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Muriel Ressiguier
Question N° 8343 au Ministère de l'europe


Question soumise le 15 mai 2018

Mme Muriel Ressiguier appelle l'attention de M. le ministre de l'Europe et des affaires étrangères sur le relevé de décision du dernier comité interministériel de la coopération internationale et du développement (CICID). Le décret n° 98-66 du 4 février 1998, a créé le CICID, qui vise, entre autres, à fixer les orientations relatives aux objectifs et aux modalités de la politique de coopération internationale et d'aide au développement. Hors, la lutte contre la sous-nutrition ne fait l'objet d'aucun engagement financier, dans le relevé de décision du dernier CICID du 8 février 2018. Le Sahel, par exemple, semble être la priorité géographique de la politique de développement du Gouvernement. Au sein des pays de l'alliance Sahel, 11,4 millions de personnes sont sous-alimentées (32 % dans des pays comme le Tchad) et plus de 8 millions de femmes souffrent encore d'anémie. Il semble évident que ce développement, ainsi que toute promesse de stabilité dans la région, ne seront tenables que si la situation nutritionnelle s'améliore ; et dans cette situation, la politique française de développement au Sahel devrait prioriser et financer la lutte contre la faim mais ce n'est pas le cas. La courbe de la faim remonte pour la première fois depuis 10 ans et elle concerne 11 % de la population mondiale, d'après les chiffres de l'Organisation des Nations unies pour l'alimentation et l'agriculture. 2017 a été marquée par 4 crises alimentaires alarmantes au Yémen, au Nigéria, au Sud-Soudan et en Somalie. 6 900 enfants décèdent chaque jour de causes liées à la sous-nutrition, soit 5 enfants chaque minute. Or en 2015, la France ne consacrait que 25 millions d'euros de son APD à la nutrition alors que la Grande-Bretagne allouait, elle, 700 millions d'euros. Elle lui demande donc si le Gouvernement a pris conscience du fait que la lutte contre la malnutrition et la sécurité alimentaire sont des priorités. Elle lui demande également quels engagements concrets et chiffrés va prendre la France pour améliorer au plus vite cette situation.

Réponse émise le 2 octobre 2018

La France a défini la nutrition comme une priorité de son aide au développement en 2014 dans le cadre de la loi d'orientation et de programmation relative à la politique de développement et de solidarité internationale (LOP-DSI). Pour traduire cet engagement, une feuille de route pour l'action de la France en nutrition à l'international a été développée. Elle vise à renforcer la prise en compte de la nutrition dans les programmes et stratégies humanitaires et de développement à l'horizon 2020. Elaborée selon un processus consultatif et inclusif dans le cadre du sous-groupe nutrition du groupe interministériel sur la sécurité alimentaire (GISA), elle identifie des axes d'interventions clairs permettant de guider les efforts des acteurs de l'aide publique au développement française dans l'atteinte de cet objectif. La feuille de route concentre d'abord son action sur huit pays prioritaires : Burkina Faso, Cameroun, Laos, Madagascar, Mali, Niger, République centrafricaine, et Tchad. La Feuille de route a été approuvée par le comité interministériel de la coopération internationale et du développement (CICID) fin 2016. Sa mise en œuvre est en cours. Elle se décline de plusieurs manières. 1) D'abord, par un effort renouvelé pour s'attaquer aux causes multisectorielles de la malnutrition (santé, agriculture, éducation) afin d'obtenir des résultats durables. Les projets ayant un impact sur les causes de la malnutrition (dits "projets sensibles à la nutrition") représentent environ 84 % du volume global des projets nutrition financés par la France. 2) Le ministère de l'Europe et des affaires étrangères travaille ensuite à promouvoir une collaboration accrue et une meilleure prise en compte de la nutrition par les différents acteurs français et internationaux et se mobilise sur le sujet dans les enceintes multilatérales à travers différentes actions (G7/G20, Nations unies, Comité pour la sécurité alimentaire, OCDE etc.). 3) Le ministère de l'Europe et des affaires étrangères œuvre également pour favoriser l'intégration de la nutrition dans les politiques des pays cibles de la Feuille de route, principalement à travers un engagement soutenu au mouvement Scaling Up Nutrition à travers notamment le réseau des bailleurs. La mise en œuvre, engagée depuis 2016, fera l'objet d'un premier rapport public de redevabilité en 2018. Le comité interministériel de la coopération internationale et du développement du 8 février a de plus clairement réitéré l'importance de la mise en œuvre de la Feuille de route. Pour 2018, entres autres actions, il est prévu d'allouer la moitié de l'aide alimentaire programmée (AAP) à des projets ayant un impact sur la nutrition. La France renforce également cette année son action sur la nutrition à travers les actions de santé (fonds Muskoka notamment). L'Agence française de développement (AFD) démarre par ailleurs un projet d'ampleur multi pays sur la lutte contre la malnutrition dans la zone du Sahel, particulièrement touchée. Ces efforts se traduisent également dans les niveaux d'investissements : en 2016, les dépenses d'APD française engagées dans des projets nutrition s'élèvent à près de 34 millions d'euros. Concernant ces 4 pays touchés en 2017 par des famines ou pré-famines, la France apporte une réponse plurielle : l'action française s'organise autour de plusieurs canaux, selon le continuum urgence-développement. La France apporte une réponse d'urgence, notamment à travers les organisations internationales et les programmes de l'Union européenne. A titre bilatéral, sur le court et moyen terme, la France mobilise l'AAP pour renforcer la résilience des populations et lutter contre la malnutrition. Le CICID a acté une augmentation de l'aide humanitaire française pour atteindre le montant de 500 millions d'euros à l'horizon 2022. Ce montant permettra de renforcer encore l'appui aux populations touchées par les crises alimentaires et nutritionnelles.

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