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Brigitte Liso
Question N° 8722 au Ministère de la justice


Question soumise le 29 mai 2018

Mme Brigitte Liso attire l'attention de M. le ministre d'État, ministre de l'intérieur, sur la question de la récidive, suite au drame de Wambrechies. Quelques jours après l'immense émotion populaire suscitée par la disparition, dans des conditions atroces, d'Angélique Six. Le législateur doit réfléchir aux moyens d'éviter une nouvelle tragédie. Actuellement, au-delà des enjeux humains, juridiques et médicaux, aucune étude ne valide la castration chimique ou physique comme réponse à la récidive. Il convient donc de renforcer davantage les moyens de contrôle en assurant un meilleur suivi des individus déjà condamnés, en étoffant les fichiers existants, en réactualisant leur situation professionnelle et familiale tous les six mois, en créant des groupes de partage ou un numéro vert spécifique pour les prédateurs identifiés. Si, pour se reconstruire, le droit à l'oubli est nécessaire, l'obligation de vigilance demeure, il convient d'agir. Elle lui demande de bien vouloir lui préciser ses intentions en la matière.

Réponse émise le 7 août 2018

Si la mort dramatique de la jeune Angélique est particulièrement tragique et peut questionner sur la pertinence des suivis judiciaires, prises en charge et contrôles possibles des auteurs d'infractions à caractère sexuel, il convient d'examiner la pertinence et l'effectivité de la mise en œuvre des dispositifs déjà existants avant d'envisager de les modifier ou d'en créer de nouveaux. En effet, le cadre juridique de prise en charge judiciaire et de contrôle de ces auteurs est à ce jour très étoffé, s'étant considérablement enrichi, dans une optique de meilleure prévention de la récidive, depuis l'instauration, en 1998, du suivi socio-judiciaire et de l'injonction de soins. Des mesures de sûreté pouvant comprendre des obligations similaires à celles du suivi socio-judiciaire ont ainsi été créées pour maintenir les personnes condamnées à des peines importantes pour les infractions les plus graves sous suivi judiciaire à leur sortie de détention sur le temps des réductions de peine obtenues (surveillance judiciaire), voire, en cas de condamnation à une peine d'au moins 15 ans pour certains crimes, à l'issue de l'exécution de leur condamnation et pour une durée renouvelable de façon indéterminée (surveillance de sûreté), et ce au regard de leur dangerosité et d'un risque important de récidive. Ces personnes peuvent en outre, pour ce même motif, être placées sous surveillance électronique mobile dans le cadre des mesures précitées, d'un suivi socio-judiciaire ou d'une libération conditionnelle. Par ailleurs, le fichier judiciaire national automatisé des auteurs d'infractions sexuelles et violentes (FIJAIS), créé par la loi du 9 mars 2004 (dite PERBEN 2) et entré en fonctionnement le 1er juillet 2005, contribue aujourd'hui avec efficacité à prévenir le renouvellement des infractions de ce type et à faciliter l'identification de leurs auteurs. Les personnes condamnées pour de telles infractions sont soit automatiquement inscrites dans le fichier soit, dans des cas réduits, inscrites dans le fichier après décision expresse mentionnée dans la condamnation (délits commis par les mineurs de 13 à 18 ans ; délits commis par des majeurs et punis de moins de 5 ans d'emprisonnement). La durée d'inscription au sein du fichier à compter de la fin de la peine, est de 30 ans pour les personnes majeures condamnées pour crime ou délit puni de dix ans d'emprisonnement, de 20 ans pour les personnes majeures condamnées pour délit puni de moins de dix ans d'emprisonnement et de 10 ans pour les personnes mineures quelle que soit l'infraction commise. Au 1er juillet 2018, 79.259 personnes étaient inscrites dans le FIJAIS. Les personnes inscrites dans le fichier sont soumises à un régime de justification de domicile et de changement de domicile à des rythmes variables (annuel, semestriel ou mensuel) selon les infractions et la personnalité. La personne inscrite est ainsi obligée de justifier de son domicile en se présentant périodiquement au commissariat de police ou à l'unité de gendarmerie. Si elle n'y procède pas, elle encourt une peine de 2 ans d'emprisonnement. Dès que la personne inscrite n'a pas procédé dans les délais à la justification de son adresse, l'officier de police judiciaire territorialement compétent pour le dernier domicile déclaré est automatiquement alerté. Il déclenche un contrôle immédiat et en avise le parquet pour apprécier la suite à donner. Les enquêteurs disposent de l'accès national au FIJAIS et peuvent à tout moment, à l'occasion d'investigations judiciaires, vérifier la présence sur un secteur géographique donné, de toutes les personnes inscrites au FIJAIS. En outre, il convient de souligner que lorsqu'ils sont saisis de la situation de ces condamnés dans le cadre d'une mesure de suivi judiciaire en milieu ouvert, les professionnels qui en ont la charge font preuve d'une particulière vigilance et envisagent un accompagnement resserré. Toutefois, il ne doit pas être occulté que la grande majorité des personnes condamnées et suivies pour ce type de faits ne récidivent pas et que l'allègement puis l'arrêt du contrôle institutionnel exercé sur elles peuvent utilement participer de leur processus de résilience, lequel est un facteur essentiel de prévention de la récidive. L'évaluation du risque de récidive, de l'état de dangerosité criminologique et des garanties d'insertion ou de réinsertion d'une personne déjà condamnée est en tout état de cause délicate. Elle nécessite une analyse fine et pluridisciplinaire des facteurs de risque d'un nouveau passage à l'acte, mais elle demeure une évaluation et non une détermination scientifique prédictive.

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