Commission des affaires européennes

Réunion du jeudi 15 mars 2018 à 10h05

Résumé de la réunion

Les mots clés de cette réunion

  • CETA
  • OMC
  • acier
  • commerce
  • commerciale
  • commerciaux
  • négociation

La réunion

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Jeudi 15 mars 2018

Présidence de Mme Sabine Thillaye, Présidente de la Commission

La séance est ouverte à 10 h 05.

I. Audition de M. Jean-Baptiste Lemoyne, Secrétaire d'État auprès du ministre de l'Europe et des affaires étrangères

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Monsieur le ministre, mes chers collègues, je suis heureuse d'accueillir aujourd'hui M. Jean-Baptiste Lemoyne, secrétaire d'État auprès du ministre de l'Europe et des affaires étrangères, et le remercie d'avoir accepté d'évoquer avec nous les nombreux sujets qui font l'actualité du commerce international.

Parmi ces sujets, trois ont retenu mon attention, mais je suis sûr que d'autres seront soulevés au cours de cette réunion.

Le premier est la décision du président américain Donald Trump d'imposer des droits de douane sur les importations d'acier et d'aluminium. Cette décision a soulevé un tollé mondial, mais les choses ont évolué depuis quelques jours, puisque le Canada et le Mexique ont obtenu une exception. Est-il possible que l'Union européenne en bénéficie également et, sinon, quelles sont alors les mesures susceptibles d'être mises en oeuvre ?

Deuxième sujet, la politique commerciale européenne. La semaine dernière, nos collègues Patrice Anato et Vincent Bru nous ont informés, dans le cadre de leur rapport sur l'Organisation mondiale du commerce (OMC) et son articulation avec la politique commerciale européenne, de l'intention de la Commission européenne d'en finir avec les accords mixtes et, par conséquent, avec la ratification des accords de libre-échange par les États membres. Les Parlements nationaux ne se prononceraient donc plus sur ceux-ci, alors qu'ils en avaient l'occasion jusqu'à présent.

Avez-vous confirmation de ces informations ? Si oui, comment les parlements nationaux seraient-ils alors en mesure de contrôler la politique commerciale européenne, même s'il s'agit, à première vue, d'une compétence exclusive de l'Union européenne ? Si le contrôle a posteriori n'est plus possible, ne faut-il pas envisager un contrôle a priori dès avant l'adoption des mandats de négociation ?

Enfin, troisième sujet, l'accord économique et commercial global, ou Comprehensive Economic and Trade Agreement (CETA), avec le Canada. Où en est le Gouvernement s'agissant de la mise en oeuvre du plan présenté à l'autonome dernier et avez-vous des informations supplémentaires sur la date retenue pour la présentation à l'Assemblée nationale du projet de loi autorisant sa ratification ?

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Jean-Baptiste Lemoyne, secrétaire d'État auprès du ministre de l'Europe et des affaires étrangères

En premier lieu, je souhaite remercier et féliciter les députés Patrice Anato et Vincent Bru pour la qualité de leur rapport, que vous venez d'évoquer. Il tombe en effet à point nommé par rapport à l'actualité du commerce international. Il est publié à un moment critique pour l'OMC. J'en ai pris connaissance et puis me dire relativement en osmose avec le constat dressé, comme avec les pistes esquissées.

Dans cette présentation liminaire, je souhaite aborder trois points. J'évoquerai d'abord les urgences de l'heure, à savoir la définition de la réponse européenne à la décision du président Donald Trump de relever les droits de douane de 25 % sur l'acier et de 10 % sur l'aluminium. Ce sera l'occasion d'aborder ensuite les causes structurelles de la crise du multilatéralisme, qui sont d'ailleurs très bien exposées dans le rapport. J'évoquerai enfin les orientations de la politique commerciale européenne, les évolutions relatives à la mixité des accords conclus, le plan d'action CETA comme l'actualité des négociations commerciales en cours : relations avec le MERCOSUR, avec le Mexique…

Venons-en à l'actualité chaude, voire brûlante : le président Trump a annoncé le jeudi 8 mars le relèvement des droits de douane sur les importations américaines d'acier et d'aluminium. Cette mesure devrait être prise dans un délai très rapide, puisqu'il évoquait une durée de quinze jours, soit des mesures dès le 23 mars. Le Conseil européen se réunira d'ailleurs le même jour et traitera de la question. Dès avant le 8 mars, le Président de la République s'était engagé en faveur d'une inscription des sujets de commerce international à l'ordre du jour de cette réunion. Il est important, en effet, de retrouver des repères, une boussole. Les opinions publiques souhaitent être davantage associées à ces sujets. Dans le cadre du plan d'action CETA, la France pousse ses positions sur certains d'entre eux, notamment dans le domaine du développement durable.

L'objectif principal et affiché de l'administration américaine est d'augmenter la production d'acier et d'aluminium aux États-Unis, car elle considère que le taux d'utilisation global des installations industrielles est plus faible qu'il devrait être. Pour parvenir à ce résultat, les rapports présentés par le département du commerce, sous la direction de Wilbur Ross, proposent un objectif de réduction des importations de 13 millions de tonnes pour l'acier, soit 37 % des importations américaines d'acier en 2017, et de 669 000 tonnes pour l'aluminium, soit 13 % des importations américaines en 2017.

En outre, le président Trump a laissé entendre que des exemptions pourraient être données, pour certains pays, en lien avec la coopération militaire et de sécurité. Cela laisse planer un certain flou ou, si l'on veut être plus positif, une certaine marge de manoeuvre. Le Mexique et le Canada ont été cités dans ce contexte, mais il est clair que cela vise à permettre aux États-Unis de gagner du levier dans la renégociation en cours de l'accord de libre-échange nord-américain (ALENA).

Du point de vue économique, les mesures américaines affecteraient les exportations européennes à hauteur de 4,6 millions de tonnes pour l'acier, soit tout de même 5 milliards d'euros en valeur, et 0,26 million de tonnes pour l'aluminium, soit un milliard d'euros en valeur. Ces mesures auraient un impact sur les exportations françaises, de l'ordre de 478 millions d'euros d'exportation pour l'acier et de 193 millions d'euros pour l'aluminium, impact concentré sur quelques produits spécifiques, notamment les produits plats en acier et les tubes et tuyaux destinés au marché de l'énergie.

Il n'est naturellement pas possible de rester les bras ballants devant une telle situation. Depuis le début, nous nous sommes mobilisés sur ce sujet, comme je peux en témoigner. Lors d'une réunion informelle du conseil des ministres à Sofia, quelques jours avant cette annonce du président américain que nous anticipions, une unanimité se dégageait en faveur d'une réaction européenne.

La difficulté économique résulte de ce que, même si d'autres régions géographiques seront plus touchées que l'Europe, une incidence s'y observe néanmoins, puisque ces régions risquent de déporter vers le marché européen leurs productions antérieurement destinées au marché américain. Cela aurait pour effet corollaire une baisse des prix sur le marché européen, source de difficultés.

La position de l'Union européenne est forte et claire et repose sur trois piliers.

Premièrement, l'Union européenne déplore une mesure unilatérale qui frappe des pays qui ne sont pas à l'origine des surcapacités dans les secteurs de l'acier et de l'aluminium. On sait en effet que nos amis chinois sont particulièrement performants dans ce secteur, grâce à des subventions dont on peut questionner le bien-fondé. Les mesures américaines frapperaient donc des pays qui ne sont pas à l'origine du problème. D'autre part, elles reposent sur une base légale – la sécurité nationale – qui n'apparaît pas forcément crédible, ni étayée. Le secteur de la défense américaine n'est en effet commanditaire que de 3 % des importations d'acier, soit un montant résiduel. La démarche constitue en outre un précédent, qui pourrait conduire d'autres États de l'organisation à arguer de ce motif pour revenir sur l'accès au marché qu'ils ont concédé à l'OMC ; ce n'est pas acceptable.

Deuxièmement, l'Union européenne, en tant qu'alliée des États-Unis, va engager un dialogue au plus haut niveau avec son partenaire pour continuer à travailler sur les meilleurs moyens de remédier aux surcapacités que l'on observe au niveau mondial dans les secteurs de l'acier et de l'aluminium. Certains forums méritent peut-être d'être réactivés, comme celui qui fut créé, sous présidence chinoise, dans le cadre du G20.

Troisièmement, l'Union européenne ne consentira pas de concessions unilatérales sous la menace d'un relèvement des droits de douane. Le président américain souhaite manifestement obtenir des réductions de droits de douane dans d'autres secteurs, voire entrer dans une démarche de libre-échange transatlantique. Sur ce point, la position française est très claire. Comme je l'ai dit à la tribune de l'Assemblée nationale, nous devons annoncer que nous négocions avec les États parties à l'accord de Paris, car il est à notre sens de bonne politique d'établir le lien entre libre-échange et développement durable.

Dès lors, trois options sont envisagées en réaction aux mesures que pourraient adopter les États-Unis le 23 mars prochain : la saisine de l'organe de règlement des différends de l'OMC, pour faire constater la non-compatibilité des mesures américaines avec le système multilatéral ; l'adoption par l'Union européenne de mesures de sauvegarde temporaires sur des produits d'acier ou d'aluminium, les États-Unis n'ayant pour l'instant pas qualifié leurs décisions de mesures de sauvegarde pour échapper à des mesures de compensation ; si l'Union était directement visée, l'adoption de mesures de rééquilibrage contre des exportations américaines autres que l'acier et l'aluminium. La Commission travaille d'ailleurs actuellement à une liste de contre-mesures.

À ce stade, je vous dois des explications sur deux points sensibles, à savoir le champ de l'exemption prévue par le président Donald Trump et la définition du champ des mesures de rééquilibrage.

Sur le champ de l'exemption que considèrent les États-Unis, un dialogue est en cours, au plus haut niveau. On peut considérer que nous aurions des raisons d'être entendu, mais, comme vous le savez, la prévisibilité n'est pas forcément la caractéristique la plus évidente dans la politique conduite outre-Atlantique dans le domaine du commerce extérieur.

S'agissant des mesures de rééquilibrage, la France ne souhaite pas de guerre commerciale, car cela signifierait une certaine défaite des règles de régulation actuelles. Or nous sommes des promoteurs du multilatéralisme. Nous ne souhaitons donc pas ce type de démarche « perdant-perdant ». Cela étant dit, si on nous cherche, nous devrons bien répondre présent.

Certains d'entre vous assistaient, la semaine dernière, à une réunion du comité de suivi de la politique commerciale, où vous avez pu entendre les professionnels, notamment ceux de la filière de l'acier et de l'aluminium. Nous avons ainsi pu en apprendre davantage sur l'impact des mesures de leur point de vue, avant de réfléchir, en incluant dans la discussion les organisations non gouvernementales représentées, aux réactions à adopter.

J'en viens à la situation du système commercial multilatéral actuel. Avant même l'élection de Donald Trump à la présidence américaine, les tensions commerciales étaient en voie d'accroissement. On sait que les difficultés proviennent en premier lieu du modèle de développement économique de certains États émergents. Ce modèle repose sur une intervention lourde de l'État dans les processus économiques, via des entreprises d'État, des subventions transversales et des prix faussés, en faveur des exportateurs, ce qui conduit à des surcapacités, à des prix mondiaux artificiellement bas et à des dommages pour les partenaires loyaux. Ces sujets sont connus depuis longtemps. Comme je le disais, il convient d'activer le forum global sur les surcapacités dans le secteur de l'acier.

À défaut, ce serait, après l'accord de Paris, un second pilier d'une mondialisation régulée qui serait fragilisé, puisqu'il s'agit d'une atteinte à des éléments forts susceptibles d'entraîner une adhésion de la communauté internationale. Par conséquent, nous partageons les propositions du rapport Anato-Bru sur la relance du multilatéralisme.

Mais comment faire ? J'ai eu l'occasion de me rendre, en compagnie de parlementaires de l'Assemblée nationale et du Sénat, à la réunion ministérielle de l'OMC à Buenos Aires en décembre 2017. Les ministres présents n'ont même pas été capables de se mettre d'accord pour mettre fin aux subventions à la pêche illégale. Quand les intérêts de certains États sont en jeu, il n'est même pas possible de progresser sur ce type de points.

Il faut refonder le système et faire preuve de créativité. Il n'est plus possible d'organiser ainsi pendant plusieurs jours des grand-messes qui mobilisent des centaines de personnes et ne débouchent sur aucune avancée. À cet égard, le rapport Anato-Bru évoque la piste du cadre plurilatéral. Dans ce cadre restreint, nous avons plus de chance d'obtenir des accords entre des acteurs qui partagent les mêmes valeurs et les mêmes intérêts. Il serait ainsi envisageable d'établir des nouvelles règles sur le commerce électronique ou d'approfondir les règles sur les subventions dans un format semblable. L'objectif est de créer une dynamique susceptible de rallier, sous la forme de coalitions, des États membres qui ne participaient pas à la négociation initiale, afin qu'ils rejoignent l'accord plurilatéral une fois ce dernier constitué.

Le second enjeu du multilatéralisme à court terme est la préservation du bon fonctionnement de l'organe de règlement des différends de l'OMC. Les États-Unis refusent d'y nommer de nouveaux juges pour remplacer ceux qui doivent l'être. Un certain nombre ne sont plus en fonctions ; d'autres devraient être nommés et ne le sont pas, faute d'accord.

Pour l'heure, l'organe ne compte plus que quatre juges. L'un d'entre eux quittera ses fonctions fin 2018, un autre fin 2019. Or l'instance ne peut délibérer valablement que si au moins trois membres se prononcent. Au plus tard fin 2019, l'organisme de règlement des différends (ORD) de l'OMC ne sera donc plus en mesure de fonctionner et de trancher des litiges. L'idée est parfois évoquée de créer un « ORD bis », instance qui serait compétente pour les affaires impliquant des États autres que les États-Unis. Cela ne peut cependant nous satisfaire pleinement, si on songe que l'ORD connaît d'affaires telles que les litiges transatlantiques relatifs au soutien aux industries aéronautiques.

Enfin, j'en termine par les orientations du gouvernement relativement à la politique commerciale européenne. Comme il l'a annoncé lors de l'adoption du plan d'action CETA du 25 octobre, le Gouvernement est très attaché à l'obligation d'information du Parlement en matière de politique commerciale. Je pense que nous devons de plus en plus travailler ces sujets en amont, de sorte que nous ayons en tête, quand siège à Bruxelles le conseil des ministres, les positions du parlement national.

De ce point de vue, je salue vos collègues du Sénat, qui ont mis à l'ordre du jour en séance publique dans leur assemblée une résolution relative au mandat de négociations commerciales avec l'Australie et avec la Nouvelle-Zélande. Notre audition de ce jour participe elle aussi de cette « hygiène de vie » dans le régime des relations entre le Gouvernement et le Parlement au sujet de ces questions.

Comme l'a indiqué le Premier ministre à Marielle de Sarnez, le Gouvernement apportera une attention toute spécifique à l'étude d'impact qui sera en annexe du projet de loi de ratification du CETA. Comme parlementaire, j'ai dû en effet, en lisant des études d'impact, parfois rester sur ma faim. Vu l'importance du CETA, nous souhaitons que la méthodologie appliquée soit irréprochable et qu'un organisme économique mène des études d'impact sectorielles et géographiques. Des inquiétudes se sont manifestées, de sorte que nous voulons que le Parlement puisse disposer d'instruments d'analyse pour se prononcer en toute connaissance de cause.

Un centre de recherche en économie internationale, le CEPII, va donc être saisi dans les prochains jours. La méthodologie qu'il va appliquer sera discutée avec le Parlement, étant toutefois entendu qu'il appartient, en vertu de la Constitution, au Gouvernement d'élaborer cette étude d'impact.

Par ailleurs, des débats sont toujours en cours à Bruxelles sur l'architecture de la politique commerciale. La question de la « mixité » des accords commerciaux, qui détermine la nécessité ou non d'une ratification par tous les parlements nationaux, est débattue : il faut trouver un équilibre entre la légitimité démocratique, avec l'association des parlements nationaux, et la crédibilité de la politique commerciale, pour éviter que nos partenaires aient le sentiment qu'un parlement peut à lui seul bloquer l'ensemble de l'Union. On se souvient notamment de l'épisode wallon s'agissant du CETA. Il faut donc trouver le bon équilibre. Compte tenu de l'attention qu'y accorde l'opinion publique, les questions de politique commerciale doivent irriguer tant les débats du Parlement européen que ceux des parlements nationaux.

Nous souhaitons que les chefs d'État et de gouvernement puissent se saisir de cette question de la mixité des accords commerciaux, qui n'est pas un petit débat. Pour l'instant, la logique du cas par cas l'emporte. Par exemple, nous avons atteint un accord politique avec le Japon. Mais les Japonais ne sont pas encore prêts à conclure sur le volet des investissements, sur lequel des discussions se poursuivent. Il a ainsi été décidé que l'accord puisse être – dans ce cas-là – non mixte ; mais, comme je l'ai dit en conseil des ministres chargés du commerce extérieur, cela ne doit pas faire jurisprudence, ni constituer un précédent. Pour l'heure, examinons la situation au cas par cas, en attendant que des discussions aient lieu entre chefs d'État et de gouvernement.

Sur le plan politique, le Gouvernement est particulièrement conscient des critiques et doutes que portent de nombreux citoyens aux négociations en cours. Le Président de la République a fortement pris position.

Premièrement, la France est favorable aux négociations, à la condition qu'elles aboutissent à des accords respectant le principe de réciprocité. Dans les instances européennes, ce dernier mot n'est plus un gros mot : il est plus facile à partager aujourd'hui avec nos partenaires. Deuxièmement, l'agriculture ne doit en aucun cas être une variable d'ajustement. Nous portons donc des demandes visant à l'établissement de mécanismes tels que des contingents, des démantèlements progressifs ou des clauses de sauvegarde garantissant la pérennité de nos filières agricoles – en particulier bovines, mais cela vaut aussi pour la volaille et le sucre.

Troisièmement, les accords sont un levier utile pour promouvoir nos propres normes à l'international. Il ne s'agit pas de constater un nivellement par le bas, au contraire, surtout si on veut défendre le développement durable. Il convient donc de faire partager plus largement les préférences collectives européennes, en matière de droit social comme de droit environnemental.

Voici enfin un état des lieux des négociations en cours.

Des négociations ont eu lieu il y a quelques jours à Asunción, au sujet du MERCOSUR. Un accord ne sera conclu que s'il y a un équilibre. À ce stade, le compte n'y est pas. Au niveau agricole, nous avons porté des demandes visant à ce que nos filières sensibles soient le mieux préservées possible. Prenons l'exemple des bovins. Les quotas relatifs à la viande de haute qualité devraient, selon nous, être le plus possible soumis aux critères du contingent Hilton, de façon que la concurrence soit plus équilibrée et le volume des exportations plus proche des 70 000 équivalents-carcasse.

Il y a aussi tous les problèmes de normes sanitaires et de traçabilité. Il n'a échappé à personne qu'il y a eu un scandale sanitaire de viande avariée au Brésil. Nous cherchons à obtenir du MERCOSUR des garanties fortes sur les normes sanitaires et la traçabilité. Le démantèlement du réseau de vente de viande avariée a entraîné de nouvelles arrestations au Brésil la semaine dernière.

Nous passons beaucoup de temps – dirai-je que nous nous décarcassons ? – à chercher de nouveaux débouchés pour nos productions à l'international. Le marché turc, les marchés d'Asie s'ouvrent. En Chine, – le président Macron l'a souligné lors de son déplacement –, la levée de l'embargo ESB se met en place.

Par ailleurs, nous souhaitons que l'Accord de Paris puisse figurer comme clause essentielle dans le volet politique de l'accord.

Vous le savez, le Mexique est déjà bénéficiaire d'un accord de libre-échange avec l'Union européenne. En 2013, les parties avaient convenu de moderniser cet accord ; la Commission estime qu'une conclusion pourrait intervenir au cours du premier semestre, malgré des points encore durs, notamment sur les indications géographiques et la protection des brevets. Nous appelons à ce que des progrès soient faits dans ces domaines, que l'accord soit ambitieux sur le chapitre du développement durable et que le respect de l'Accord de Paris soit une clause essentielle.

S'agissant du plan d'action CETA, nous avons mis en ligne un tableau de suivi, consultable par tous. Le plan d'action est structuré autour de trois axes. Le premier est de s'assurer que les risques identifiés par le rapport Schubert ne se concrétisent pas. Les Canadiens utilisent une part infime – 1 % – du quota de viande de boeuf. Ce sont 500 tonnes de viande bovine qui ont été exportées sur le continent européen en 2016, bien loin des 45 000 tonnes octroyées. Il ne sert donc à rien d'agiter les craintes, mais il convient de suivre attentivement les échanges et de guetter tout début de déstabilisation. Pour le moment, les Canadiens ne disposent pas d'une filière à même de répondre aux caractéristiques du marché européen. Sur la traçabilité, l'audit de 2016 était positif mais la France a demandé qu'un nouvel audit soit réalisé, certainement en 2019. Quant à la Cour sur l'investissement, elle n'entrera pas en vigueur tant que l'ensemble des États membres n'auront pas ratifié l'accord.

Le deuxième axe consiste à conduire des actions bilatérales avec le Canada en faveur du développement durable. Les travaux sont en cours et un document devrait être signé à l'occasion de la venue en Europe de Justin Trudeau, en avril, ou du déplacement d'Emmanuel Macron au Canada. Ce plan d'action s'articule autour de dix thèmes, parmi lesquels figurent la réduction des émissions du transport aérien et maritime, l'efficacité énergétique, le développement de la finance verte ou encore les efforts conjoints en recherche et développement. Par ailleurs, lors du One Planet Summit, les autorités canadiennes ont accepté l'idée d'une revue sur les subventions aux énergies fossiles, laquelle a été présentée à la réunion du groupe énergie du G20, les 22 et 23 février.

Le 19 février, le ministre d'État Nicolas Hulot a explicitement demandé aux vice-présidents de la Commission européenne Maroš Šefčovič et Jyrki Katainen d'intégrer au programme de travail de Bruxelles la question de la révision de la directive sur la qualité des carburants, dans l'idée de réduire l'empreinte carbone des carburants consommés dans l'Union pour la période 2020-2030. Le même jour, nous avons présenté des propositions sur le mécanisme d'inclusion carbone aux frontières à la Commission. Celle-ci reste réservée, mais nous essaierons de bâtir une coalition avec les États membres prêts à nous suivre.

Le troisième axe du plan CETA consiste à conduire une politique commerciale nouvelle qui intègre les enjeux de développement durable. Nous avons déjà obtenu des résultats. Le mandat adopté pour la rénovation de l'accord avec le Chili a été publié par le Conseil le 22 janvier 2018. Quant à l'accord avec le Japon, il comprendra un engagement à respecter et à mettre en oeuvre l'accord de Paris. Les accords de commerce suivants devront intégrer des références contraignantes à l'accord de Paris et aux conventions internationales de l'Organisation internationale du travail (OIT). Nous faisons en sorte que les effets sur le climat des transports aériens et maritimes soient pris en compte dans le cadre des mandats Australie et Nouvelle-Zélande.

Ces propos liminaires ont été longs, mais cela s'explique par l'actualité en matière de politique commerciale, particulièrement riche et dense !

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Depuis notre prise de fonctions, nous sommes régulièrement interrogés sur le dossier CETA. Il semble que les accords négociés par l'Union européenne aient un effet bénéfique aussi bien sur les importations, en réduisant les frais, que sur les exportations. Nous parvenons à protéger certains produits grâce à des protections qui n'existent pas ailleurs et nous pouvons faire jouer des clauses environnementales. Pourtant, beaucoup de formations politiques expliquent que ces accords commerciaux ont un impact négatif.

Ma question est simple, Monsieur le Ministre : les conséquences des accords sont-elles si mauvaises que nous n'arrivions pas à montrer leur bon aspect ? N'existe-t-il pas tout simplement un problème de communication ? Nous devons montrer que ce que l'Union européenne fait en notre nom a des conséquences positives pour nous et le reste du monde. Pouvez-vous nous fournir d'autres données pour faciliter ce travail de communication ?

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Merci d'avoir lu avec attention le rapport d'information que j'ai publié avec Patrice Anato. Le cycle de Doha touche à sa fin et vous-même venez d'expliquer que le cadre le plus pertinent est désormais celui du plurilatéralisme. À cet égard, vous avez évoqué l'échec de Buenos Aires, en décembre. Pourtant, on y a quand même accepté ou évoqué des déclarations d'intérêts sur l'e-commerce, sur les micros, petites et moyennes entreprises et sur la facilitation des investissements. Il a ainsi été annoncé à Genève que le Bénin se ralliait au premier point sur l'e-commerce. Pensez-vous que l'Organisation de coopération et de développement économiques (OCDE), avec la Chine et l'Inde, serait un cadre favorable au plurilatéralisme ?

Nous avons noté dans notre rapport que l'OMC était un organisme administratif de négociation, dépourvu d'une certaine dimension politique, dans la mesure où le politique ne s'y investit que tous les deux ans. Ne faudrait-il pas insuffler davantage de politique dans l'OMC ? La France, le Président de la République en particulier, sont-ils prêts à lancer une refonte de l'OMC, enfin d'en faire un organe qui aurait beaucoup plus d'autorité ?

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Ma question rejoint celle de M. Mendes : la France conduit-elle des études d'impact du CETA qui viendraient confirmer celles réalisées par l'Union européenne ?

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Je suis heureux de vous entendre dire que les négociations avec le MERCOSUR sont « au point mort », car elles sont, pour les agriculteurs, encore plus anxiogènes que les négociations sur le CETA, notamment sur la filière viande. Il semble que la filière lait et fromages, qui bénéficie de l'accord avec le Canada, sera exclue du MERCOSUR. Si tel était le cas, cela voudrait dire que l'on négocie avec le MERCOSUR tout ce qui négatif pour l'agriculture française, tandis que les filières qui pourraient bénéficier de l'accord restent de côté. La France, et l'Europe en général, doivent être vigilantes et résister sur ces points.

Par ailleurs, l'Europe a supprimé il y a quelques années les droits de douane avec le Pakistan, notamment sur l'importation de coton. Cela a eu des conséquences catastrophiques en matière d'emplois pour toute la filière textile, notamment dans mon département, les Vosges. Ces droits de douane feront l'objet de nouvelles négociations d'ici quelques années ; je veux appeler votre attention sur l'avenir de cette industrie très importante en France et reviendrai régulièrement sur cette question.

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Le président Trump a annoncé son intention de relever unilatéralement les droits de douane sur les importations d'acier et d'aluminium. Jusqu'ici, les Européens ne semblent pas avoir réussi à obtenir des Américains une exemption. À la suite de la réunion du 10 mars, Donald Trump a souhaité conditionner une éventuelle exemption à un abaissement par l'Union européenne des barrières douanières et réglementaires sur les produits américains. Quelle est la position de la France face à cette exigence, qui pourrait s'apparenter à du chantage ?

Les représentants des institutions européennes et plusieurs chefs d'État européens souhaitent que l'Union réagisse de manière unie et forte. Or l'annonce d'une visite du ministre britannique du commerce à Washington la semaine prochaine, dans le but de convaincre l'administration américaine d'exclure le Royaume-Uni du relèvement de ses droits de douane, ne va pas dans ce sens. Que feront les Européens si Londres se désolidarise des Vingt-sept dans ce dossier ? Cette décision aura-t-elle un impact sur les négociations du Brexit ?

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Les évolutions du commerce international et les attentes des citoyens ont poussé la France et l'Union européenne à engager une réflexion sur le renouvellement de notre politique commerciale commune. Un sujet, essentiel pour l'adhésion des citoyens, est celui de la prise en compte des enjeux climatiques et environnementaux, en cohérence avec l'accord de Paris et l'évaluation de la mise en oeuvre des engagements. Quelles sont les mesures concrètes que la France propose ? Est-elle favorable à l'instauration, à l'intérieur des accords commerciaux, de mécanismes de compensation en faveur du climat ?

Par ailleurs, des négociations plurilatérales sont en cours sur un accord entre 18 États membres de l'OMC, visant à réduire les droits de douane et les barrières non tarifaires sur un ensemble de biens et de services environnementaux. Le gouvernement français plaide pour assurer la crédibilité environnementale des produits contenus dans le futur accord ; je partage pleinement cette exigence. Selon vous, quels critères précis doivent servir de base à l'établissement d'une liste de biens environnementaux bénéficiant des mesures de libéralisation, compte tenu des divergences d'intérêts économiques entre les pays ? Quelles sont les principales difficultés qui font obstacle à la conclusion d'un accord ? Il nous faut démontrer que toutes les politiques de l'Union contribuent à la lutte contre le changement climatique et la France a sans doute un rôle à jouer dans ce domaine.

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Jean-Baptiste Lemoyne, secrétaire d'État auprès du ministre de l'Europe et des affaires étrangères

Ludovic Mendes a évoqué ce que j'appellerai pour ma part l'instrumentalisation des accords de libre-échange. On le voit bien, les accords sont aussi créateurs d'opportunités pour un certain nombre de filières, comme celle des vins et spiritueux et celle du lait. Après un accord avec la Corée signé en 2011, la balance commerciale européenne est devenue excédentaire.

En novembre, la Commission a remis au Gouvernement un rapport qui, pour la première fois, évalue la mise en oeuvre des accords. C'est un fait, on passe beaucoup moins de temps à évaluer la mise en oeuvre des accords qu'à les négocier ! On doit en faire la publicité, car cela permet de se rendre compte que le résultat est plutôt positif. Le fait d'en parler régulièrement au Parlement est l'occasion d'informer la population.

Pourtant, force est de constater que des rumeurs, totalement infondées, circulent, relayées par les réseaux sociaux. Il faut dire que cela a été favorisé par l'opacité et le culte du secret qui caractérisaient, il y a peu d'années, la négociation de ces accords. Je vous rappelle qu'il n'y a pas si longtemps, les parlementaires ne pouvaient consulter les documents que dans une pièce prévue à cet effet, et sans portable. Des progrès ont été faits depuis deux ans, mais nous plaidons pour la transparence, qui permet de rétablir certaines vérités. Oui, il faut informer et mettre à la disposition de tous les données réelles.

Il est vrai, Monsieur Bru, que l'OCDE a permis d'obtenir des accords sur les crédits à l'exportation, contre la corruption. Il faudrait, pour avancer, étendre le champ des négociations conduites à l'OCDE. Dans le cadre de l'OMC, le Japon, les États-Unis, l'Union européenne parviennent à enclencher des débats. Nous essaierons d'y agréger petit à petit de nouveaux pays.

Mais l'OMC manque de dimension politique et il faut la refondre. Nous sommes en train de travailler à de nouvelles règles. Comme vous l'avez souligné dans votre rapport, la règle du consensus peut paralyser l'institution. La réponse aux problèmes commerciaux, ce n'est pas moins d'OMC, mais plus et mieux d'OMC. Lorsque l'on assiste à ces grands-messes, on se rend compte que l'Union européenne, critiquée par ceux-là mêmes qui agitent les peurs vis-à-vis des accords commerciaux, ne fonctionne pas si mal que ça.

Dans les négociations avec le MERCOSUR, nous estimons que le compte n'y est pas pour la filière lait. L'autre partie doit encore faire des efforts.

Effectivement, nous devrons rediscuter des droits de douane sur le textile, l'accord spécifique ayant pris fin. Il nous reste quelques instruments de défense commerciale, mais, très clairement, c'est un domaine auquel nous devons demeurer attentifs.

Liliana Tanguy a signalé le fait qu'un ministre britannique se rendrait aux États-Unis pour obtenir des exemptions. Comme cela a été souligné dans le rapport, la politique commerciale fait partie des politiques fondamentales qui ont été mises en oeuvre dès le début et qui concernent l'ensemble du bloc européen. Nous considérons que celui-ci ne peut être scindé. L'Union n'est pas sécable de ce point de vue !

Enfin, Monsieur Michels, nous plaidons pour que la dimension environnementale soit systématiquement prise en compte dans les accords et dans les mandats, ce qui n'est pas évident pour tout le monde. La Commission a publié un document il y a dix jours comportant une quinzaine de propositions, dont certaines sont issues du plan d'action CETA. Mais nous pensons qu'elles ne vont pas assez loin car nous voulons que cela soit contraignant.

Nous rencontrons des difficultés pour conclure les négociations EGA (« Environmental Goods Agreement ») sur les biens environnementaux en cours au sein de l'OMC. Les États-Unis ne sont plus très motivés, ce qui n'étonne personne, et la Chine veut indexer des biens qui ne sont pas vraiment environnementaux. Force est de constater que cette discussion est plutôt au point mort.

Je signale que les documents que j'évoquais, en répondant à M. Mendes, sur l'évaluation des accords de libre-échange, par exemple ceux passés avec la Corée, sont en ligne. Je vous invite, vous, et tous ceux qui suivent nos débats, à les lire, ainsi que la note portant sur le sujet de la commission du développement durable.

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La sortie de la Grande-Bretagne de l'Union européenne entraînera-t-elle la réapparition des duty free ? Dans ma circonscription, Boulogne-sur-Mer voyait autrefois passer quatre millions de passagers. Un premier coup a été porté au trafic trans-Manche par l'ouverture du tunnel, et un second par la disparition du duty free. Depuis, ce trafic a complètement disparu ainsi que les importants revenus qu'il générait. Le rétablissement des duty free constitue donc un véritable enjeu pour tous les ports français, pour ceux du Pas-de-Calais, comme Calais et Boulogne, mais aussi pour le tunnel.

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Monsieur le ministre, pourriez-vous nous donner des précisions sur les filières concernées par l'accord commercial passé avec le Japon ? Comme c'est le cas avec la Corée, je pense que l'Europe peut en tirer un grand bénéfice. Pourquoi le volet investissement semble-t-il un peu bloqué ?

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Avec le CETA, on nous avait annoncé que toutes les viandes consommées en France seraient remplacées par des viandes canadiennes ? Pourtant, six mois après la mise en application de ce traité, je constate que le boeuf canadien est totalement absent de mon département. J'en suis évidemment plutôt heureux. Cela montre, en tout cas, qu'il ne faut pas toujours écouter les voix les plus alarmistes.

Pouvez-vous nous éclairer sur la réalité de la situation ? Disposez-vous de chiffres ? Mon département est-il un cas singulier, ou les taux d'utilisation des contingents sont-ils finalement assez faibles au niveau national et européen ? Quelles sont les perspectives d'évolution en la matière ? Enfin, avons-nous constaté une réaction du côté canadien, en particulier en ce qui concerne les règles sanitaires et environnementales ?

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Il y a cinquante ans, on suivait le boeuf, maintenant on le précède ! (Sourires.)

Les études d'impact publiées après la signature des accords sont évidemment trop tardives. Nous en disposons en effet seulement alors que nous sommes déjà pieds et poings liés : soit nous ratifions, et nous n'avons plus qu'à nous taire, soit nous ne ratifions pas et nous faisons sauter tout l'édifice.

Pouvez-vous envisager une sorte d'étude d'impact en continu, dès le mandat de négociation ? Cela me semble nécessaire, même si cette solution présente l'inconvénient de dévoiler nos intentions à tous – ce qui est ennuyeux dans une négociation. Winston Churchill disait, à juste titre, que dans une guerre vient toujours un moment où il faut prendre en compte les intentions de l'adversaire. Pour que les Parlements nationaux puissent exercer un contrôle à la fois efficace et non paralysant, ils devraient disposer assez tôt d'études relativement précises sur les différents scénarios envisageables. Ces études pourraient être progressivement enrichies au cours de la négociation. Les parlementaires sauraient ainsi un peu mieux où ils mettent les pieds.

Monsieur le ministre, vous avez été prudent sur la mixité ou la non-mixité des accords ratifiés par le Parlement européen et négociés de façon communautaire – je simplifie volontairement les choses –, et des accords ratifiés de façon nationale. Vous avez parlé de cas par cas. Pouvez-vous être un peu plus précis ?

Les Parlements nationaux sont spontanément attachés à voter. Cependant, chaque fois qu'il y a une négociation à caractère communautaire et une négociation demandant la ratification des parlements nationaux, nous savons que si la seconde attire la première, on ne parle plus d'autre chose que de négociations à caractère intergouvernemental. Le Gouvernement français est-il vraiment favorable à une liaison systématique qui amène l'intergouvernemental à prendre le communautaire en otage ?

Ne serait-il pas pertinent, dès lors que nous disposons de deux instruments juridiques, de définir deux domaines de négociation distincts en fonction de ces outils ? Vous auriez, d'un côté, la responsabilité de la Commission européenne et la ratification du Parlement européen, et, de l'autre, la ratification des parlements nationaux. Ne faudrait-il pas mener une réflexion sur le partage des domaines, quitte à procéder à une révision du cadre institutionnel ?

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Monsieur le ministre, les négociations officielles entre Londres et Bruxelles sur la sortie prochaine de l'Union européenne du Royaume-Uni se termineront dans presque un an, conformément à ce qui est prévu dans le traité de l'Union européenne. Le 7 mars dernier, le président du Conseil européen, M. Donald Tusk, a affiché une ligne directrice claire sur l'avenir de nos relations commerciales avec nos voisins britanniques. Les futurs accords commerciaux entre l'Union européenne et le Royaume-Uni seront fondés sur un modèle similaire au CETA, traité international de libre-échange entre l'Union européenne et Canada.

Il est en effet difficile de concevoir, comme l'a pertinemment souligné M. Tusk, un traité regroupant les avantages des accords commerciaux et douaniers internes à notre Union et ceux des accords de libre-échange internationaux. Dans sa déclaration du 7 mars, il souligne deux critères essentiels aux futures négociations : d'une part, l'équilibre des droits, et, d'autre part, l'intégrité du marché unique. Il n'est nullement question de mener une bataille commerciale, et nous espérons que ces négociations engageront un échange constructif et cohérent qui répondra aux enjeux socio-économiques de notre future Union à vingt-sept, mais aussi à ceux du partenariat auquel nous tenons avec les Britanniques.

Comment la France réagit-elle aux positions du président Tusk, et quelles seront les lignes directrices données par le Gouvernement pour l'élaboration du futur accord commercial de libre-échange avec le Royaume-Uni ?

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Notre commission a examiné, la semaine dernière, le rapport d'information de MM. Patrice Anato et Vincent Bru sur l'OMC et son articulation avec la politique commerciale européenne. À cette occasion, nous avons appris que la Commission européenne souhaite en finir avec la mixité des accords de libre-échange. Je comprends son objectif qui consiste à supprimer le double niveau de ratification – Union européenne, puis États membres –, et à distinguer, d'une part, les accords de libre-échange relevant de sa compétence exclusive, et, d'autre part, les accords de promotion et de protection de l'investissement qui resteront soumis à la ratification nationale.

Les rapporteurs nous précisaient, la semaine dernière, que le projet de loi autorisant la ratification du traité CETA, qui devrait être examiné au deuxième semestre, pourrait être le dernier sur lequel le Parlement français se prononcera. Quel est le point de vue des autorités françaises sur cette question ? Le sujet est sensible, car nous savons que la Commission européenne a parfois tendance à estimer qu'elle a le champ libre si les États n'y trouvent rien à redire.

Les accords commerciaux qui portent de plus en plus sur le domaine des services, dont certains services publics, pourraient, selon le Parlement européen lui-même, avoir des conséquences fortes sur les femmes, par exemple en limitant leur accès aux soins, ou en les obligeant à reprendre à leur compte des tâches autrefois dévolues au secteur public. Que pensez-vous de l'idée d'intégrer la dimension du genre aux accords commerciaux, comme l'a suggéré le Parlement européen dans une récente résolution ?

Enfin, pouvez-vous nous dire où en est l'idée de faire précéder systématiquement la conclusion des accords de libre-échange d'une évaluation de son impact en termes de transition énergétique et de biodiversité ? Je n'ai pas bien saisi le sens de vos premières réponses sur ce sujet.

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On ne peut désormais raisonner au niveau mondial sans dresser une géopolitique du risque qui est devenu un élément que toutes les analyses doivent nécessairement prendre en compte. Selon vous, Monsieur le ministre, le risque redéfinira-t-il l'économie mondiale et la stratégie économique de l'Union européenne ?

On dit souvent que celui qui impose ses normes impose son leadership. L'Union parviendra-t-elle à imposer ses normes avec la nouvelle formule des traités ? Les États-Unis voient aujourd'hui l'Union européenne comme un vrai concurrent économique direct. Les analystes économiques pensent très clairement que l'Europe, en particulier la France, est déconnectée de ce qu'on appelle « la guerre économique ». Qu'en pensez-vous ? Pour que l'Union européenne soit puissance et fasse jouer son leadership, il faut qu'elle fasse preuve d'unité. Estimez-vous que les élections qui ont eu lieu dans plusieurs pays membres, et qui doivent se tenir dans divers autres auront un impact sur notre unité ?

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Dans le prolongement des questions de M. Jean-Louis Bourlanges et de Mme Marietta Karamanli sur les modèles à réinventer, il me semble que, si nous devons être respectueux du Parlement européen, qui est tout aussi légitime démocratiquement que nous le sommes, nous ne pouvons pas nous dessaisir du débat national sur les compétences exclusives de la Commission européenne.

La solution ne serait-elle pas de repenser le lien entre notre Exécutif et le Parlement ? Nous l'avons fait de façon volontariste à votre initiative, Monsieur le ministre, grâce, par exemple, aux réunions que vous avez mises en place ou aux résolutions du Sénat. Serez-vous le ministre qui innovera pour institutionnaliser un vrai renouveau du dialogue entre l'Exécutif et les parlementaires sur les sujets du commerce international ?

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Monsieur le ministre, vous avez évoqué la nécessité de changer la nature des débats à l'OMC. Je n'ai pas bien compris quels changements la France souhaite impulser.

De notre point de vue, il s'agit aujourd'hui de changer complètement de modèle, en particulier pour pouvoir défendre une forme de protectionnisme solidaire nécessaire si l'on veut tenir compte des enjeux écologiques, et protéger un certain nombre de droits syndicaux. Évidemment, tout cela entre en contradiction avec le libre-échangisme qui est de mise à l'OMC. Quelle est précisément la stratégie de la France, alors que les prises de position actuelles du gouvernement américain montrent l'échec d'un certain nombre de procédures de l'OMC ?

Sur les pouvoirs du Parlement, je rejoins mes collègues. Cela pose tout de même un problème que l'on nous demande de nous exprimer a posteriori sur des accords déjà en vigueur, comme c'est le cas pour le CETA. Les associations qui ont publié, en septembre 2017, à partir d'éléments publics, un rapport sur l'impact macroéconomique du CETA et ses conséquences sur le climat, la santé, l'agriculture et l'emploi, comme ATTAC, AITEC – Association internationale de techniciens, experts et chercheurs –, Les Amis de la Terre ou Corporate Europe Observatory, seront certainement très heureuses d'apprendre qu'elles diffusent des fake news, et que les travaux des économistes ou des agronomes qui portent un regard critique sur le CETA sont motivés par la peur et la démagogie.

Plus sérieusement, rien ne sert de se conduire comme s'il fallait réexpliquer les choses à des enfants qui n'auraient pas compris la nature des problèmes, alors qu'il faut résoudre la question de la transparence démocratique et de la capacité des Parlements à se prononcer. Sur ce sujet, je ne suis pas certaine de bien avoir compris la position du Gouvernement français, en particulier concernant la mixité des accords.

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Lorsque la Grande-Bretagne a fait le choix du Brexit, nous avons beaucoup parlé des possibilités de transferts de sièges sociaux et d'activités bancaires vers l'Europe continentale – j'ai appris ce matin qu'Unilever avait transféré son siège à Rotterdam.

La France a préparé le terrain : je me souviens que nous avons voté des amendements permettant la non-fiscalisation des opérations intraday. Où en sommes-nous aujourd'hui ? Des grandes entreprises ont-elles déménagé leur siège londonien vers l'Europe continentale, et en particulier vers la France ? Se sont-elles dirigées vers notre pays ou plutôt vers d'autres ? Les mesures que nous avons prises ont-elles été efficaces ? Quid des vingt-cinq agences européennes dont le siège se trouvait à Londres ? Il me semble qu'une ou deux se sont installées dans notre pays : que s'est-il passé pour les autres ? Où en sont les négociations ?

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Jean-Baptiste Lemoyne, secrétaire d'État auprès du ministre de l'Europe et des affaires étrangères

En réponse à la question de M. Pont, je confirme que, dès lors que la Grande-Bretagne sort de l'union douanière, objectif annoncé et confirmé par Theresa May, les duty free seraient susceptibles de réapparaître, y compris à Boulogne ; c'est une des conséquences induites par le positionnement britannique.

S'agissant de l'accord passé entre l'Union européenne et le Japon, nous avons des intérêts offensifs, dans la filière du boeuf notamment. Cet accord ouvre également de nouvelles perspectives pour la viande de porc, le fromage ainsi que les vins et spiritueux. Il faut conserver à l'esprit que le marché japonais, du fait de sa taille, est passablement important, et que ses consommateurs ont un haut niveau d'exigence. Je pense que, compte tenu de notre système d'indications géographiques protégées (IGP) et de la qualité de certaines de nos filières alimentaires, nous sommes particulièrement bien placés pour répondre à cette demande. Au-delà de ces filières, l'accès aux marchés publics, qui constituent un volet important de l'accord, sera facilité grâce à une plus grande réciprocité dans l'ouverture des marchés  ; non seulement à l'échelon national, mais aussi à l'échelon local. Dans le secteur ferroviaire par exemple, de nouvelles perspectives s'ouvrent aux entreprises européennes.

Concernant le volet investissement, nous souhaitons tenter de mettre en oeuvre le système mis en place dans le cadre du CETA, qui est une amélioration des systèmes précédents, à savoir l'Investor-State Dispute Settlement (ISDS) puis l'Investment Court System (ICS), ce qui implique des juges nommés pour une période assez longue et astreints à des règles de déontologie précises ; c'est un système qui va bien au-delà du pur arbitrage ponctuel. Toutefois, cela ne constitue pour nous qu'un système transitoire puisque, à terme, nous souhaitons aller vers une véritable cour permanente des investissements. Pour l'instant le Japon se montre réticent devant ce nouveau modèle, considérant le coût même du dispositif excessif et les procédures lourdes. Nous ne renonçons pas à les convaincre, mais telle est la nature de leurs réticences à ce stade.

Pour sa part, le taux d'utilisation des contingents applicables à la filière bovine est très faible  ; de l'ordre de 1 %. Il n'y a donc pas d'évolution significative par rapport à ce qui se faisait auparavant, à l'inverse nous avons nous-mêmes quasiment saturé les contingents laitiers en utilisant pratiquement 95 % de notre quota ; ce qui montre que nos producteurs utilisent bien les marges de manoeuvre nouvelles ainsi créées.

Jean-Louis Bourlanges a abordé le sujet des études d'impact portant sur les accords commerciaux passés par l'Union européenne avec ses partenaires. À cet égard, dans le cadre du mandat de négociation des prochains accords commerciaux avec l'Australie et la Nouvelle-Zélande adopté par le Conseil, la Commission européenne réalise une première étude d'impact. Il est positif de disposer très en amont des premiers éléments d'appréciation, mais effectivement, dans une négociation, il ne faut pas abattre toutes ses cartes, et nos objectifs majeurs ne doivent pas apparaître trop clairement. Dans tous les cas, en termes de procédure, cette solution est préférable, et nous nous réjouissons de sa systématisation.

S'agissant de la mixité des accords commerciaux couplés avec des accords d'investissement, je rappelle que la France y a toujours été favorable : d'une part pour faire place à l'expression de la représentation nationale, et aussi parce que nous avons des intérêts offensifs à privilégier dans le domaine de la protection des investissements. En outre, il est souvent plus facile d'obtenir ce que l'on souhaite en couplant ce sujet avec les négociations commerciales qu'en passant un accord d'investissement « sec ».

Nous plaidons donc pour le maintien de la mixité, toutefois, les rapports de force au sein du Conseil n'y sont pas favorables, ce qui conduit à négocier au cas par cas. Mais la mixité peut être regardée d'une autre façon : lorsqu'un accord commercial est adossé à un accord politique, car cette situation implique la mixité.

Si les équilibres retenus devaient empêcher la poursuite de la mixité, effectivement, il faudrait trouver une nouvelle articulation très en amont, et je crois que nous sommes en train de la mettre en place à tâtons. L'idée, c'est que cette démarche fasse place à un plus grand systématisme et que des clauses de rendez-vous très régulières soient instituées afin que l'exécutif prenne en compte l'avis du Parlement national lorsqu'il se présente devant les instances européennes.

À ce stade, je ne peux guère aller plus loin, si ce n'est pour vous dire que nous sommes attachés à la mixité, mais que, les rapports de force étant ce qu'ils sont au sein des instances européennes, nous n'avons pas de garantie quant à sa pérennité.

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C'est là un blocage complet assuré, et qui ne manquera pas de s'aggraver au fil du temps  : il sera toujours plus difficile d'obtenir la ratification nécessaire de vingt-sept parlements, et même davantage si l'on compte les parlements régionaux. Si nous restons sur ce pied, le risque est celui d'une impasse communautaire globale.

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Jean-Baptiste Lemoyne, secrétaire d'État auprès du ministre de l'Europe et des affaires étrangères

Je comprends ce point de vue, mais les opinions publiques sont de plus en plus attentives et très mobilisées sur ces sujets ; il ne faut pas donner l'impression d'un dessaisissement des parlements nationaux. Encore une fois, les débats en amont portant sur les mandats constituent une façon de procéder. D'ailleurs les résultats électoraux italiens le montrent : certaines forces tendent à s'emparer des sujets européens afin de mettre en évidence une sorte d'éloignement entre l'échelon européen et l'échelon national. Il faut donc avancer avec beaucoup de précautions sur ces sujets.

En termes de crédibilité dans la négociation, il est clair que les partenaires ont le sentiment, lorsqu'il y a uniquement la ratification du Parlement européen, que les choses iront plus vite. Mais, là encore, s'il y a blocage de la part d'un Parlement national, cela ne concerne que le volet investissement. Dans le cas du CETA, une annexe précise que c'est l'ensemble de l'accord qui tombe, mais on peut imaginer que ce ne soit pas systématiquement cette voie qui sera retenue à l'avenir. Le volet commercial relève purement et simplement du domaine communautaire, et, finalement, du point de vue de la ratification, il relève de la compétence exclusive du Parlement européen.

Pour ce qui concerne le Brexit, la France est alignée sur la position de l'Union européenne  ; nous tenons absolument à préserver cette unité avec le négociateur. Theresa May a expliqué sa position il y a quelques jours : elle souhaite, à terme, sortir du marché intérieur ainsi que de l'union douanière. Cela implique effectivement un relèvement des barrières douanières ; et la négociation d'un accord de libre-échange de type CETA pourrait être engagée afin de trouver de nouveaux équilibres. Dans tous les cas, nous ne souhaitons pas que s'installe ce qu'on appelle le cherry picking – formulation anglaise signifiant « cueillette des cerises » – c'est-à-dire une participation à la carte au sein du marché intérieur.

Je confirme à Mme Marietta Karamanli que la France est effectivement favorable et se place en tête de file pour l'inclusion de la question du genre dans les accords commerciaux, nous avons d'ailleurs signé à Buenos Aires une déclaration portant sur le thème « commerce et genre », et nous militons pour l'ouverture d'une négociation sur ce sujet au sein de l'OMC.

La dimension géopolitique des accords a par ailleurs été évoquée. Nous pensons que ces accords constituent l'occasion de partager nos normes, de faire en sorte qu'elles puissent peut-être prévaloir dans un certain nombre d'aires géographiques, notamment dans celles qui ont peu d'accords commerciaux. Le MERCOSUR, par exemple, ne connaît que peu d'accords commerciaux, c'est pourquoi nous pensons qu'il y a là un gisement d'opportunités.

En définitive, la question portait sur l'unité européenne au regard des dernières élections. On a effectivement pu observer un débat portant sur un certain nombre de valeurs dans des pays du bloc central et oriental de l'Europe. D'aucuns d'entre eux adoptent des législations qui font question, alors que, paradoxalement, ils sont soucieux de politique commerciale, et dans ce domaine les clivages sont assez différents. Il me semble d'ailleurs que ces clivages existaient avant tous ces votes.

Habituellement, le clivage en politique commerciale oppose plutôt les États du Nord aux États du Sud, impliquant souvent des pays nordiques, emmenés par les Pays-Bas ou le Danemark, qui sont partisans du libre-échange pur et dur, alors que, de notre côté, nous avons un certain nombre de principes et de « lignes rouges ». Ainsi, au sujet du MERCOSUR ou d'accords en voie de préparation, sommes-nous souvent rejoints par des États d'Europe centrale et orientale, nonobstant le fait que, sur d'autres sujets, nous sommes en désaccord. En matière de politique commerciale donc, les lignes sont un peu différentes.

Dans le même esprit que Jean-Louis Bourlanges, Sylvain Waserman a évoqué le rôle du Parlement européen, qui est l'instance démocratiquement légitime pour avaliser les accords commerciaux. Cependant, nous devons effectivement trouver de nouvelles règles afin de toujours mieux associer les parlements nationaux, et poursuivre ce dialogue fluide qui permet de prendre en compte vos avis.

Nous souhaitons tout simplement pouvoir rediscuter du critère de développement, car c'est aussi cela qui bloque, et peut-être revoir aussi les règles de décision parce que le consensus a montré ses limites, il faut donc s'interroger sur l'institution de règles de majorité qualifiée.

Mme Obono a demandé quelles sont les propositions de la France au sujet de l'OMC. Objectivement, même s'il y a eu quelques petites avancées sur le commerce ou les PME, que vous avez évoquées, la situation n'en est pas moins restée bloquée dans plusieurs domaines cruciaux. Je considère que nous devons revisiter notre mode de fonctionnement, or, pour l'instant, nous n'avons pas de réponses définitives, et la réflexion demeure en cours ; vous serez naturellement tenus informés de ses progrès.

Vous avez cité, Madame la députée, un certain nombre de travaux. Pour ma part, je n'ai cité personne : j'ai simplement relevé qu'il suffit d'ouvrir Facebook pour constater que tout un chacun, parfois, véhicule des idées qui ne sont pas la réalité. Cela parce qu'il y a une façon de présenter, de travestir des chiffres, qui a malheureusement cours. Pour notre part, nous avons souhaité, au sujet du CETA, nous en remettre à l'avis de scientifiques : la commission d'experts chargée de l'évaluation de l'impact du CETA sur l'environnement, le climat et la santé, présidée par Mme Catherine Schubert, était totalement indépendante. Nous n'avons pas tenu la plume de leur rapport et nous nous fions à ces opinions scientifiques qui nous semblent fondées.

Éric Straumann évoque l'attractivité de Paris, susceptible d'attirer des agences européennes : c'est l'agence bancaire européenne qui va venir s'y installer. L'Agence du médicament, elle, ira finalement à Amsterdam. J'avoue par ailleurs ne pas disposer ici d'informations portant sur les autres agences ; je vous les ferai passer après l'audition. S'agissant des délocalisations, toutes les décisions ne sont pas prises, mais je confirme que les entreprises sont nombreuses à se manifester pour s'installer chez nous.

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Quel compte allez-vous tenir des propositions formulées par la commission dite « Schubert » ?

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Jean-Baptiste Lemoyne, secrétaire d'État auprès du ministre de l'Europe et des affaires étrangères

Pour nous, le commerce n'est pas le commerce « sec » : il comporte un certain nombre de dimensions associées, et nous souhaitons que les études d'impact puissent refléter l'ensemble des effets attendus des accords, ce qui comprend également les aspects environnementaux.

J'observe que le mandat portant sur l'accord négocié avec l'Australie et la Nouvelle-Zélande comportera une partie consacrée à l'environnement : il faut être également éclairé sur ce point.

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De nouvelles négociations ont-elles été entreprises avec l'Association des nations de l'Asie du Sud-Est (ASEAN) ?

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Jean-Baptiste Lemoyne, secrétaire d'État auprès du ministre de l'Europe et des affaires étrangères

Dans la zone ASEAN, nous négocions un accord qui est en voie de finalisation avec le Vietnam, par exemple, et je pense que c'est une zone dans laquelle nous avons des intérêts offensifs nombreux. Il faut considérer les taux de croissance des pays de l'ASEAN, qui atteignent 7 % à 8 % par an en moyenne, et où des classes moyennes importantes émergent  : c'est une zone avec laquelle nous avons besoin de nouer des liens.

Les discussions sont en cours. Cécilia Malmström était présente dans la région il y a peu, et nous souhaitons continuer de passer des accords avec ces pays, voire avec la zone dans son ensemble.

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Merci beaucoup, Monsieur le ministre. Je pense que nous allons nous revoir assez régulièrement ; nous continuerons notre cycle d'auditions sur les accords commerciaux la semaine prochaine en entendant Thomas von Danwitz, président de la 4e chambre de la Cour de justice de l'Union européenne, en charge des avis et arrêts portant sur les accords commerciaux.

II. Examen de textes soumis à l'Assemblée nationale en application de l'article 88-4 de la Constitution

Sur le rapport de la Présidente Sabine Thillaye, la Commission a examiné des textes soumis à l'Assemblée nationale en application de l'article 88-4 de la Constitution.

l Textes « actés »

Aucune observation n'ayant été formulée, la Commission a pris acte des textes suivants :

Ø POLITIQUE AGRICOLE COMMUNE - SÉCURITÉ ALIMENTAIRE

- Règlement (UE) de la Commission établissant les principes méthodologiques applicables à l'évaluation du risque et aux recommandations pour la gestion du risque visés dans le règlement (CE) nº 4702009 (D05496102 – E 12794).

- Règlement (UE) de la Commission modifiant l'annexe V du règlement (CE) nº 9992001 du Parlement européen et du Conseil en ce qui concerne les exigences relatives à l'enlèvement des matériels à risque spécifiés des petits ruminants (D04801706 – E 12811).

Ø POLITIQUE INDUSTRIELLE - ENTREPRISES

- Proposition de décision du Conseil relative à la position à prendre, au nom de l'Union européenne, au sein du Comité mixte de l'EEE en ce qui concerne une modification de l'annexe XXII (Droit des sociétés) et du protocole 37 (comportant la liste prévue à l'article 101) de l'accord EEE (COM(2018) 83 final – E 12841).

Ø TRANSPORTS - POLITIQUE SPATIALE

- Proposition de décision du Conseil relative à la position à prendre, au nom de l'Union européenne, au sein du Comité mixte de l'EEE en ce qui concerne une modification de l'annexe XIII (Transports) de l'accord EEE (COM(2018) 82 final – E 12840).

l Textes « actés » de manière tacite

Accords tacites de la Commission, du fait de la nature du texte

En application de la procédure d'approbation tacite, dite procédure 72 heures, adoptée par la Commission, celle-ci a approuvé tacitement les documents suivants :

Ø BUDGET COMMUNAUTAIRE

- Proposition de virement de crédits n° DEC 042018 à l'intérieur de la section III - Commission - du budget général pour l'exercice 2018 (DEC 042018 – E 12853).

Ø INSTITUTIONS COMMUNAUTAIRES

- Décision du Conseil portant nomination d'un membre de la Cour des comptes (566218 – E 12846).

- Décision du Conseil portant nomination du directeur exécutif d'Europol (634418 LIMITE – E 12847).

- Décision du Conseil portant nomination d'un membre du Comité économique et social européen, proposé par le Royaume de Danemark (657418 – E 12848).

- Décision du Conseil portant nomination d'un membre du Comité des régions, proposé par la République fédérale d'Allemagne (670518 – E 12849).

- Décision du Conseil portant nomination d'un membre et d'un suppléant du Comité des régions, proposés par la République fédérale d'Allemagne (673618 – E 12850).

Accords tacites de la Commission liés au calendrier d'adoption par le Conseil

La Commission a également pris acte de la levée tacite de la réserve parlementaire, du fait du calendrier des travaux du Conseil, pour les textes suivants :

Ø POLITIQUE ÉTRANGÈRE ET DE SÉCURITÉ COMMUNE (PESC

- Décision du Conseil abrogeant la position commune 97193PESC relative à des mesures restrictives à prendre à l'encontre des personnes ayant commis des actes de violence lors des incidents de Mostar du 10 février 1997 (652218 LIMITE – E 12844).

- Décision du Conseil modifiant la décision 2011173PESC concernant des mesures restrictives en raison de la situation en Bosnie-Herzégovine (652318 LIMITE – E 12845).

Ø SERVICES FINANCIERS (BANQUES - ASSURANCES

- Décision du Conseil modifiant la décision 199970CE concernant les commissaires aux comptes extérieurs des Banques centrales nationales en ce qui concerne les commissaires aux comptes extérieurs de l'Oesterreichische Nationalbank (586518 – E 12823).

La séance est levée à 11 h 31.

Membres présents ou excusés

Présents. - M. Pieyre-Alexandre Anglade, M. Jean-Louis Bourlanges, M. Vincent Bru, Mme Typhanie Degois, Mme Coralie Dubost, Mme Carole Grandjean, Mme Christine Hennion, M. Christophe Jerretie, Mme Marietta Karamanli, Mme Constance Le Grip, M. Ludovic Mendes, M. Thierry Michels, M. Christophe Naegelen, Mme Danièle Obono, M. Damien Pichereau, M. Jean-Pierre Pont, M. Joaquim Pueyo, M. Éric Straumann, Mme Liliana Tanguy, Mme Sabine Thillaye

Excusés. - Mme Sophie Auconie, Mme Yolaine de Courson, Mme Françoise Dumas, M. Alexandre Freschi, M. Alexandre Holroyd

Assistait également à la réunion. - M. Sylvain Waserman