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Christophe Lejeune
Question N° 7611 au Ministère du travail


Question soumise le 17 avril 2018

M. Christophe Lejeune interroge Mme la ministre du travail sur l'interprétation de la réglementation relative au travail en hauteur. Certains organismes chargés d'une mission de service public prescrivent des recommandations obligatoires au maître d'ouvrage, dans le cadre des projets de construction ou de réhabilitation-restructuration de bâtiments professionnels à toitures planes ou de faibles pentes et impose l'installation de « protections collectives définitives pour faciliter les interventions ultérieures sur l'ouvrage, cela afin de garantir la sécurité des travailleurs salariés ». Il oblige donc l'installation de garde-corps d'une hauteur de 1,1 m ou l'intégration d'acrotères d'une hauteur similaire. Le surcoût engendré est très important pour les maîtres d'œuvre, alors même que cette dépense n'est pas toujours inscrite dans le budget initial. Or l'article R. 4323-59 du code du travail prévoit la mise en place de protections pour prévenir les chutes, cependant, il n'impose pas l'installation de sécurité de façon permanente. Des ancrages fixés sur la toiture permettent aux entreprises intervenantes d'installer puis de démonter aisément lesdites protections collectives, suffisent à assurer la sécurité des salariés pendant la durée de l'intervention. Il souhaite connaître sa position quant à l'interprétation faite de la réglementation relative au travail en hauteur et la présence de protections collectives définitives et les contraintes qu'elles font naître pour les professionnels de la construction.

Réponse émise le 3 juillet 2018

La prévention des risques de chutes de hauteur revêt un caractère tout à fait primordial au regard des données relatives à l'accidentologie. Ainsi, il s'agit de la troisième cause d'accidents du travail mortels (13 % des décès), après les manutentions manuelles (20 % des décès) et le risque routier professionnel (25 % des décès) sur les 514 accidents du travail mortels recensés par la caisse nationale d'assurance maladie, en 2016. Au regard des risques d'atteinte à la santé sécurité des travailleurs, le législateur a conféré, en particulier, à la caisse d'assurance retraite et de la santé au travail (CARSAT) un large pouvoir d'intervention. Ainsi, le code de la sécurité sociale (article L. 422-4) prévoit que : « La caisse régionale peut (…) inviter tout employeur à prendre toutes mesures justifiées de prévention, (…) ». De plus, l'article 11 de l'arrêté du 9 décembre 2010 relatif à l'attribution de ristournes sur la cotisation ou d'avances ou de subventions ou à l'imposition de cotisations supplémentaires en matière d'accidents du travail ou de maladies professionnelles, précise que : « Les mesures de prévention visées à l'article L. 422-4 du code de la sécurité sociale et, dans les conditions fixées par arrêtés ministériels, à l'article L. 422-1 du code de la sécurité sociale relèvent de la procédure d'injonction. L'injonction est adressée par lettre recommandée avec demande d'avis de réception, après enquête sur place effectuée par un ingénieur-conseil ou un contrôleur de sécurité. Elle doit indiquer avec précision le risque exceptionnel concerné, les mesures à prendre par l'employeur, les possibilités techniques de réalisation, fixer le délai d'exécution (…) ». Ces dispositions confèrent à l'administration un vaste pouvoir d'injonction, sans le support d'aucune prescription réglementaire, puisqu'elle peut « inviter tout employeur à prendre toutes mesures justifiées de prévention », y compris des mesures à caractère expérimental, comme l'a précisé le Conseil d'Etat (CE, 29 décembre 1997, SA Compagnie générale d'entreprises automobiles, no 159223). Dans ce cadre, peuvent donc être prescrites des mesures ne figurant pas expressément dans le code du travail à partir du moment où elles contribuent à la prévention. En l'espèce compte tenu de sa connaissance des risques professionnels, la CARSAT est fondée à imposer aux acteurs de la construction les mesures de prévention qu'elle juge appropriées, au regard de sa mission de prévention, qui l'autorise à être plus exigeante que la réglementation. Ainsi, l'expérience montre que les mesures de prévention les plus efficaces passent par l'installation de dispositifs de sécurité permanents, et qu'en l'absence de dispositifs non rabattables au niveau des accès et des périphéries des toitures, les dispositifs sont souvent rabattus et non remis en place. Les dispositions du code du travail relatives à la prévention des chutes de hauteur donnent justement une marge d'appréciation aux employeurs et préventeurs pour leur permettre de réfléchir aux moyens de prévention les plus adaptés en fonction de la situation réelle de terrain. Elles s'inscrivent, en effet, dans le cadre des principes généraux de prévention aux termes desquels, l'employeur a l'obligation de prendre les mesures nécessaires pour assurer la sécurité et protéger la santé physique et mentale de ses salariés. Par ailleurs, de la même façon, il incombe au maître d'ouvrage d'appliquer les principes de prévention auxquels il est assujetti notamment lors des choix architecturaux et techniques, afin de faciliter la réalisation des interventions ultérieures sur l'ouvrage (article L. 4531-1 du code du travail). Concernant les moyens de protection contre les chutes de hauteur, il est ainsi impératif dès la phase de conception de prévoir les travaux ultérieurs qui seront réalisés sur l'ouvrage tels que la maintenance, le nettoyage et d'anticiper la mise en place de moyens de protection adaptés.

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