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Laurence Trastour-Isnart
Question N° 6132 au Ministère de la cohésion des territoires


Question soumise le 6 mars 2018

Mme Laurence Trastour-Isnart alerte M. le ministre de la cohésion des territoires sur les difficultés d'application de la loi du 13 décembre 2000 relative à la solidarité et au renouvellement urbains. L'article 55 impose pour les communes, d'ici 2025, l'obligation de disposer d'un taux minimum de logements sociaux de 25 % pour celles dont la population est au moins égale à 1 500 habitants en Île-de-France et 3 500 habitants dans les autres régions de France, selon des modalités précises. Cette loi avait vocation à améliorer la cohérence urbaine et territoriale et à renforcer la solidarité entre les villes au moyen d'une politique de l'habitat adaptée. Aujourd'hui, force est de constater son inadéquation en raison de l'application uniforme et centralisatrice qui ne tient pas compte de la spécificité des territoires. Les 25 % imposés par cette loi sont inadaptés et disproportionnés. En effet, nombre de communes ne sont pas en mesure d'y répondre en raison de contraintes géographiques et réglementaires comme la loi littoral, la loi montagne, le plan de prévention des risques incendie et inondation, les normes sismiques, les espaces naturels, la topographie... L'application autoritaire de la loi SRU doit donc être assouplie par une approche territoriale pragmatique. Parce que les problématiques ne sont pas les mêmes sur tout le territoire national, il conviendrait d'autoriser le droit à la différenciation par la contractualisation en faisant évoluer la loi plutôt qu'en assignant des objectifs irréalisables et pénalisant. À titre d'exemple, le département des Alpes-Maritimes, comptait 22 communes carencées à l'issue du bilan triennal 2014-2016, sans compter les prélèvements annuels SRU. Aussi, elle souhaiterait connaître les intentions du Gouvernement pour adapter le dispositif SRU afin de prendre en compte les spécificités des territoires, d'être plus proche de la réalité et donc de repenser la territorialisation de la politique du logement.

Réponse émise le 4 décembre 2018

Ainsi qu'il l'a rappelé tout au long de la discussion parlementaire relative au projet de loi portant évolution du logement, de l'aménagement et du numérique (Elan), le Gouvernement considère que le dispositif de l'article 55 de la loi relative à la solidarité et au renouvellement urbains (SRU) est équilibré, s'agissant de son périmètre d'application et du niveau des obligations assignées aux communes en matière de logement social (20 ou 25 % des résidences principales), au regard des spécificités locales. Toutes les communes aujourd'hui soumises à obligation de rattrapage et à l'effort de solidarité, dès lors qu'elles n'atteignent pas le taux légal applicable, sont nécessairement situées dans des agglomérations tendues, au sein desquelles la demande de logement social est largement supérieure à l'offre de logements disponible. Quand elles sont situées hors de ces agglomérations, ces communes sont cependant pleinement intégrées, notamment par le réseau de transport en commun, aux bassins d'activités et d'emplois. C'est tout particulièrement le cas des communes soumises à l'article 55 de la loi SRU dans le département des Alpes-Maritimes, dans lequel la demande en logement social est parmi les plus élevées de France (10 demandeurs en attente pour 1 attribution sur l'agglomération niçoise, plus de 13 demandeurs pour 1 attribution sur l'agglomération de Menton-Monaco, etc.). Le dispositif tel qu'issu de la loi relative à l'égalité et à la citoyenneté du 27 janvier 2017, et inchangé par la loi du 23 novembre 2018 dite loi Elan, permet d'exempter de cet effort les communes situées dans des agglomérations peu tendues, ou hors des agglomérations, dans des secteurs isolés, mal desservis, et peu attractifs, aussi bien pour les ménages modestes que pour les bailleurs sociaux. Le mécanisme en vigueur permet également de supprimer les obligations de développement de l'offre dans des communes fortement contraintes, dont plus de la moitié du territoire urbanisé est grevé par des servitudes ou des dispositions limitant trop fortement ou interdisant la construction (plan de protection des risques, plan d'exposition au bruit, servitudes environnementales, etc.). C'est ainsi que sur la base de ces critères, le Gouvernement a pris le 28 décembre 2017, un décret permettant d'exempter pour les années 2018 et 2019, 274 communes de l'obligation SRU. Cela permet de mieux tenir compte des réalités territoriales et mieux articuler le périmètre d'application de l'article 55 de la loi SRU à ces réalités et renforcer sa cohérence et sa crédibilité. Ce sont au final un peu plus de 1 000 communes qui restent soumises à l'obligation de rattrapage. Elles doivent lancer des dynamiques vertueuses de développement de l'offre de logements, à ce jour insuffisante en regard des besoins, au profit des plus fragiles de nos concitoyens. Parmi ces communes, il se trouve bien entendu des communes littorales, de montagne, ou soumises à des contraintes de construction réglementaires, géographiques ou topographiques. Mais elles ne sauraient être exemptées de l'obligation SRU sur ces seuls critères, dès lors qu'elles ne répondent pas aux conditions d'exemption précitées, à plus forte raison au regard du fait que bien souvent, on y observe un développement, parfois massif, de l'offre de logements privés, voire de résidences secondaires. Quand bien même dans ces secteurs, l'offre de foncier disponible est parfois restreinte et/ou coûteuse, le Gouvernement rappelle que le développement de l'offre de logements sociaux peut alors s'y opérer par conventionnement du parc existant. Par ailleurs, preuve de son ancrage aux territoires, le mécanisme de l'article 55 de la loi SRU permet aux communes soumises à obligation de rattrapage d'adapter momentanément (sur trois ans) le rythme de ce rattrapage, dans le cadre de programmes locaux de l'habitat (PLH) « mutualisateurs » des objectifs à l'échelle de l'intercommunalité, pour tenir compte des projets des territoires et de leur échelonnement dans le temps. La loi Elan a même élargi ce dispositif en permettant, par contractualisation, pour les communes proches de l'objectif légal de 25 % de logements sociaux, de finaliser l'effort par report de la production sur d'autres communes de l'intercommunalité, sous l'égide et la responsabilité des établissements publics de coopération intercommunale (EPCI) d'appartenance volontaires et disposant de tous les leviers d'action pour mettre en œuvre ces dispositions (compétence urbanisme, couverture par un PLH, et délégation des aides à la pierre). Enfin, toujours dans le cadre de la loi Elan, le Gouvernement a encore mieux enraciné le dispositif SRU dans les réalités territoriales. Ainsi, pour toutes les communes nouvellement soumises à rattrapage en matière de logement social, l'échéance légale d'atteinte du taux légal de logement social fixé pour tous les territoires à 2025 par la loi du 18 janvier 2013 relative à la mobilisation du foncier public en faveur du logement et au renforcement des obligations de production de logement social, a été remplacée par une échéance variable fixée au terme de la cinquième période triennale pleine suivant l'entrée de la commune dans le mécanisme.

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