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Aude Luquet
Question N° 6692 au Ministère de la justice


Question soumise le 20 mars 2018

Mme Aude Luquet attire l'attention de Mme la garde des sceaux, ministre de la justice, sur l'application de la loi n° 2016-339 du 22 mars 2016 relative à la prévention et à la lutte contre les incivilités, contre les atteintes à la sécurité publique et contre les actes terroristes dans les transports collectifs de voyageurs. L'article 21 prévoit que les agents des services de sécurité interne, spécialement désignés par le transporteur, peuvent interdire à toute personne dont le comportement est susceptible, soit de compromettre la sécurité des personnes, soit de troubler l'ordre public, l'accès du véhicule ou la contraindre à en descendre ou à quitter sans délai les espaces, gares ou stations et, en tant que de besoin, requérir l'assistance de la force publique. Or les transporteurs regrettent que la justice n'utilise pas tous les moyens mis à sa disposition pour lutter contre la petite délinquance, source d'insécurité et de sentiment d'insécurité, notamment avec la possibilité pour un magistrat d'interdire aux délinquants multirécidivistes de paraître dans les gares ou sur les lignes où ils commettent habituellement leurs méfaits. Aussi, cette interdiction de paraître n'étant que très rarement prononcée, elle lui demande si elle entend adresser à l'ensemble des magistrats, une directive pénale les incitant à utiliser davantage l'interdiction de paraître dans des gares ou sur des lignes à l'encontre des délinquants récidivistes qui ont l'habitude d'y sévir.

Réponse émise le 15 mai 2018

Les magistrats peuvent prononcer des mesures d'interdiction de paraître aux différents stades de la procédure pénale. Ainsi, dans le cadre d'un contrôle judiciaire, une interdiction de se rendre dans certains lieux peut être ordonnée par le juge d'instruction ou le juge des libertés et de la détention (article 138 du code de procédure pénale). Au titre des alternatives à l'emprisonnement, l'article 131-6, 12° prévoit « l'interdiction, pour une durée de trois ans au plus, de paraître dans certains lieux ou catégories de lieux déterminés par la juridiction et dans lesquels l'infraction a été commise ». Une interdiction de séjour peut également être prononcée comme peine complémentaire. Définie par l'article 131-31 du code pénal, elle emporte défense de paraître dans certains lieux déterminés par la juridiction et comporte, en outre, des mesures de surveillance et d'assistance. La juridiction de jugement fixe la liste des lieux interdits ainsi que les mesures de surveillance et d'assistance, qui peuvent être modifiées par le juge de l'application des peines, dans les conditions fixées par le code de procédure pénale. Cette peine d'interdiction de séjour est prévue pour des infractions susceptibles d'être commises dans les transports, telles que des vols (article 311-14, 5° du code pénal), dégradations (article 322-15, 4°), violences volontaires ou agressions sexuelles (article 222-47). La juridiction de jugement dispose d'un large pouvoir de personnalisation des peines en vertu de l'article 132-1 du code pénal : « toute peine prononcée par la juridiction doit être individualisée. Dans les limites fixées par la loi, la juridiction détermine la nature, le quantum et le régime des peines prononcées en fonction des circonstances de l'infraction et de la personnalité de son auteur ainsi que de sa situation matérielle, familiale et sociale ». La peine ayant pour fonctions, selon l'article 130-1 du code pénal, « de sanctionner l'auteur de l'infraction et de favoriser son amendement, son insertion ou sa réinsertion », le juge apprécie souverainement l'opportunité d'ordonner, contre un auteur d'incivilités, une interdiction de paraître dans des gares ou sur des lignes, mesure qui doit être proportionnée et envisagée sous réserve de ne pas être une entrave à la réinsertion du condamné.

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