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Jean-Philippe Ardouin
Question N° 6865 au Ministère de l'éducation nationale


Question soumise le 27 mars 2018

M. Jean-Philippe Ardouin attire l'attention de M. le ministre de l'éducation nationale sur la nécessaire prévention du suicide chez les adolescents scolarisés. Chaque année, on déplore une quarantaine de décès par suicide chez les moins de 15 ans, et environ 600 chez les 15-24 ans. Au-delà de ce chiffre, autour de 40 000 adolescents tentent de se donner la mort chaque année, constat alarmant qui doit nous conduire à évaluer les éléments de dépistage pour éviter tout risque de récidive. Le suicide d'un adolescent est un scandale et un drame qui nous affecte tous, car il touche au-delà du cercle familial et des proches, tous les membres de la communauté enseignante où pouvait être scolarisée l'adolescent. Il reflète une incompréhension, et pousse à vouloir éviter une nouvelle fois la tragédie. La Charente-Maritime a connu dernièrement un suicide en milieu scolaire qui a bouleversé la communauté enseignante de la structure en internat où était scolarisé l'adolescent malheureusement passé à l'acte. Aussi, il souhaite connaître les mesures que compte prendre le Gouvernement pour accompagner et soutenir concrètement la communauté enseignante et les élèves concernés par un drame de ce type.

Réponse émise le 10 décembre 2019

Le taux de décès par suicide en France ainsi que dans le monde, est en diminution. Cet état de fait est lié aux stratégies préventives gouvernementales. L'observatoire national du suicide (ONS) a été créé en France en 2013. Le 3e rapport national de l'Observatoire National du Suicide (ONS) de février 2018 indique qu'en France métropolitaine, en 2014, 8 885 décès par suicide ont été enregistrés, soit près de 24 décès par jour. Malgré une baisse de 26 % du taux de suicide entre 2003 et 2014, la France présente, au sein des pays européens, un des taux de suicide les plus élevés derrière les pays de l'Est, la Finlande et la Belgique. Elle est au 10e rang sur 32. Le taux de décès par suicide est plus faible chez les adolescents qu'en moyenne dans la population (deux catégories d'âge présentent une surmortalité : les 45-54 ans et les plus de 75 ans). Mais il représente, chez les 15-24 ans, la deuxième cause de mortalité après les accidents de la circulation, soit 16.2% des décès. Les causes extérieures incluant les suicides et les accidents de la circulation représentent ensemble 58.3% des décès dans cette tranche d'âge (Source : INSERM CépiDc et Santé Publique France). Le Baromètre de Santé publique France 2017 apporte des connaissances sur les idées suicidaires et les tentatives de suicide (TS) dans la population générale et chez les actifs. Près de 5% des 18-75 ans de la population générale déclaraient avoir pensé à se suicider au cours des 12 derniers mois et plus de 7% déclaraient avoir fait une TS au cours de la vie. Les femmes étaient plus touchées que les hommes. 200 000 TS ont été recensées en 2014, 89 000 hospitalisations suite à des TS (source : Réseau OSCOUR, Santé Publique France et Observatoire National du Suicide). Les adolescents de 17 ans ont été interrogés dans le cadre de l'enquête Escapad (Enquête sur la santé et les consommations lors de l'appel de préparation à la défense) de l'OFDT. Il en ressort qu'en 2017, près de 3% des adolescents déclaraient avoir fait au cours de leur vie une TS ayant nécessité une hospitalisation. La situation des filles est particulièrement préoccupante avec une augmentation des TS et des pensées suicidaires depuis 2011. Les variables associées à ces conduites suicidaires sont les troubles psychologiques et psychiatriques, le décrochage scolaire et les consommations de substances psychoactives (alcool, tabac et drogues illicites). L'analyse des hospitalisations pour TS par Santé Publique France confirme la situation préoccupante des jeunes filles âgées de 15 à 19 ans. C'est dans cette population que le taux le plus élevé est systématiquement observé quelle que soit l'année. Par ailleurs, sur l'ensemble de la population, le nombre d'hospitalisations pour TS a diminué entre 2008 et 2017, passant de plus de 100 000 par an à environ 89 000 en 2017, cette baisse étant plus marquée chez les femmes. Par contre, le taux annuel de récidives de TS hospitalisées est resté constant. Certaines régions sont plus touchées que d'autres et cette différence présente en 2008 perdure en 2017. Le suicide est un phénomène complexe et multifactoriel qui appelle à une analyse pluridisciplinaire. Il engendre un fort impact au niveau émotionnel, qui dépasse la sphère familiale du suicidé. Le suicide des jeunes entraine une véritable onde de choc au niveau sociétal et au sein de la communauté éducative. Pour son troisième rapport, l'Observatoire national du suicide porte son attention sur les enjeux éthiques que soulève la prévention du suicide et sur les comportements suicidaires chez les jeunes, leurs singularités ainsi que les actions efficaces pour les prévenir. Les stratégies de prévention du suicide au niveau régional s'adaptent au contexte et aux ressources locales. Les objectifs sont le maintien du contact avec les personnes ayant fait une TS, le développement d'actions ciblées ; l'amélioration de la formation des personnels. Actions en milieu scolaire : En cas de survenue d'un évènement majeur grave, le chef d'établissement ou le directeur d'école prévient le directeur académique des services de l'éducation nationale (DASEN) ou l'inspecteur de l'éducation nationale (IEN) pour signaler l'événement. Il peut saisir le centre de ressources départemental (CRD), instance d'accompagnement des écoles et des établissements scolaires confrontés à une situation grave ou à un événement traumatisant qui a une répercussion émotionnelle forte au sein de la communauté scolaire. Le CRD décide alors, en concertation avec le chef d'établissement ou le directeur d'école et l'IEN, de l'activation éventuelle d'une cellule d'écoute et d'accompagnement. L'objectif de ce dispositif est de réaliser des activités d'accompagnement de la communauté scolaire visant à réduire les répercussions néfastes dus à la survenue d'un événement grave et traumatisant. Cette cellule est constituée de personnels formés, assistants de service social, infirmiers, médecins, psychologues, généralement rattachés à l'établissement, mais également selon les besoins, issus d'autres établissements. Dès qu'il est activé, le centre de ressources départemental reste à disposition de la communauté scolaire pour la soutenir quel que soit le dispositif mis en place, se tient à disposition du coordonnateur de la cellule d'écoute pendant tout le temps d'intervention, informe le DASEN de l'évolution de la situation, évalue chaque intervention au cas par cas et prépare le bilan annuel départemental du dispositif. Selon la situation, la cellule d'urgence medio -psychologique (CUMP) rattachée au SAMU peut être déclenchée par le SAMU après évaluation de la situation et l'indication d'intervention posée par le psychiatre référent ; l'activation de la CUMP peut être effectuée à la demande du Préfet dans le cadre des plans relevant de sa responsabilité. (Décret du 7 janvier 2013 renforcé par le décret du 6 octobre 2016).   Prévention individuelle et collective : Les comportements suicidaires des adolescents constituent une préoccupation majeure de santé publique, les questions relatives au bien-être des élèves, de leur réussite scolaire, et de la réduction des inégalités sont réaffirmées par la loi pour une école de la confiance portée par le ministre de l'éducation nationale et de la jeunesse et promulguée le 28 juillet 2019. Une convention cadre de partenariat a été signée en novembre 2016 entre le ministère de l'éducation nationale et de la jeunesse (MNEJ) et le ministère de la santé et des solidarités (MSS) afin de renforcer leur coopération à tous les échelons territoriaux notamment par la mise en place de partenariat entre les agences régionales de santé (ARS) et les rectorats, pour la promotion du bien-être psychique et de la santé mentale, et pour la prévention et la détection précoces de la souffrance et des troubles psychiques. D'une manière générale, l'implication des acteurs de l'Ecole, dans le cadre de leurs missions et de leurs compétences respectives, relève de la promotion de la santé mais aussi du repérage et de l'orientation de jeunes en situation de souffrance psychique. La promotion de la santé est inscrite dans le code de l'éducation. A ce titre, les élèves bénéficient, au cours de leur scolarité, d'actions de prévention et d'information, de visites médicales et de dépistage obligatoires, qui constituent leur parcours de santé dans le système scolaire. Les élèves bénéficient également d'actions citoyennes et de promotion de la santé, qui favorisent notamment leur réussite scolaire et la réduction des inégalités en matière de santé. La prévention des situations de décrochage scolaire et d'absentéisme fait l'objet d'attentions et de mesures spécifiques, par l'intervention de l'ensemble de la communauté éducative en partenariat avec les acteurs de l'Ecole. Pour améliorer le repérage des élèves en situation de souffrance psychique et accompagner les acteurs des établissements : - des formations au repérage de la crise suicidaire sont menées dans les académies en partenariat avec les agences régionales de santé. Ces formations de sensibilisation sont destinées aux professionnels de première ligne, sur la base du volontariat ; - un parcours de formation à distance destiné aux infirmiers de l'EN, sur le thème de la santé mentale, est en cours de réalisation. Il sera mis à disposition sur la plateforme M@gistère ; - le dispositif expérimental « Ecout'Emoi », piloté par la direction générale de la santé (DGS) en lien avec les agences régionales de santé (ARS) et les rectorats, et conduit de 2017 à 2020, auprès des jeunes de 11 à 21 ans en souffrance psychique, sur trois territoires dans les régions Ile de France, Pays de la Loire et Grand Est, vise à organiser la prise en charge de la souffrance psychique de 500 jeunes de 11 à 21 ans. Cette expérimentation « Ecout'Emoi » a fait l'objet d'une mesure dans la loi de financement de la sécurité sociale 2017. Les personnels du ministère de l'éducation nationale participent à cette expérimentation par le repérage des signes de souffrance psychique chez un élève de 11 à 21 ans et l'orientation vers un médecin évaluateur (médecin traitant, médecin généraliste, médecin scolaire ou pédiatre). Après une évaluation de la situation globale du jeune un accompagnement psychologique par un psychologue clinicien est proposé ; comprenant 12 séances maximum, entièrement prises en charge par le dispositif. L'évaluation actuelle du dispositif permettra de mettre en lumière la pertinence de celui-ci et l'intérêt de le généraliser à l'ensemble du territoire.

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