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Julien Aubert
Question N° 9020 au Ministère de l’intérieur


Question soumise le 5 juin 2018

M. Julien Aubert alerte M. le ministre d'État, ministre de l'intérieur, sur le mal-être ressenti par les fonctionnaires de police. Dans un climat particulièrement anxiogène de risque d'attentats accru, les forces de l'ordre souffrent d'un manque de considération, d'une dégradation de leurs conditions de travail (agressions, insultes, caillassages) et d'une surcharge de travail. Au sein de la police nationale, une moyenne de 43 suicides par an ont endeuillé l'institution au cours des dernières années, avec un pic à 55 en 2014. En 2017, 51 suicides ont été déplorés. Le 5 décembre 2017, un membre de la section de la sous-direction de la protection des personnes, se suicidait avec son arme de service en laissant une lettre dans laquelle il dénonçait le peu de considération de la hiérarchie ainsi que des cycles de travail intenses. Ces actes désespérés trouvent souvent leur source dans la vie personnelle. Pour autant, on ne peut écarter l'impact du mal-être en milieu professionnel au moment du passage à l'acte. Les forces de l'ordre assurent chaque jour leurs missions régaliennes, avec courage et conviction, parfois au péril de leur vie. Ils doivent être au centre des préoccupations. Il lui demande donc ce qu'entend mettre en place le Gouvernement afin d'améliorer les conditions de travail des forces de police.

Réponse émise le 18 septembre 2018

Les policiers assurent chaque jour, avec dévouement, professionnalisme et courage, le respect de la loi et la protection de nos concitoyens, dans des situations fréquemment difficiles et dangereuses, parfois au péril de leur vie. Ils font l'objet de violences et de menaces croissantes, d'atteintes de toutes sortes, à leur intégrité physique comme à leur image. Les menaces et mises en cause atteignent parfois même les familles. Les policiers sont également confrontés à des difficultés matérielles et opérationnelles, tandis que le formalisme administratif et procédural ou les charges indues dénaturent le sens de leur mission et de leur vocation et les détournent de leurs véritables missions de police. Cette situation ne saurait être niée et des interrogations sur le cœur du métier de policier existent dans les rangs de la police nationale. Tout doit être mis en œuvre pour garantir aux policiers des conditions de travail satisfaisantes et leur donner les moyens de remplir leurs missions dans les meilleures conditions possibles d'efficacité et de sécurité. Il est également capital de fixer un cap clair aux policiers, de redonner un sens aux missions de ces fonctionnaires très engagés et désireux plus que tout d'accomplir leur métier et ce qui en constitue l'essence. Plusieurs chantiers engagés par le Gouvernement visent à répondre aux fortes et légitimes attentes des policiers. Il en est ainsi de la décision de renforcer les effectifs de la police nationale (7 500 emplois supplémentaires prévus durant le quinquennat), ainsi que leurs moyens matériels (immobilier, équipements de protection, véhicules, outils numériques, etc.), si importants pour les conditions de travail et la sécurité. Le déploiement de la police de sécurité du quotidien (PSQ), conçue après une vaste concertation des policiers eux-mêmes, et les chantiers engagés pour simplifier la procédure pénale et poursuivre la réduction des missions périphériques vont également redonner du sens à la mission et à la vocation des policiers. Le ministre d'Etat, ministre de l'intérieur s'investit également particulièrement dans les grands enjeux de sécurité, d'hygiène et de santé des personnels. L'amélioration des conditions de travail des policiers est une priorité de son action. Le ministre d'Etat a ainsi présenté le 24 janvier 2018 une programmation immobilière ambitieuse qui s'appuie sur des budgets accrus. La police nationale est ainsi dotée d'un budget « immobilier » de 196 M€ par an au titre de la programmation triennale, soit 5 % de plus par rapport à 2017. Autre paramètre important : 45 M€ de crédits [crédits TATE – travaux d'aménagement et d'entretien] sont déconcentrés en 2018 pour des travaux d'aménagement et d'entretien courants. Choix de confiance et d'efficacité, cette méthode place l'initiative au niveau des chefs de service locaux qui peuvent ainsi faire réaliser des travaux rapidement et au plus près des besoins afin d'apporter des améliorations concrètes aux conditions de travail des policiers. Sur le plan social, il est primordial en particulier de favoriser la cohésion et les solidarités au sein des services, ainsi que le bien-être au travail. Le management, la communication interne et les relations interpersonnelles sont à cet égard des enjeux clairement identifiés. La réforme des régimes et cycles de travail de la police nationale constitue à ce titre une avancée, puisqu'elle a notamment pour objectif de mieux répondre aux attentes des personnels (conciliation vie privée-vie professionnelle, etc.) et de mieux prévenir les risques psycho-sociaux. Certains de ses aspects ayant suscité des interrogations, elle fait l'objet d'une évaluation qui sera poursuivie tout au long de l'année. En concertation avec les organisations syndicales, l'administration poursuit et intensifie son action pour s'efforcer de toujours mieux détecter et prévenir les suicides et leurs tentatives. Ce sujet, éminemment dramatique et complexe, est une préoccupation majeure et constante du ministère de l'intérieur qui conduit de longue date une politique volontariste en la matière. Elle a permis de développer au sein de la police nationale une culture commune permettant de mieux détecter et prévenir les suicides et leurs tentatives, en créant un réseau d'acteurs et des instances de dialogue et d'écoute. S'il est établi que les causes du suicide sont majoritairement d'ordre privé, la difficulté du métier de policier, confronté aux violences, aux souffrances et aux détresses qui traversent la société, ne peut être éludée parmi les facteurs déclenchant un passage à l'acte. Depuis 1996, la direction générale de la police nationale (DGPN) est dotée d'un service de soutien psychologique opérationnel (SSPO) composé, sous l'autorité d'une psychologue, de plus de 80 psychologues cliniciens répartis sur l'ensemble du territoire. Ils travaillent en collaboration avec les autres acteurs de l'accompagnement (médecine de prévention, etc.). Les psychologues proposent des consultations pour les agents rencontrant des difficultés et accompagnent les responsables souhaitant mettre en place un système d'accompagnement psychologique après un événement potentiellement traumatique. Plusieurs dispositifs ont également été développés au cours des dernières années pour mieux détecter et prendre en charge les situations de vulnérabilité et améliorer la connaissance du phénomène. Depuis 2010, la police nationale a ainsi structuré une véritable action de prévention des suicides et un plan ministériel de lutte contre le suicide a été lancé début 2015. En 2016, dans un souci de prise en charge globale des risques psycho-sociaux, le plan de lutte contre le suicide est devenu un plan d'amélioration des conditions de travail. Pour autant, de nouvelles pistes de progrès doivent toujours être recherchées, notamment pour amplifier les efforts afin d'améliorer la détection des personnels en difficulté, la réactivité et la prise en charge au niveau local. La déconcentration des initiatives et des actions, au plus près des situations à traiter, est également une clé de l'efficacité. Comme il s'y était engagé en novembre dernier en réunissant l'ensemble des organisations syndicales de la police nationale, le ministre d'Etat, ministre de l'intérieur a présidé fin mai 2018 un comité d'hygiène, de sécurité et des conditions de travail (CHSCT) de la police nationale qui a permis de faire un point sur les dispositifs et d'organiser un renforcement des capacités d'accompagnement médical, psychologique et social. Un programme de mobilisation a été présenté en CHSCT, à l'issue de la concertation menée au cours des derniers mois par la direction générale de la police nationale. Le plan identifie trois axes autour desquels les efforts doivent être amplifiés : - Mieux répondre à l'urgence : mieux repérer les agents traversant une crise suicidaire ; garantir un partage d'informations plus efficace entre les réseaux de soutien, notamment la médecine de prévention et la médecine statutaire ; mieux suivre et orienter les personnes en situation d'urgence ; soutenir plus efficacement les agents qui ont tenté de se suicider ; - Prévenir plus efficacement les situations de fragilité : objectiver l'analyse des suicides mais également des tentatives ; mieux évaluer les risques lors du recrutement ; renforcer le rôle des CHSCT et des réseaux d'accompagnement du personnel ; accompagner dans la durée les agents fragilisés, par la création notamment d'un guichet unique d'accompagnement des blessés ; - Améliorer le quotidien du travail, le collectif : développer les moments de convivialité et de partage, faciliter le dialogue et organiser le management de proximité, favoriser la cohésion. Par ailleurs, le directeur général de la police nationale a annoncé la constitution d'un groupe de travail sur la question du retrait de l'arme hors service pour les agents traversant des difficultés personnelles. Les mesures précitées ont vocation à être mises en œuvre et enrichies grâce, notamment, aux échanges qui vont se poursuivre avec les organisations syndicales.

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