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Thibault Bazin
Question N° 7490 au Ministère de l'action


Question soumise le 17 avril 2018

M. Thibault Bazin attire l'attention de M. le ministre de l'action et des comptes publics sur l'inquiétude relative à la mise en place du prélèvement à la source. Inquiétude des entreprises d'abord, qui estiment à juste titre ne pas avoir à se transformer en « percepteurs d'impôts » et qui s'alarment d'un effet psychologique négatif pour les salariés qui vont voir leur salaire baisser le 1er janvier 2019. De plus, cette obligation est une nouvelle charge pour les entreprises et l'opposé des simplifications administratives qu'elles réclament. Elles demandent donc, au minimum, une compensation financière et l'abandon de la pénalisation des éventuelles sanctions en cas de dysfonctionnement. Inquiétude des salariés ensuite qui redoutent le manque de confidentialité vis-à-vis de leur employeur et les complications des régularisations à effectuer s'ils font le choix du taux neutre. Inquiétude enfin quand on sait que la campagne d'imposition 2018 est marquée par un « bug » informatique qui a entraîné un défaut de transmission sur une partie des déclarations pré-remplies, sous-évaluant les revenus de 500 000 foyers. Tout cela augure mal d'une mise en application du prélèvement à la source en 2019. Il lui demande donc de surseoir à cette mesure afin de prendre en compte les inquiétudes légitimes des entreprises et des concitoyens.

Réponse émise le 9 octobre 2018

S'agissant de la charge nouvelle que le prélèvement à la source fait peser sur les entreprises, le rapport d'audit de l'Inspection Générale des Finances (IGF) transmis au Parlement le 10 octobre 2017 sur les conditions de mise en œuvre du prélèvement à la source vient objectiver et relativiser cette charge. La mission IGF estime ainsi que la charge financière serait comprise entre 310 et 420 M€ pour les entreprises. Plus de 70 % de ce coût provient de la valorisation des ressources internes qui seraient mobilisées pour le paramétrage des logiciels, la formation des utilisateurs et la communication auprès des salariés. En effet, la mise en œuvre du prélèvement à la source repose sur la déclaration sociale nominative qui est un vecteur déclaratif existant et désormais éprouvé. Les entreprises bénéficieront en outre d'un effet en trésorerie dès lors qu'elles ne reverseront la retenue à la source qu'elles auront collectée qu'après un délai de plusieurs jours. Les entreprises de moins de cinquante salariés effectueront ainsi ce reversement le 15 du mois suivant le prélèvement. La mission poursuit en précisant que cette charge peut néanmoins être atténuée par un plan de communication adéquat de l'administration. Ce plan a débuté au printemps 2018 avec la campagne de déclaration des revenus. Les déclarants en ligne ont pu prendre connaissance de leur taux de prélèvement et exercer les options pour l'individualisation ou la non transmission de leur taux. Tous les contribuables prendront connaissance de leur taux de prélèvement à l'été 2018 avec la réception de leur avis d'impôt. Le rapport de l'IGF comporte également des propositions pour alléger les modalités et règles de gestion pour les collecteurs. Elles visent notamment à renforcer le dispositif d'accompagnement des employeurs par l'administration, en particulier grâce à un kit de démarrage à l'attention de tous les collecteurs qui est en ligne sur le site impots.gouv.fr depuis le 5 mars 2018. Ce kit a fait l'objet d'une consultation auprès des parties prenantes du prélèvement à la source et est évolutif en fonction des demandes d'adaptation qui émergent au fur et à mesure de sa diffusion. Pour l'ensemble de ces raisons, il n'est pas envisagé que le Gouvernement s'engage dans une démarche de compensation au bénéfice des entreprises. S'agissant de la responsabilité pénale du chef d'entreprise, le Ministre de l'Action et des Comptes publics a annoncé le 27 avril 2018 l'abandon de la sanction pénale spécifiquement prévue par le code général des impôts s'attachant aux manquements au secret professionnel dans le cadre du prélèvement à la source. Ce principe est désormais inscrit à l'article 10 de la loi pour un État au service d'une société de confiance. Plus largement, concernant la question des sanctions applicables aux entreprises, l'administration fiscale fera preuve de mesure et de discernement dans leur application, comme pour toute entrée dans une réforme d'envergure. Dans ce contexte, les sanctions qui auront été appliquées feront l'objet d'une publication sur le site impots.gouv.fr afin de démontrer qu'elles seront prises pour réprimer les seuls comportements véritablement répréhensibles. Concernant l'effet psychologique pour les salariés, la possibilité de mettre en place une phase de préfiguration sera offerte aux collecteurs. Cette opération, inspirée du passage à l'euro en 2002, constitue un vecteur d'accompagnement du changement puissant, permettant l'appropriation de la réforme par les salariés. À partir d'octobre 2018, les salariés dont les employeurs se sont engagés dans cette démarche, verront ainsi figurer sur leur bulletin de paie les informations relatives au prélèvement à la source. Les salariés qui auraient opté pour la non transmission de leur taux personnalisé à leur employeur pourront constater les conséquences pécuniaires de ce choix et pourront le cas échéant y renoncer avant l'entrée en vigueur de la réforme s'il s'avère que cela conduit à un surprélèvement. En tout état de cause, toutes les opérations de régularisation rendues nécessaires en cas de recours au taux non personnalisé seront réalisées par la DGFiP et non par l'employeur. Au sujet de l'incident informatique auquel il est fait référence, celui-ci n'a aucun lien avec la mise en place du prélèvement à la source. Enfin, les petites entreprises qui n'utilisent pas à ce jour la déclaration sociale nominative et qui n'ont pas d'expert-comptable peuvent recourir au dispositif du TESE grâce auquel les formalités, dont les opérations relatives au prélèvement à la source, sont effectuées gratuitement par l'URSSAF pour le compte de l'entreprise. Le gouvernement a d'ailleurs annoncé le 6 septembre 2018 que le seuil de vingt salariés au-delà duquel le TESE ne peut pas être utilisé serait prochainement supprimé.

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