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José Evrard
Question N° 8937 au Ministère de la justice


Question soumise le 5 juin 2018

M. José Evrard alerte Mme la garde des sceaux, ministre de la justice sur la décision du tribunal de Boulogne-sur-Mer. À Calais, un migrant en situation irrégulière a frappé violemment une policière. Les services judiciaires ne disposant pas d'interprète dans son dialecte, son placement en garde à vue n'a pu être maintenu, il a été relâché. La procédure pénale prévoit en effet que la personne susceptible d'être privé de liberté doit se voir signifier ses droits. Il semble qu'il n'est pas possible de le faire en français et qu'il faille le faire dans le dialecte du délinquant. Considérant les dizaines de milliers de dialectes existant sur la planète, l'administration judiciaire peut envisager de se mettre en congé vis-à-vis d'une quantité non négligeable d'auteurs de délits, peut-être de crimes pour se concentrer sur les auteurs francophones. Cette histoire est-elle sérieuse ou n'est-ce pas un enfumage qui s'apparente à de la fausse information ? Il lui demande si l'argumentation développée par le tribunal (en l'occurrence celui de Boulogne-sur-Mer) est compatible avec la Constitution de la République française qui précise dans son article 2 que « La langue de la République est le français » et comment dans ces conditions, il est possible de contraindre une administration à parler un dialecte.

Réponse émise le 16 octobre 2018

La loi n° 2013-711 du 5 août 2013 portant diverses dispositions d'adaptation dans le domaine de la justice en application du droit de l'Union européenne et des engagements internationaux de la France a inséré un alinéa au sein de l'article préliminaire du code de procédure pénale qui dispose : « […] Si la personne suspectée ou poursuivie ne comprend pas la langue française, elle a droit, dans une langue qu'elle comprend et jusqu'au terme de la procédure, à l'assistance d'un interprète, y compris pour les entretiens avec son avocat ayant un lien direct avec tout interrogatoire ou toute audience, et, sauf renonciation expresse et éclairée de sa part, à la traduction des pièces essentielles à l'exercice de sa défense et à la garantie du caractère équitable du procès qui doivent, à ce titre, lui être remises ou notifiées ». Selon l'article 63-1 du code de procédure pénale, l'officier de police judiciaire ou, sous son contrôle, l'agent de police judiciaire, a le devoir de notifier immédiatement dans une langue que la personne placée en garde à vue comprend les droits attachés à cette mesure. Tout retard dans la mise en œuvre de cette obligation, non justifié par une circonstance insurmontable, porte nécessairement atteinte aux intérêts de la personne concernée. Lorsqu'il n'est pas fait appel à un interprète immédiatement, des circonstances insurmontables doivent être justifiées et constatées par procès-verbal. S'agissant de la pénurie d'interprètes en langue rare, il importe donc de relever que la notification des droits doit intervenir dans une langue que comprend la personne placée en garde à vue et non pas exclusivement dans sa langue maternelle ou la langue officielle du pays dont elle est ressortissante. Des formulaires de notification des droits traduits dans une langue qu'elle comprend peuvent également être remis à la personne placée en garde à vue avant toute notification par un interprète. Actuellement, les formulaires sont traduits en 29 langues. Le droit à l'interprétation et à la traduction, accordé aux personnes qui ne parlent pas ou ne comprennent pas la langue de la procédure, est garanti par l'article 6 de la cour européenne des droits de l'homme (CEDH). A ce titre, toute modification de l'article préliminaire et de l'article 63-1 du code de procédure pénale, serait contraire aux exigences conventionnelles.

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