Photo issue du site de l'Assemblée nationale ou de Wikipedia

Éric Alauzet
Question N° 7239 au Ministère de l'économie


Question soumise le 10 avril 2018

M. Éric Alauzet attire l'attention de M. le ministre de l'économie et des finances sur la non prise des décrets d'application de la loi n° 2017-399 relative au devoir de vigilance des sociétés mères et des entreprises donneuses d'ordre. À l'issue de débats parlementaires denses et animés, la loi n° 2017-399 relative au devoir de vigilance des sociétés mères et des entreprises donneuses d'ordre a été votée puis promulguée le 27 mars 2017. Elle établit une nouvelle norme ambitieuse en matière de responsabilité sociale des entreprises avec une obligation, pour les sociétés par actions employant au moins 500 salariés en France ou 10 000 dans le monde, de définir, de publier et de mettre en œuvre un « plan de vigilance ». Cette « vigilance » concerne aussi bien la protection des droits de l'Homme que celle de la santé et de l'environnement. Elle s'étend à la société et à l'ensemble de ses filiales mais aussi à ses sous-traitants. La prise en compte des risques de l'activité sur l'ensemble de la chaîne de sous-traitance est une avancée forte en matière de responsabilité sociale et environnementale des entreprises : elle empêche que l'entreprise se décharge de ses responsabilités sur des sous-traitants soumis à des normes très variables en la matière et parfois peu regardantes. Le plan doit notamment intégrer une cartographie des risques, des procédures d'évaluation des sous-traitants, des actions visant à atténuer les risques, un mécanisme d'alerte et un dispositif de suivi des actions. Pourtant, un an après sa promulgation, les décrets nécessaires à l'application de cette loi se font toujours attendre et elle n'a jamais pu être appliquée. Il lui demande sous quelle échéance et dans quelles modalités les mesures nécessaires à une pleine application de cette loi seront-elles prises.

Réponse émise le 8 mai 2018

Le premier alinéa de l'article 1er de la loi no 2017-399 du 27 mars 2017 relative au devoir de vigilance des sociétés mères et des entreprises donneuses d'ordre prévoit l'obligation, pour les sociétés qui emploient, à la clôture de deux exercices consécutifs, au moins 5 000 salariés en son sein et dans ses filiales directes ou indirectes dont le siège social est fixé sur le territoire français, ou au moins 10 000 salariés en son sein et dans ses filiales directes ou indirectes dont le siège social est fixé sur le territoire français ou à l'étranger, d'établir et de mettre en œuvre un plan de vigilance. Cet article précise ensuite le contenu de ce plan, dont les mesures sont limitativement fixées par ses quatrième à neuvième alinéas : « [le plan de vigilance] comprend les mesures suivantes : 1° Une cartographie des risques destinée à leur identification, leur analyse et leur hiérarchisation ; 2° Des procédures d'évaluation régulière de la situation des filiales, des sous-traitants ou fournisseurs avec lesquels est entretenue une relation commerciale établie, au regard de la cartographie des risques ; 3° Des actions adaptées d'atténuation des risques ou de prévention des atteintes graves ; 4° Un mécanisme d'alerte et de recueil des signalements relatifs à l'existence ou à la réalisation des risques, établi en concertation avec les organisations syndicales représentatives dans ladite société ; 5° Un dispositif de suivi des mesures mises en œuvre et d'évaluation de leur efficacité ». Le seul décret en Conseil d'État mentionné dans la loi, à la suite de ce 5°, est facultatif. Le dixième alinéa indique en effet qu'un tel décret « peut compléter les mesures de vigilance prévues […] [et] peut préciser les modalités d'élaboration et de mise en œuvre du plan de vigilance (…) ». Ce décret facultatif n'est pas nécessaire à l'application de la loi, dont l'article 4 fixe les modalités d'entrée en vigueur : les obligations fixées par le I. de son article 1er, c'est-à-dire celles d'établir et de mettre en œuvre de manière effective un plan de vigilance, à l'exception du compte-rendu, sont applicables pour les sociétés concernées à partir de l'exercice en cours au 28 mars 2017 ; les autres dispositions de la loi, c'est-à-dire celles d'effectuer un compte-rendu et celles indiquant le régime attaché aux manquements aux obligations nouvelles, sont applicables à partir du rapport de gestion de chaque société portant sur le premier exercice ouvert à partir du 28 mars 2017 (c'est-à-dire, en pratique généralement, à partir des rapports paraissant en 2019).  Les obligations d'établir et de mettre en œuvre le plan de vigilance étant déjà applicables, le décret facultatif prévu pourrait, le cas échéant, préciser le contenu ou les modalités de présentation de certains items du plan prévus par la loi. L'opportunité d'adopter un tel décret sera examinée par le ministère, une fois qu'un premier bilan de l'application complète de la loi aura pu être réalisé.

Aucun commentaire n'a encore été formulé sur cette question.

Cette législature étant désormais achevée, les commentaires sont désactivés.
Vous pouvez commenter les travaux des nouveaux députés sur le NosDéputés.fr de la législature en cours.