Commission d'enquête sur la sûreté et la sécurité des installations nucléaires

Réunion du jeudi 22 février 2018 à 17h00

Résumé de la réunion

Les mots clés de cette réunion

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La réunion

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La commission d'enquête sur la sûreté et la sécurité des installations nucléaires a procédé à l'audition M. Pierre-Franck Chevet, président de l'autorité de sûreté nucléaire (ASN).

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Chers collègues, nous accueillons M. Pierre-Franck Chevet, président de l'Autorité de sûreté nucléaire (ASN), créée par la loi du 13 juin 2006 relative à la transparence et à la sécurité en matière nucléaire. L'ASN est une autorité administrative indépendante (AAI), dont les trois missions essentielles sont l'élaboration de la réglementation, le contrôle du respect des règles de prescription, l'information du public. En cas de situation d'urgence, elle est chargée d'assister le Gouvernement, en particulier en adressant aux autorités compétentes ses recommandations sur les mesures à prendre sur le plan médical et sanitaire ou au titre de la sécurité civile. Elle est également chargée d'informer le public sur l'état de sûreté des installations concernées et sur les éventuels rejets de matières radioactives et le risque pour la santé des personnes et pour l'environnement.

Conformément aux dispositions de l'article 6 de l'ordonnance du 17 novembre 1958, je dois vous demander, monsieur le président de l'Autorité de sûreté nucléaire, de prêter le serment de dire la vérité, toute la vérité, rien que la vérité.

(M. Pierre-Franck Chevet prête serment.)

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Je vous laisse la parole pour un exposé liminaire, après lequel Mme la rapporteure et les autres membres de la commission d'enquête pourront vous interroger.

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Pierre-Franck Chevet, président de l'Autorité de sûreté nucléaire

Monsieur le président, je reviendrai tout d'abord sur l'ASN, dont vous avez décrit les grandes missions, puis je vous livrerai le jugement que nous portons sur l'état de la sûreté et de la radioprotection en France actuellement, et, enfin, je dirai un mot de l'articulation entre problèmes de sûreté et problèmes de sécurité.

Nous sommes effectivement une autorité indépendante, comme d'autres. En l'occurrence, nous sommes indépendants par conception de tous ceux qui portent une vision politique énergétique, au premier rang desquels du gouvernement lui-même, qui se doit d'avoir une politique et de définir la politique énergétique, mais aussi des exploitants et des industriels concernés qui ont leur propre vision, de même que des associations de protection de l'environnement. Chacun de ces acteurs a, légitimement, une vision. Nous nous devons d'en être indépendants et d'exercer notre rôle d'autorité technique en matière de sûreté indépendamment de leurs considérations, qui ont une autre légitimité.

Nous sommes actuellement à peu près 500 personnes, des cadres d'assez haut niveau, compétents et formés pour l'être sur les matières que nous traitons. Nous sommes assistés dans notre tâche par un expert dont vous avez auditionné la direction ce matin, l'Institut de radioprotection et de sûreté nucléaire (IRSN), qui met à notre disposition 500 personnes à temps plein. S'il faut retenir un chiffre, c'est donc celui de 1 000 personnes qui contrôlent les enjeux de sûreté et de radioprotection en France.

Nous parlerons plutôt, sans doute, des réacteurs de production d'électricité, mais nous assurons également, à l'autre extrémité du spectre, le contrôle de beaucoup plus petites activités, beaucoup plus diffuses sur le territoire, notamment dans le domaine médical ou l'industriel. Une radiothérapie utilise des rayonnements ionisants pour tuer les cellules cancéreuses, et les enjeux de radioprotection sont, en la matière, loin d'être négligeables.

Quid de notre vision de la sûreté et de la sécurité ? Tout d'abord, nous considérons que la situation est – et reste, par rapport à l'année dernière – globalement satisfaisante. Les mots sont choisis : « globalement satisfaisante » signifie qu'il y a des écarts, des éléments qui ne sont pas globalement satisfaisants, mais, dans l'ensemble, c'est quand même globalement satisfaisant.

Nous sommes actuellement vigilants sur plusieurs points – cela vaut pour les prochains mois, peut-être pour les prochaines années.

Dans le domaine médical, nous avons encore une petite dizaine d'incidents de niveau 2, des incidents sérieux, essentiellement dans le domaine de la radiothérapie. Nous maintiendrons une vigilance forte, de même qu'à propos du développement de ce qu'on appelle les « pratiques interventionnelles radioguidées » – où l'imagerie sert à guider le geste des praticiens de santé. Évidemment, ce développement est une bonne chose, notamment pour les patients, mais le risque existe d'une exposition de ces derniers et, surtout, des personnels de santé, à des doses trop importantes. Nous constatons un certain nombre d'incidents tout à fait sérieux dans ces deux domaines, et nous sommes particulièrement vigilants, d'autant que les pratiques interventionnelles guidées montent en puissance.

Un deuxième grand point de vigilance concerne EDF et sa manière de gérer, d'une manière générale, les non-conformités, anomalies, écarts… Un certain nombre de signaux nous alertent, et nous serons attentifs au maintien d'un bon système de détection, de déclaration, notamment à l'ASN, et de traitement de tous ces écarts.

Cet état des lieux à un instant donné s'inscrit dans un contexte de moyen terme que j'ai qualifié l'année dernière de « préoccupant » et que je juge aujourd'hui en un peu moins préoccupant. Un certain nombre d'éléments de contexte vont effectivement plutôt dans le bon sens.

Premièrement, des anomalies techniques avaient été découvertes, notamment des excès de carbone dans l'acier de gros composants. Détecté pour la première fois sur la cuve du réacteur pressurisé européen – Evolutionary Power Reactor (EPR) en construction à Flamanville, le phénomène concernait également douze réacteurs. Cela nous a d'ailleurs conduits, au cours de l'hiver dernier, à demander l'arrêt sous trois mois d'une douzaine de réacteurs aux fins de contrôles supplémentaires. Cette anomalie a été assez largement traitée même si un certain nombre de dossiers résiduels doivent nous être transmis. Nous avons pris, à propos de l'EPR, une décision allant dans le sens d'un renforcement des contrôles en service pour la cuve elle-même et nous avons imposé le changement de couvercle de la cuve avant l'année 2024. Quant aux générateurs de vapeur du parc en exploitation, les douze réacteurs que nous avons arrêtés, les contrôles et les traitements ont été faits. C'est donc plutôt un élément positif : l'anomalie est assez largement derrière nous, même s'il reste encore un peu de travail, notamment à l'international, parce que si nous l'avons détectée, nous, elle est susceptible de concerner bien d'autres pays. Si elle a notamment été détectée à la suite des demandes formulées par l'ASN à EDF, il reste à travailler au niveau international.

Deuxièmement, nous avions été amenés à détecter de possibles falsifications à l'usine du Creusot, après que nous avions demandé, nous, la réalisation d'un audit de qualité sur les prestations et la fabrication du Creusot. Au terme de cet audit mené par Areva et EDF sous notre surveillance, nous nous étions effectivement aperçus de cas suspects qui pouvaient s'apparenter à des falsifications. La revue systématique de toutes les pages du dossier de fabrication de tout ce qui a été fabriqué au Creusot, d'il y a plus de cinquante ans jusqu'à récemment est en cours ; nous sommes à peu près à mi-parcours. À mon sens, cette revue est réalisée dans de bonnes conditions. Areva fait le travail, EDF surveille qu'effectivement ce travail est fait, et nous-mêmes, dans ces circonstances, procédons aussi aux inspections appropriées pour vérifier que ce travail est bien fait. Globalement, j'estime que c'est actuellement le cas, mais nous maintiendrons notre surveillance. Le travail devrait s'achever à la fin de l'année.

La première partie du réexamen a montré quelques cas posant des questions en termes de sûreté. Ils ont été traités. Évidemment, à mi-parcours, je n'exclus pas que puissent être également trouvés, dans les autres 50 % de vérifications qu'il faut absolument faire, des cas qui sortent de l'ordinaire et méritent une attention particulière en termes de sûreté. Malgré tout, point positif, ce réexamen, méthodologiquement, est bien engagé, et il est mené, pour l'instant en tout cas, dans de bonnes conditions. C'est pourquoi j'ai dit que la situation était moins préoccupante.

Troisièmement, les grandes entreprises responsables des installations nucléaires de base – EDF, Areva – étaient encore, il y a un an, dans une situation très compliquée, notamment en raison d'un décalage entre leurs moyens économiques, financiers ou budgétaires et la charge qu'elles avaient à gérer. Parmi les charges exceptionnelles du moment, la question de la prolongation d'installations anciennes est évidemment un point majeur. Il y a aussi quelques grands chantiers d'installations nouvelles. Il y a encore un an, ces enjeux sans précédent étaient gérés par des entreprises en grande difficulté. Aujourd'hui, la réorganisation industrielle a été décidée et la recapitalisation est faite. Il s'agit évidemment, pour moi, de vérifier que ces moyens généraux supplémentaires pour les entreprises seront bien affectés aux endroits appropriés du point de vue de la sûreté. Il faut à la fois des moyens financiers et, surtout, des compétences techniques aux bons endroits. C'est un point sur lequel je suis vigilant.

Ces trois éléments de contexte sont moins préoccupants qu'il y a un an. Voilà pour un jugement global sur la sûreté à l'heure actuelle.

Quant à l'articulation entre sûreté et sécurité, actuellement et globalement, nous ne sommes pas chargés de la question de la sécurité, à une exception près : les sources radioactives, que l'on utilise dans le domaine médical ou dans l'industrie. Les radiographies visant à vérifier l'état des soudures de tuyaux sont faites à l'aide de sources radioactives assez puissantes, puisqu'elles permettent de radiographier des soudures en acier. Ces objets, de petite taille, une fois débarrassés de leur protection, sont très puissants et susceptibles de causer de graves dégâts, notamment s'ils sont entre des mains malveillantes. Nous avions là un sujet orphelin dont le suivi attentif n'incombait à personne. La loi du 17 août 2015 relative à la transition énergétique pour la croissance verte nous en a confié la responsabilité, que nous exerçons notamment au travers de nos inspections.

Ce n'est cependant qu'un tout petit sujet par rapport à l'ensemble des enjeux de sécurité. Par exemple, nous ne sommes pas, à ce stade, chargés de la sécurité et de la protection des réacteurs des grosses installations contre les actes de malveillance, contrairement à ce qui se passe dans les autres grands pays nucléaires. Certaines choses ne relèvent jamais, nulle part, d'une autorité de sûreté nucléaire : définir la menace terroriste relève des services de renseignement spécialisés, et intervenir en cas d'attentat ou de tentative d'attentat ne relève évidemment pas d'une autorité de sûreté nucléaire. En revanche, une fois que la menace est définie, nos homologues étrangers s'occupent de faire en sorte que les installations soient bien dimensionnées et que les exploitants fassent les bons gestes en temps voulu.

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Je déduis de votre remarque que vous souhaitez que ces compétences de sécurité soient dévolues à l'ASN.

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Pierre-Franck Chevet, président de l'Autorité de sûreté nucléaire

Oui. Ce n'est pas urgent, mais c'est une réforme inéluctable.

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En ce qui concerne les enjeux financiers, est-il déjà arrivé à l'ASN de s'interdire certaines préconisations qui seraient trop coûteuses en raison de la difficile situation économique de certains exploitants ? Prenez-vous ce paramètre en compte ? Soupesez-vous à la fois les risques et les coûts lorsque vous formulez une préconisation ?

La mention « dans des conditions économiquement acceptables » que l'on peut lire dans vos prescriptions signifie-t-elle que l'ASN laisse à l'exploitant une marge d'interprétation en fonction du coût ?

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Pierre-Franck Chevet, président de l'Autorité de sûreté nucléaire

La mention « dans des conditions économiquement acceptables » ou « dans des conditions réalistes » est issue des textes législatifs. Elle n'est d'ailleurs pas employée dans le seul domaine nucléaire. Il faut que l'action prescrite soit possible, il faut aussi qu'elle ne soit pas disproportionnée financièrement. Il y a là également une raison de sûreté : si une action demandée coûte très cher mais rapporte peu en termes de sûreté, cela veut dire qu'à moyens non infinis la société renoncera à d'autres actions qui, elles, peuvent être intéressantes pour la sûreté. Nous essayons donc dans nos raisonnements de proportionner les demandes, en visant celles qui rapportent le plus du point de vue de la sûreté, c'est très clair. Cela étant, je n'ai jamais rencontré de situation où nous nous serions retenus d'édicter une demande que nous estimions absolument nécessaire.

En revanche, vous aurez noté que les exploitants nucléaires doivent avoir des compétences techniques et des capacités financières à la hauteur. C'est la loi qui le prescrit. Imaginez-vous la sûreté être gérée par un exploitant impécunieux ? Cela n'a simplement pas de sens. Tel est le sens de cette prescription législative. Cela explique aussi que j'appelle depuis deux ou trois ans l'attention sur le problème. Aujourd'hui, en ce qui concerne EDF et Areva, avec la recapitalisation, je suis plutôt satisfait. Je suis cependant vigilant : il faut que les moyens soient affectés aux bons endroits.

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Avez-vous toujours les moyens de faire respecter vos prescriptions ? On a parfois l'impression d'un respect à géométrie variable. EDF peut craindre l'arrêt de ses réacteurs, mais on a parfois le sentiment que l'exploitant prend des libertés avec l'application de vos prescriptions. On l'a vu, avec les problèmes du Creusot. Il y a aussi le report du démantèlement de ses six réacteurs à graphite-gaz, qui devait intervenir d'ici à 2040 : EDF a pris la décision de repousser l'échéance à l'horizon 2100, contrairement aux recommandations de l'ASN. Avez-vous toujours les moyens de faire respecter vos prescriptions et vos décisions ?

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Pierre-Franck Chevet, président de l'Autorité de sûreté nucléaire

Je disais que nous étions à peu près 500. Des efforts ont été faits. Nous avons, au cours des dernières années, demandé des moyens, que nous avons obtenus avec une cinquantaine de postes supplémentaires à l'heure actuelle – soit quand même 10 % de notre effectif.

Au regard des besoins, je pense qu'il manque encore une dizaine de postes, essentiellement pour monter en puissance en matière de détection des fraudes. Nous avons travaillé sur la méthode : comment mieux prévenir et détecter les fraudes ? Cela suppose par exemple plus d'inspections, et des inspections adaptées. Nous imaginons qu'une dizaine de postes supplémentaires, pas forcément immédiatement – le recrutement pourrait être étalé sur quelques années –, nous permettraient de monter en puissance pour surveiller l'ensemble du système, y compris pour veiller à ce que les exploitants et les industriels fassent ce même travail contre les fraudes. Il faudrait donc une dizaine de postes, mais nous saluons l'effort déjà fourni, y compris cette année, pour « renflouer » l'ASN et lui donner des moyens.

Quant au pouvoir de sanction, nous disposons de multiples possibilités quand une prescription n'est pas respectée, d'ailleurs accrues à la suite de la loi sur la transition énergétique. Elles nous permettent de « monter en gamme ». En cas de problème grave, nous pouvons demander l'arrêt d'une installation, comme nous avons toujours pu le faire, sans rien demander à personne. Si c'est moins grave, nous adressons une mise en demeure. Si la mise en demeure n'est pas respectée, un procès-verbal est dressé, etc. Maintenant, nous disposons d'un arsenal de sanctions que nous savons mettre en oeuvre ; ce n'était pas le cas avant la loi de transition énergétique. Par exemple, nous avons eu des discussions très complexes avec l'installation CIS Bio, située à Saclay, qui résistait à l'idée de faire des travaux pourtant nécessaires pour éviter les incendies. Tout cela a été extrêmement judiciarisé et, finalement, nous avons obtenu devant le Conseil d'État, compétent comme pour une décision ministérielle lorsqu'une décision d'une autorité administrative indépendante est attaquée, que les travaux soient réalisés. Les moyens existent donc, et portent leurs fruits.

En ce qui concerne EDF, la vie n'est pas toujours simple, et nous avons souvent des débats compliqués, nous ne sommes pas toujours d'accord, ce qui est parfaitement normal, puisque notre point de vue est indépendant du leur et de celui des associations. Parfois, mais pas souvent, les deux – EDF et associations – se réjouissent de nos décisions. Le plus souvent, l'un s'en réjouit, et pas l'autre. Parfois, les deux sont mécontents – peut-être est-ce le meilleur des cas ! Telle est la vie d'une autorité de sûreté indépendante qui fait son métier.

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Une information est parue aujourd'hui. Un nouveau problème de qualité apparaît, qui engage la sûreté de l'EPR de Flamanville. Est concernée la tuyauterie qui relie les générateurs de vapeur, dans l'enceinte des réacteurs, et les turbines, elles hors de l'enceinte des réacteurs. Il y aurait eu de premières alertes à l'ASN en 2015, à propos des soudures. Si c'est le cas, il est quand même problématique de n'en avoir connaissance qu'aujourd'hui. Est-ce en raison de l'absence d'accord entre EDF et l'ASN sur le caractère acceptable ou non des défauts détectés que l'information a été rendue publique ? Autrement dit, en aurions-nous eu connaissance si un accord était intervenu entre vous ?

L'ASN confirme-t-elle les affirmations d'EDF selon lesquelles cela n'a finalement aucun impact sur la sûreté, sur les délais et sur les coûts du projet ? Ou bien l'ASN confirme-t-elle que certaines exigences ne sont, en l'état, pas respectées, et qu'EDF doit engager une démarche de justification dont l'issue et la date d'échéance sont incertaines ?

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Pierre-Franck Chevet, président de l'Autorité de sûreté nucléaire

Cette anomalie a été détectée en interne en 2015. C'est bien plus tard, à la fin de l'année 2016, que l'ASN a été informée. Cela nous a conduits à faire une inspection au mois de février 2017, dont le rapport est accessible comme tous les rapports d'inspection. Nous nous sommes simplement aperçus que le problème était plus important ou sérieux que nous ne l'imaginions au vu des premières informations que nous avions recueillies.

Ce tronçon de tuyauterie qui traverse le bâtiment du réacteur et va alimenter la turbine devait être soumis à de très hautes exigences de qualité. Il était postulé qu'il ne pouvait pas rompre. L'analyse de sûreté a été faite en prenant cette hypothèse, mais elle ne pouvait évidemment être valable que si les tuyaux et soudures concernés remplissaient les plus hautes exigences de qualité. Or une partie de ces exigences, définies il y a bien longtemps, il y a une dizaine d'années, n'ont pas été répercutées sur les fournisseurs, qui, du coup, ne les ont pas respectées. Le sujet reste pour moi entièrement ouvert. Je suis très loin d'une conclusion puisque ces objets n'ont pas été fabriqués en suivant les hautes exigences dont le respect était nécessaire à leur fonction de sûreté. Pour l'instant, je considère que nous sommes plutôt au début d'un processus d'analyse parce que l'écart est très clair par rapport à ce qui aurait dû être fait. Je suis très loin d'être en mesure de confirmer ce qu'a dit EDF, selon qui cela n'aurait pas d'impact. Pour l'instant, la question est ouverte, et sérieuse.

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Pierre-Franck Chevet, président de l'Autorité de sûreté nucléaire

En tout état de cause, la mise en service est soumise à mon autorisation. Le calendrier de sûreté s'imposera donc.

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Vous avez aussi évoqué la question des cuves et du taux de carbone dans l'acier des cuves et du couvercle de l'EPR de Flamanville. Il contiendrait 0,3 % alors que la limite est fixée à 0,22 %. Est-ce vrai ? Le cas échéant, pourquoi avez-vous finalement validé ces pièces ? Vous l'avez un peu dit, mais nous devons vraiment être précis. Pourquoi avoir demandé le changement du couvercle d'ici à 2024 et pas le changement du fond de la cuve ? Un ouvrage récemment paru évoque un surcoût rédhibitoire et des retards. Qu'en est-il ?

Par ailleurs, des actions ont-elles été entreprises depuis la découverte de problèmes sur des cuves en Belgique pour déterminer la présence éventuelle de défauts sur les cuves de notre parc au-delà de la première épaisseur ? J'ai bien compris que c'était celle-ci qui était examinée. Des contrôles supplémentaires réalisés dans ce cadre ont-ils conduit à la détection de défauts qui n'étaient pas connus précédemment ? Avez-vous, en particulier, connaissance de résultats confirmant les affirmations publiées dans ce livre paru la semaine dernière et contesté par EDF, selon lesquelles des défauts ont été détectés dans six cuves où l'on n'en avait pas trouvé précédemment ? Il s'agirait des cuves des réacteurs Bugey 2, Cruas 1, Gravelines 5, Saint-Alban 1, Penly 1 et Golfech 1.

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Pierre-Franck Chevet, président de l'Autorité de sûreté nucléaire

Le chiffre que vous donnez à propos de la cuve de l'EPR de Flamanville est tout à fait exact, mais, ici, il s'agit des codes industriels qui donnent des valeurs minimales pour un certain nombre de paramètres. Si elles sont respectées, c'est bon, il n'est pas besoin d'une autre démonstration. En revanche, les codes industriels comme la réglementation prévoient que si les limites ne sont pas respectées, alors il faut des démonstrations plus sophistiquées au plan mécanique, au plan chimique. C'est la voie qui a été retenue par Areva et EDF, le but étant de montrer par des démonstrations plus élaborées que, en tout état de cause, l'objectif de sûreté est atteint et que cela ne rompt pas, quelles que soient les circonstances. C'est cette démonstration qui fut plus compliquée. Ils ont dû faire 1 500 essais supplémentaires, par rapport à ce qui existe dans la littérature, pour arriver à documenter et démontrer, au bout de deux ans de travail et plusieurs milliers d'essais, que cela tenait. Naturellement, cela exigeait un effort technique, scientifique supplémentaire.

Pourquoi une différence entre le couvercle et le fond de cuve ? Les deux zones se sont finalement révélées bonnes à peu près dans les mêmes conditions, avec une différence de fond. Le principe, sur ces matériaux, c'est d'avoir des marges. Elles existaient effectivement mais étaient réduites par rapport à une cuve « normale », qui ne présente pas les défauts constatés. Les marges servent à faire face à ce qui n'a pas été prévu à la conception. S'il arrive quelque chose – par définition, on ne sait quoi ; sinon, on l'intégrerait dans les calculs – ces marges servent à nous donner du temps, par exemple à la suite de l'apparition d'un phénomène de vieillissement. Or le fond de la cuve et la cuve elle-même sont parfaitement contrôlables, par la machine que j'évoquerai ensuite. C'est une surface extrêmement simple, à la géométrie très simple ; c'est contrôlable, la technique existe. Il en va autrement du couvercle. Il y a les mêmes marges, mais, à l'heure actuelle, on ne peut pas le contrôler. Il n'existe pas de technologie qui permette de contrôler le couvercle et de détecter précocement un vieillissement. Pour le fond de cuve, vous mettez donc en oeuvre les contrôles en service qui permettraient, éventuellement, s'il se passait quelque chose d'utiliser la marge. En revanche, pour le reste, vous changez le couvercle. Nous l'aurions laissé jusqu'à l'année 2024, ce qui est cohérent avec notre vision des enjeux de sûreté : nous ne voyons pas de problème de sûreté à leur donner ce temps pour ce changement, mais ce changement s'impose.

Quant aux « défauts belges », la situation est presque l'inverse de celle que vous décrivez. Ils ont été détectés avec les techniques de contrôle en service françaises. C'est le jour où les Belges ont passé la machine de contrôle française, que nous utilisons pratiquement depuis l'origine sur le parc actuel, qu'ils ont vu ces défauts. Néanmoins, ayant vu les défauts belges qui ne sont effectivement pas tout à fait au même endroit, nous avons fait des re-vérifications, avons relu les contrôles, etc., et nous n'avons pas trouvé de cas qui s'apparente au cas belge.

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D'une manière plus générale, vous avez dit que vous pensiez que la sûreté était « globalement satisfaisante » aujourd'hui, et qu'il fallait être vigilant sur certains points, que vous avez cités. Aujourd'hui, certaines centrales ou certaines installations, en dehors de ce que vous nous avez dit, vous semblent-elles plus exposées à des vulnérabilités en matière de sûreté ? Le cas échéant, lesquelles, et que préconiseriez-vous ?

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Pierre-Franck Chevet, président de l'Autorité de sûreté nucléaire

Notre rôle, si nous avons une crainte, c'est éventuellement d'arrêter la centrale. Nous pouvons le faire, nous le faisons déjà. Par exemple, nous n'avons aucune hésitation à demander l'arrêt des centrales pour contrôler leurs générateurs de vapeur. Actuellement, nous ne sommes pas dans cette situation, mais si une anomalie se présente au cours des prochains mois, nous ferons ce qu'il faut.

À l'inverse, mais il est difficile d'en tirer une conclusion – j'imagine que votre question est en rapport avec la politique énergétique et les centrales qui seront fermées –, des sujets ont été identifiés dans certaines centrales, mais, souvent, ils ont été traités.

Par exemple, on sait qu'il y a eu des défauts au Tricastin, très près de la peau interne de la cuve du réacteur, plus importants qu'ailleurs. Le livre que vous avez cité en parle comme d'un scoop, mais le problème est identifié depuis vingt-cinq ou trente ans ! Détectés très tôt, ces défauts font l'objet d'un suivi très régulier. C'est évidemment un paramètre à prendre compte au moment de décider de l'éventuelle prolongation de l'activité du Tricastin. La quatrième visite décennale est prévue en 2019 ; ce sera alors examiné comme tous les dix ans, et même plus souvent. On ne constate aucune aggravation, mais, potentiellement, effectivement, c'est moins bien qu'ailleurs, car les défauts sont plus grands. Cela ne signifie pas qu'il faille l'arrêter ; les contrôles sont là pour détecter s'il se passe quelque chose.

Sur un certain nombre d'enceintes de confinement, autour des réacteurs eux-mêmes, des réacteurs les plus récents, de 1 300 mégawatts, il y a des problèmes d'étanchéité. Nous le savons, des traitements sont donc en cours et une surveillance renforcée s'exerce.

Chaque fois qu'un sujet se présente, il est examiné, il est traité, des mesures compensatoires sont prises. Le jour où celles-ci ne suffisent plus, nous sommes amenés à arrêter. Il est donc extrêmement difficile de faire une réponse « en binaire ». Nous continuons à faire notre métier. Le jour où nous estimerons que cela ne marche pas, nous le ferons savoir clairement.

Il est très dur de faire une sorte de classement. Nous classons tous les ans les centrales en fonction de la qualité d'exploitation. Il se pourrait d'ailleurs que Fessenheim ne s'en sorte pas trop mal. Je ne sais pas si EDF est motivé, mais, globalement, la qualité d'exploitation n'y est pas mauvaise, et ce depuis plusieurs années, peut-être en lien avec les discussions sur la politique énergétique.

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Aujourd'hui les questions de sûreté et les questions de sécurité sont de plus en plus imbriquées, notamment avec les risques terroristes et d'actes de malveillance, quels qu'ils soient, et des investissements sont nécessaires pour faire face à ces risques. Nous n'avons pas parlé des investissements « post-Fukushima » mais ils requièrent aussi un certain nombre de travaux. Avez-vous chiffré les investissements nécessaires, du point de vue de la sûreté et, éventuellement, du point de vue de la sécurité, dans l'hypothèse d'une prolongation de l'activité des réacteurs au-delà quarante ans ?

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Pierre-Franck Chevet, président de l'Autorité de sûreté nucléaire

Tout d'abord, nous ne raisonnons pas ainsi, en termes budgétaires.

Nous sommes encore dans une phase d'examen des grandes questions liées à la possible prolongation des réacteurs. Nous serons amenés à donner un avis global en 2020, que nous transformerons ensuite en prescriptions applicables à chaque installation à partir de 2021.

Nous examinons, pour notre part, la question de la prolongation sous deux angles.

Il s'agit tout d'abord de vérifier que les centrales respectent leurs standards de conception initiaux, qu'il n'y a ni vieillissement ni malfaçons. Nous en avons rencontré l'an dernier sur les supportages des gros diesels de secours des centrales. Ces malfaçons d'origine font qu'ils ne pouvaient résister aux séismes. Les questions de ce type doivent être réglées à l'occasion de la prolongation. Cela explique d'ailleurs ce que j'ai dit sur la vigilance à exercer quant à la manière de traiter les non-conformités. Tout cela est extrêmement important.

Il s'agit ensuite de voir comment le niveau de sûreté peut être amélioré. C'est compliqué puisqu'il s'agit d'ajouter des systèmes à une installation qui existe déjà. Il nous faut traiter quatre ou cinq questions liées à l'amélioration de la sûreté. La référence en la matière est celle des réacteurs modernes, du type de l'EPR de Flamanville. En cas d'accident très grave, notamment de fusion du coeur, un récupérateur de coeur, sous le réacteur, empêcherait le coeur de traverser le plancher et, éventuellement, d'atteindre la nappe phréatique. Il n'y en a pas sur les réacteurs existants, et il n'y a pas beaucoup de place à cet endroit. La question est posée à EDF : comment faites-vous pour empêcher le coeur de traverser le radier ? Certes, c'est un plancher de plusieurs mètres de béton, mais cela ne suffit pas forcément. Ce sont là des questions simples à énoncer, mais complexes à résoudre. Nous en discutons actuellement, notamment avec EDF. Ce travail est engagé, le rendez-vous est fixé à 2020, et je ne peux préjuger des réponses : certes, les questions qui se posent ne sont pas innombrables, mais il y en a quand même quatre ou cinq.

Si vous m'interrogez sur le budget, EDF annonce un ordre de grandeur d'un peu plus d'une cinquantaine de milliards d'euros pour l'ensemble du grand carénage – je ne porte pas de jugement sur la somme…

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Peut-être pouvez-vous rappeler ce qu'on appelle le grand carénage.

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Pierre-Franck Chevet, président de l'Autorité de sûreté nucléaire

EDF a donné ce nom à l'ensemble des modifications et investissements à faire sur les centrales nucléaires, sur une période d'une dizaine d'années. Cela comprend des modifications répondant aux besoins d'EDF, mais également des modifications dont bénéficie la sûreté. Cela inclut notamment les améliorations prévues à la suite de Fukushima, estimées à 10 milliards d'euros par EDF. Il ne m'appartient pas de valider ces chiffres. Par ailleurs, comme l'instruction des questions techniques de sûreté que j'évoquais n'est pas terminée, il n'est nullement exclu que nous formulions un certain nombre de demandes qui alourdiront la note.

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J'en viens à l'entreposage des combustibles usés. Du fait de l'encombrement des piscines actuelles, il existe un projet de piscine centralisée pour refroidir le combustible usagé. Avez-vous, tout d'abord, noté qu'il était nécessaire d'accroître la sûreté, y compris au regard des questions de sécurité, quelque peu imbriquées ? Avez-vous aussi étudié la possibilité d'un entreposage à sec des combustibles usés ?

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Pierre-Franck Chevet, président de l'Autorité de sûreté nucléaire

Une fois brûlés dans un coeur de réacteur, les assemblages de combustibles sont d'abord mis dans la piscine de combustible du réacteur. Ensuite, au bout d'un certain temps, ils peuvent être transportés, actuellement à destination de La Hague. Comme tous ne sont pas retraités – certains ne sont même pas complètement retraitables –, nous assistons à une saturation progressive, tout à fait anticipée et anticipable de cette piscine de La Hague. EDF est revenu vers nous, il y a quelques mois, pour nous présenter le dossier d'options de sûreté, c'est-à-dire les grands principes de sûreté qu'EDF compte appliquer à une nouvelle piscine, centralisée, en un seul endroit qu'il lui reste à définir ou, du moins, à proposer. EDF propose notamment d'améliorer la protection contre les agressions externes en mettant un bunker sur l'ensemble de la piscine – il n'y en a pas sur les piscines actuelles, que ce soit sur les sites ou à La Hague. Le dossier est en cours d'examen et nous attendons de disposer d'un certain nombre d'analyses pour porter un jugement, mais ce ne sont pas des objets très compliqués. Il faut considérer des épaisseurs de béton, y compris au plan de la sécurité, même si nous ne sommes pas chargés de celle-ci. Nous considérons tous les autres types d'agression externe : les séismes, les accidents d'avion... Les piscines sont un bon exemple : quelle que soit la nature de l'agression, qu'elle procède d'un acte de malveillance ou non, la question du dimensionnement des protections, des circuits, etc., se pose à peu près dans les mêmes termes techniques. Les données d'entrée ne sont pas tout à fait les mêmes, mais la manière d'appréhender la question est assez proche. C'est d'ailleurs pour cela qu'à l'étranger ce genre de sujet est traité par la même autorité technique, parce que ce volet est technique – nous ne parlons pas là de l'intervention des forces de l'ordre.

Nous n'avons pas de propositions d'entreposage à sec. Certains y recourent, notamment les Américains, mais c'est faute d'un entreposage du type d'une piscine ou d'un stockage – il y a un projet très compliqué, Yucca Mountain. Une fois les piscines des réacteurs pleines, les exploitants n'ont d'autre choix que de recourir à un stockage à sec sous les parkings des centrales, protégés par un grillage. Je ne suis pas sûr du tout que cette solution soit imaginable et acceptable en France. En tout cas, je ne suis pas sûr de sa vertu technique, et de tels ouvrages, assez visibles, sont exposés au risque d'agressions, notamment d'actes de malveillance.

Une piscine centralisée, dont le gardiennage est plus facile, ne me paraît pas comparable à un entreposage à sec, éventuellement disséminé sur tout le territoire. En tout cas, il n'y a pas de projet à l'étude et je doute que ce soit la meilleure option.

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La question se pose dans la mesure où vous dites vous-même que, contrairement aux autres, cette piscine centralisée sera « bunkérisée ». Par ailleurs, il nous a été rapporté que la création de cette piscine coûterait un milliard d'euros ; j'ignore si le chiffre est exact, mais c'est celui qui circule.

Notre commission se pose la question de la sûreté et de la sécurité des installations, et les piscines sont vues comme un point de vulnérabilité. C'est sous cet angle que se pose cette question de l'entreposage à sec.

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Pierre-Franck Chevet, président de l'Autorité de sûreté nucléaire

Améliorer la sûreté d'une piscine – cela vaut aussi pour la sécurité – peut s'envisager de deux manières.

Nous pouvons créer un bâtiment externe qui résiste vraiment à tout, mais ce n'est pas forcément totalement possible.

Un travail doit également être fait, en termes de sûreté, sur la piscine elle-même : sur l'épaisseur de ce qu'on appelle les voiles des piscines, c'est-à-dire les parois et le plancher, les systèmes prévus pour remettre de l'eau en cas de brèche quelconque, quelle que soit sa nature, la capacité à refroidir l'eau de piscine, car les assemblages dégagent une chaleur qu'il faut supprimer. Ce travail d'amélioration de la sûreté s'impose aussi pour les piscines existantes. Il est en cours, et compte parmi les quatre ou cinq points que nous examinons en lien avec la question de la prolongation. Il s'agit de renforcer tous ces circuits de refroidissement et ces circuits d'appoint d'eau qui permettraient, quelle que soit l'origine de l'agression, de remettre de l'eau et de la refroidir. C'est cette discussion qui est en cours.

En tout cas, les deux approches ont des vertus en termes de sûreté et de sécurité.

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C'est un point intéressant et important pour nous. Vous dites être en train de regarder des dispositifs de sûreté, que vous venez de décrire, en précisant que cela permet aussi d'améliorer la sécurité des piscines. Qui aujourd'hui s'occupe des aspects techniques du renforcement de la sécurité des installations ?

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Pierre-Franck Chevet, président de l'Autorité de sûreté nucléaire

Tout à l'heure, j'ai dit que le sujet de la sécurité des sources radioactives, lui, était un sujet orphelin. En revanche, ces problèmes de sécurité des grosses installations ne sont pas un sujet orphelin. Un service du ministère de la transition écologique et solidaire en est chargé. Cela relève du haut fonctionnaire de défense et de sécurité – lui incombent les questions de sécurité qui incombent aussi, à l'étranger, aux autorités de sûreté. La situation n'est pas la même que pour les sources : en la matière, une décision s'imposait pour que quelqu'un s'en occupe, mais quelqu'un s'occupe bien de la sécurité des installations. Je ne critique pas son travail, mais celui-ci est de même nature que le nôtre, et c'est pour cela qu'à l'étranger les deux responsabilités incombent à la même instance.

Il n'y a pas urgence, mais, à mon avis, une réforme s'impose et s'imposera.

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L'accident de Fukushima a rappelé la sensibilité des réacteurs nucléaires à une perte totale des sources d'alimentation électrique de la source froide. Où en sont, de ce point de vue, les exploitants sur l'ensemble du territoire national ?

Nous évoquons surtout les réacteurs nucléaires, mais il y a en France 85 installations nucléaires de base (INB), dont vous surveillez la sûreté, parmi lesquelles des réacteurs de recherche, laboratoires, usines de fabrication de combustibles, irradiateurs industriels et installations de traitement, d'entreposage, de stockage des déchets – la filière est riche et variée. Qu'en est-il du risque que présentent ces INB ? Quelle part de votre activité représentent-elles ? Comment vous organisez-vous entre surveillance du parc nucléaire et surveillance des autres installations ?

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Plusieurs représentants d'autres organisations, auditionnés la semaine dernière, nous ont plus ou moins laissés entendre que vous auriez un intérêt à travailler avec EDF et que, du coup, vous ne seriez pas forcément assez exigeants, que vous seriez « perméables ». Qu'en pensez-vous ?

De même, il nous a été rapporté à la suite de ce qui a été découvert au Creusot, que nos installations comporteraient des composants défectueux, à l'insu de tout le monde. Qu'en pensez-vous ?

Selon vous, le fait que la sécurité n'entre pas dans le champ de vos compétences est un handicap, mais, selon les représentants de l'Agence pour l'énergie nucléaire (AEN) auditionnés ce matin, il n'y a pas de problème. Pouvez-vous donc développer votre point de vue ?

Enfin, la semaine dernière, les représentants des associations nous ont fait part de la mauvaise foi des exploitants, avec une absence de transparence et des malfaçons non déclarées.

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Au mois de janvier dernier, l'ASN a autorisé l'usine de Creusot Forge à reprendre la production de pièces. Quelles garanties ont été apportées pour que les défauts constatés ne se retrouvent sur de nouvelles pièces ? Et quelle est la nature exacte de la surveillance renforcée que l'ASN entend exercer ?

Quant au suivi des recommandations de l'ASN, il y a deux semaines, je me suis rendue sur le site de Romans-sur-Isère, sur lequel il y a eu, en 2014, un incident de niveau 1 sur l'échelle internationale de classement des événements nucléaires, dite « INES » – acronyme d'International Nuclear Event Scale. À la suite de cet incident, l'ASN a demandé à l'exploitant Areva, redevenue Framatome, de prendre des mesures pour éviter de nouveaux incidents et a mis en place une surveillance renforcée. Un accord est intervenu pour qu'une entreprise indépendante sous-traitante soumette le transport de matières à un double contrôle mais, depuis vingt-deux jours, les salariés du sous-traitant sont en grève pour protester contre leurs conditions de travail. L'accord passé prévoit que des agents de Framatome puissent temporairement agir à la place de l'entreprise sous-traitante. L'ASN n'a pas pris position sur cette situation, qui dure depuis vingt-deux jours, alors qu'elle est proche de celle qui prévalait avant l'incident qui a suscité les recommandations faites. Que pouvez-vous donc nous dire du suivi des recommandations ?

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Pierre-Franck Chevet, président de l'Autorité de sûreté nucléaire

La question des suites de Fukushima ne concerne pas les seuls réacteurs ; en France, nous en avons élargi le champ à l'ensemble des installations. Le Japon a subi un séisme d'une puissance que nous ne connaîtrons probablement pas en France. Plutôt que d'en déduire qu'il n'y a rien à faire, notre approche a été de considérer qu'ils s'étaient fait surprendre par quelque chose à quoi ils n'avaient pas pensé. Nous avons donc essayé de savoir comment faire face à l'impensable, ce qui est évidemment compliqué.

De manière plus pragmatique, nous nous sommes demandé comment faire face à un accident grave quelle que soit son origine, y compris des actes de malveillance. La réponse est assez basique : pour la plupart des installations, il faut remettre de l'eau, en quantité suffisante. Et pour ce faire, il faut de l'eau, de l'électricité, et des tuyaux pour tout relier. C'est le sens de toutes les demandes que nous avons faites, mêmes si certains aspects étaient un peu plus subtils. Dans un premier temps, nous avons demandé à l'ensemble des exploitants de rajouter des pompes mobiles, de rajouter des tuyaux, et de créer une source froide d'appoint, par exemple un pompage dans la nappe phréatique pré-réalisé. Pour les moteurs diesels qui permettent aux pompes de fonctionner, il faut de l'électricité. Des moteurs diesels supplémentaires, de petite taille, ont été installés en hauteur, sur un des bâtiments, à l'abri des inondations ou des vagues. Mais ils ne sont pas à l'abri de tout : des agressions causées par l'aviation – pas nécessairement malveillantes – pourraient les endommager.

Cette première phase est entièrement terminée. S'y est ajoutée la mise en place de forces d'action rapides – qu'EDF appelle FARN, pour « force d'action rapide nucléaire » – sur quatre sites en France. Des moyens et du personnel ont été prépositionnés afin que le jour venu, ils soient capables de se projeter et apporter leur secours aux sites qui connaissent des problèmes, y compris dans le cas d'un accident de type Fukushima où plusieurs réacteurs sont en difficulté. Pour les autres grands exploitants tels que Framatome ou le CEA, le même type de demande ont été faites, et elles ont été réalisées.

Cette phase 1 correspond à ce qui a été demandé dans les autres pays. En France, nous sommes allés plus loin. Par exemple, nous avons demandé d'ajouter de gros moteurs diesels dans un bunker protégé de tout ou presque, il y a toujours des limites. Ce sont des travaux plus importants, qui vont bien au-delà des seuls moteurs diesels, et leur réalisation s'étalera jusqu'en 2021.

Nous avons également exigé une troisième tranche, que n'ont pas prévue d'autres pays, qui sera faite lors de la quatrième visite décennale de chaque installation.

Le plan de bataille est fixé, et la phase 1, prévue dans les autres pays, est déjà en place. Toutes ces mesures seront aussi positives en vue de la prolongation, et même si elles ne sont pas suffisantes à ce stade, elles sont bonnes pour la sûreté.

Nos demandes sont à peu près équivalentes pour toutes les grosses installations, dont EDF représente à peu près la moitié. Les installations d'EDF sont extrêmement standardisées, ce qui nous rend plus efficaces, car lorsqu'un problème est réglé pour une installation, la solution vaut aussi pour les autres réacteurs. À la différence, les autres installations du cycle sont extrêmement variées, chacune est unique. Il n'y a qu'une seule usine de La Hague, avec plusieurs installations ; les réacteurs de recherche imposent une tout autre approche, et les lieux de stockage ou d'entreposage impliquent encore une autre logique de sûreté. L'approche est beaucoup plus sur mesure. Pour les installations du CEA, les questions de démantèlement sont compliquées parce que leurs installations sont plus anciennes, donc un plus grand nombre d'entre elles est en cours de démantèlement. Or le CEA fonctionne sur moyens budgétaires. Et si j'ai mentionné l'amélioration que constituait la recapitalisation d'EDF et d'Areva, pour le CEA, les questions budgétaires constituent un frein au démantèlement. S'agissant d'Areva – devenue Orano –, la reprise des déchets anciens à La Hague constitue un enjeu important à nos yeux, et nous avons imposé des prescriptions.

Je ne sais pas si nous sommes « perméables » vis-à-vis d'EDF, je ne sais pas exactement ce que vous entendez par ce terme, j'y vois un problème d'étanchéité. Il suffit de voir la réaction d'EDF à certaines de nos décisions pour constater que nous ne sommes pas perméables. Il nous arrive fréquemment de discuter sur les sujets techniques avec EDF, mais à la fin, nous prescrivons. Par exemple, nous avons imposé il y a trois ou quatre mois l'arrêt des quatre réacteurs du Tricastin, EDF n'était pas d'accord, mais cela a été fait.

S'agissant des défauts cachés dans les pièces réalisées au Creusot, le but de la démarche en cours est justement qu'ils ne le soient plus. Ces défauts avaient effectivement été dissimulés, et nous les avons trouvés en reprenant les documents pour y trouver les fraudes et les falsifications. L'ASN souhaite purger cette situation et étudier chaque dossier. Il y a plus de 2 millions de pages à relire, une par une, et il faut un expert pour arriver, au vu d'un seul document, à soupçonner une falsification. C'est un travail compliqué. Je prévois d'ailleurs qu'au terme de ce travail sur les documents, une vérification soit faite sur site. Il faudra bien cibler pour nous assurer de ne pas être passés à côté d'une falsification. Nous verrons plus clair dans les prochains mois pour savoir où viser intelligemment.

En ce qui concerne la sécurité, je persiste à dire, quoi qu'en disent d'autres, qu'il suffit de regarder comment les choses sont organisées ailleurs. Il y a une raison technique à cela ; il n'est pas question de l'intervention de la puissance publique ou de la définition de la menace, ce n'est nulle part le champ d'intervention des autorités de sûreté nucléaire. Mais partout ailleurs, y compris aux États-Unis ou au Royaume-Uni, qui ont aussi des autorités indépendantes, elles sont en charge de la sécurité. C'est un simple rappel factuel.

Quant à l'éventuelle mauvaise foi des exploitants, nous avons connu des cas dans lesquels les déclarations d'événements ou d'écarts étaient tardives. C'est pourquoi nous serons très attentifs à ce que les exploitants détectent leurs propres anomalies, car ils sont au plus près des installations ; mais aussi à ce qu'ils nous en parlent rapidement. Nous n'avons pas été tout à fait satisfaits des agissements des exploitants dans certains cas. Mais au-delà, on ne peut pas parler de mauvaise foi caractérisée et systématique. Nous ne sommes pas toujours d'accord avec les uns ou les autres, loin de là, nous sommes une autorité technique et nous restons dans notre champ.

L'autorisation de redémarrage de l'usine du Creusot a fait suite à un travail d'amélioration de l'usine qui a duré un an et demi, mené par Areva sous notre surveillance et celle d'EDF, qui est de ses premiers clients au niveau français. Areva a défini un plan d'action qui touche à des aspects très variés. Un certain nombre des personnes concernées n'est plus au Creusot. La formation a été systématisée. Et les surveillances en cascade ont été renforcées, car ce genre d'activité n'est pas réalisé par une personne seule. Il y a tout d'abord une surveillance hiérarchique locale, et l'encadrement a connu quelques changements ; puis la surveillance qu'exerce la maison-mère, Areva, sur le Creusot ; et celle d'EDF sur l'ensemble de l'usine. EDF sera notamment capable de se rendre dans l'usine à n'importe quel moment. Enfin, nous avons placé cette usine en surveillance renforcée car nous devrons être extrêmement attentifs au cours de la phase de remontée en marche de l'usine. Des pratiques inacceptables y ont eu cours, et nous devrons vérifier qu'elle fonctionne bien, conformément au nouveau schéma qui a été présenté. Nous avons donc donné notre accord au redémarrage, à la condition que l'ensemble de ces surveillances soient maintenues tant qu'il existera le moindre doute sur la qualité des opérations.

S'agissant de la surveillance renforcée de la Franco-Belge de fabrication du combustible (FBFC) à Romans-sur-Isère, je ne connais pas les détails. Cette société a été placée en surveillance renforcée il y a quelque temps maintenant, en 2014. Les derniers éléments qui me sont remontés, mais qui peuvent être antérieurs aux derniers événements, étaient plutôt positifs quant à la reprise en main du site en matière de qualité et de sûreté d'exploitation. Nous envisagions, sous réserve d'une dernière vérification établissant que tout est opérationnel, de lever la surveillance renforcée. Peut-être que ce que vous venez de dire remet en cause cette conclusion, mais je ne peux pas vous parler du cas que vous évoquez, car je ne le connais pas personnellement.

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Pourriez-vous nous éclairer sur la sous-traitance, en particulier pour ce qui est du risque d'actes malveillants, de compétences insuffisantes, et de la santé des personnes en question ? Il est souvent fait état d'interventions venant de pays voisins ; comment nous assurer de la dosimétrie et du contrôle ?

Enfin, qu'en est-il de la vulnérabilité de nos installations aux cyberattaques ?

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Pierre-Franck Chevet, président de l'Autorité de sûreté nucléaire

Je ne répondrai pas en ce qui concerne les actes de malveillance, n'étant pas en charge, pour l'instant, du sujet.

La sous-traitance impose de la vigilance, mais peut aussi contribuer à la sûreté. On voit souvent l'aspect négatif de la sous-traitance, mais, pour certaines opérations pointues, il vaut mieux que des spécialistes interviennent. Et lorsque les exploitants n'ont pas ces spécialistes en interne, la sous-traitance s'impose. En revanche, la loi relative à la transition énergétique pour la croissance verte a prévu une limite au nombre de sous-traitants successifs. Un décret d'application prévoit les détails : un sous-traitant, puis deux niveaux. Il est possible d'y déroger pour certaines opérations très spécialisées, mais cela doit être justifié auprès de l'Autorité, qui étudie les raisons de ce recours à la sous-traitance. Bien souvent, c'est nécessaire et positif pour la qualité et la sûreté de ce qui est fait.

Voilà le dispositif en place. Le bilan est contrasté : il peut y avoir de bonnes choses, mais dans d'autres cas, la surveillance est compliquée car la chaîne de sous-traitance est trop longue. La loi et les nouveaux textes ont bien encadré cette situation, même s'il faudra s'assurer, dans la durée que ces dispositions sont bien appliquées.

Les cyberattaques ne sont pas un sujet actuellement de ma compétence.

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Pensez-vous que les problèmes rencontrés pour la fabrication des couvercles soient liés à une perte de compétence suite au départ à la retraite de personnes qui avaient acquis cette expérience au cours des décennies précédentes, et qui ne l'ont pas transmise ?

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Je suis peut-être naïve, mais vos derniers propos soulèvent des questions. Comment se fait-il qu'une situation exceptionnelle, comparable à une grève dans une centrale, qui dure depuis vingt-deux jours, et concerne une entreprise mise en place sous la surveillance de l'ASN, ne remonte pas jusqu'à vous ?

Lors de la chute du générateur de vapeur à Paluel 2, il y avait soixante-dix entreprises sous-traitantes sur le site, et les rythmes de travail mis en place — induits par la sous-traitance — avaient créé une situation dans laquelle les conditions et les processus de travail étaient un peu banalisés.

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Pierre-Franck Chevet, président de l'Autorité de sûreté nucléaire

La première question porte sur la cuve de l'EPR. Il y a bien un problème global de perte d'expérience, facile à comprendre car les installations nucléaires, en particulier les réacteurs, ont été construites en grand nombre à la fin des années 1970 et dans les années 1980, par des gens qui ont appris à faire des cuves, des soudures sur site, ou des bétons compliqués, propres au domaine nucléaire. La durée de la vie professionnelle de ces personnes est de l'ordre de quarante ans. À Flamanville, une partie des difficultés rencontrées tient à la plus grande complexité du réacteur, mais l'essentiel est lié à la perte d'expérience – je préfère parler de perte d'expérience que de perte de compétence, qui donne le sentiment d'une attaque personnelle. Simplement, nous n'avons pas fait de soudures ni de bétons compliqués pendant longtemps, il n'est donc pas étonnant que nous ayons des difficultés.

S'agissant spécifiquement de la cuve, mon jugement sera plus nuancé. Le réacteur EPR de Flamanville est un peu plus gros, et lorsqu'une usine est dimensionnée pour faire des pièces d'une certaine taille, il faut changer de procédé pour réaliser des pièces plus grosses. Et pas de chance, le procédé retenu a créé cette anomalie.

Sur la situation de FBFC, je ne suis pas personnellement au courant, mais l'ASN l'est. Nous avons une dizaine de divisions territoriales qui assurent le travail de proximité, et ce sont elles qui s'en chargent, parce que c'est un problème local. Elles feront remonter l'information si quelque chose doit être corrigé, mais sans doute que le sujet ne mérite pas un traitement immédiat.

À Paluel 2…

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Permettez-moi d'apporter un complément sur ce point. Nous parlions de Fukushima précédemment, il ne s'agit évidemment pas d'un problème de même proportion, et heureusement. Mais le problème survenu à Fukushima n'avait absolument pas été envisagé, tout comme une chute de générateur de vapeur faisait partie des problèmes qui ne devaient jamais arriver et n'avaient donc pas été envisagés. Maintenant que c'est arrivé, avez-vous revu un certain nombre de vos idées préconçues sur ce qui pouvait arriver ou non ?

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Pierre-Franck Chevet, président de l'Autorité de sûreté nucléaire

En réponse à cette dernière question, je vous ferai part d'une anecdote. Des groupes permanents d'experts se réunissent pour traiter les grandes questions les plus difficiles. Ce sont les sages que nous consultons, en plus de l'IRSN, sur les questions compliquées. Il se trouve que la veille, un de ces groupes d'experts se penchait sur le dimensionnement, au regard des problèmes de manutention. Effectivement, la théorie des exploitants était que ce genre d'événements n'était pas possible, mais il est survenu le lendemain.

Nous n'étions donc pas convaincus qu'un tel événement ne pourrait jamais se produire et le fait qu'il soit arrivé démontre à l'évidence que ce genre de cas doit être pris en compte et qu'il faut y trouver des parades adéquates. Nous n'avons pas d'éléments d'explication à ce stade, et il est certain que le montage industriel était complexe ; je ne parle pas du nombre de sous-traitants sur Paluel 2, mais de ce qui a été fait en matière de manutention. Il est clair qu'il y a eu une erreur de conception, mais ce n'est peut-être pas tout, des enquêtes judiciaires sont en cours. Le montage était donc compliqué, et il y a aussi eu une erreur de calcul, mais je ne sais pas si c'est la cause de l'accident.

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Nous ne pouvons pas aller plus loin sur ce sujet, afin de ne pas empiéter sur le champ d'une enquête judiciaire.

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La question du stockage des déchets radioactifs est en pleine actualité. Quelle est la position actuelle de l'ASN sur ce stockage sur différents sites ? L'attention est portée sur Bure, mais il y a aussi les sites de Soulaines-Dhuys et de Morvilliers. Dans l'hypothèse où un stockage en profondeur se révélerait trop dangereux, avez-vous étudié les solutions alternatives, notamment celle du stockage en subsurface, présentée par certains comme plus sûr car plus facilement réversible ?

Une thèse soutenue en décembre par Leny Patinaux démontre l'impossibilité d'apporter la preuve de la sûreté à long terme d'un stockage tel qu'il est envisagé pour le Centre industriel de stockage géologique (CIGEO). Avez-vous une opinion sur ce point ?

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Pierre-Franck Chevet, président de l'Autorité de sûreté nucléaire

Sur le stockage, y compris les sites existants, l'Agence nationale pour la gestion des déchets radioactifs (ANDRA) est un bon exploitant. Il y a toujours des débats sur l'historique du Centre de stockage de la Manche (CSM), mais pour les autres sites en fonctionnement, notamment Morvilliers, nous n'avons pas de problèmes avec l'ANDRA.

Deux catégories de déchets n'ont pas encore de solution de stockage : les déchets de faible activité à vie longue, qui ne sont pas les plus nocifs, mais dont la longévité impose un traitement particulier, et, naturellement, les déchets les plus nocifs : ceux de haute et moyenne activité à vie longue.

Le travail sur les premiers est en cours, l'idée avancée par l'ANDRA est de réaliser un stockage en subsurface, en tout cas pas très profond, puisqu'il s'agit de déchets de faible activité.

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Pour les non-spécialistes qui nous suivent, pourriez-vous préciser la nature et l'origine des déchets de faible activité à vie longue ?

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Pierre-Franck Chevet, président de l'Autorité de sûreté nucléaire

Ils se caractérisent par ce que je viens de dire : ils sont de faible activité, ils ne produisent pas beaucoup de rayonnements ; mais ils sont à vie longue, leur radioactivité met beaucoup de temps à décroître. Ils constituent une catégorie intermédiaire, ils ne sont pas très nocifs à l'instant t, mais leurs effets durent longtemps. Les premières solutions envisagées sont plutôt en subsurface. Les déchets les plus nocifs sont de haute ou moyenne activité – donc nocifs à l'instant t – et à vie longue. Et par vie longue, on entend des centaines de milliers d'années.

Il n'y a aucun problème à imaginer des entreposages en subsurface pour le moyen terme – de l'ordre de la centaine d'années –, et les déchets d'une telle durée de vie sont déjà dans des zones de reposage, sous notre contrôle. Concevoir une installation industrielle à même d'accueillir ces déchets pour cent ou deux cents ans n'est pas un problème, c'est tout à fait possible. Mais toutes ces installations industrielles supposent un contrôle sociétal. Il faut faire de la maintenance d'ouvrage, car en subsurface, des ouvrages de béton entourent les déchets. Un minimum d'intervention humaine est donc requis pour vérifier que les murs et les colis tiennent, et il faut un personnel minimum pour éviter les entrées de personnes, malveillantes ou non. Il est possible d'imaginer cela à un horizon de cent ou deux cents ans, en ayant foi dans l'avenir. Mais à un horizon de cent mille ans, je défie quiconque de présenter un raisonnement qui tienne la route.

C'est pour cela qu'au niveau international, la solution définitive retenue est de s'appuyer sur les caractéristiques géologiques intrinsèques, qui ont une portée de cent mille ans. Toute autre solution aujourd'hui imaginable ne résiste pas à l'épreuve de ce temps long, intrinsèque à ces déchets.

Il y a un bémol à mes propos, c'est la réversibilité, qui a été constamment soulevée lors des débats à ce sujet. Rien n'interdit de penser que, d'ici une centaine d'années, une nouvelle technologie permettra de s'abstenir de ce stockage en traitant ces déchets pour qu'ils ne soient plus nocifs. Il n'est pas loufoque d'imaginer cela ; on ne sait jamais. Notre génération a le devoir de trouver une solution qui marche, mais on ne peut pas insulter l'avenir en refusant d'imaginer qu'une autre, meilleure, apparaisse.

C'est pourquoi la loi prévoit cette réversibilité, qu'il faut encore traduire en termes techniques précis. La loi prévoit que pour une période d'au moins cent ans, la réversibilité doit être assurée, et que l'on ne peut revenir dessus que par une nouvelle loi. C'est une position assez ferme, logique au regard des questions posées dans les enquêtes publiques, déjà nombreuses, sur le projet CIGEO.

Pour l'instant, la solution du stockage géologique profond est accessible techniquement et scientifiquement, mais il faut se donner la possibilité d'une vraie réversibilité sur un horizon de temps long. C'est notre vision.

Par ailleurs, en tant qu'autorité de sûreté, nous avons été amenés à rendre un avis début janvier sur les grandes options de sûreté du stockage. Elles sont bonnes dans l'ensemble, et l'un des points importants tient aux conditions géologiques de la zone : c'est une bonne argile. Le zonage est donc bon d'un point de vue technique – je ne me prononce pas sur l'acceptabilité locale du projet.

Globalement, le dossier est très bon. Un point technique nous pose problème, et il doit être réglé avant de descendre des déchets de cette nature : celui des déchets conditionnés dans du bitume. Il s'agit plutôt de déchets de moyenne activité, ce ne sont pas les plus nocifs – les résidus de combustible – mais des déchets de traitement, placés dans des fûts où l'on a coulé du bitume. C'est l'un des moyens de rendre ces déchets partiellement inertes, mais le bitume n'est pas inerte, il y a un risque d'inflammation une fois porté à température. Et un incendie dans un stockage est compliqué à gérer.

Nous avons imaginé deux voies : la première consiste à traiter ces déchets avant de les descendre, pour les rendre plus inertes qu'ils ne le sont actuellement. C'est celle que nous privilégions actuellement. Mais si cela s'avérait impossible, l'autre voie est de prévoir tout ce qu'il faut en matière de détection et de lutte contre l'incendie pour pouvoir intervenir très rapidement.

En tout état de cause, tant que nous n'aurons pas une position claire sur ce sujet, les déchets ne descendront pas.

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Peut-on imaginer de les revitrifier, ou de les recapturer ?

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Pierre-Franck Chevet, président de l'Autorité de sûreté nucléaire

On peut tout imaginer. De telles solutions entrent dans le cadre de la deuxième voie : nous acceptons qu'ils ne soient pas totalement inertes et nous prévoyons des « surcolisages » : nous mettons des colis dans d'autres colis. Mais si un incendie apparaît pour une autre raison, et que le suremballage se met à chauffer, l'intérieur va aussi finir par chauffer. Les problèmes ne sont donc pas résolus, et j'attends de connaître les résultats des recherches avant de prendre une position. La solution privilégiée pour l'instant est plutôt la première : rendre ces colis inertes avant de les stocker.

L'hypothèse d'un incendie est préoccupante, notamment suite aux retours d'expérience d'installations de stockage. J'ai été en charge de l'une de ces situations : en Alsace, StocaMine a créé un stockage pour des déchets nocifs, mais pas radioactifs, dans les anciennes mines de potasse d'Alsace. Des précautions quant à la nature des déchets introduits étaient évidemment prévues pour éviter les incendies. Il se trouve qu'une fois, un colis de déchets introduit était en combustion interne. Le stockage a péri des suites de l'incendie qui a touché l'installation.

L'autre exemple, dans le domaine radioactif, concerne l'installation américaine de défense du Waste Isolation Pilot Plant (WIPP), site de stockage géologique pour les déchets de la défense. Là aussi, un jour, des déchets qui n'étaient pas conformes à ce que l'on attendait ont été introduits, une réaction chimique a eu lieu et un incendie s'est déclaré. Cela a coûté très, très cher à l'installation qui a connu un long arrêt.

Ce sont des sujets sérieux, c'est pour cela que nous avons posé ces questions avec l'orientation dont je vous ai fait part.

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Les colis à haute activité sont actuellement stockés à La Hague. L'embouteillage rend nécessaire une piscine d'entreposage intermédiaire, pour stocker les déchets des années antérieures. Pour la clarté des débats, il faut souligner que ces déchets existent déjà, et qu'il va bien falloir trouver des solutions pour les stocker. Pour les déchets bitumineux, qui pourraient entraîner des incendies suite à des réactions chimiques, nous avons encore un peu de temps pour voir venir en les laissant où ils sont et en les gérant avec de bonnes précautions. En revanche, pour les déchets à haute activité, nous arrivons au bout de nos capacités d'entreposage, et c'est la raison pour passer à la solution CIGEO.

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Pierre-Franck Chevet, président de l'Autorité de sûreté nucléaire

Pour CIGEO comme pour les autres installations de stockage, quel que soit le type d'activité et de nocivité des déchets, nous gérons des déchets déjà produits. Que l'on continue l'exploitation de l'énergie nucléaire ou pas, ils seront tous là : bitume et résidus de traitement des combustibles usés.

Pour les déchets issus du retraitement du combustible, que l'on appelle les verres, il n'y a pas de saturation. C'est pour les assemblages de combustibles qu'il n'y a pas assez de place dans les piscines actuelles et qu'une autre piscine est nécessaire, il s'agit du projet dont nous avons déjà parlé. Le projet CIGEO est principalement prévu pour les fûts vitrifiés qui contiennent des déchets du retraitement. Il est prévu qu'ils ne commencent à arriver qu'à partir de 2070, le temps qu'ils refroidissent et que le traitement soit fait. La nouvelle piscine dont nous discutons a vocation à gérer le problème entre-temps, à partir de 2030, lorsque La Hague serait saturée. Et elle servira à gérer les combustibles en l'état, et non les fûts qui résultent du retraitement.

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Je lance une invitation aux éminents membres de notre commission à se rendre dans la centrale de Cruas-Meysse, en Ardèche, car beaucoup de sujets que nous avons évoqués pourraient être illustrés lors d'une telle visite. Notamment, des diesels d'ultime secours sont en cours de construction ; j'ai visité la centrale mardi matin, et c'est très impressionnant. Un réacteur est en cours de révision décennale, il est donc possible de le visiter et d'entrer au coeur du moteur. Je ne suis pas certain que tous les membres de la commission aient déjà eu l'occasion de le faire.

Cela permettrait surtout de prendre la mesure d'un événement qui a défrayé la chronique, l'incursion de militants de Greenpeace le 28 novembre dernier. La compréhension du cheminement de ces militants fait apparaître qu'ils n'ont absolument pas atteint la piscine d'entreposage du combustible.

Cette visite m'a aussi permis d'échanger avec les militaires responsables du peloton spécialisé de protection de la Gendarmerie (PSPG) sur le terrain, et c'est riche d'enseignements à même d'éclairer nos débats sur les questions de sécurité.

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Je dois rappeler que nous ne pouvons pas empiéter sur le champ d'investigations judiciaires. Nous ne pouvons interférer avec l'enquête en cours.

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Nous irons donc en visiter une autre, pas celle-là !

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Nous avons été alertés du fait que le transport constituait un point faible de la filière. Que pensez-vous du fait que des camions circulent avec des éléments radioactifs ?

J'ai bien entendu que votre champ de compétence n'incluait pas la cyber-sécurité, avez-vous un retour d'expérience négatif concernant les blocs de contrôle-commande numériques qui existent dans les réacteurs de 1 450 mégawatts, par rapport à ceux qui ne sont pas numériques ?

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Pierre-Franck Chevet, président de l'Autorité de sûreté nucléaire

Je suis plus à l'aise pour répondre à votre deuxième question. Nous n'avons pas de retour d'expérience négatif sur ce point. Je ne parle pas de cyberattaques, vu que je ne suis pas en charge de ce genre de sujets. Mais ces blocs de commande-contrôle ont été introduits pour améliorer le pilotage des installations, donc la sûreté. Ils posent d'autres problèmes, mais c'est un avantage pour la qualité de l'exploitation, y compris en cas de gestion des accidents ou des incidents.

Quant à la sécurité des transports, je ne suis pas compétent. Mais nous participons à leur sûreté, en vérifiant que les emballages de transport tiennent en cas d'agressions normales. Tout un processus est prévu, et nous y prenons part. Mais nous ne participons pas à la protection contre des actes de malveillance, toujours pour la même raison.

Il y a un commentaire que j'aurais dû faire dès le départ. Il y a un vrai problème à en parler des questions de sécurité. De nombreuses choses sont protégées par le secret de la défense, à juste titre et pour de bonnes raisons, et il n'est pas possible d'en parler. Je vous dis que je ne suis pas compétent, et c'est vrai pour l'instant. Mais si je l'étais, je ne vous dirais rien ou pas grand-chose, pour la simple raison que vous n'êtes pas tous habilités. En aucune manière on ne peut imaginer mener une opération extrêmement transparente sur ces sujets-là, car ce serait prendre le risque de susciter des actes de malveillance. Une solution consisterait à créer une formation ad hoc pour les parlementaires habilités, qui me paraîtrait extrêmement utile pour mettre en question ce que nous faisons, ce que nous ne faisons pas, ou ce que vous souhaiteriez voir mettre en place ; et pour témoigner auprès du grand public, sans donner les détails, mais en attestant que vous avez pu réaliser votre mission de contrôle. Un aspect intrinsèque du sujet impose de ne pas en parler publiquement, mais rien n'empêche de prévoir d'échanger avec des membres accrédités de la représentation nationale. Sur le sujet de la sécurité, dont je n'ai pas la charge, ce serait une vraie amélioration du système. C'était un simple commentaire, et vous aurez bien noté qu'il sort de mon champ de compétence.

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Nous allons étudier cette proposition. Cacher le plus possible de choses peut éviter des actes malveillants basiques, mais des terroristes qui auraient envie de s'attaquer à une installation nucléaire vont se préparer pendant des mois et auront accès à tout ce que vous disiez : beaucoup d'informations sont publiques, et ils prendront le temps de se préparer. Greenpeace nous a fait parvenir un rapport très intéressant en se fondant uniquement sur des données publiques, et ils sont capables de mettre sur pied des scénarios d'attaque – sans les réaliser, bien sûr. S'ils y ont pensé, des terroristes aussi peuvent le faire : ils ne sont pas plus bêtes que les gens de Greenpeace…

Je reviens sur ma question concernant la thèse, à laquelle vous n'avez pas répondu.

S'agissant de sûreté, la question de la prolongation de l'exploitation des centrales au-delà de quarante ans se pose, mais aussi l'hypothèse de la construction de nouveaux réacteurs. EDF et Orano, dans des déclarations publiques, ont évoqué de nouveaux types de réacteurs : ATMEA1, ou EPR-NM, pour « nouveau modèle ». L'ASN a-t-elle été saisie de demandes de validation ou de dossiers d'options de sûreté pour de tels réacteurs ? Si oui, lesquels, et quelles en seraient les principales caractéristiques ?

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Pierre-Franck Chevet, président de l'Autorité de sûreté nucléaire

Ma secrétaire m'a fait une copie de la thèse de M. Patinaux ; j'ai les quatre cents pages sur mon bureau, dont je n'ai encore lu que les morceaux choisis. Cette thèse rejoint ce que j'ai dit précédemment à propos de l'objet CIGEO. Il est question de quelques centaines de milliers d'années, donc la démonstration de sûreté renvoie à des problèmes que nous n'avons pas l'habitude de manier. Ce n'est pas un objet classique : il oblige à penser à cent mille ans, donc en faisant abstraction de la société, car personne ne peut imaginer à quoi elle ressemblera alors, mais en nous focalisant sur la géologie et les éléments de base qui changent moins à de telles échéances.

La thèse tourne autour de cette idée, et je trouve positif que l'ANDRA se soit soumise au regard d'un chercheur en épistémologie, et ait laissé son personnel s'exprimer dans une thèse qui a vocation à être rendue publique. Il est bien qu'un exploitant s'interroge, et rende public le fruit de ses réflexions. C'est aller dans le sens de la sûreté que d'exposer publiquement les questions qu'ils se posent sur la manière de construire un raisonnement, d'être compris – par l'autorité de sûreté, mais aussi par les gens –, s'agissant une installation dont la durée de vie est de cent mille ans. Et comment expliquer que l'on est convaincu que c'est sûr, ou qu'on ne l'est pas ?

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La thèse porte plutôt à croire qu'on ne peut pas être convaincu que c'est sûr.

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Pierre-Franck Chevet, président de l'Autorité de sûreté nucléaire

Je dis simplement que j'apprécie les gens qui se posent des questions, et j'espère que nous en faisons partie.

Nous avons effectivement été saisis d'un projet d'EPR « nouveau modèle », sur lequel nos groupes d'experts techniques se sont réunis en janvier. J'attends leurs conclusions, j'ai l'impression qu'elles seront plutôt positives. Il s'agit de l'EPR de Flamanville, avec un certain nombre d'évolutions, certaines à vocation industrielle, d'autres à vocation de sûreté. L'un dans l'autre, cela semble bien orienté en matière de conception, mais il nous reste à prendre une position finale.

Par ailleurs, nous avons reçu – ou allons recevoir – un deuxième dossier, qui s'appelle « EPR V2 ». Il se situe entre l'EPR de Flamanville et l'EPR NM, qui marque une évolution significative par rapport au premier – ce qui peut être bon en matière de sûreté, mon jugement sur ce point n'est pas encore rendu. Mais je parlais précédemment de perte d'expérience ; plus nous nous écarterons, même pour de bonnes raisons, du « design » initial, et plus nous devrons réapprendre à faire, car le design ne sera pas le même. Donc, y compris s'agissant de la sûreté finale, un équilibre doit être trouvé. L'EPR V2 vient avant tout corriger des bugs, ce qui s'impose et limite le fossé entre ce que nous avons fait avec quelques difficultés pour l'EPR de Flamanville, et ce que l'on pourrait être amené à faire – si la décision est prise un jour – avec un EPR bis. Nous allons donc être saisis de l'EPR V2, et nous allons rendre une décision dans les prochains mois sur l'EPR NM.

Puisque des invitations ont été lancées, je me permets d'en faire une à mon tour : il est possible d'organiser, pour ceux qui le souhaitent, la participation à une inspection sur un site à choisir. Cela permettrait de voir le site, mais aussi d'assister à une inspection de l'ASN.

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S'agit-il d'inspections surprises, ou sont-elles prévues à l'avance ?

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Pierre-Franck Chevet, président de l'Autorité de sûreté nucléaire

Nous faisons les deux, je n'ai pas la proportion en tête. Sur certains sujets, il vaut mieux prévenir pour s'assurer d'avoir les bons interlocuteurs au moment où nous arrivons. Sur d'autres, pour aller vérifier comment les choses se passent en salle de commande, nous pouvons le faire de manière inopinée. Il nous est arrivé de le faire au moment des fêtes ou dans les moments les plus compliqués, où le personnel compétent est censé être en salle de commande. Si vous souhaitez intervenir de nuit avec nous, ça ne pose pas de problème.

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Merci pour cette invitation. Ne sous-estimez pas nos capacités et notre envie d'agir !

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Je vous remercie de la clarté de vos réponses. Nous nous réservons la possibilité de vous inviter à nouveau si nous avons besoin d'autres éclaircissements au cours de notre long cheminement, cette commission d'enquête étant prévue pour durer encore quelques mois. Nul doute que d'autres questions pourraient apparaître, qu'il est important de vous exposer afin de recevoir vos explications.

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Membres présents ou excusés

Réunion du jeudi 22 février 2018 à 17 heures

Présents. - M. Xavier Batut, M. Fabrice Brun, M. Paul Christophe, Mme Perrine Goulet, M. Adrien Morenas, M. Jimmy Pahun, Mme Mathilde Panot, Mme Barbara Pompili, Mme Natalia Pouzyreff.

Excusés. - M. Christophe Bouillon, M. Anthony Cellier.