement 28 d'entre eux ont été reconnus comme liés au travail. Il lui demande, quels moyens peuvent être mis en œuvre afin de mieux mesurer les cas de suicide liés au travail. Aussi, face aux salariés en souffrance, les généralistes privilégient la prescription de médicaments, avant celle d'arrêts de travail. Une prise en charge peu adaptée, due entre autres choses à un manque de formation. Il ressort d'une étude Héraclès qu'un traitement médicamenteux par anxiolytiques, antidépresseurs et/ou somnifères a été prescrit à plus de 80 % des 525 patients présentant des troubles psychiques en lien avec leur activité. L'arrêt de travail arrive seulement en deuxième position. Il lui demande les moyens qu'elle entend mettre en œuvre dans le cadre de la formation continue ou pour les étudiants en médecine, pour qu'une formation en santé au travail, a fortiori en matière de prise en charge des pathologies psychiques d'origine professionnelle soit réalisée. Il l'interroge aussi sur la possibilité d'instaurer la présence au sein des entreprises d'un personnel dédié aux pathologies psychiques liées au travail, afin notamment de concilier productivité et bien-être des travailleurs.

Réponse émise le 25 juin 2019

La prévention des pathologies psychiques liées au travail s'inscrit dans le cadre de la Stratégie nationale de santé (SNS) qui porte, parmi ses priorités, l'amélioration de la transversalité entre santé publique et santé au travail, la continuité du parcours en santé et la question de la préservation de la santé mentale, dans le cadre et en dehors du cadre du travail. La SNS est déclinée dans le plan national de santé publique. Parmi les actions concrètes portant sur la santé mentale figurent notamment la mise en place d'un kit de prévention du suicide, la généralisation des dispositifs de contact des personnes à l'issue d'une tentative de suicide à leur sortie des urgences ou d'une d'hospitalisation, et l'étude des conditions de la mise en place d'une ligne d'appel nationale aux intervenants formés à l'intervention téléphonique de crise suicidaire. Un pilote de formation aux premiers secours en santé mentale sera aussi mis en œuvre. Concernant plus spécifiquement la possibilité d'instaurer la présence au sein des entreprises d'un personnel dédié aux pathologies psychiques liées au travail, il est important de rappeler que depuis la loi de modernisation sociale du 17 janvier 2002, l'employeur est non seulement responsable de la protection de la santé physique, mais aussi mentale des salariés. Ainsi, l'employeur doit mettre en œuvre, au titre des articles L. 4121-1 et suivants du code du travail, des actions d'évaluation et de prévention des risques psychosociaux dans l'organisation du travail. Pour mettre en œuvre de telles mesures de prévention, la présence de personnels formés à la prévention des risques est essentielle. Outre les personnels dédiés à cette tâche, qui peuvent être salariés ou non de l'entreprise et qui accompagnent l'employeur dans l'évaluation et la prévention du risque, les services de santé au travail jouent un rôle primordial, que ce soit en matière d'accompagnement individuel des salariés ou d'analyse des postes de travail sur le terrain. Les services de santé au travail disposent en leur sein des compétences pluridisciplinaires d'ergonomes ou de psychologues du travail. La prévention des risques passe également par un dialogue social de qualité au sein des entreprises. C'est pourquoi, le législateur a souhaité donner un rôle central aux instances représentatives du personnel. Le comité social et économique (CSE), appuyé le cas échéant par l'action d'une commission santé, sécurité et conditions de travail et de représentants de proximité, a ainsi pour rôle, notamment, de contribuer à la promotion de la santé, de la sécurité et des conditions de travail dans l'entreprise. Le CSE peut également mener des enquêtes en matière d'accidents du travail ou de maladies professionnelles ou à caractère professionnel. Les facteurs de risques psychosociaux font partie des risques pris en compte lors de ce types d'enquêtes. Il peut faire appel à un expert habilité lorsqu'un risque grave, identifié et actuel, révélé ou non par un accident du travail, une maladie professionnelle ou à caractère professionnel, est constaté dans l'établissement. De même, il peut faire recourir à l'expertise en cas d'introduction de nouvelles technologies ou de projet important modifiant les conditions de santé et de sécurité ou les conditions de travail. Le CSE dispose ainsi des moyens permettant d'identifier les éventuels facteurs de risques psychosociaux ainsi que les déterminants d'une transformation réussie au niveau de l'entreprise. Enfin, les membres du CSE bénéficient de la formation nécessaire à l'exercice de leurs missions en matière de santé, de sécurité et de conditions de travail, qui intègre notamment la prévention des risques psychosociaux comme les autres risques auxquels peuvent être confrontés les salariés.

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