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Virginie Duby-Muller
Question N° 9373 au Ministère de l'agriculture


Question soumise le 19 juin 2018

Mme Virginie Duby-Muller interroge M. le ministre de l'agriculture et de l'alimentation sur le sujet de la réhomologation du cuivre par l'Union européenne. Les substances actives composées de cuivre sont utilisées dans les produits de protection des plantes en viticulture, cultures de légumes et arboriculture que ce soit en agriculture biologique ou en conventionnelle. En agriculture biologique, ce sont les seuls produits autorisés par le règlement européen pour lutter contre les bactéries et les champignons. La réhomologation du cuivre à partir de 2019 est en cours de discussion au niveau européen. Or, si la substance active cuivre n'est pas réapprouvée en 2019 ou réapprouvée en trop faible quantité, c'est la mort programmée de la viticulture biologique, faute d'alternatives de remplacement sur le marché dès 2019. Les conclusions du colloque ITAB-INRA du 16 janvier 2018 répondant à la question « Peut-on se passer de cuivre en agriculture biologique ? » démontrent en effet qu'il n'est pas possible de se passer de cuivre à court terme. Une diminution des quantités autorisées, alors même que les vignerons ont déjà drastiquement diminué les doses utilisées au cours des années, conduira à des déconversions massives des exploitations certifiées en agriculture biologique et donc à une augmentation de l'utilisation de produits de protection de synthèse. Cela apparaît complètement contraire aux engagements du Gouvernement sur le développement de l'agriculture biologique et portera également préjudice à l'agriculture conventionnelle. Les viticulteurs sont conscients des enjeux d'écotoxicité potentielle tels que décrits dans les conclusions du rapport EFSA. Mais le niveau problématique de concentration de cuivre dans les sols est très rarement atteint en France, même dans des zones viticoles où l'emploi du cuivre a été conséquent. De plus, le co-rapporteur du rapport d'évaluation, l'agence allemande UBA, a renvoyé à l'EFSA des commentaires sur le fait que le modèle d'évaluation n'était pas adapté pour évaluer l'écotoxicité de substances minérales métalliques. Dans ces conditions, il apparaît précipité de prendre une décision qui impacterait autant de filières agricoles face à un dossier contenant de nombreuses données manquantes et dont la méthodologie est remise en cause par le co-évaluateur. En outre, et surtout, il semble que les discussions actuellement en cours au niveau européen ne prennent pas en compte la possibilité de « lissage » des doses employées sur plusieurs années. Or, c'est l'outil numéro 1 de diminution des quantités de cuivre qui n'est même pas sur la table des discussions. Aussi, elle lui demande de bien vouloir lui indiquer quelle sera la position de la France sur ce dossier et souhaite savoir s'il s'engagera sur l'introduction du « lissage » dans les conditions de ré-homologation du cuivre au niveau européen.

Réponse émise le 31 juillet 2018

Le cuivre est une substance naturellement présente dans l'environnement, dont les propriétés antimicrobiennes ont été utilisées de longue date à des fins domestiques. Il s'agit également d'une des substances de protection des plantes les plus anciennement connues, en particulier pour traiter les maladies fongiques de différentes cultures telles que la vigne, les arbres fruitiers, les légumes, les fleurs ou le houblon. Les composés du cuivre (hydroxyde de cuivre, oxyde cuivreux, oxychlorure de cuivre, sulfate de cuivre tribasique, bouillie bordelaise) constituent une famille de substances phytopharmaceutiques approuvées au niveau européen jusqu'en janvier 2019. Le cuivre, du fait de son caractère persistant et bioaccumulable, appartient à la catégorie des substances dont on envisage la substitution. À ce titre, l'approbation ne peut pas être renouvelée pour une durée supérieure à sept ans, et les demandes d'autorisation doivent faire l'objet d'une évaluation comparative, en vue d'une substitution par une alternative plus sûre pour la santé humaine ou animale ou l'environnement, lorsqu'elle est disponible. Les évaluations scientifiques disponibles, notamment les conclusions de l'autorité européenne de sécurité des aliments (EFSA) publiées en janvier 2018, montrent que certaines données sont manquantes ou que des risques sont identifiés pour les utilisations demandées, à 6 kg/ha/an, sur la vigne, les tomates ou les cucurbitacées avec ou sans peau comestibles. Cependant, elles indiquent qu'il est possible de maintenir le risque à un niveau acceptable si les modalités d'utilisation sont assorties des restrictions nécessaires, notamment en termes de dose maximale utilisée. La France est favorable à ce qu'un renouvellement de l'approbation des composés du cuivre soit proposé sur ces bases. Lorsqu'ils délivreront les autorisations de mise sur le marché, les États membres compléteront ou préciseront les conditions d'utilisation avec des mesures de gestion des risques, conformément aux principes uniformes d'évaluation et d'autorisation. La France a également demandé à la Commission européenne d'explorer la possibilité d'autoriser, dans le cas des cultures pérennes, un dépassement limité de la quantité admise au cours d'une année, dès lors que l'apport total ne dépasserait pas la quantité maximale permise sur une période qui ne devrait pas dépasser cinq ans. Cette possibilité de « lissage » devrait se fonder sur les résultats favorables de tests ou d'études qu'il reviendrait au demandeur de produire à l'appui de sa demande d'autorisation du produit. Enfin, compte tenu des contraintes liées à l'utilisation du cuivre, mais aussi de son importance pour les différentes filières de production de l'agriculture conventionnelle et surtout biologique, il est nécessaire d'engager des travaux sur la réduction de l'utilisation du cuivre pour les productions agricoles. L'expertise scientifique collective publiée en janvier 2018 par l'institut national de la recherche agronomique, intitulée « Peut-on se passer du cuivre en protection des cultures biologiques », a souligné l'importance cruciale du cuivre pour certaines productions et son caractère irremplaçable à court terme. Elle a également identifié des leviers d'action pour réduire les doses d'utilisation ne remettant pas en cause l'efficacité de la protection phytosanitaire. Des travaux de recherche et de développement permettant de valider les différentes combinaisons de moyens, y compris la reconception des systèmes de culture, doivent compléter cette première analyse afin d'atteindre l'objectif d'une réduction globale de l'utilisation du cuivre en protection des cultures.

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