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Pierre Dharréville
Question N° 7550 au Ministère de l'europe


Question soumise le 17 avril 2018

M. Pierre Dharréville interroge M. le ministre de l'Europe et des affaires étrangères sur la conformité des procédures d'octroi des autorisations de vente d'armes à l'Arabie saoudite et aux Émirats arabes unis, pays engagés dans le conflit au Yémen. Depuis trois ans, le Yémen traverse la pire crise humanitaire du monde selon l'ONU. 19 millions de Yéménites ont besoin d'une aide humanitaire, 8,4 millions sont au bord de la famine et 2 200 sont morts du choléra. Depuis que la coalition menée par l'Arabie Saoudite a lancé ses premières attaques, 5 974 civils auraient été tués et 9 493 blessés. Troisième exportateur d'armes au monde, la France a pour partenaires l'Arabie saoudite et les Émirats arabes unis. Avec la vente d'armes, la France assure des prestations de formation et de maintenance. En 2016, l'État français a délivré à ses entreprises 218 licences d'exportation d'armement vers l'Arabie saoudite ce qui représente un montant dépassant les 19 milliards d'euros. Du côté des EAU, 189 licences ont été délivrés pour un montant de 25,6 milliards d'euros. Délivrées par le Premier ministre, les autorisations sont accordées ou réfutées par la Commission interministérielle pour l'étude des exportations des matériels de guerre (CIEEMG) qui étudie notamment le risque que ces armes puissent servir à la commission de crimes de guerre ou de violations graves des droits de l'Homme et du droit humanitaire international. L'opacité entourant la procédure d'octroi de ces licences rend difficile tout contrôle par le parlement et les citoyens de leur conformité avec les règles du droit international fixées par le Traité sur le commerce des armes (TCA) et la Position commune de l'Union européenne. Cependant, depuis le début du conflit, plusieurs violations ont été recensées par l'ONU et diverses organisations internationales. Un rapport publié par l'ONU en janvier 2017 au sujet des frappes aériennes précisait même que sur 8 des 10 enquêtes menées par Groupe d'experts des Nations unies il n'avait aucune preuve que les frappes aériennes visaient des objectifs militaires légitimes. Si la France n'est pas engagée militairement dans ce conflit, les importants contrats conclus avec les pays membres de la coalition arabe, lui confèrent une responsabilité morale. Il souhaite savoir comment le Gouvernement s'assure que la France ne se rend pas complice de graves violations des règles internationales et de la catastrophe humanitaire qui frappe le peuple yéménite.

Réponse émise le 5 février 2019

L'analyse des demandes de licences d'exportations d'armements s'effectue dans le cadre d'une procédure interministérielle, au sein de la Commission interministérielle pour l'étude des exportations des matériels de guerre (CIEEMG). La décision est prise par le Premier ministre, après avis de la CIEEMG. Cette évaluation est effectuée au cas par cas, et chaque licence fait l'objet d'un débat contradictoire particulièrement complet. Dans leurs échanges, les administrations compétentes tiennent compte de la nature des matériels, de l'utilisateur final, des questions de respect des droits de l'Homme et du droit international humanitaire. Elles prennent également en compte la stabilité régionale et les objectifs de la France en matière de soutien à la lutte contre le terrorisme. La sécurité des civils et le respect des engagements internationaux de la France en matière de droits de l'Homme font bien entendu partie des critères d'examen. C'est là une préoccupation continue des autorités françaises. Le respect des principes du droit international humanitaire dans la conduite des hostilités est fondamental. La France le rappelle de manière constante aux parties impliquées au Yémen. En tant que partie à un conflit armé, la Coalition a des responsabilités à cet égard. Ces messages ont été passés au plus haut niveau par le Président de la République et le ministre de l'Europe et des affaires étrangères, à leurs interlocuteurs saoudien et émirien. La délivrance des autorisations se fait dans le strict respect des obligations internationales de la France, notamment les dispositions du Traité sur le commerce des armes et la position commune 2008/944/PESC du Conseil du 8 décembre 2008, qui prévoient un certain nombre de critères d'examen des demandes. La France respecte pleinement ces critères. La France soutient bien entendu les efforts en vue de l'établissement d'un cessez-le-feu au Yémen. Devant la dégradation de la situation humanitaire, la France a rehaussé le niveau de vigilance de sa procédure d'examen des demandes de licences d'exportation vers la coalition arabe. Les exportations d'armements relèvent pleinement de la compétence de l'exécutif car elles sont au coeur de la défense et de la conduite des relations internationales. Ce processus fait cependant l'objet de mesures de transparence à différents niveaux. Ainsi, un rapport sur les exportations d'armement de la France est transmis chaque année au Parlement, et disponible en ligne. La France transmet également chaque année sa contribution nationale au rapport au Parlement européen, conformément à ses engagements au titre de la position commune 2008/944 définissant des règles communes pour le contrôle des exportations d'équipements et de technologies militaires. Enfin, la France soumet chaque année un rapport détaillé dans le cadre du Traité sur le commerce des armes. Ces différents rapports sont publics et accessibles à tous.

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