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Delphine Batho
Question N° 7407 au Ministère de la transition écologique et solidaire


Question soumise le 17 avril 2018

Mme Delphine Batho interroge M. le ministre d'État, ministre de la transition écologique et solidaire, sur les difficultés que rencontrent les fabricants de matériaux biosourcés utilisés notamment dans le cadre de travaux d'isolation thermique des bâtiments, dont le chanvre et la paille. L'article 14 de la loi n° 2015-992 du 17 août 2015 relative à la transition énergétique pour la croissance verte stipule que « l'utilisation des matériaux biosourcés concourt significativement au stockage de carbone atmosphérique et à la préservation des ressources naturelles. Elle est encouragée par les pouvoirs publics lors de la construction ou de la rénovation des bâtiments ». Cette filière, qui a été identifiée dès 2010 par le Commissariat général au développement durable comme l'une des 18 filières vertes ayant un potentiel de développement économique élevé pour l'avenir, rencontre cependant une barrière réglementaire importante. En effet, les matériaux biosourcés non couverts par des avis techniques sont, de fait, exclus du marché compte tenu des conditions d'attribution des aides et crédits d'impôt. Il suffirait pour régler cette difficulté que l'article 18 bis du code général des impôts fasse mention de la possibilité de justifier l'emploi de matériaux isolants à partir des valeurs par défaut figurant sur l'arrêté du 26 octobre 2010 relatif aux caractéristiques thermiques et aux exigences de performance énergétique des bâtiments nouveaux et des parties nouvelles de bâtiment, ou bien qu'une circulaire interprétant la législation en ce sens soit publiée. De très nombreuses structures rencontrent des difficultés pour obtenir ces avis techniques en raison des procédures souvent longues et coûteuses pour les petits industriels. Aussi elle souhaite connaître les mesures que le Gouvernement envisage pour favoriser la reconnaissance et l'utilisation des matériaux biosourcés.

Réponse émise le 14 août 2018

Le ministère de la transition écologique et solidaire (MTES) est particulièrement attaché à promouvoir l'incorporation de matériaux biosourcés dans les constructions neuves et les travaux de rénovation. Ces solutions présentent un potentiel de réduction de l'empreinte carbone du secteur du bâtiment de par le stockage de carbone qu'elles offrent. Elles tendent à rendre le secteur de la construction plus sobre dans l'usage des ressources non-renouvelables. Par ailleurs, elles sont un vecteur reconnu de développement de l'économie locale des territoires. Les services du ministère, et plus particulièrement la direction générale de l'aménagement, du logement et de la nature (DGALN), œuvrent ainsi au développement des filières de la construction biosourcée et à la valorisation des services environnementaux qu'elles rendent. L'article 18 bis du 5° « Crédit d'impôt de la transition énergétique » (CITE), de l'annexe 4 du code général des impôts précise les matériaux d'isolation thermique pour lesquels les contribuables domiciliés en France métropolitaine peuvent bénéficier d'un crédit d'impôt sur le revenu. Pour entrer dans les conditions d'éligibilité, les matériaux doivent avoir évalué leur résistance thermique selon les normes NF EN 12664, NF EN 12667 ou NF EN 12939 pour les isolants non-réfléchissants. L'éligibilité au CITE repose donc sur une caractérisation précise des propriétés thermiques des matériaux, avec une valeur minimale de résistance thermique à respecter. La facture fournie par l'entreprise (RGE, i.e. Reconnue garante de l'environnement) réalisant la pose de l'isolant, doit faire référence à cette valeur de la résistance thermique R et à la norme ayant été retenue pour la mesure. À noter qu'une certification sur les matériaux isolants, ainsi que l'existence d'un avis technique, d'un agrément européen ou d'un marquage CE, permettent de satisfaire à la condition d'évaluation en référence aux normes de la résistance thermique. Il est prévu de sensibiliser les entreprises RGE aux matériaux de construction biosourcés afin qu'elles les promeuvent auprès des particuliers dans leurs travaux de rénovation énergétique. Cette sensibilisation s'effectuera en lien avec la Confédération de l'artisanat et des petites entreprises du bâtiment (CAPEB) et la Fédération française du bâtiment (FFB) afin qu'elles mobilisent leurs relais locaux. Les services déconcentrés du MTES seront également mobilisés pour relayer ce message. Par ailleurs, dans le cadre des réflexions engagées pour une réforme de la procédure de qualification des entreprises RGE, notamment sur le volet de leur formation, la possibilité d'introduire un module de présentation des matériaux de construction biosourcés et de leurs caractéristiques thermiques est à l'étude. De nombreuses solutions d'isolation à base de végétaux remplissent les critères d'éligibilité du CITE. Pour autant, certaines solutions biosourcées se prêtent peu à une évaluation selon les normes précitées compte tenu d'une variabilité intrinsèque du matériau et de caractéristiques physiques particulières (densité faible). Des valeurs par défaut sont généralement retenues pour ces isolants en vue de l'évaluation réglementaire des performances énergétiques des bâtiments neufs. Une solution alternative pour ces matériaux va ainsi être étudiée afin que leur entrée sur le marché ne soit pas freinée. Au-delà de cet enjeu de reconnaissance des isolants biosourcés dans les dispositifs fiscaux d'incitation à la rénovation, le ministère œuvre depuis plusieurs années déjà à la levée des obstacles au développement des matériaux biosourcés dans la construction, en travaillant sur les axes de progrès suivants : - la structuration des filières biosourcées autour d'une stratégie partagée par ses membres, leur donnant plus de visibilité pour dialoguer avec les acteurs de la construction et leur permettant de faire entendre leur voix au sein d'instances de décision. En décembre 2016, la DGALN a ainsi contribué, à la création de l'association Collectif des filières biosourcées du bâtiment (CF2B) qui fédère et représente l'ensemble de la filière courte française. Par ailleurs, pour encourager la maîtrise d'ouvrage à utiliser des matériaux de construction biosourcés, la DGALN a mis en place le label « bâtiment biosourcé » (décret nº 2012-518 et arrêté d'application parus respectivement au Journal officiel le 21 avril 2012 et le 19 décembre 2012) dont une réflexion sur son évolution est actuellement engagée ; - l'industrialisation de la filière en promouvant l'évaluation et la certification (aptitude à l'usage, performances fonctionnelles et environnementales), la rédaction de règles professionnelles assurant une maîtrise et une régularité des conditions de pose représentant une étape indispensable pour le déploiement d'une intensification de l'usage des matériaux biosourcés dans la construction, et plus généralement une démarche de qualité totale ; - la professionnalisation pour que les filières puissent être en mesure d'acquérir, de coordonner, de transmettre et de diffuser ses savoirs et savoir-faire ; - L'intensification de l'innovation en s'appuyant notamment sur des connaissances scientifiques issues de programmes de recherche et développement fondamentaux en association avec des universités, des écoles d'ingénieurs, l'Ifsttar (Institut français des sciences et technologies des transports, de l'aménagement et des réseaux, le Cerema (Centre d'études et d'expertise pour les risques, la mobilité, l'environnement et l'aménagement) et le CSTB (Centre scientifique et technique du bâtiment) ; - la territorialisation de la démarche de développement des filières vertes dans la construction dont l'axe essentiel de cette stratégie repose sur l'action motrice des directions régionales de l'environnement, de l'aménagement et du logement (DREAL) pour identifier et piloter des projets au sein des territoires aux côtés des professionnels locaux et des collectivités territoriales. Enfin, en ce qui concerne les coûts de l'avis technique, la complexité des procédures d'évaluation et leur délai, notamment pour les filières locales des matériaux biosourcés et les petites entreprises, la Commission chargée de formuler les avis techniques (CCFAT) a, depuis 2012, engagé en lien avec le CSTB un plan de modernisation de l'avis technique et poursuit aujourd'hui cette réforme. Le délai moyen d'obtention d'un avis technique a été réduit à 7 mois. Un accompagnement spécifique des TPE-PME et start-up a été mis en place et une réduction de 30 % est accordée aux TPE-PME lors de leur première demande. Aujourd'hui, près de 60 % des titulaires d'avis techniques sont des PME.

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