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Jean-Luc Fugit
Question N° 5296 au Ministère de l'agriculture


Question soumise le 13 février 2018

M. Jean-Luc Fugit attire l'attention de M. le ministre de l'agriculture et de l'alimentation sur le déclin de population des abeilles qui jouent un rôle fondamental dans la biodiversité et, de fait, dans la protection de l'environnement. Afin de remédier à ce problème, les causes doivent être déterminées. En France, le nombre de colonies d'abeilles ne cesse de diminuer. Certains professionnels des régions de grandes cultures perdent chaque année jusqu'à 50 % de leurs ruches. Pour compenser ces pertes, les apiculteurs importent massivement des abeilles de races étrangères à développement fort et rapide. Ces abeilles ne semblent pas adaptées au biotope local. Les populations locales à développement plus lent, mais pourtant considérées comme bonnes productrices de miel sont délaissées. Ces implantations sauvages, souvent sans suivi, créent dans les populations indigènes des croisements incontrôlés qui ne donnent pas forcément de bons résultats, pire même, ces hybridations incontrôlées modifient profondément le potentiel génétique de la race et des écotypes locaux. Des associations dans toutes les régions tentent de préserver les espèces d'abeilles locales et notamment l'abeille noire. Il l'interroge sur l'aide pouvant être apportée aux associations qui œuvrent pour la préservation des espèces et la protection des écotypes d'abeilles locales.

Réponse émise le 17 juillet 2018

Fortement conscient du rôle de l'apiculture, tant pour la biodiversité que par la production de miel ou d'autres produits de la ruche, le ministère de l'agriculture et de l'alimentation est attentif à l'évolution de la filière apicole. Des mesures de protection de l'abeille noire sont proposées par l'intermédiaire de conservatoires, constitués sous forme d'associations, et concernent les conditions d'implantation et d'élevage des abeilles issues d'importations ou hybridées avec les populations autochtones. L'institut technique de l'abeille (ITSAP) et l'institut national de la recherche agronomique mènent une étude conjointe visant à caractériser les populations d'abeilles existantes en France, ceci aussi bien du point de vue de leur patrimoine génétique que du point de vue de leur production (projet SeqApiPop). Aucun lien n'a été démontré entre la présence d'hybrides élevés localement et la transmission de maladies ; les abeilles autochtones comme l'abeille noire paraissent toutes aussi sensibles aux maladies que les abeilles importées. Les mesures proposées par les conservatoires partent du principe que les populations autochtones à conserver seraient « pures » et distinctes des populations périphériques, supposées hybridées. Cependant, le travail réalisé lors du projet SeqApiPop démontre au contraire que toutes les populations d'abeilles utilisées en France (y compris dans les conservatoires à l'exception de celles de l'association conservatoire de l'abeille noire bretonne) présentent déjà un niveau d'hybridation important. Ce bilan est cohérent avec la biologie de la reproduction des abeilles, l'ancienneté et l'ampleur des pratiques de transhumances et d'hybridations. Ce constat était largement partagé par les apiculteurs français dont plus de la moitié déclaraient, lors d'une enquête réalisée en 2012, la présence, dans leurs ruches, d'abeilles distinctes de l'abeille noire. Par ailleurs, un cahier des charges a été rédigé par l'ITSAP et le centre national de la recherche scientifique (CNRS) pour détailler les exigences rigoureuses à appliquer par les conservatoires pour maintenir une population sans risque trop important d'hybridation. Aujourd'hui, dans les faits, un état des lieux réalisé en 2015 par le CNRS montre une grande hétérogénéité des structures qui revendiquent la dénomination « conservatoire » et aucune structure ne met en place des actions d'ampleur suffisante pour satisfaire à ces exigences à l'exception du conservatoire de l'abeille noire d'Île-de-France et du conservatoire de l'abeille noire bretonne. Dans les conditions actuelles de fonctionnement des conservatoires, la proposition d'interdire systématiquement d'implanter et d'élever d'autres abeilles que l'abeille noire à proximité des conservatoires serait le plus souvent difficile ou impossible à mettre en œuvre pour les deux raisons déjà énoncées. Des mesures réglementaires auraient pour conséquence de stigmatiser certains apiculteurs sur le critère inapplicable de la « pureté » de leurs abeilles, alors même que les populations sont déjà largement hybridées. La filière apicole s'inscrit dans une perspective durable de développement, tant pour garantir le rôle fondamental que jouent les colonies d'abeilles dans la biodiversité que pour augmenter la production de miel et de produits de la ruche. À ce titre, le programme apicole européen, doté d'un budget de 11,3 millions d'euros sur la période 2017-2019 dont la moitié provient de crédits nationaux, finance des actions d'assistance technique et de formation, la rationalisation de la transhumance, des actions sanitaires, l'aide au maintien et développement de cheptel, des programmes de recherche appliquée. Le comité d'experts apicole rattaché au conseil national d'orientation de la politique sanitaire animale et végétale associe toutes les parties prenantes concernées par les questions sanitaires de la filière apicole. Depuis 2015, ses réunions biannuelles ont été l'occasion d'aborder de nombreux sujets et notamment ceux de la surveillance et de la protection des ruchers.

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