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Jean-Luc Mélenchon
Question N° 5683 au Ministère de l'agriculture


Question soumise le 20 février 2018

M. Jean-Luc Mélenchon attire l'attention de M. le ministre de l'agriculture et de l'alimentation sur le problème de la pêche illégale en Guyane. La Guyane pourrait être un exemple mondial de la pêche durable du fait de la richesse de ses eaux et de sa biodiversité exceptionnelle. La population guyanaise de pêcheurs est essentiellement artisanale, 190 bateaux côtiers de moins de 12 mètres et 22 chalutiers crevettiers semi-industriels de 24 mètres. Les acteurs de la petite pêche locale se battent pour améliorer leurs pratiques de pêche. Ils ont, par exemple, interdit le chalutage de fond entre 0 et 30 mètres pour protéger les zones sensibles de nourriceries. Ils souhaitent la mise en place un plan de gestion des ressources en évitant la surexploitation des stocks. Or la pêche illégale va à l'encontre de tout plan de gestion des ressources. D'après les locaux les navires de pêche illégale sont environ 30 par jour. Ils agissent de nuit, avec des méthodes de pêche destructrices interdites en Europe. Ils ont une efficacité de pêche inquiétante et ramassent des quantités énormes de poissons et d'organismes marins. La France ferme les yeux sur le désastre de la pêche illégale. Ces pêcheurs viennent du Suriname, du Brésil, du Guyana et sont lourdement armés. Ils réalisent le double des captures que les petits pêcheurs locaux (6 000 tonnes contre 3 000). La marine française possède plusieurs navires dans les eaux guyanaises afin de protéger la base spatiale de Kourou. Pourtant ces navires ne s'aventurent jamais dans les estuaires des trois grands fleuves de Guyane, là où le pillage a lieu. Les pêcheurs illégaux savent que les eaux guyanaises sont peu contrôlées et que les sanctions sont faibles. La passivité de l'État français sur cette question entraîne la mort lente de l'activité de pêche guyanaise, de l'environnement marin et de sa biodiversité. L'ironie du sort est que les poissons capturés illégalement sont transformés au Surinam, au Guyana ou au Brésil dans des usines modernes absentes en Guyane faute de financement. En effet, les pays frontaliers de la Guyane ont reçu des subventions du Fonds européen au titre de l'aide au développement. M. le député se demande si c'est là le modèle que la France soutient ? Des activités illégales, un travail sous-payé réalisé dans des conditions dangereuses, la surexploitation des ressources et la dégradation inexorable de l'environnement marin. Cela pour alimenter en matière première des usines qui ne profitent pas à l'économie locale et à l'emploi mais subventionnées par des fonds européens qui font de la concurrence déloyale à la Guyane ? Un autre modèle est possible et nécessaire. M. le député se demande quelles sont les actions de la France contre la pêche illégale. Il aimerait savoir quels sont les investissements de l'État pour mettre fin aux inégalités de traitement entre les Français d'outre-mer et ceux de l'Hexagone. Il lui demande quelles politiques publiques mettre en œuvre pour faire de la Guyane une économie locale dynamique et durable, tournée vers la transition écologique.

Réponse émise le 22 mai 2018

Les pêcheurs guyanais sont soumis aux règles de la politique commune des pêches, alors que certains pêcheurs surinamais et brésiliens pêchent en dehors de tout cadre légal les ressources présentes dans les eaux françaises. Des inspections, déroutements et destructions de navires illégaux constituent la réponse de l'État aux activités de pêche illégale en Guyane. À titre d'illustration, 32 déroutements de « tapouilles » ont été conduits pour l'année 2017 en Guyane. Aussi, il a été décidé le 26 janvier 2018, de confier au préfet de Guyane, en lien avec les autres administrations civiles et militaires participant au contrôle, l'élaboration des grandes lignes d'une nouvelle stratégie de contrôle et de maîtrise des eaux guyanaises. Celle-ci pourra s'appuyer sur des éléments nouveaux du dispositif de lutte, actuellement en cours de mise en place, notamment la création d'une deuxième unité de l'unité littorale des affaires maritimes dotée d'un moyen nautique, et l'usage expérimental de drones. Ce renforcement des moyens, accompagné d'une stratégie d'optimisation, s'accompagne d'une coopération au niveau régional et bilatéral avec les états voisins en matière de contrôle. Des opérations conjointes avec le Brésil ont lieu régulièrement, et les contacts avec le Venezuela et le Surinam ont permis des avancées récentes. Notamment s'agissant du Venezuela, un accord a été conclu afin de permettre à un nombre limité de pêcheurs de ce pays de bénéficier de licences de pêche dans la zone économique exclusive française. Ces activités autorisées dans ce cadre, sont très contrôlées. La bonne coopération avec le Venezuela est donc essentielle et fait l'objet d'un suivi attentif par la direction de la mer de Guyane, consciente de l'importance, pour le tissu économique local, de cette pêcherie vénézuélienne puisque ses produits sont débarqués et transformés sur le sol guyanais. Au-delà de ces relations entretenues avec chacun des états voisins, la France soutient le développement et le renforcement de la commission des pêches pour l'Atlantique centre ouest, qui rassemble les états pêcheurs et côtiers de la zone. Cette organisation est une des enceintes appropriées pour la mise en œuvre d'une coordination régionale contre la pêche illicite non déclarée non réglementée, puisque la problématique dépasse largement les zones économiques exclusives nationales. Enfin, le secteur de la pêche guyanaise a pu bénéficier, au titre du fonds européen pour la pêche, d'un appui au développement de son activité à hauteur de 4,8 M€ sur la période 2007-2013 (dont plus de 3,5 M€ pour les seules actions de transformation). De même, au titre de la programmation actuelle, le fonds européen pour les affaires maritimes et la pêche permet d'apporter, via notamment les plans de compensation des surcoûts (PCS), gérés par la collectivité territoriale, un soutien important aux opérateurs de ce secteur. À ce stade, 7 M€ ont déjà été payés au titre des PCS en Guyane.

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